FRANZ WEBER PROTÉGER LES ARBRES OÙ NOUS SOMMES.
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indépendant – intrépide – compétent JOUR NA L FRANZ WEBER janvier | février | mars 2020 | No 131 PROTÉGER PROTÉGER LES OCÉANS OÙ LES ARBRES OÙ ILS SONT. NOUS SOMMES. f f w. c h
SOMMAIRE Éditorial 3 En Bref 4–5 Une chance pour Equidad 6–7 – L'agonie de la corrida au Portugal 8–9 Nous avons été les témoins des incendies déclen- chés en Amazonie pour répondre aux besoins de Un voyage semé d'embuches aux Caraïbes 10 – 13 l’industrie de l’élevage. Ensuite vinrent les images Chasser des éléphants pour le plaisir au Botswana 14 – 16 des feux en Australie. Mais n’oublions pas une autre catastrophe moins visible mais tout aussi préoccu- Révision de la loi sur la chasse: "à bas les animaux sauvages"... 18 – 22 pante: la mort lente des récifs coralliens. Elevage intensif: nous bouffons le pain des pauvres 23 – 25 Page 10 Le vieil arbre et le mensonge 26 – 30 Sacrifier une forêt sur l'autel des transports publics? 31 – 33 Lavaux: Cheval de Troie des spéculateurs 34 – 37 Bonrook: havre de verdure et de paix pour les chevaux en Australie 38 – 39 – À Belp, la plus ancienne allée de marronniers de Suisse a été abattue, un scandal! Les arbres, âgés de 130 à 270 ans, n’étaient pas malades, contraire- ment à ce qui était invoqué pour justifier leur abat- tage. Malheureusement, il est fréquent d’invoquer la maladie pour procéder à des abattages d’arbres. IMPRESSUM UNE PUBLICATION DE LA FONDATION FRANZ WEBER C’est pourquoi les arbres vénérables ont de toute REDACTION EN CHEF: Vera Weber et Matthias Mast urgence besoin d’une protection accrue. Page 26 REDACTION: Matthias Mast, Julia Fischer, Vera Weber PARUTION: 4 fois l'an CONCEPT: KARGO Kommunikation GMBH MISE EN PAGE: Gianpaolo Burlon IMPRESSION: Swissprinters AG ABONNEMENTS: Journal Franz Weber, Abo, BP 257, 3000 Berne 13, Suisse T: +41 (0)21 964 24 24 | E-Mail: ffw@ffw.ch | www.ffw.ch | | Tous droits réservés. Reproduction de photos, de textes ou d'illustration unique- ment avec la permission de la rédaction. Aucune responsabilité ne peut être acceptée pour les manuscrits ou les photos non sollicités. – Depuis 30 ans, le sanctuaire «Bonrook» à Pine Creek en Australie est un paradis pour les chevaux. La représentante de la Fondation Franz Weber en Australie, Viktoria Kirchhoff, a visité le légendaire POUR VOS DONS: Compte postal: 18-6117-3, Fondation Franz Weber, 3000 Berne 13 «Franz Weber Territory» et décrit ici ses impres- IBAN: CH31 0900 0000 1800 6117 3 sions. Page 38 2
N0 13 1 J A N V I E R | F É V R I E R | M A R S 2020 EDITORIAL Chère lectrice, cher lecteur Quand on veut noyer son chien, on dit qu’il a la rage … Quand on veut abattre une allée d'arbres plus que centenaires, on af- firme qu'elle est malade. Quand on veut construire des appartements sur un espace vert libre, merveilleux et qui sert la diversité des espèces, on prétend que les fonds sont nécessaires à la rénovation de l'église VERA WEBER historique. Quand on veut détruire une réserve naturelle protégée en Présidente de la Fondation Franz Weber terminal à conteneurs, on proclame qu'il s'agit d'un projet pour la pro- tection du climat. Quand on veut construire un projet immobilier de luxe au cœur d'un site du patrimoine mondial, on avance qu'il s'agit d'une mise en valeur de la région. Bétonner une forêt et des prairies pour un atelier ferroviaire? On assure que cela sert à promouvoir les transports publics. Quand on veut implanter un méga-hôtel sur une rive intacte, on soutient que cela créera des centaines de nouveaux emplois. Pour torturer des taureaux à mort, on déclare que c'est dans l'esprit de la tradition et de la culture et que cela favorise la protection des espèces. Si l’on veut vendre des permis pour trophées de chasse, on promet que les bénéfices iront à la population pauvre et meurtrie. Je pourrais remplir toutes les pages de ce journal avec de tels exemples – et bien d'autres encore. Ce qui est accablant, c'est que beaucoup de gens prennent ces arguments au pied de la lettre. Mais la plupart, si- non tous, sont fondés sur le profit, la prétention au pouvoir et l'intérêt personnel. Aujourd'hui plus qu'hier, les entreprises, les spéculateurs et les profiteurs veulent justifier des projets destructeurs de l'environ- nement en les enveloppant d’un «halo» vert, social et culturel, dans l'espoir de tromper les politiciens de droite, de gauche et, malheureu- sement, trop souvent aussi des politiciens verts. Mais nous ne sommes pas dupes. Avec vous à nos côtés et grâce à vous, nous continuerons à nous battre sans relâche. Sincères salutations Vera Weber 3
EN BREF * ANIMAUX * NATURE * NATURE Contre-projet à Creux-du-Van: Référendum l’initiative contre recours déposé contre la destruc- l’élevage intensif tion d’un espace Le Creux-du-Van, impressionnant phé- naturel protégé Le Conseil fédéral a annoncé son in- nomène naturel à la frontière entre les tention de présenter au Parlement un cantons de Neuchâtel et de Vaud, est À Bâle, une réserve naturelle unique en contre-projet direct à l’initiative « Non insuffisamment protégé par les deux son genre est menacée par le dévelop- à l’élevage intensif en Suisse ! ». Ainsi, cantons, comme en té-moignent le Plan pement urbain : un nouveau bassin por- les critères de détention respectueuse d’affectation cantonal neuchâtelois et tuaire et un immense terminal de conte- des animaux, de sorties régulières et la décision de classement vau-doise. neurs doivent être construits en son cœur d'abattage effectué avec ménagement Les deux cantons sont loin de prévoir avec l’argent du contribuable. La zone doivent ainsi être inclus et ancrés dans des mesures de