L'Ukraine à la croisée des chemins

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L'Ukraine à la croisée des chemins
L’Ukraine à la croisée des chemins
     Depuis le 21 novembre 2013, l’Ukraine a surgi à la une des actualités. Ce jour-là, le président
Viktor Ianoukovitch renonce à l’accord d’association proposé par l’Union européenne, qui devait être
signé lors du sommet des chefs d’État et de gouvernement de l’UE à Vilnius, les 28 et 29 novembre.
En un mois à peine, l'on passera de la non signature d’un accord attendu avec l’UE à la signature d’un
accord avantageux avec la Russie. Durant cette période, l’Ukraine connaît une réédition de la tentative
de « révolution orange » de 2004 qui visait à intégrer cette nation à l’OTAN. La « question
ukrainienne » est complexe et nécessite, pour éviter d’être médusé par le mainstream médiatique de la
propagande mondialiste qui fait l’opinion en Occident, une lecture à quatre niveaux. Tout d’abord un
retour sur les données historiques, en remontant au baptême de saint Vladimir et à la naissance de la
nation russe en 988, naissance contemporaine de l’avènement des Capétiens en France. Ensuite
l’analyse des enjeux stratégiques profonds dans le grand affrontement entre les puissances
thalassocratiques (États-Unis et Europe occidentale plus ou moins vassalisée) et les puissances
continentales eurasiatique (Russie) et extrême-orientale (Chine). Enfin, l’examen des enjeux
économiques et commerciaux pour l’Ukraine et le décryptage de la contestation organisée et des luttes
internes pour le pouvoir en Ukraine.

LES DONNEES HISTORIQUES
     Qu’est-ce que l’Ukraine ? Un État kaléidoscope, à la charnière de l’Ouest et de l’Est européen,
agité par des forces centrifuges, devenu aujourd’hui un enjeu majeur du mondialisme. L’État ukrainien
actuel est une construction artificielle, résultant de l’héritage malheureux de 72 ans de régime
communiste, une entité qui se situe à la charnière entre les deux poumons de l’Europe : un Occident
catholique et latin face au monde orthodoxe, avec la Russie pour élément dominant.
     Le mot « Ukraine » signifie d’ailleurs « confins territoriaux, marche frontière ». Cette zone est
constituée de territoires disparates. Les vastes plaine entre Dniepr et Don, sont peuplées de Cosaques
et de Russes venus s’installer dans ces régions à partir du XVIIIe s. La région de Kiev a été le berceau
de la Russie jusqu’à l’invasion mongole du XIIIe s., le flambeau étant repris alors par la principauté de
Moscou. La partie orientale de la Galicie (Lvov, Ternopol) a été rattachée d’abord au royaume polono-
lituanien, puis à l’empire austro-hongrois jusqu’en 1918. La Ruthénie subcarpathique fut austro-
hongroise jusqu’en 1918, puis tchécoslovaque jusqu’en 1945. Au sud-est sont encore des territoires
détachés de la Moldavie-Bessarabie et au sud la Crimée, russophone, mais offerte en 1954 à l’Ukraine
par Khrouchtchev.

LA RUS’ DE KIEV ET LE BAPTEME DE LA RUSSIE

     La Russie, comme la France, est le produit d’une évolution historique complexe, et les historiens
ne manquent pas de débattre pour savoir à quelle date situer le saut qualitatif à partir duquel existe une
nation « Russie » et une nation « France ». Mais ces deux pays ont une origine mystique très précise et
fondatrice : le baptême de Clovis, à la Noël 496, et le baptême de saint Vladimir le Grand (grand-
prince de Kiev qui régna de 980 à 1015), appelé le Beau Soleil de la Russie, le 28 juillet 988. Etant
venu, en 987, à l’aide de l’empereur byzantin Basile II pour mettre fin à une révolte, Vladimir obtient
en échange la main de la princesse Anna Porphyrogénète, sœur de l’empereur. Après son mariage, il
renonce au paganisme, il reçoit le baptême et impose à son peuple le christianisme de rite byzantin1.

1
 On trouvera sur cet événement fondateur des considérations intéressantes dans l’article de René Marichal (S.J.) et Yves
Hamant (datant de 1988), « Le millénaire du baptême de saint Vladimir » et sur le site « Parlons d’orthodoxie » du 27 juillet
1913 une étude de l’historien André Zoubov. Par ailleurs, on ne saurait trop conseiller la lecture du livre de Vladimir
Volkoff, Vladimir, le Soleil Rouge.
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       Vladimir Ier – Baptême      Ukraine – Baptême de Vladimir le Grand             B
       28 juillet 988 – 12h TU                                                        A
                 Kiev                                                                 M

         Baptême de s. Vladimir
         Victor Vasnetsov (1890)

