LA RECONSTRUCTION DES MEDIAS DANS LES SOCIETES DE POST-CONFLIT: QUATRE PERSPECTIVES
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
. . LA RECONSTRUCTION DES MEDIAS DANS LES SOCIETES DE POST-CONFLIT: QUATRE PERSPECTIVES L'EXPERIENCEDESORGANISATIONS INTERGOUVERNEMENTALES ETNONGOUVERNEMENTALES Document d’informution pour la Conférence organisée par l’UNESCO à Genève à l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse Mai 2000 Sous la direction de Monroe E. Price Codirecteur, Programme de droit et politique comparés des médias Centre d’études socio-juridiques, Université d’Oxford c Les vues et opinions exprimées dans la présente étude sont celles de leurs auteurs respectifs et non pas nécessairement celles de l’UNESCO
INTRODUCTION MONROE E. PRICE Les observateurs des violents APERÇU GENERAL conflits ethniques des années 1990, qui viennent ternir l’éclat qu’on aurait pu attendre de la paix ayant succédé à la Après le Rwanda, après que les guerre froide, ont souvent remarqué une germes de la haine eurent été semés en nouvelle et dangereuse tendance, à savoir Yougoslavie, des propositions ont un recours accru aux médias - et en commencé à être faites pour que la particulier aux médias électroniques - pour communauté internationale entreprenne encourager et soutenir des tendances une action concertée destinée à prévenir un génocidaires. La brutalité et l’habileté se usage génocidaire de la radio et de la sont combinées pour produire une télévision qui encourageaient ou . propagande qui a eu des effets aggravaient un conflit catastrophique et extraordinaires sur la nature et la souvent génocidaire. Certains ont proposé persistance du conflit qui en résultait et sur qu’une “unité d’intervention pour la violence avec laquelle la force était l’information” des Nations Unies réagisse employée. Mais cette situation engendrée aux tentatives qui pourraient être faites par la radio et la télévision a eu également d’utiliser les médias pour inciter à la une influence importante sur la violence dans les “points chauds”. Cette physionomie de l’environnement au unité aurait eu trois fonctions principales : lendemain du conflit et sur les problèmes surveillance, émissions en faveur de la soulevés. On a déjà beaucoup écrit sur la paix et, dans les cas extrêmes, brouillage façon dont les médias ont été exploités des émissions de radio et de télévision. pour contribuer à une frénésie de Tout le monde se souvenait du rôle destruction. On s’est moins étendu sur les mobilisateur explosif que la efforts déployés par les organisations Radiotélévision libre des Milles collines internationales gouvernementales (OIG) et (RTLM) avait joué au Rwanda avec les Par les organisations non exhortations répétées et explicites qu’elle gouvernementales (ONG) pour intervenir adressait aux Hutus pour que ceux-ci afin de maintenir un ordre mondial plus massacrent les Tutsis. Cela est devenu stable et plus pacifique soit en prévision l’exemple type du cas où une intervention d’un conflit, soit durant le conflit préventive de Ia communauté lui-même, soit encore au milieu des internationale aurait dû être jugée épreuves faisant suite au conflit. Destiné opportune et peut-être nécessaire. aux participants à la Conférence de L’intervention dans le domaine de l’UNESCO qui .doit se tenir à Genève en l’information serait un moyen d’élargir la mai 2000, le présent document se propose palette des possibilités intermédiaires à la de mettre en lumière les aspects principaux disposition de l’ONU, de I’OTAN ou des caractérisant la situation au lendemain d’un Etats-Unis lorsque des mesures de conflit en se basant avant tout sur quatre maintien de la paix sont prises dans des études de cas concernant respectivement la conflits ethniques ou autres. Les voix se Bosnie-Herzégovine, le Kosovo, le sont faites de plus en plus nombreuses Rwanda et le Cambodge. pour soutenir que l’échec de la communauté mondiale, impuissante à arrêter le génocide au Rwanda, révélait la faiblesse d’un système international qui contraint les Etats à choisir entre deux