sauvegarde et de res- sèche de 20 hectares concernée, d’une la Constitution fédérale. Cependant, le taura-tion pérennes du Creux-du-Van. importance nationale, abrite aujourd’hui Conseil fédéral n’envisage pas de so- L’autorisation de la chasse dans la zone plus de 400 espèces de plantes diffé- lution concrète concernant l'importa- de protection est particulièrement cho- rentes et de très nombreuses espèces ani- tion de produits d'origine animale. Les quante. Certaines espèces indigènes, males menacées. Lièvre brun d’Europe, produits qui ne satisfont pas à nos exi- dont le grand tétras, sont menacées hélicette du thym, coronelle lisse, criquet gences en matière de bien-être animal d’extinction. Helvetia Nostra entend italien, azuré des cytises… tous seront et qui ne peuvent pas être fabriqués protéger la nature suisse de toute nou- victimes du méga-projet de construction dans le pays pourraient donc continuer velle menace et a déposé des recours inutile ! à être importés en Suisse. auprès des tribunaux neuchâtelois et Un scandale que la Fondation Franz Même si la FFW apprécie le fait que vaudois. Le Creux-du-Van doit pouvoir Weber n’est pas disposée à accepter. le Conseil fédéral partage les principes servir de refuge aux animaux sauvages C’est pourquoi elle soutient le projet de l'initiative, elle ne peut pas caution- et leur offrir une zone de tranquillité, et de référendum. La FFW demande donc ner la position timorée du Conseil fédé- non faire office de terrain de jeu supplé- à tous les habitants de Bâle-Ville de si- ral sur les produits importés. mentaire pour les chasseurs. gner le référendumo! 4
N0 13 1 J A N V I E R | F É V R I E R | M A R S 2020 * … «Le monde aspire à un changement d’orientation de la publicité, qui ne doit plus inciter les consommateurs à consommer davantage, mais à orienter leur demande vers la qualité, la durabilité et la réparabilité des produits.»… … «Chaque fois qu’une forêt disparaît sur terre, le monde perd un poumon et nos chances de survie s’en trouvent diminuées. C’est pourquoi doit se créer un office mondial de la forêt à l’image de l’Office mondial de la santé.»… FRANZ WEBER, WORLD ECONOMIC FORUM (WEF) 1981 * CORONAVIRUS Le trafic de pangolins en cause L’épidémie de coronavirus est directement liée au tra- l’on utilise leurs écailles en médecine traditionnelle. Parfai- fic d’espèces sauvages et domestiques sur un marché tement conscient de cette problématique, le gouvernement de Wuhan, en Chine. Des animaux vivants et de la vian- chinois a déclaré une interdiction de tout commerce d’espè- de dite «de brousse» (issue d’animaux sauvage) y sont ces sauvages sur son territoire. vendus dans de sordides conditions. Des conditions d’incubation idéales pour une épidémie mortelle pour A force de consommer des produits « de luxe » ou de mé- l’homme. decine traditionnelle, issus de plantes ou d’animaux sauva- ges, nous avons créé une situation qui nous échappe et nous En l’occurrence, les experts, à l’instar d’Arnaud Fontanet menace. Seule une interdiction permanente du commerce de l’Institut Pasteur en France, pensent que le coronavirus a et de la consommation de ces « produits » permettrait d’évi- d’abord touché des chauve-souris. Celles-ci ont ensuite été ter des épidémies similaires à l’avenir, et protègerait les an- mises en contact, vraisemblablement sur un marché chino- imaux sauvages de l’extinction. C’est ce pour quoi la FFW is, avec des pangolins, les mammifères les plus trafiqués au s’engage inlassablement. monde. En Chine, l’on consomme leur viande, leur sang et 5
ANIMAUX Sanctuaire Equidad Une chance que nous ne Souvenez-vous: dans une précédente édition de pouvons pas laisser passer! notre Journal, nous vous informions vouloir ac- quérir le terrain voisin du sanctuaire Equidad, afin d’en étendre la superficie sur 20 hectares. Il s’avère aujourd’hui qu’une possibilité nous a été offerte * ALEJANDRA GARCÍA d’acheter un autre terrain, mieux adapté et bien plus grand, qui nous permettrait de résoudre une Directrice du sanctuaire Equidad et de multitude de problèmes auxquels nous sommes ZOOXXI en Amérique latine confrontés. Actuellement, hormis quelques pro- – blèmes d’insécurité liés à des brigandages perpé- 6
N0 13 1 J A N V I E R | F É V R I E R | M A R S 2020 trés dans la région, notre Córdoba. La beauté naturelle n’entendrions là-bas que le tion des citoyens face aux problème majeur est le de cet espace est incroyable. chant des oiseaux de la ré- brigandages. manque d’espace. Nous Des activités d’élevage et de gion et le bruit de l’eau de la ● Reconvertir l’activité d’éle- souhaitons pouvoir fournir tourisme ont été dévelop- rivière qui traverse la finca. vage, qui est actuellement à nos animaux une alimen- pées dans cette finca argen- Grâce à ce véritable paradis, source de pollution, en op- tation conforme à leurs be- tine typique, qui accueille nous pourrions: tant pour une utilisation soins, grâce à des pâturages des voyageurs venus d’Eu- ● Alimenter les animaux rationnelle des sols et de naturels. Pour l'instant, nous rope et du reste de l’Argen- grâce aux pâturages naturels l’eau pour un nombre limité avons recours à de la luzerne tine. La résidence dispose de ● Améliorer leur santé, grâce d’animaux, ce qui garantirait que nous achetons chaque chambres avec salles de bain à l’étendue du terrain qu'ils la protection de cet espace mois, ce qui non seulement et de toutes les commodi- pourraient arpenter à loisir. naturel. entame substantiellement tés. Elle compte une maison Cela contribuerait aussi à la Notre équipe en Argen- notre budget, mais consti- principale et deux maisons santé de leurs pieds, à leur tine est en train d'analyser tue également à long terme