     Nous ne donnons qu’un thème géocentrique pour le baptême de Vladimir, le lieu et l’heure étant
incertains. Le cycle Uranus-Neptune, commencé en 965, au moment de la fondation du Saint-Empire
romain germanique par la dynastie ottonienne, traverse, lors de la fondation mystique de la Russie, la
phase du septile évolutif, qui signale le sceau du destin. A 19° Capricorne, Uranus se situe sur la zone
de la conjonction Uranus-Neptune de 1993 qui accompagnera les débuts de la seconde indépendance
de l’Ukraine.
     L’événement a donné lieu, à la fin du XIXe s., à deux œuvres du peintre Victor Vasnetsov, artiste
qui se spécialisa dans les représentations mythologiques et historiques. Vasnetsov fut chargé de
peindre des fresques pour la cathédrale Saint-Vladimir de Kiev et deux tableaux monumentaux sont
consacrés au baptême de Vladimir le Grand.

     La Rus’ de Kiev sera submergée par le joug de la Horde d’Or qui finit par être chassée d’Europe
par les Polonais et les Lituaniens au XIVe s. C’est à partir de la Moscovie que la Rus’ devenue Russie
(Rossia) renaît de ses cendres. Après la chute de Constantinople le 29 mai 1453), la Russie récupère
l’emblème de l’Aigle à deux têtes et Moscou se considère désormais comme « la Troisième Rome ».
En fait, la Russie, plus qu’une nation, est un État impérial, réunissant dans une même communauté de
destin différents territoires et populations issus du noyau kiévien ; d’ailleurs, les Tsars s’intituleront
« empereurs de toutes les Russies ».
     Dans la seconde moitié du XVe s., la Russie blanche et une grande partie de l’Ukraine sont sous la
domination du Grand-duché de Lituanie, la partie occidentale étant intégrée au royaume de Pologne et
une partie orientale demeurant soumise à la Horde d’Or, tandis que la Principauté de Crimée englobe
tous les territoires autour de la mer d’Azov. Quant à la Russie, elle est confinée dans le Nord, et
Moscou se trouve non loin des frontières avec le Grand-duché de Lituanie et dans une dangereuse
proximité de la Grande Horde.
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         Europe orientale dans la seconde moitié du XVe s.

        http://historyatlas.narod.ru/europe1450_1500.png

Europe orientale dans la première moitié du XVII e s.

                                   Empire russe

                            Moscou

      Vilnius

  Roy. Polono-
  lituanien       Kiev

                                   Principauté
   Roy. de                         de Crimée
   Hongrie

             Empire ottoman
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     Dans la première moitié du XVIIe s., la Horde d’Or a disparu de la carte et la progression de la
Russie vers le Sud est impressionnante, l’empire russe atteignant dans le Caucase les frontières avec
l’empire ottoman et avec la Perse. Toute l’Ukraine occidentale est intégrée au royaume polono-
lituanien, unifiée sous la dynastie des Jagellon. L’empire ottoman a conquis les Balkans et la Hongrie
se trouve réduite de moitié, devenant une marche frontière de l’Europe occidentale face à l’invasion
musulmane venant de l’Est, qui atteindre bientôt les murs de Vienne et qui sera stoppée le 12
septembre 1683 par Jean Sobieski, roi de Pologne et grand-duc de Lituanie.
     La partie orientale de l’Ukraine est passé au XVIe s. sous la domination moscovite après l’échec
de l’installation d’un tsar polonais à Moscou durant le Temps des roubles (entre la mort d’Ivan le
Terrible et l’avènement de la dynastie des Romanov en 1613). Après la victoire de Pierre le Grand sur
les Suédois et Mazeppa à Poltava en 1709, les Cosaques deviennent des vassaux de la Russie et le fer
de lance de l’expansion russe contre l’Empire ottoman et contre la Pologne.
Le reflux de la Pologne, qui aboutira, à la fin du XVIIIe s., à son démantèlement et à son partage entre la Russie,
la Prusse et l’Autriche, entraînera l’intégration de l’ancienne Rus’ de Kiev dans l’Empire russe.

LA PREMIERE INDEPENDANCE

                                            Une Ukraine indépendante apparaît pour la première fois dans
                                      l’histoire, pour une brève période, à l’occasion des soubresauts
                                      tragiques qui accompagnent la fin de l’empire russe et l’avancée de
                                      la domination bolchévique. Le traité de Brest-Litovsk (3 mars
                                      1918) concède à l’Allemagne l’Estonie, la Lettonie et toute
                                      l’Ukraine. Il s’ensuit une période de troubles et d’affrontements
                                      entre de multiples forces. Le 1er décembre 1918, deux
                                      gouvernements – l’un installé à Ternopol en Galicie, l’autre à Kiev,
                                      signent un accord et la Rada (Parlement) de Kiev proclame le 22
                                      janvier 1919 l’unification de l’Ukraine, qui ne sera en fait jamais
                                      effective, car les deux gouvernements se maintiennent. En 1920, la
                                      victoire des bolcheviks aboutit à l’intégration de l’ancienne Ukraine
                                      russe à l’URSS. Quant à l’ancienne Galicie autrichienne( autour de
                                      Lvov), elle devient polonaise.