extrêmes : soit une intervention leur apparition, l’Organisation pour la humanitaire armée et massive, soit une sécurité et la coopération en Europe action purement symbolique. A mesure (OSCE) se voyant confier, au titre du que s’élargit le champ ouvert aux médias maintien de la paix, des responsabilités pour favoriser conflits et génocides, le administratives pour la reconstruction de moment est venu d’élaborer, de l’infrastructure kosovare dévastée. perfectionner et d’institutionnaliser des réponses fondées sur l’information à ce que Si l’on considère l’ensemble des Jamie Metz1 a appelé “les communications activités déployées en Bosnie, au Kosovo, de masse incendiaires”. au Cambodge et au Rwanda et leur rapport avec les efforts de maintien de la paix dans La question de savoir ce qu’il fallait le monde entier, on pourrait dire que deux faire lorsque les flammes du conflit étaient approches, dichotomiques dans une temporairement maîtrisées et lorsque certaine mesure, encore que leurs objectifs l’effort de reconstruction allait commencer fussent similaires, ont été mises à l’essai. a soulevé différents problèmes. Au Dans le premier cas, on a vu ceux qui Cambodge, à la suite des Accords de Paris estimaient que, pour contrer la propagande de 1991, l’Autorité provisoire des de guerre et de haine dans la plupart des Nations Unies au Cambodge (APRONUC) situations postconflictuelles, les s’est efforcée de trouver des techniques et organisations internationales des approches pour modifier la structure et gouvernementales (quelles que soient leurs la pratique de la diffusion de l’information caractéristiques) devaient créer des organes avant les élections de 1993. Peu après, en d’information de rechange qui, au début du vertu des Accords de Dayton, la Sfor et le moins, seraient placées sous leur contrôle. Haut Commissariat, ainsi que I’OSCE et Ces initiatives coupent souvent l’herbe toute une série d’ONG, ont pris des sous le pied aux organes d’information mesures pour remodeler et réformer associés avec les belligérants ou avec des l’espace médiatique en factions ethniques opposées. La logique est Bosnie-Herzégovine, reconnaissant simple : pour obtenir un contenu qui soit l’importance décisive d’une transformation neutre et orienté vers la paix, il est des médias pour la reconstruction de la nécessaire d’avoir une structure qui soit société. Il est apparu clairement qu’une neutre et orientée vers la paix. nouvelle approche de la part de la communauté internationale se dessinait, Une seconde approche, favorisée et avec des implications constitutionnelles, encouragée davantage par les ONG que par politiques et structurelles de la plus haute les OIG, apparaît moins contraignante. Elle importance. Tout d’un coup, la structure vise à renforcer les organes d’information des médias a été soumise à un mécanisme autochtones locaux, en particulier lorsque administratif imposé par la communauté ceux-ci font entendre une voix nouvelle, internationale comme on n’en avait pas vu dans l’espoir d’édifier une sphère publique, depuis près d’un demi-siècle. Cependant une société civile et un mécanisme à long que plusieurs organisations internationales terme pour la paix et la reconstruction, s’acquittaient de leurs fonctions, toute une l’idée directrice étant que la construction série d’ONG ont fait leur entrée sur le d’un réseau indépendant des OIG signifie terrain, désireuses elles aussi d’édifier un qu’il y aurait un legs d’information non système de médias qui contribuerait à partisane, qu’une infrastructure propice au instaurer une société démocratique pluralisme serait établie et qu’un électorat plurielle plus stable. Tout récemment, au informé ferait son apparition. Kosovo, des variations sur les thèmes exécutés en Bosnie-Herzégovine ont fait 2