plus petites, en bon état. forme physique générale et cette offre, car nous ne pou- un problème pour la santé En outre, les installations, à leur équilibre psycholo- vons naturellement pas ac- des équidés, car ceux-ci de- notamment le chauffe-eau, gique, car dans cet espace quérir ce bien sans réflexion vraient pouvoir consommer fonctionnent grâce à l’éner- naturel, tous leurs sens se- en profondeur et sans avoir des graminées. gie solaire. Il n’est donc pas raient stimulés. visité au préalable d’autres La grande nouvelle est nécessaire de recourir à un ● Accueillir et loger davan- terrains disponibles. Une que l’on nous offre la possibi- fournisseur d’électricité ou tage de volontaires en leur fois cette réflexion menée, lité d’acquérir un terrain de de gaz. proposant de bonnes condi- nous voudrions pouvoir 310 hectares (le sanctuaire tions de confort. franchir cette nouvelle étape actuel en compte 10) à proxi- Ce terrain n’est pas un lieu ● Préserver encore davan- au cours de l’année 2020. mité de San Marcos Sierra, de passage, préservant ainsi tage la sécurité de nos ani- L’engagement de la Fon- situé entre une chaîne de la tranquillité et l’intimité maux, car la police de la ré- dation Franz Weber pour le montagnes et la vallée de des résidents (contrairement gion semble désireuse d’agir bien-être des animaux dont Punilla, dans la province de à la situation actuelle). Nous efficacement pour la protec- elle prend soin est sans faille. — Le terrain de 310 hectares qui nous est offert, sur lequel coule un cours d’eau, s’étendent des prairies, des forêts, est impressionnant de beauté naturelle et de paix absolue. Nos chevaux et tous les animaux sous notre protection y auraient beaucoup de place et une grande qualité de vie. 7
ANIMAUX La Corrida au Portugal – toujours plus près de l’abolition! A l’instar de l’Espagne, de la France et de certains pays d’Amérique latine, * la corrida est régulièrement célébrée au SÉRGIO RUI ALVES CAETANO, Représentant de la FFW, Portugal Portugal, où elle est nommée «tourada». – Cette cruelle «tradition» y est toutefois légè- la tête. S’en suivent les blessures aux «scénario» hostile et stressant. Leur rement différente: la «lidia» (phase de «lutte» «fers courts», puis les fameuses «passes angoisse est intense et palpable – contre le taureau) est principalement opérée au manteau» rouge emblématique. Fa- chaque année, l’on recense des cas de à cheval, les cornes des taureaux sont munies cile «d’affronter» un taureau dans ces «mort subite» de chevaux, liés à l’effort de protection en cuir (afin d’éviter que les che- conditions. Une fois l’animal griève- extrême et au stress auxquels ils sont vaux ne soient éviscérés) et les animaux ne ment blessé et affaibli, il est retiré de soumis. meurent généralement pas dans l’arène – ils l’arène par huit hommes – en somme, sont mis à mort à l’abri des regards, en toute seule sa torture est donc «célébrée». Le Premier ministre portugais, chef discrétion. Une fois le taureau hors de vue, les fers du gouvernement socialiste actuelle- longs et courts qui se trouvent encore ment en place, assume publiquement La «tourada» n’en est pas moins cruelle, dans son corps sont ôtés, au moyen de son antipathie envers la corrida. La contrairement à ce que l’on pourrait croire. couteaux, sans aucune assistance vé- Ministre de la Culture considère, quant D’un point de vue de la maltraitance animale, térinaire. Finalement, il est emmené à à elle, la fin des corridas comme «une ces corridas sont même plus graves que les va- l’abattoir – vu leurs graves blessures, question civilisationnelle». La fin des riantes espagnoles, françaises ou latino-amé- leur état de stress et d’affaiblissement «touradas» serait-elle proche? C’est ricaines. L’on fait subir aux taureaux d’atroces général, beaucoup d’animaux meurent sans compter sur le puissant lobby de souffrances durant la «lidia». Puisque les durant le transport. la tauromachie, qui continue d' exercer fameux «picadores» sont interdits au Portu- une grande influence sur tous les par- gal, les «torreros» utilisent d’abord des «fers Les chevaux, utilisés par les «tore- tis politiques, surtout sur les ailes plus longs», soit des lances aux pointes aiguisées ros» portugais sont souvent les grands conservatrices. Plusieurs initiatives (de 8cm de long) qui provoquent des lésions oubliés des «touradas». Ils sont pour- abolitionnistes ont ainsi été freinées, encore plus profondes à l’animal, dès qu’il tant forcés à affronter un animal puis- ces dernières années. entre dans l’arène, afin de l’obliger à baisser sant et désespéré dans le cadre d’un 8
Il en va ainsi d’une proposition l’école tauromachique y a fermé, à la «d’établir l’âge minimal pour participer d’augmenter la TVA sur les corridas suite d’un travail politique intensif de et assister à des corridas et à des lâchers de 6% actuellement, aux 23% usuels notre équipe portugaise dans le cadre de taureaux, y compris dans des écoles au Portugal, et ainsi de supprimer le de notre campagne «Infancia Sin Vio- de tauromachie, à 18 ans, sans excep- privilège économique indéfendable lencia» (Enfance sans violence). L’on tion, et de sensibiliser les fonctionnaires, jusqu’ici accordé aux «touradas». Cette assiste à une prise de conscience crois- la presse et la population en général aux augmentation avait été proposée au sante que les enfants ne doivent abso- effets négatifs sur les enfants, y compris Parlement l’année dernière, mais reti- lument pas être exposés à la violence en tant que spectateurs, de la violence rée au dernier moment par les aficio- des corridas – un signe encourageant associée aux corridas et aux lâchers». nados socialistes. Cette année, la même