     Le thème de la première indépendance de l’Ukraine est incertain, du fait que non seulement
l’heure, mais même la date n’est pas assurée ; les historiens hésitent entre le 22 et le 29 janvier. Pour le
22 janvier, le thème est éloquent, avec une puissante configuration autour de l’axe des Nœuds situés
au tout début des signes Cardinaux. Cette configuration présente un carré Mars-Pluton, relié à Admète
sur le Point vernal, dans les axes Soleil/Lune et Soleil/Jupiter – ce qui, malgré un facteur de chance,
laisse présager une réalisation seulement partielle des objectifs. L’axe Uranus/Neptune (à 14°
Taureau) est relié à Pluton, Admète, Mars et Saturne : une configuration globale évocatrice du chaos
que traverse le pays à cette époque : répression d’une révolte, rapide désenchantement (avec Admète) ;
développement d’affaires occultes (avec Pluton) ; pertes, séparation en rapport à des affaires
d’héritage (avec Saturne) ; destructions, extermination soudaine, actes révolutionnaires (avec Mars).

     Faute de disposer d’un thème fiable pour la première indépendance de l’Ukraine, on peut se
reporter à l’éclipse pré-natale, qui eut lieu le 14 décembre 1917. L’éclipse se produit sur une des zones
les plus sensibles du zodiaque en astrologie mondiale, dans l’axe critique de 20° des signes Mutables,
en opposition à l’axe Jupiter/Pluton à 20° Gémeaux. Cet axe est signe d’une évolution favorable,
d’autant que l’implication de Mars est un indicateur d’une réalisation heureuse des projets. Le tableau
paraît plutôt favorable aux projets d’indépendance de l’Ukraine, mais sa réalisation à la fin janvier
1918 s’opère sous un ciel beaucoup plus chargé, évocateur du chaos effectif que traversera le pays
durant les années de guerre civile entre les Blancs et les Rouges.
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 Ukraine – Indépendance   Ukraine Indépendance – Proclamation par la Rada
         Eclipse
 14 déc. 1917 – 9h17 TU                Eclipse – 14 déc. 1917
        Kharkov

Ukraine – Indépendance    Ukraine Indépendance – Proclamation par la Rada
  Proclamation (Rada)
 22 janv. 1918 – 12h TU
        Kharkov
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                                    Europe orientale – 1921-1939

     En 1921, l’Ukraine perd son indépendance et devient une des républiques de l’URSS. État de
création récente, elle va entrer dans le jeu de la politique de Staline, qui vise à jouer du principe des
nationalités pour mieux contrôler des peuples divisés. Ainsi, la Russie stalinienne est-elle divisée entre
Républiques soviétiques de Russie, d’Ukraine, de Biélorussie, du Kazakhstan. Staline obtient des
Occidentaux, dès la création des Nations-Unies en 1945, des sièges distincts pour la Fédération de
Russie, pour la Biélorussie et pour l’Ukraine. Nikita Khrouchtchev prolongera cette politique par le
transfert, en 1954, de la presqu’île de Crimée à l’Ukraine. Il faut par ailleurs ne pas oublier que la
période soviétique d’entre les deux guerres a été marquée par l’effroyable famine organisée par le
pouvoir communiste entre 1931 et 1933, qui a causé plusieurs millions de morts, génocide non
reconnu par les instances internationales, auquel les Ukrainiens ont donné le nom d’Holodomor
(« extermination par la faim »). Génocide décrit dès 1935 par Boris Souvarine, et confirmé par les
archives soviétiques ouvertes après la chute de l’URSS.

LA SECONDE INDEPENDANCE
     La dislocation de l’Union soviétique après le putsch manqué du 19 août 1991 - qui permit à Boris
Eltsine, désireux de mettre fin au régime communiste, de l’emporter définitivement sur Mikhaïl
Gorbatchev, accroché à l’idée d’une réforme du système – aboutit à une seconde indépendance pour
l’Ukraine. Cependant, les données géopolitiques profondes demeurent et se traduisent, notamment,
dans la complexité de la situation des Eglises qui ont connu en Ukraine un renouveau spectaculaire
après les multiples persécutions subies à l’époque communiste. Il y a d’abord, à l’ouest, l’Église
catholique ukrainienne rattachée à Rome, qui regroupe ceux que l’on appelle les « Uniates », depuis
l’Union de Brest-Litovsk signée en 1598, au temps du royaume de Pologne ; cette Église regroupe
14% de la population totale de l’Ukraine, forte d’environ 45 millions d’habitants. Dans la partie
orientale prédomine l’Église orthodoxe d’Ukraine dépendant du patriarcat de Moscou ; le Patriarcat de
Kiev, créé en 1992, n’est pas reconnu par l’ensemble des Eglises orthodoxes, de même que l’Église
orthodoxe autocéphale, implantée dans l’ouest et dans la diaspora ukrainienne à travers le monde.
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      Ukraine – Indépendance                  Ukraine Indépendance - Proclamation
           Proclamation
      24 août 1991 – 14h31 TU
                Kiev