Le présent document s’assigne pour être aussi extrêmement délicate et ces objectif de fournir des éléments permettant équipes sont fréquemment formées au de débattre des avantages et des détriment des organes locaux qui, souvent, inconvénients de chacune des deux ne peuvent rivaliser avec les organes approches, du bien-fondé de diverses nouveaux pour ce qui est des conditions de techniques dans des contextes particuliers travail du personnel et de la qualité de la et de la manière dont elles peuvent production. Enfin, les sommes à investir s’harmoniser, immédiatement et à long pour créer des organes d’information de terme, avec les principes profondément rechange peuvent être très élevées et, ancrés de la liberté d’expression. Les lorsque le mandat international prend fin et études qu’on trouvera ci-après dues pour la que l’infrastructure établie disparaît, il peut plupart à d’excellents journalistes en résulter un vide immense dans l’espace connaissant bien les régions considérées médiatique. examinent les diverses stratégies et discutent de leur efficacité dans les zones Le fait de se focaliser avant tout sur où elles ont été récemment expérimentées les organes d’information autochtones (Cambodge, Rwanda, Bosnie, Kosovo). locaux comporte aussi des inconvénients. Dans les contextes postconflictuels, où la Sur la base de ces études, nous société est déchirée par des paroles autant pouvons nous demander si ces deux que par d’autres armes, souvent presque approches sont vraiment dichotomiques. toutes les stations sont affiliées à un parti Nous pouvons aussi examiner certains des politique ou à un pouvoir local avantages et des inconvénients inhérents à extrêmement partisan. Les règles de la chaque approche. C’est ainsi que déontologie et de la responsabilité des l’imposition ou l’introduction d’un nouveau journalistes sont souvent en déclin et, de ce média peut aliéner une proportion fait, le niveau de professionnalisme des substantielle des populations visées. organes d’information locaux est souvent Celles-ci risquent d’avoir le sentiment relativement bas à l’aune des normes qu’une presse administrée par une internationales. Ce manque de organisation internationale ou trop professionnalisme ne fait que étroitement associée à celle-ci ou financée compromettre toutes les prétentions à par un gouvernement constitue un corps l’indépendance que ces organes étranger qu’il faut rejeter pour revenir aux d’information locaux revendiquent. La médias auxquels elles étaient fidèles. Les neutralité et l’objectivité risquent fort de journaliste locaux refusent parfois de n’être pas à l’ordre du jour. La communauté travailler pour ceux qu’ils considèrent internationale se sent souvent menacée par comme des étrangers ou bien ils réagissent les vestiges durables d’amertume qui négativement au contrôle que des s’étalent dans les médias cependant que des organisations intergouvernementales journalistes locaux et étrangers risquent exercent sur la diffusion des informations aussi de devenir victimes d’intimidation ou que les organes nouvellement créés de violence. destinent à leurs propres compatriotes. En revanche, quand les médias sous patronage FACTEURS À PRENDRE EN international réussissent, ils peuvent, en CONSIDÉRATION raison de leur richesse relative, attirer les meilleurs journalistes qu’ils détournent des Quand on passe en revue les quatre médias locaux, affaiblissant ainsi leur exemples d’une intervention internationale potentiel à long terme pour le dans le domaine des médias dans une développement d’une société civile. La situation d’après-conflit, il convient de constitution d’équipes rédactionnelles peut tenir compte des objectifs à atteindre : 3