de plus! Cette forte recommandation vient ren- proposition a été portée par le Premier forcer et clarifier ce qui avait été déjà ministre en personne, ainsi que par la Autre bonne nouvelle: l’un des bas- exigé du Portugal en 2014. La réaction Ministre de la Culture, cette fois avec tions de la corrida au Portugal, la ville du Gouvernement ne s’est pas fait at- succès. Le 5 février 2020, le Parlement, de Póvoa de Varzim, qui célébrait les tendre: l’État a annoncé son intention dont les sensibilités animalistes sont «touradas» plusieurs fois par année, d’augmenter la limite d’âge pour avoir de plus en plus marquées, a accepté parfois en direct de la télévision pu- accès à des corridas, actuellement seu- l’augmentation de la TVA pour les cor- blique, a tout récemment décidé de lement réservées aux «plus de 12 ans». ridas! Contestée par le lobby de la cor- mettre fin à cette pratique – le maire a La mesure n’en est encore qu’au stade rida et par les municipalités ayant une ainsi annoncé que les arènes seraient de promesse, mais nous travaillons à activité tauromachique, cette mesure reconverties en lieux de spectacles sa concrétisation en sensibilisant les historique assène un coup financier culturels et sportifs. députés et les groupes parlementaires, très important à cette industrie. ainsi que le gouvernement et les insti- La pression ne vient pas que de l’in- tutions étatiques, en particulier celles Cette même tendance se fait ressen- térieur du pays: l’ONU s’y met égale- chargées de la protection des mineurs. tir au niveau des villes, notamment à ment. Ainsi, le 27 septembre 2019, le Lisbonne, où se trouve l’une des prin- Comité des droits de l’enfant de l’ONU a Nous continuons notre lutte afin que cipales arènes du pays; la Praça de publié de nouvelles recommandations la fin de la corrida au Portugal soit la Touros de Campo Pequeno. Suite à une à l’attention du Portugal, lui intimant plus proche possible! enquête approfondie, nous avons dé- couvert que, comble de l’ironie, cette arène est propriété d’une institution publique de protection des enfants (la Casa Pia de Lisbonne). Au XIXème siècle, la Ville avait offert l’arène à cette organisation, à la condition expresse que des corridas y soient organisées régulièrement. Casa Pia louait donc l’arène à des organisateurs de corridas privés, en échange d’un loyer, afin de remplir la condition qui la liait. Nous sommes toutefois parvenus à faire pression sur la Mairie de Lisbonne pour qu’elle libère formellement la Casa Pia de dite obligation, et obtenu la garantie de Casa Pia que le prochain gestionnaire privé en serait également — exempté. Un investisseur intéressé par Au Portugal, les l’exploitation des arènes de Lisbonne a cornes des taureaux déjà affirmé publiquement ne voir au- sont épointées, ce qui cun intérêt économique à l’organisa- est très douloureux pour eux. Après avoir été tion de corridas. ainsi « taillées », elles sont garnies d’un épais Mais c’est au début de cette année rembourrage afin que le que nous sommes parvenus à assé- taureau ne puisse pas ner ce qui pourrait bien être le coup éventrer le cheval. de grâce à la tauromachie à Lisbonne: 9
ANIMAUX Pour la protect Seaflower dan Nous avons été les témoins stupéfaits des incendies déclen- chés en Amazonie pour répondre aux besoins de l’industrie de l’élevage. Notre douleur a ensuite été immense devant les images des feux qui ont ravagé une partie de l’Australie. * LEONARDO ANSELMI Dans les deux cas, de nombreux appels ont été lancés face Directeur de la FFW pour le Sud de l'Europe et l'Amérique latine aux souffrances endurées par les hommes et les animaux – qui ont été la proie des flammes et à cette destruction des écosystèmes. Mais n'oublions pas une autre catastrophe: la mort lente des récifs corraliens Une autre forme d’incendie, tout quatre décennies, nous avons — aussi préoccupante, mais mé- détruit plus de la moitié des Le troisième récif corallien connue car peu couverte par les formations coralliennes dans du monde, la réserve de biosphère Seaflower, dans médias, fait des ravages depuis le monde, qui ont eu besoin les Caraïbes, est aussi le de nombreuses années. Il s’agit de 500 millions d’années pour plus menacé — pour des de la mort lente des récifs coral- que prenne vie cette féérie de raisons géopolitiques. liens, pierre angulaire des éco- couleurs sous-marine. systèmes marins et océaniques. La menace la plus grave est Elle est la conséquence de la celle qui pèse, pour des raisons surpêche, du tourisme sauvage, géopolitiques, sur le troisième de l’augmentation des tempéra- plus grand récif corallien du tures, et plus particulièrement de monde: la réserve de biosphère la sédimentation générée par les Seaflower, dans les Caraïbes. produits agrochimiques épandus La Fondation Franz Weber sur les produits de monoculture mène une grande campagne, destinés à engraisser le bétail. En tant par son envergure que par 10
N0 13 1 J A N V I E R | F É V R I E R | M A R S 2020 tion de la réserve ns les Caraïbes sa dimension historique, pour protéger cette région sous-ma- rine menacée. Le voyage sera long et semé d’embûches et nous voulons d’ores et déjà vous y préparer. Nous travaillons à la conser- vation de plus d’une dizaine d’espèces de cétacés et de tor- tues, de plus de 1 600 espèces de poissons, de près de 200 espèces d’oiseaux, ainsi que d’une infinité de plantes ma- rines et terrestres. Nous nous concentrons sur tout l’écosys- tème caribéen. Nous croyons fermement qu’il est nécessaire de rompre avec le réduction- nisme scientifique attaché aux «espèces en danger d’extinc- tion» pour parler des «habitats en danger d’extinction». Et il est probable que les écosys- tèmes caribéens soient en ce moment parmi les plus vul- nérables de la planète, tout en étant parmi les plus riches en termes de biodiversité. Si nous ne faisons rien, en moins d’une décennie, les Caraïbes pourraient devenir une mer morte, constituée uni que- ment d’eau et de sel. Concer- nant la situation générale des Caraïbes, nous sommes par- ticulièrement préoccupés par 11