      La proclamation de l’indépendance de l’Ukraine par rapport à l’Union soviétique intervint
aussitôt après l’échec du putsch des nostalgiques de l’ère stalinienne. Cette nouvelle naissance d’une
nation s’opère sous le signe de la grande conjonction Uranus-Neptune, angulaire à l’Ascendant, reliée
à l’axe Soleil/Lune (« l’âme de la nation ») à la fin du Scorpion ainsi qu’à un amas autour de Jupiter à
la fin du Lion. Zone particulièrement sensible aux lourds transits en cours, en 2013 et 2014, du carré
Uranus-Pluton. On relèvera en outre le Milieu du Ciel à 13° Scorpion, conjoint à l’axe Jupiter/Saturne
(significateur des destinées de l’Europe).

      Ukraine – Indépendance                   Ukraine Indépendance - Référendum
             Référendum
       1er déc. 1991 – 18h TU
                 Kiev                                                               Carré UR-PL – 2014
                                                                                    Sur carré UR-MC natal

     SA-NE - 1917

     Le référendum confirme le choix de l’indépendance qui devient effective ce jour-là – BWH p. 372
8

     Cette zone de 13° Scorpion réapparaît avec force dans le thème de la confirmation de
l’indépendance de l’Ukraine lors d’un référendum qui eut lieu le 1er décembre 1991, au moment de la
dislocation finale de l’Union soviétique. A 13° Scorpion, on trouve dans ce thème les deux axes
Soleil/Lune et Jupiter/Uranus, significateur en principe de prospérité, mais parfois aussi de malheur
soudain. Cette zone sera transitée de septembre 2014 à avril 2015 par Jupiter en Lion, appuyé par les
divers transits de Mars dans les signes Fixes. Durant l’année 2014 également, on observera que le
carré Uranus-Pluton transitera sur le carré natal d’Uranus au Milieu du Ciel. On peut en déduire, nous
semble-t-il, que la question ukrainienne continuera à être à l’ordre du jour durant toute l’année 2014,
et au-delà sans doute. Enfin, l’Ascendant à 3° du Lion rattache le thème de l’Ukraine indépendante à
celui de la révolution russe de 1917, caractérisée par la conjonction Saturne-Neptune sur cette
position.

       Viktor Ianoukovith                   Viktor Ianoukovitch
      9 juillet 1950 – 12h15
            Jenakijevo
          48N13 - 38E12

     On ne sera pas trop surpris de retrouver certaines affinités dans le thème de Victor Ianoukovitch,
l’actuel président de l’Ukraine, avec cette zone sensible de 13° Scorpion dans le thème de l’Ukraine.
En effet, la Lune de Victor Ianoukovitch, dans l’axe Soleil/Jupiter, se trouve à 11° Taureau, sur l’axe
Uranus/Neptune de janvier 1918 et sur le Descendant du thème de la proclamation de l’indépendance
le 24 août 1991. Mais ce qui est essentiel dans ce thème, c’est la signature de Mars dans l’axe
Soleil/Uranus sur le Milieu du Ciel, zone affectée par l’opposition actuelle entre Jupiter et Pluton au
double carré d’Uranus : signature d’une période marquée par de violentes secousses et par des
surprises susceptibles de faire basculer de la prospérité à la malchance ou inversement. La conjonction
Mars-Neptune en Balance – significatrice de refus, de rejet, de destruction - est soumise, elle aussi,
aux lourds transits actuels. Cette conjonction est reliée, par semi-carré, à Zeus dans l’axe Uranus-
Neptune (à la fin Lion) : le Regelwerk d’Alfred Witte indique pour cette figure la notation suivante :
« révolution qui s’implante, s’impose ». Le carré à la Lune ajoute au tableau l’idée d’un peuple en
délire, en liesse ou dans la confusion.
9