compte tenu des préoccupations militaires, le degré d’implantation des ONG du pays des conditions extraordinairement avant le conflit ? difficiles qu’on rencontre sur le terrain et des rivalités violentes habituelles au sein (d) Quelles sont les modifications même de la communauté internationale, du contexte qui pourraient entraîner une comment les processus de restructuration réorientation des stratégies et faire qu’il et de soutien des médias peuvent-ils soit opportun de différer des initiatives s’opérer selon des modalités aussi internationales ? Quel est, par exemple, le compatibles que possible avec les normes résidu de haine et d’intimidation, et dans internationales de liberté de réception et de quelle mesure subit-il le contrecoup de diffusion de l’information ? En distinguant l’utilisation de l’espace médiatique ? entre les quatre études de cas (et en vue d’envisager d’autres cas d’intervention (e) Quelles sont les questions de postconfhctuelle dans le domaine de coordination, entre OIG et entre OIG et l’information), on peut mettre en lumière ONG, qui peuvent faire obstacle à une un certain nombre d’autres questions : mise en oeuvre optimale de diverses stratégies ? Dans quelle mesure les a) Quel est le rapport entre la problèmes de coordination, entre militaires structure des médias et le rôle qu’ils ont et civils, entre action à court terme et joué en alimentant le conflit, d’une part, et, action à long terme, l’emportent-ils sur les d’autre part, les besoins à satisfaire pour problèmes dus aux contraintes remodeler l’espace médiatique d’un Etat budgétaires ? donné dans le contexte postconflictuel ? Quelle était la structure des médias sur le Lorsque nous aurons examiné ces terrain lorsque l’évaluation de la situation facteurs, nous serons mieux en mesure postconflictuelle a été entamée ? Est-ce d’étudier, ou de reformuler, des questions que les médias ayant joué un rôle dans le plus fondamentales relatives aux conflit sont toujours intacts en ce qui engagements à long terme qui renforcent concerne leur structure et leur personnel ? les institutions démocratiques et créent un Y avait-il une tradition de médias environnement favorable aux normes indépendants de l’Etat et ces médias internationales de la liberté de parole. avaient-ils un caractère pluraliste ? Peut-on Nous serons alors mieux à même de accéder à un noyau de journalistes comprendre la nature des stratégies que la professionnels ayant une expérience communauté internationale devrait adopter nationale ? à l’égard des médias locaux pendant les opérations de maintien de la paix et les (b) Quels sont les aspects modalités selon lesquelles ces stratégies démographiques du contexte pourront empêcher ou modérer une postconflictuel qui ont une influence sur la programmation qui alimente sans nature de la stratégie relative aux médias ? discontinuer un discours haineux, raciste et Quel rôle les Etats voisins et leurs médias farouchement nationaliste dans une tonalité ont-ils joué pendant le conflit et après le incendiaire. Là encore, il est possible de conflit ? favoriser des stratégies incitant à plus de professionnalisme dans la communauté du (c) Quelles étaient les pouvoirs de la journalisme et de l’édition et aussi parmi communauté internationale pour les organismes de réglementation. Dans l’intervention dans le domaine des médias des situations de ce genre, il faut veiller au moment où elle a commencé à s’occuper avec un soin particulier à ce qu’une de la situation postconflictuelle ? Quel était information non partisane soit fournie aux populations locales sans exercer de 4
contrôle sur la teneur éditoriale de cette protection de la liberté de parole, il est information. Enfin, on a affaire à des indispensable de régler les questions de situations dans lesquelles la sécurité sûreté et de sécurité. physique des journalistes locaux et internationaux n’est pas assurée et, si l’on Ces remarques introductives étant veut faire régner une atmosphère se faites, nous aborderons maintenant les rapprochant de la norme internationale de études de cas.