ANIMAUX – Anolis concolor. Nous nous concentrons sur la protection de l’écosystème des Caraïbes dans son ensemble — terrestre et marin. un conflit politique qui met en péril la espèce parmi d’autres, mais plutôt la protection du troisième plus grand ré- pierre angulaire de tout l’écosystème cif corallien du monde, le Sea Flower. marin, qui, si elle vient à disparaitre, Situé au nord de la Colombie et à l’est entraînera la chute de toutes les autres du Nicaragua, cet épicentre de la vie pièces constitutives de cette délicate marine a été déclaré réserve de bios- mosaïque biologique qui s’en nourrit. phère en 2000 par l’UNESCO. Les ré- Leur méga-biodiversité récompense cifs de coraux constituent l’aliment la constance: les récifs coralliens ont de plus de 30% des espèces marines. commencé à se développer il y a 500 Ces espèces, à leur tour, nourrissent millions d’années. Les quatre der- — toutes les autres et représentent une nières décennies nous ont suffi pour Leonardo Anselmi (à gauche) avec l'ancien source fondamentale d’inter-connec- président de la Colombie, Ernesto Samper, en détruire plus de la moitié. tivité biologique avec les océans. Les qui soutient entièrement et activement La dégradation des coraux, et en par- coraux ne sont pas simplement une notre campagne ticulier, le manque d’attention actuelle- ment accordée au Sea Flower, ainsi que l’apparition de la sargasse (une algue en- SEAFLOWER – SITE UNESCO vahissante, produit des monocultures destinées à engraisser le bétail), mettent La réserve de biosphère de Seaflower (Seaflower Marine Protected Area; MPA) est inscrite en danger l’écosystème marin le plus au Patrimoine mondial de l’UNESCO. Cela étant, en raison du conflit territorial persistant précieux et biodiversifié de la planète. entre la Colombie et le Nicaragua, qui se disputent une partie du territoire, la description Nous espérons vous voir monter à de cette aire protégée sur le site internet de l’UNESCO n’est pas définitive. La page inter- bord pour entreprendre ce voyage in- net indique en effet que «la description du site de la réserve de biosphère Seaflower fait trépide destiné à sauver l’un des plus l'objet d'un processus continu de révision par les autorités compétentes, suite à l'arrêt de beaux paradis tropicaux de la planète. la Cour internationale de justice du 19 novembre 2012 établissant une nouvelle frontière Avis aux navigateurs: la mer est agitée, maritime entre la Colombie et le Nicaragua». C’est précisément ce conflit qui empêche le vent est fort mais nous disposons du une action coordonnée au niveau régional et international pour assurer la protection de meilleur des équipages pour arriver à la réserve… bon port. 12
N0 13 1 J A N V I E R | F É V R I E R | M A R S 2020 «DÉCISIONS URGENTES À PRENDRE» Les décisions que doivent prendre tous les pays caribéens et la communauté internationale sont loin d’être faciles: Repenser le modèle économique associé au tourisme et à la pêche qui, combiné à l’extraction des combustibles fossiles, constituent les deux activités économiques les plus importantes de la région. Décisions concernant le poids démographique que les îles sont en mesure de supporter. Il faut également revoir les systèmes de construction des habitations, non seulement pour réduire l’impact environnemental mais également pour prévenir des dommages plus importants et limiter les pertes en vies humaines, conséquences des catastrophes naturelles toujours plus fréquentes et dévastatrices qui caractérisent cette région. Coordination/action urgente au niveau local, régional et international, afin de passer à l’action le plus rapidement possible, au niveau régional et international. Cette tâche n’incombe pas uniquement aux pays caribéens. Où que nous soyons dans le monde, nous devons repenser notre manière de visiter ce paradis, en privilégiant l’écotourisme, en adoptant des politiques visant à mettre un terme à l’élevage et l’agriculture industriels qui, non seulement responsables des incendies de l’Amazonie et en Australie, sont à l’origine des fertilisants et des résidus toxiques présents dans les mers et les océans. Nous devons lutter contre le réchauffement global et réduire de manière historique nos émissions de gaz dans l’atmosphère. 13
ANIMAUX Le Botswana vend ses Élép aux chasseurs de trophées Le Botswana a vendu des permis de tuer des éléphants, au prix de quelques dizaines de milliers de francs suisses chacun. Cette décision porte préjudice * au secteur florissant de l’écotourisme du ADAM CRUISE Journaliste & auteur pays et va également accélérer la dispari- – tion des éléphants. Le gouvernement botswanais a mis des conflits entre les hommes et les élé- l’habitat des éléphants. Différents re- aux enchères des permis de chasse au phants et de la destruction du milieu censements ont prouvé que le nombre trophée correspondant à 70 éléphants, naturel. Il insiste sur le fait que les per- d’éléphants n’a pas augmenté de ma- pour un montant total de 2,4 millions mis de chasse au trophée permettront nière significative, au moins depuis de francs suisses. Il a également défini de limiter ces conflits et de préserver la 2006, et que la densité de la population un quota qui permet d’abattre 272 élé- biodiversité. (nombre d'individus par unité de su- phants pendant la saison de la chasse Toutefois, la chasse