LA CRISE ACTUELLE

LES ENJEUX STRATEGIQUES PROFONDS

     Par sa position géographique charnière, l’Ukraine constitue une pièce majeure dans l’offensive
mondialiste visant au containment de la Russie, selon la doctrine exposée par Zbigniew Brzezinski,
qui n’hésitait pas à déclarer : « Arrachez l’Ukraine à la Russie, et elle n’est plus un empire ». Le
relance d’une contestation qui rappelle étrangement la révolution orange de 2004 en Ukraine vise à
rendre à Vladimir Poutine la monnaie de sa pièce pour sa victoire diplomatique sur la question
syrienne et à stopper le retour en force de la Russie sur la scène internationale. Afin de concentrer
leurs forces vers l’Asie, les États-Unis souhaitent aujourd’hui maintenir leur domination sur l’Europe à
moindres frais, et une rupture entre l’Ukraine et la Russie écarterait pour un temps l’ascension de
Moscou comme première puissance européenne. L’objectif de l’accord avec l’Union européenne qui
semblait acquis et duquel Victor Ianoukovitch s’est défaussé in extremis le 21 novembre 2013 ne
visait nullement au bien de l’Ukraine, mais à sa séparation forcée d’avec la Russie. Alors que
l’Ukraine avait besoin d’assurer ses exportations vers l’Europe pour rééquilibrer sa balance
commerciale déficitaire de dix milliards d’euros et pour établir une certaine égalité avec la Russie, son
principal fournisseur d’énergie et son premier partenaire commercial, la coalition constituée par les
États-Unis, l’Allemagne et la Pologne visait uniquement un but géopolitique : séparer l’Ukraine de la
Russie sans rien donner en échange.
     D’ailleurs, l’Ukraine n’est pas, dans ces négociations, le seul objectif de l’Union européenne.
Depuis le sommet européen de Prague en mai 2009, un processus de préparation à une intégration
future à l’UE a été mené en direction de six républiques ex-soviétiques (Arménie, Azerbaïdjan,
Biélorussie, Géorgie, Moldavie et Ukraine). Au moment même où l’Ukraine connaissait des
manifestations violentes, l’Arménie signait un accord avec la Russie pour la fourniture de gaz russe à
des tarifs bien inférieurs aux prix du marché. La Turquie elle-même a exprimé l’intention d’intégrer
l’Organisation de Shanghai, pendant eurasiatique de l’OTAN ; les difficultés que rencontre
actuellement Repic Erdogan pourraient avoir quelque lien avec ces velléités de se dégager de l’alliance
traditionnelle de ce pays avec les États-Unis et l’OTAN.

LES ENJEUX ECONOMIQUES ET COMMERCIAUX POUR L’UKRAINE

     Les négociations entre l’Union européenne et l’Ukraine remontent aux premières années de
l’indépendance, avec la signature d’un accord de coopération et de partenariat en 1994. L’année
suivante, le président ukrainien Leonid Koutchma avait déclaré que l’intégration dans les structures
européennes et euro-atlantiques était un objectif stratégique pour son pays. Le processus de
négociation fut poursuivi tant sous la présidence de Victor Iouchtchenko que sous la présidence de
Victor Ianoukovitch, jusqu’à l’abandon impromptu du 21 novembre 2013. Certes, la pression exercée
par la Russie a pesé dans la balance à ce moment crucial : Vladimir Poutine avait menacé d’imposer
des sanctions économiques et de mettre un terme à la coopération avec les fabricants d’armes
ukrainiens en cas de signature de l’accord avec l’UE. Mais le facteur décisif a été tout autre que la
pression russe : c’est le constat que l’accord d’association avec l’UE aurait conduit l’Ukraine au
désastre.
     Cet accord visait à transformer l’Ukraine en un secteur à bas salaire pour les entreprises
européennes et impliquait de profondes « réformes » qui auraient réduit, des années durant, le niveau
de vie de la population. Afin de répondre aux normes techniques de l’UE et de vendre les
marchandises ukrainiennes sur le marché européen, les entreprises ukrainiennes auraient dû procéder à
d’énormes investissements. Selon le premier ministre Mykola Azarov, entre 100 et 160 milliards
d’euros étaient nécessaires pour la reconversion technique sur une période de dix ans : l’UE, n’était
prête à s’engager que pour un milliard de fonds sur une période de sept ans. En outre, durant cette
période de reconversion, les entreprises ukrainiennes auraient eu à faire face à une concurrence féroce
de la part d’entreprises européennes et lutter pour leur survie. La conséquence en eût été une massive
perte de la capacité productive, des emplois et des recettes fiscales, le tout exacerbé encore par la
suppression des actuels privilèges tarifaires accordés à l’Ukraine par la Russie.
10