DEUXIEME PARTIE : LES ETUDES DE CAS
BOSNIE-HERZEGOVINE MONROEE. PRICE L’étude de cas sur la de 1992, Slobodan Milosevic avait envoyé Bosnie-Herzégovine fournit un exemple des paramilitaires et des techniciens pour exceptionnellement complet des difficultés s’emparer d’une douzaine d’émetteurs de que, dans un contexte postconflictuel dur télévision dans le nord et l’est de la Bosnie. et complexe, on rencontre pour Ces zones sont proches de la Serbie et reconstruire et remodeler les médias, à la avaient des populations serbes importantes. fois pour permettre à un processus de paix C’est ainsi que plus de la moitié des d’aller de l’avant et, en même temps, pour habitants du territoire de la reconstruire des institutions qui créeront un Bosnie-Herzégovine commencèrent à avenir plus stable et démocratique. Il s’agit recevoir des émissions télévisées d’un cas particulièrement important pour contrôlées par Belgrade au lieu des l’étude de l’intervention et de la gestion des émissions habituelles provenant de médias électroniques, considérés comme Sarajevo. Les dirigeants bosniaques jouant un rôle essentiel dans la formation demandèrent à des fonctionnaires de de l’opinion publique. D’autres formes de IlAmbassade des Etats-Unis à Belgrade de communication- journaux, rassemblements brouiller les émissions de télévision serbes. de masse et les diverses manifestations de L’idée d’un espace d’information unifié la société civile - ont toutes joué un rôle, pour la Bosnie, avec un message national mais l’accent est mis ici sur la télévision et émanant de Sarajevo, fut immédiatement la radio. Les blessures de la guerre, les mise à mal, et la scène était prête pour le incertitudes du financement, la compétition lancement d’une guerre de propagande ou la confusion parmi les acteurs de la farouche qui allait précéder les vrais communauté internationale, combats. gouvernementaux et non gouvernementaux, les débats sur les Les Serbes n’étaient pas les seuls à principes premiers des droits de l’homme comprendre que la clé du pouvoir et de sont autant d’éléments qui jouent un rôle l’influence était la télévision. Bien avant le dans une histoire où les réponses faciles début des combats en Bosnie, la télévision sont rares, sinon inexistantes. croate, comme la télévision serbe, diffusait des émissions nationalistes expliquant En Bosnie-Herzégovine comme comment les Serbes se proposaient ailleurs, les conditions à remplir pour d’exterminer la population croate afin de l’administration au lendemain du conflit former une “grande Serbie”. Ces pouvaient être trouvées par l’étude de ce programmes incendiaires ont fait qui s’était passé pendant la guerre et au comprendre aux Croates qu’ils couraient un cours de la période qui l’avait précédée. danger mortel de la part des Serbes et qu’il Les médias avaient été utilisés pour leur fallait s’armer avant qu’il ne fût trop répandre la terreur et attiser les flammes de tard. la guerre dans l’ex-Yougoslavie. Plusieurs mois avant que quiconque dans la région Placée fermement sous le contrôle eût pris ouvertement les armes, des leaders des dirigeants nationalistes qui allaient nationalistes dans les diverses républiques mener la guerre, la SRT bosno-serbe yougoslaves avaient commencé à jeter les utilisa, pendant et après le conflit, les bases de la guerre en planifiant des mêmes tactiques que la télévision de campagnes médiatiques. Au printemps Belgrade avant la guerre. La télévision croate de Zagreb commença à diffuser des 7
nouvelles prétendant que des expressément habilitée à adopter des règles fondamentalistes islamiques essayaient de et règlements électoraux concernant créer un Etat dans lequel les Croates l’enregistrement des partis politiques, les catholiques seraient opprimés et asservis. conditions à remplir pour voter, les Des voix indépendantes existaient qui observateurs internationaux, ainsi que exprimaient des vues contraires à la d’autres mesures destinées à faire en sorte doctrine officielle, mais elles étaient en que des “campagnes électorales ouvertes et butte à des brimades systématiques, équitables” puissent avoir lieu. Les partis n’étaient