au trophée n’est perficie) est restée relativement stable 2020. pas la solution à ces problèmes. depuis la fin des années 1990, ce qui La population des éléphants a chu- correspond aux ressources en eau et en té de près de deux tiers en 40 ans: elle LA CHASSE AU TROPHÉE: nourriture qui sont à leur disposition. est passée de 1,3 million d’individus en UN ARGUMENT FALLACIEUX Dans les faits, les hommes ont étendu 1979 à 415 000 en 2015. Ce déclin s’ex- D’abord, la disparition de quelques cen- leurs surfaces agricoles et ont pénétré plique principalement par trois fac- taines d’éléphants marqués à l’oreille dans des zones naturelles du Botswana teurs: l’activité humaine qui empiète pour la chasse au trophée ne suffira cer- précédemment préservées de toute in- sur leur territoire, le changement cli- tainement pas à endiguer le problème. cursion humaine, ce qui s’est invaria- matique et le braconnage pour leurs En réalité, la chasse au trophée pour- blement traduit par des conflits avec défenses. rait même exacerber les conflits qui les éléphants. Il est possible de limiter Le Botswana abrite quelque 130 000 opposent les hommes aux éléphants. ce type de conflits grâce à l’entretien de éléphants, près du tiers de la popula- En effet, ces derniers, victimes de cette corridors naturels qui permettent aux tion de l’ensemble du continent. Ce chasse, pourraient devenir plus agres- éléphants de contourner les villages et pays est l’un des derniers bastions de sifs. les terres cultivées. L’édification de bar- l’éléphant d’Afrique. Mais le gouverne- Ensuite, les conflits entre les rières naturelles, notamment de clô- ment affirme qu’ils seraient trop nom- hommes et les éléphants s’expliquent tures de ruches et de piments, s’avère breux. Selon le président botswanais, bien moins par la surpopulation des également efficace. Les éléphants sont Mokgweetsi Masisi, cette surpopula- éléphants que par la progression de terrifiés par les abeilles et détestent tion est la cause de la multiplication l’activité humaine qui empiète sur tout ce qui est pimenté. 14
N0 13 1 J A N V I E R | F É V R I E R | M A R S 2020 phants L'impact positif des éléphants est d'éléphants dont les défenses sont évident dans les zones protégées du plus courtes ou qui ne possèdent pas Botswana où ils évoluent et les savanes de défenses du tout. La population s et les forêts y restent intactes et saines. saine du Botswana sera donc grave- Le contraste est saisissant lorsque la ment menacée. comparaison est faite avec les zones dans lesquelles les éléphants ont été DES COMMUNAUTÉS évacués ou tués. Au Botswana et ail- RURALES APPAUVRIES leurs en Afrique, la désertification s’ac- Malgré tous ces éléments, le gouverne- Troisièmement, les éléphants sont centue à un rythme préoccupant. Elle ment botswanais estime nécessaire de de brillants architectes du paysage afri- s’explique par la destruction de l’habi- réintroduire la chasse à l’éléphant, pré- cain, et ils ne participent en rien à la tat des éléphants, résultat de l’incur- tendument pour dédommager finan- destruction de l’environnement. En ef- sion humaine ou de l’expansion des cièrement les communautés locales fet, ils cassent les branches des arbres, cultures ou de l’élevage qui empiètent appauvries qui vivent dans la partie font parfois tomber l’arbre entier, créant sur leur territoire. nord du pays, zone dans laquelle vaga- des micro-habitats qui favorisent le dé- En dernier lieu, les chasseurs de bondent les éléphants. Là encore, cet veloppement des jeunes plants et la vie trophées recherchent les plus grands argument tombe à faux, et cette déci- des petits vertébrés. Les excréments des mâles, qui portent les défenses les plus sion est susceptible de produire l’effet éléphants constituent une source de imposantes. En ciblant spécifique- inverse. nourriture pour les bousiers, qui en re- ment les animaux «trophées» les plus En effet, la chasse au trophée est un tour participent à la dissémination des grands et les plus forts, les chasseurs concept purement occidental, une ma- graines pour de nombreuses espèces ignorent les individus les plus faibles nière d’envisager la préservation des es- d’arbres. Ils préservent l’équilibre struc- et de plus petite taille. Cela signifie pèces qui a été importée par les colons turel des savanes en réduisant le rapport que les meilleurs gènes sont perdus et, européens. À l'inverse, nous constatons arbres/herbes et créent sous les arbres par conséquent, que les espèces seront que dans la plupart des cultures afri- morts des microclimats riches en nutri- moins à même de s’adapter au change- caines traditionnelles, les éléphants ments. Globalement, l’activité des élé- ment climatique, qu’elles seront plus sont considérés comme un élément à phants accroît la biodiversité et contri- sensibles aux maladies et que le risque part entière du paysage africain. Sur ce bue autant à la vie des insectes qu’à celle d’extinction n’en est que plus grand. continent, les éléphants et les hommes des mammifères. Une biodiversité plus Des scientifiques ont constaté que la ont évolué ensemble. Ils ont vécu côte grande est gage d’un air plus pur, d’une chasse au trophée et le braconnage des à côte pendant des centaines d’années. eau plus pure, d’un sol plus riche et éléphants d’Afrique ont pour consé- Les éléphants font partie intégrante des d’habitants en meilleure santé. quence l’apparition d’une population systèmes de croyances des habitants. — 2019: encore à l’abri des chasseurs de trophées assoiffés de sang: un troupeau d’éléphants fait halte au bord de la rivière Chobe, au Botswana. (Photo Vera Weber) 15