      Le président Ianoukovitch, qui n’est certainement pas une marionnette de la Russie, a voulu avant
tout défendre les intérêts ukrainiens. Il s’est rendu compte que le véritable objectif des Européens,
inféodés aux États-Unis, était de créer une fracture entre l’Ukraine et la Russie. Il a mesuré le risque
terrible d’une sécession de l’Est qui aurait résulté d’un retournement unilatéral vers l’Union
européenne, et, sans céder aux pressions exercées par des opposants largement soutenus par les
Occidentaux, il a signé avec la Russie un accord énergétique substantiel, sans d’ailleurs se lier les
mains quant à une éventuelle Union douanière avec le bloc déjà constitué par la Russie, la Biélorussie
et le Kazakhstan.
      Le dépit européen n’a d’ailleurs pas tardé à se manifester puisque, dès le 15 décembre, Bruxelles
annonçait la suspension des travaux en vue d’un accord d’association avec l’Ukraine, déplorant le
manque d’engagement clair du président Ianoukovitch.

LA CONTESTATION ORGANISEE

     Dans leur acharnement à obtenir une volte-face du président Ianoukovitch ou son éventuel
renversement sous la pression de la rue, les Occidentaux ont fait feu de tout bois, soutenant une
opposition des plus disparates. La pseudo-révolution orange de 2004 avait déjà été une opération
mûrement préparée par les États-Unis et leurs alliés pour renverser un régime pro-russe au nom de la
démocratie libérale alignée sur les intérêts économiques de l’Occident. Viktor Iouchtchenko,
vainqueur aux élections du 26 décembre 2004, avait rapidement battu des records d’impopularité de
sorte que Viktor Ianoukovitch prit sa revanche à l’élection présidentielle de 2010 (la prochaine doit
avoir lieu en 2015). L’opposition, qui a commencé par protester contre la non signature de l’accord
avec l’Union européenne et qui est vite passée à l’exigence d’une démission de Viktor Ianoukovitch,
forme une alliance appelée « Groupe d’action pour la résistance nationale » qui regroupe trois partis :
l’Alliance ukrainienne démocratique pour la réforme (UDAR, dont le sigle signifie « coup »), dirigée
par l’ancien boxeur Vitali Klitschko, qui a manifesté, durant ce conflit, son ineptie et sa maladresse en
matière politique ; le parti d’opposition « Patrie » de Iulia Timochenko, femme d’affaires d’origine
russo-lettonne, devenue oligarque dans l’industrie gazière, ex-Premier ministre condamnée le 11
octobre 2011 à sept ans d’emprisonnement pour corruption ; l’union pan-ukrainienne Svoboda
(« Liberté ») qui portait jusqu’en 2004 le nom de Parti national-socialiste d’Ukraine, et qui appelle à
une révolution sociale et nationale, avec l’aide de milices pagano-radicales telle la Wotan-Jugend. Les
deux autres composantes (UDAR et Patrie) entretiennent pour leur part des liens étroits avec les partis
conservateurs en Europe, notamment avec la CDU allemande.
     La question se pose de savoir si les Européens comprennent bien à qui vont leur soutien. Ainsi,
les médias français n’ont donné qu’une version simpliste et erronée des événements en présentant ces
manifestations comme une éruption démocratique de jeunes européistes révoltés par la décision inique
de leur président-dictateur de les éloigner de l’Europe en faisant usage de violence. Les actions de rue
se déroulent selon un scénario bien établi : on tape d’abord, puis on se plaint des provocations et des
violences de la police, tout en bénéficiant de l’appui du dispositif médiatique occidental pour faire
basculer l’opinion publique. Imagine-t-on ce qui se passerait en France si des manifestants de droite et
d’extrême droite occupaient de force la mairie de Paris, tentaient de prendre en force l’assemblée
nationale et appelaient à un coup d’Etat pour renverser le pouvoir ?
     D’influents politiciens européens et américains n’ont pas hésité à s’immiscer dans les affaires
intérieures de l’Ukraine pour venir apporter leur chaleureux soutien aux manifestants de Maïdan (la
Place de l’Indépendance au centre de Kiev). Les ministres des Affaires étrangères de Pologne et de
Suède, Radoslav Sikorski et Carl Bildt, ont dans un communiqué commun exprimé leur solidarité aux
manifestants. Alexandre Kwasniewski, membre de la mission de surveillance du Parlement européen
et ex-président de Pologne, a ouvertement conseillé aux manifestants d’accentuer la pression sur le
pouvoir ukrainien. L’ancien premier ministre polonais et le dirigeant du parti national conservateur
PiS (Droit et Justice), Jaroslaw Kaczynski, ont pris personnellement part à la manifestation à Kiev. Le
ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, a fait un déplacement à Kiev pour
rencontrer deux chefs de l’opposition ukrainienne avant de se mêler aux manifestants
antigouvernementaux place de l’Indépendance. Une attitude qui contraste avec le soutien public ou
tacite venu de ces mêmes politiciens pour la répression fréquente et brutale de ceux qui, en Grèce, en
Espagne ou au Portugal manifestaient leur opposition aux dictats d’austérité de l’UE. Le 15 décembre,
le sénateur républicain américain John McCain, ancien candidat à la présidentielle américaine en
2008, accompagné par le sénateur démocrate Christopher Murphy, était présent place Maïdan d’où il
lançait une mise en garde contre la tentation de « vendre » l’Ukraine à Moscou.
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                                  On retrouve à l’œuvre, dans la crise ukrainienne, les mêmes procédés
                            et les mêmes grandes fondations transnationales qui militent pour la mise en
                            place d’une « Société ouverte », selon le modèle de l’Open Society Institute,
                            réseau créé en 1993 par le milliardaire américain d’origine magyare George
                            Soros, dans le but de promouvoir une « gouvernance démocratique ». Ces
                            instituts forment des militants des « droits de l’homme », à qui l’on fournit
                            le matériel télématique, les techniques de l’image, les capacités
                            organisationnelles en vue de nourrir les luttes sociales et politiques par le
                            truchement des media et des réseaux dits sociaux (Twitter, Facebook), clefs
                            de la propagande dans le monde actuel. Si les divers « Printemps des
peuples » ne sont pas totalement programmés, ils sont souvent préparés par un long et patient travail
de sape intellectuel et spirituel. D’ailleurs, ces mouvements sont très vite réorientés, récupérés,
manipulés et canalisés selon des objectifs de domination universelle. Dans le cas de l’Ukraine, c’est
l’organisation « Pora » (qui signifie : c’est le moment !) qui est activée, organisation fondée en 2004 et
financée par George Soros ; le soleil naissant du sigle de « Pora ! » est censé représenter une « aube
nouvelle » - sans lien avec le mouvement qui, en Grèce, porte le même nom. Mais l’on a vu aussi,
dans les récenets émeutes de Kiev, l’entrée en scène de jeunes Tatars de Crimée encadrant les
manifestations ; ce sont des membres du du mouvement Azatlyk [Liberté] de Naïl Nabiullin, qui
militent pour la Grande Turquie ; ils bénéficient du soutien de partis trotskistes, tel le Front de gauche
russe de Serguei Oudaltsov, ainsi que de Recep Erdogan, le premier ministre turc ; ces jeunes militants
ont été formés à la guérilla djihadiste en combattant en Syrie contre l’État baasiste.