le plus souvent pas lues ou pas étaient tenus de respecter les dispositions entendues et n’eurent guère d’influente sur relatives à la CEP figurant dans les l’opinion publique. Accords, ainsi que toutes règles et tous règlements que la CEP formulerait en A. LES ACCORDS DE DAYTON application des Accords. La guerre en Bosnie, combinaison B. LA SITUATION DES MÉDIAS brutale de manipulation psychologique et APRÈS LES ACCORDS DE de violence physique, prit fin en DAYTON décembre 1995 avec les Accords de Dayton. La composante militaire des Pour maintenir un contrôle sur leurs Accords exigea des semaines de territoires, les dirigeants nationalistes préparation et fut spécifiée avec beaucoup bosno-serbes et bosno-croates se de détails. Les aspects civils des Accords cramponnèrent aux médias contrôlés par ne bénéficièrent pas de la même attention. leurs partis. Les parties de la Bosnie tenues Les Accords stipulaient que l’Organisation par les Serbes étaient toujours couvertes pour la sécurité et la coopération en par les émissions de la Radio et Télévision Europe (OSCE) organiserait des élections serbe (SRT) fanatiquement nationaliste et sous le contrôle des Nations Unies. Ils les parties de la Bosnie tenues par les prévoyaient également la création d’une Croates continuèrent à recevoir les force de police civile non armée chargée émissions de la Radio et Télévision croate de superviser les forces de police WR‘-0 elle aussi fanatiquement traditionnelles dans chaque entité. En nationaliste. La partie du pays sous outre, ils donnaient au Haut Commissaire contrôle bosniaque resta desservie par la des Nations Unies pour les réfugiés le Radio et Télévision de pouvoir de superviser le retour ou la Bosnie-Herzégovine (RTBiH). réinstallation des personnes déplacées ou des réfugiés. Un Haut Représentant choisi Les trois groupes ethniques par le Groupe de contact devait coordonner commencèrent à entrer en compétition les activités des différentes organisations. pour obtenir un usage et un contrôle plus Ces sections des Accords avaient pour efficaces des ondes dans leurs sphères objectif de reconstituer le caractère d’influente. Les Croates, les Serbes et les _ multiethnique qu’avait auparavant la Musulmans réparèrent tous les émetteurs Bosnie et de créer une identité nationale de télévision endommagés par la guerre bosniaque alors que persistaient haines et situés sur des montagnes dans leurs loyautés ethniques. territoires respectifs, s’efforçant d’assurer à leurs fréquences respectives une diffusion Les Accords spécifiaient que I’OSCE aussi large que possible. Le gouvernement constituerait une Commission électorale serbe à Belgrade installa en Serbie un provisoire (CEP) chargée de surveiller les émetteur de télévision, à proximité de la élections au niveau de la fédération, des frontière de la Republika Srpska entités et des municipalités. La CEP était nouvellement créée, pour diffuser les 8
émissions de la télévision serbe dans toute nationalistes et séparatistes. Si des sources l’entité contrôlée par les Serbes. En outre, d’information de substitution n’étaient pas le gouvernement serbe aida les mises en place dans tout le pays, les Bosno-serbes à réparer les émetteurs mêmes dirigeants nationalistes qui avaient endommagés par la guerre. Le fait la guerre et qui contrôlaient encore la gouvernement croate installa de nouveaux radio et la télévision avaient des chances émetteurs en Croatie à proximité de la de revenir au pouvoir avec les élections. frontière bosniaque pour diffuser des Pour que ces dernières fussent un succès émissions de la télévision croate dans le en application des Accords, la territoire bosniaque et aida les communauté internationale jugea bosno-croates à réparer les émetteurs nécessaire de jouer un rôle dans les existants et à en installer de nouveaux. ajustements à apporter à la pratique des Initiative plus importante, les autorités de médias pour rendre possible un débat plus Zagreb utilisèrent une société placée large et plus libre avant les élections. nominalement sous le contrôle des Bosno-croates pour rediffuser les Les organisations participant à la émissions