ANIMAUX Ils appartiennent au patrimoine de ce créations d’emplois générées par la revenus de la chasse au trophée? La continent et les Africains en sont fiers. chasse au trophée. Le tourisme d’obser- réponse est à chercher du côté des bé- Dans la majeure partie de l’Afrique, vation de la vie sauvage rapporte envi- néficiaires des recettes perçues. Seuls les éléphants n’ont jamais été traités ron 2 millions de francs suisses sur une sont concernés quelques hauts res- comme des marchandises susceptibles période équivalente à l’espérance de vie ponsables politiques – cette politique de générer des revenus commerciaux. d'un seul éléphant. Il convient donc de n’a donc aucun sens. Les communautés appauvries, qui mettre ce chiffre en parallèle avec un perçoivent rarement le moindre cen- paiement unique d’un montant de 39 SOUS L’INFLUENCE DE L’OCCIDENT time des recettes engrangées, restent 000 francs suisses pour la chasse d’un Il faut encore ajouter que le gouverne- pauvres. La part du lion termine dans éléphant. La chasse au trophée annihile ment a été fortement influencé par de les poches des riches organisateurs des toute possibilité de recettes ultérieures. riches organisations occidentales de chasses, le reste servant à payer les li- En termes d’emplois, la chasse a re- chasseurs. Des rumeurs ont circulé à cences et les permis au gouvernement. cours à des pisteurs, à des peaussiers, à propos de puissants lobbyistes qui in- Les communautés n’en perçoivent des tanneurs. Mais ces emplois ne sont terviennent au niveau international quasiment rien, excepté une part de la que temporaires. En effet, un organisa- pour défendre la chasse au trophée, viande prélevée sur la carcasse aban- teur de chasse travaille moins de six fois dont Safari Club International (SCI), donnée par le chasseur de trophée, qui dans l’année. Par conséquent, les possi- basé aux États-Unis. Ces organisations n’exporte habituellement que la tête et bilités d’emploi pour les hommes sont orientent la politique du gouverne- les défenses de l’animal. négligeables et nulles pour les femmes. ment botswanais et ont l’oreille du pré- Par contre, au Botswana, l’éco-tourisme sident Mokgweetsi Masisi (en mettant CHASSE AU TROPHÉE CONTRE aide un plus grand nombre de per- la main à la poche). En remerciement ÉCOTOURISME À IMPACT LIMITÉ sonnes, particulièrement des femmes, de sa complaisance, le SCI a décerné Pour le Botswana, le tourisme d'obser- que tout autre secteur de l’économie. le «Prix du législateur international de vation de la vie sauvage (éco-tourisme) Dans l’ensemble, les recettes générées l’année» au président Masisi lors de sa constitue le second secteur d’activité par la chasse au trophée sont dérisoires convention annuelle de la chasse, qui économique par ordre d'importance, comparées à celles issues de l’éco-tou- s’est tenue à Reno, aux États-Unis, en après l’extraction du diamant. risme, dont la croissance attendue est février dernier. L’influence de la SCI Selon le rapport annuel du Conseil de 3,4 % chaque année. est considérable. Elle intervient dans la mondial du tourisme et des voyages Bien que marginale en termes de re- politique menée par les gouvernements (WTTC) consacré à l’impact écono- venus et d’emploi comparée à l’éco-tou- de tous les pays de l’Afrique australe, et mique et social du secteur, l’économie risme, la chasse au trophée peut néan- facilite souvent les négociations en ré- du tourisme du Botswana a progressé moins avoir un impact négatif sur tribuant financièrement ceux qui font et a dépassé les 2,5 milliards de francs l’économie touristique du pays. les lois. suisses en 2018. Cela représente une Depuis que le gouvernement La chasse au trophée a donc reçu le augmentation de 70 % par rapport aux botswanais a annoncé début 2019 son feu vert au Botswana car il satisfait l'ap- recettes enregistrées en 2013. intention d’autoriser la chasse aux élé- pétit pécuniaire personnel de quelques Le Botswana a mis en place un ex- phants, les acteurs du secteur du tou- élus. Toutefois, il est vital de préserver cellent modèle touristique, appelé risme ont déclaré que le nombre de la vie des éléphants dans ce pays, tout «tourisme à faible impact et à recettes visiteurs a chuté. Des réservations ont comme dans le reste de l’Afrique, car élevées». Selon ce modèle, le nombre de été annulées et les visiteurs se tournent ils assurent en partie la subsistance des touristes qui visitent le pays est limité vers des pays comme le Kenya, où la habitants. Choisir une autre option, afin de préserver et de protéger la bio- chasse au trophée est interdite. Ces c’est-à-dire accepter qu'ils soient tués, diversité. Les touristes qui y viennent chiffres sont corroborés par le fait que annihilera tout espoir pour les commu- paient très cher pour s’immerger dans durant la période d'interdiction de la nautés de s’extraire de la pauvreté. les plus beaux paysages naturels de la chasse, entre 2013 et 2018, les recettes Il est à craindre que la chasse au tro- planète. Et les éléphants en sont le pre- issues du tourisme au Botswana ont phée n’accélère la disparition du der- mier atout. augmenté de 70 %. nier bastion africain des éléphants. Si Il faut donc comparer les avantages Dans ce cas, pourquoi le Botswana la chasse au trophée perdure, les élé- économiques retirés d’un tourisme à met-il en péril une économie floris- phants continueront à être menacés faible impact avec les recettes et les sante pour engranger les maigres d’extinction. 16
VOTRE TESTAMENT EN FAVEUR DES ANIMAUX ET DE LA NATURE Pour que vos volontés se perpétuent dans la nature et les animaux Si votre volonté est de venir en aide aux animaux et à la nature même au-delà de votre vie, nous vous prions de penser, dans vos dispositions testamentaires, à la Fondation Franz Weber. FONDATION FRANZ WEBER Case postale 257, 3000 Berne 13 Notre collaboratrice spécialisée, Lisbeth Jacquemard, se tient à votre disposition T +41 (0)21 964 24 24 pour vous conseiller. ffw@ffw.ch | www.ffw.ch 17