QUELLE EVOLUTION DE LA CRISE ?
      Depuis que s’est dissous le grand trigone Jupiter-Saturne-Neptune à l’automne 2013, les tensions
n’ont fait que croître dans le monde. Si les États-Unis se sont dégagés du Levant avec l’abandon (ou la
mise en sourdine temporaire) d’une intervention directe en Syrie et contre l’Iran, ils demeurent
présents sur le « Toit du monde » afghan, négociant avec le président Hamid Karzaï leur maintien
effectif après le retrait officiel de leurs troupes. Les États-Unis opèrent en fait un vaste redéploiement
de leur dispositif en Asie, aux confins du pacifique, là où se relèveront les grands défis du XXIe s. On
observe sur le pourtour de la Chine une multiplication des foyers de déstabilisation (Tibet, Ouïghours
du Xinjiang, Thaïlande), et surtout une montée inquiétante de la tension entre la Chine et le japon
autour des îles Senkaku en mer de Chine. Ce qui est en jeu, c’est une recomposition globale du monde
hérité des accords de Yalta et de Potsdam, une nouvelle répartition des pouvoirs et des aires
d’influence entre grandes puissances. La période du carré Uranus-Pluton (de 2008 à 2017) est celle
d’un « chaos planétaire » et d’une « mutation explosive », comme nous l’expliquons depuis de
nombreuses années. Elle est aussi celle de l’affirmation d’un mondialisme qui mêle des aspects
despotiques à un anarchisme libertarien sur le plan des mœurs derrière une façade démocratique vidée
de toute substance. Et l’on assiste finalement, un siècle après la Grande Guerre, à la reconstitution de
deux grands blocs : le boc euratlantique et le bloc eurasiatique. Toutefois, il est peu vraisemblable que
cette opposition prennent avant longtemps (peut-être autour des années 2080) la forme d’un
affrontement direct et massif ; pour le moment, les guerres entre blocs sont appelées à prendre la
forme de révoltes populaires et démocratiques, telles les « révolutions de couleur » ou les « printemps
de la liberté », dénominations dignes du fameux roman d’Orwell, 1984.
      Dans le monde actuel, face aux offensives répétées du mondialisme atlantique depuis
l’effondrement de l’Union soviétique, la nouvelle Russie, portée depuis la fameuse éclipse
« nostradamique » d’août 1999 par Vladimir Poutine, apparaît de plus en plus comme un rempart pour
défendre les valeurs traditionnelles face à la déchéance morale du monde occidental. Le
« conservatisme » poutinien n’est pas un retour au despotisme oriental d’un Staline, c’est une doctrine
politique qui vise à contrer le mouvement vers le bas. C’est ce qui ressort, par exemple, d’une récente
déclaration de Vladimir Poutine : « De plus en plus de gens dans le monde soutiennent notre position,
qui est la défense des valeurs traditionnelles qui constituent depuis des millénaires la base morale et
spirituelle de la civilisation de chaque peuple » ; et le président de la Russie poursuit son propos avec
une citation du philosophe Nicolas Berdiaev : « Le conservatisme a pour but d’empêcher un
mouvement en arrière et vers le bas, dans le chaos des ténèbres ».
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                                 EG H8 – Janvier-Juin 2014 - Ukraine