de la HRT dans la plus grande mise en oeuvre du plan de paix invitèrent partie de la Bosnie. Le gouvernement les politiciens de Bosnie à mettre une norvégien accorda son assistance pour la sourdine aux programmes nationalistes et rénovation et la réparation de quelque provocateurs de leurs médias. L’OSCE créa 21 émetteurs de télévision afin d’élargir la une Commission d’experts des médias portée de la voix multiethnique nécessaire (CEM) en tant que sous-commission de la pour faciliter la réconciliation. Toutes les CEP. La CEM publia un ensemble de factions ayant participé à la guerre avaient règles et de règlements que les médias manifestement l’intention de continuer à étaient censés respecter et qui visaient diffuser leurs doctrines du temps de guerre notamment à “fournir une information pendant la paix instaurée par les Accords. vraie et exacte”, “s’abstenir de diffuser des programmes incendiaires” et diffuser les C. LA MISE EN OEUVRE DES communiqués de l’OSCE et d’autres ACCORDS DE DAYTON ET sources internationales relatifs aux LES MEDIAS élections. Elle ordonna également aux trois chaînes de télévision contrôlées par les Quelques jours seulement après que partis au pouvoir dans les entités de Bosnie les Accords de Dayton eurent été signés à d’accorder aux partis politiques de Paris, l’ambassadeur américain Robert l’opposition le même temps de parole Frowick, qui était à la tête de la mission de qu’aux partis nationalistes au pouvoir. Elle I’OSCE en Bosnie, arriva à Sarajevo pour mit ensuite en place un groupe de commencer à faire des plans pour les surveillance habilité à rédiger des citations élections. Frowick et les autres diplomates pour les violations de ces règles et chargés de la mise en oeuvre des Accords règlements commises par les médias. de Dayton se rendirent compte qu’il était indispensable de changer la situation des Ne se contentant pas d’édicter des médias, fragmentés et nationalistes, afin règles régissant les médias existants, d’unifier le pays comme le prévoyaient les I’OSCE contribua à financer un réseau Accords. En l’absence d’une voix spécial de radiodiffusion, le Réseau de multiethnique plus forte, les habitants de la radio des élections libres (RREL), au titre Bosnie, qu’ils fussent Bosniaques, Serbes d’un projet dont le gouvernement suisse ou Croates, risquaient de n’avoir accès avait pris l’initiative et qui visait à fournir qu’aux informations de leurs programmes “des informations objectives et actualisées de télévision respectifs, farouchement sur les élections” aux habitants de toutes
les entités de la Bosnie-Herzégovine. Il engagés à concourir à la création du RT0 était prévu de toucher 70 % de la comprenaient notamment l’Agence Bosnie-Herzégovine bien avant les d’information des Etats-Unis (USIA), des élections, les émissions étant partagées à Etats membres de l’Union européenne, à la égalité entre la Fédération fois à titre bilatéral et par l’intermédiaire de croate-musulmane et la Republika Srpska. la Commission européenne, ainsi que Mais les dirigeants serbes de Bosnie I’Open Society Institute (OSI) de la prétendirent qu’ils ne pouvaient pas Fondation Soros. installer les émetteurs dont le RREL avait besoin parce que les routes menant aux Dès le début, deux conceptions montagnes sur lesquelles ils devaient être s’opposèrent quant à la structure du RTO. placés étaient minées. L’OSCE et le La première visait à mettre sur pied un gouvernement suisse parvinrent à faire réseau nouveau avec des journalistes fonctionner un émetteur du RREL à Banja couvrant toutes les parties au conflit Luka mais, au bout de quelques jours, les ethnique, ainsi qu’un personnel nombreux autorités serbes empêchèrent les venu de l’étranger. La seconde conception transmissions. Lorsque le RREL visait à fournir une formation aux stations commença à émettre en juillet 1996, deux indépendantes existantes et à mettre mois seulement avant les élections, il ne ensuite en place un réseau qui les aurait touchait que 40 % du territoire de la réunies. Le Haut Représentant de l’époque, Bosnie-Herzégovine, exclusivement dans Carl Bildt, avait préconisé la première les