ANIMAUX Révision de * les animau bientôt t JULIA FISCHER Economiste de l'environnement et de la politique – Le destin des animaux sauvages en Suisse va se décider ce 17 mai. Jour du vote sur la révision de la loi sur la chasse et la protection des mammifères et oiseaux sauvages (LChP). Les partisans de la révision – en premier lieu les associations de chasseurs et de pay- sans – tentent de promouvoir la nouvelle loi en prétextant la protection des espèces. Les modifications prévues sont un véritable camouflet pour tous les amis des animaux – elles ne sont que des affaiblissements de la LChP. Pour nous, il est clair que seul le «NON» à la révision de la LChP peut réellement protéger les animaux sauvages en Suisse. Les routes et les lotissements la nature rendent particulièrement difficile, pour tenir l’accord de la Confédération et sans devoir que nous construisons, les fo- beaucoup d’espèces, de simplement trouver des apporter la moindre preuve que ces animaux ont rêts que nous déboisons, l’agri- espaces vitaux appropriés. C’est pourquoi l‘on causé des dommages. La simple hypothèse qu’ils culture intensive que nous s’efforce depuis de nombreuses années d’en ré- pourraient un jour être à l’origine de dommages pratiquons à grand renfort introduire certaines qui sont considérées depuis suffirait pour avoir le droit de les abattre. (Pour de machines et de pesticides longtemps comme disparues en Suisse. plus de détails, voir l’encadré p. 21). – quelle place laisse-t-on en- core aux animaux sauvages, fa- TRANSFERT DE COMPÉTENCES VERS LES CANTONS UNE AMPUTATION ÉHONTÉE DU DROIT DE RECOURS rouches et sensibles? Les inter- La révision de la loi menace de réduire à néant ces Parmi les autres amendements scandaleux qui ventions multiples et lourdes de efforts: elle autoriserait les cantons à réguler eux- doivent être inclus à la loi sur la chasse révisée fi- conséquences de l’homme dans mêmes les espèces protégées – sans devoir ob- gure l’abrogation du droit de recours des associa- 18
N0 13 1 J A N V I E R | F É V R I E R | M A R S 2020 la loi sur la chasse: ux sauvages suisses tirés à bout portant – Nos lièvres arctiques comptent parmi les grands perdants du changement climatique. Pourtant, les modifications de la nouvelle loi sur la chasse, loin de les protéger, les menacerait même davantage. 19
ANIMAUX — Tuer des animaux impopulaires, menacés et protégés – comme le loup – avant même qu’ils n’aient causé un dommage, prétendument pour les « réguler » - tel est l’objectif de la version révisée de la loi sur la chasse. tions de défense de l’environnement. nombreuses espèces animales et vé- Au nom du principe de précaution, Elles n’auraient plus aucune possibilité gétales à rude épreuve – et pas seule- nous aurions dû depuis longtemps li- de déposer plainte contre les disposi- ment dans les pays lointains. Le lièvre bérer le lièvre de toute pression inutile tions cantonales concernant des ani- variable, qui vit et se déplace à des alti- par une mise sous protection adéquate, maux chassables ni de se faire l’avocat tudes de 1000 à 1500 mètres au-dessus au lieu de laisser les chasseurs le déci- des animaux pour les protéger des abat- du niveau de la mer, est l'un des grands mer. Près de 1000 lièvres variables sont tages et des massacres illégaux. Des perdants en Suisse. Les espaces vitaux encore abattus chaque année en Suisse. exemples comme celui du cormoran qui lui restent ne sont pas seulement de montrent à quel point la pression exer- plus en plus réduits, mais aussi de plus LA LOUTRE D’EUROPE: DANS LA LIGNE DE cée par des groupes d’intérêts spéci- en plus morcelés. La fonte précoce des MIRE DES PÊCHEURS fiques peut mener à des décisions erro- neiges pourrait aussi se traduire par un Tous ceux qui ont déjà vu une loutre nées lourdes de conséquences. Le droit retard dans le passage du pelage d’hiver sauvage dans la nature suisse peuvent de recours permettait jusqu’à présent blanc au pelage d’été brun, ce qui ferait s’estimer plus que chanceux. En effet, aux organisations de défense de l’envi- des lièvres une proie facile pour leurs l’espèce – stigmatisée par les pêcheurs ronnement comme la FFW et Helvetia prédateurs. Par ailleurs, nous savons en tant que parasite et longtemps chas- Nostra d’éviter les échauffourées cou- que ces animaux sensibles au moindre sée pour son pelage – n’est plus pré- pables. L’élimination de ce droit dans la dérangement souffrent des activités de sente que de manière éparse dans toute loi sur la chasse et les autres amende- loisirs hivernales de l’homme. La révi- l’Europe centrale. Grâce aux efforts en- ments prévus risquent d’être fatals à de sion de la loi ne changerait rien à la pro- trepris pour sa protection, elle réappa- nombreuses espèces animales, comme tection du lièvre variable, au contraire: raît aujourd’hui timidement dans des en attestent les exemples suivants. leur chasse resterait autorisée, sou- zones où elle était autrefois courante en mettant l’espèce à une pression encore Suisse. Aujourd’hui, dans le cas où une LE LIÈVRE VARIABLE: plus forte. De plus, les associations de loutre causait un dommage important SOUS LA MENACE DE L’HOMME ET DU défense de l’environnement ne pour- – ce qui est en soi très peu probable–, la CHANGEMENT CLIMATIQUE raient plus attaquer les dispositions population peut déjà être régulée., mais Le changement climatique met de cantonales. uniquement sur décision fédérale. 20
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