                         EG H8 – Janvier-Juin 2014 – Viktor Ianoukovitch

                                         Transits du 23 avril 2014

                    Viktor Ianoukovith                               Ukraine - 1991

    Le thème de l’Ukraine (Indépendance-Référendum 1er décembre 1991) et celui du président
Viktor Ianoukovitch présentent tous deux un fort amas dans les signes Cardinaux, que les transits du
premier semestre 2014 affecteront puissamment, notamment à partir de la fin mars et avec une
culmination lors du carré Mars-Jupiter sur Pluton le 23 avril. On peut s’attendre à une forte relance du
mouvement de contestation au printemps prochain.
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      Après la signature de l’accord du 15 décembre entre Viktor Ianoukovitch et Vladimir Poutine, les
forces mondialistes qui ont appuyé sans réserves les manifestations de Maydan à Kiev ont subi un
échec. Cependant, la partie est loin d’être jouée. La question est de savoir si, comme en Syrie pour le
moment, les États-Unis mettront la pédale douce – et les Européens n’auront qu’à suivre – ou s’ils
vont hausser la mise en suscitant des révoltes qui pourraient déboucher, comme ce fut la cas en
Yougoslavie dans les années 1990, sur une tragique guerre civile déchirant les deux parties
historiquement non homogènes de ce qui constitue, depuis 1991, l’État ukrainien. De toute façon, de
manière feutrée ou acerbe, la Russie et l’Allemagne sont désormais engagées dans une lutte pour le
contrôle de la Mitteleuropa. De par son tropisme slave, l’Ukraine sera, à long terme, poussée à
rejoindre son pôle d’attraction, la Russie. Si l’Ukraine rejoignait le pôle occidental, elle se trouverait
aussitôt sous l’emprise de l’affairisme débridé et prédateur de la superclasse mondialiste livrée aux
« cavaliers du Néant » qui visent à déraciner dans tous les peuples les valeurs morales, culturelles et
spirituelles qui ont façonné la civilisation européenne depuis au moins un millénaire. Et sur le plan
économique, il n’y a aucun gain à envisager pour l’Ukraine dans un arrimage à une Union européenne
affaiblie, endettée, en voie de désindustrialisation et soumise au remplacement de ses populations
natives par des vagues d’immigration extra-européenne inassimilables. En revanche, une adhésion de
l’Ukraine à l’Union douanière proposée par la Russie, et la transformation éventuelle de cette Union
en une entité politique ferait de cet ensemble un acteur de premier plan et bouleverserait la
géopolitique mondiale. Il est raisonnable de penser que les États-Unis veilleront à empêcher un
rapprochement aussi poussé entre l’Ukraine et la Russie. Des troubles seront vraisemblablement à
prévoir avant les élections présidentielles ukrainiennes de 2015.
      Dans l’immédiat, la prochaine ouverture des Jeux de Sotchi pourraient fournir une occasion à de
nouvelles tentatives de déstabilisation par l’Occident de la Russie de Vladimir Poutine, la bête noire
des forces mondialistes.
                            EG – Vladimir Poutine – Janvier-Juin 2014

                                                 23 avril 2014

     Comme c’est le cas pour les thèmes de l’Ukraine et de Viktor Ianoukovitch, le thème de Vladimir
Poutine présente un amas important dans la seconde moitié des signes Cardinaux, avec la conjonction
du Soleil à Saturne-Neptune au carré d’Uranus et en dissonance de la Lune (au début des Gémeaux).
Cette zone sera fortement affectée, tout au long du premier semestre 2014, par le carré Uranus-Pluton
renforcé par le transit de Jupiter en Cancer et par la rétrogradation de Mars en Balance. Les tensions
s’accumulent avec le transit solaire à partir de la fin mars pour culminer lors du carré Mars-Jupiter sur
Pluton le 23 avril, affectant directement le Soleil de Vladimir Poutine.
                                                                                          Charles Ridoux
                                                                            Amfroipret, le 7 janvier 2014
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