limites de la Fédération version, mais presque tous les donateurs croate-musulmane. Ainsi, le RREL n’a eu voulaient la seconde. Ils faisaient valoir aucun impact dans la Republika Srpska, où qu’une chaîne de télévision créée de toutes la population avait le plus besoin de pièces aurait été perçue comme imposée et sources d’information supplémentaires. aurait de ce fait manqué de crédibilité auprès des Bosniaques de toutes D. LEBUREAUDUHAUT obédiences. En août, juste un mois avant REPRÉSENTANTETLE les élections, le RT0 n’émettait pas encore RÉSEAUDE et les médiateurs de la paix, tout comme RADIODIFFUSIONOUVERTE les Etats donateurs, se rendirent compte que l’impact de la chaîne sur les élections Avant même la création du RREL, le de septembre serait négligeable. Bureau du Haut Représentant avait proposé de créer un réseau de télévision Les services du Haut Représentant, indépendant ayant pour objectif proclamé I’OSI, I’USIA et l’Union européenne de fournir des informations équilibrées continuèrent à travailler sur le projet, avant les élections. Le but du réseau devait créant finalement un réseau de stations de être de fournir des “informations non télévision qui commença à émettre biaisées” de journalistes locaux et quelques jours seulement avant les internationaux ainsi que des programmes élections. Une poignée de stations commerciaux de différentes parties du seulement, qui se trouvaient toutes sauf monde à l’intention de la une dans la Fédération croate-musulmane, Bosnie-Herzégovine tout entière. Le réseau acceptèrent de faire partie du RTO. On vint à être connu sous le nom de Réseau de estime qu’un tiers seulement de la télévision ouverte (RTO). Le Haut population bosniaque pouvait voir les Représentant de l’époque, Carl Bildt, émissions et la Republika Srpska n’était travailla sur ce projet en février et pas desservie du tout. Et, au début, les mars 1996 et l’annonça en avril. Les génériques de l’émission étaient écrits sur gouvernements et les ONG qui s’étaient un bout de papier, maladroitement tenu par 10
une paire de mains que les téléspectateurs élections nationales de septembre 1996. Il pouvaient voir. n’y a pas lieu de s’étonner que les dirigeants nationalistes qui avaient été à la Le RREL et le RT0 ne sont pas tête de leurs peuples respectifs pendant les parvenus à créer avant les élections, quatre années de guerre aient été réélus. comme ils se l’étaient proposé, un média plus pluraliste dans toute la Bien que les élections nationales Bosnie-Herzégovine. D’autres tentatives eussent déjà eu lieu, la communauté visant à modifier la situation en matière de internationale en Bosnie-Herzégovine médias n’ont pas été non plus couronnées insista pour créer des médias indépendants de succès. L’UNESCO a créé une banque et pluralistes dans le pays en s’efforçant de de programmes à Sarajevo. Elle a demandé mener à bien cette tâche avant les élections à des pays d’Europe de faire don de municipales qui devaient avoir lieu l’année certains de leurs programmes nationaux de suivante, en septembre 1997. Les télévision concernant l’histoire, les donateurs tinrent une nouvelle réunion, beaux-arts et la culture. Ces programmes cette fois à Bruxelles, en octobre 1996, un devaient être diffusés par des stations de mois après les élections nationales. Ils télévision dans toute la décidèrent de continuer à soutenir le RT0 Bosnie-Herzégovine et contribua ainsi à jusqu’à ce que celui-ci devienne rentable, améliorer la qualité des émissions et à ce qui, pensaient-ils, pourrait prendre de éviter le piratage. Toutefois, cet effort n’a trois à cinq ans. guère eu de succès pour ce qui était d’amener les stations de télévision à Malgré le soutien ainsi promis, le diffuser des émissions plus équilibrées. Les réseau rencontra bien des difficultés. Les troupes de 1’OTAN se sont efforcées elles divers donateurs commencèrent à se aussi de diffuser des informations quereller à propos de la manière de gérer le différentes. Elles ont créé leur propre réseau. La Direction des communications station de radio, Radio Mir, c’est-à-dire la de Bosnie-Herzégovine adressa une lettre radio de la paix. L’USAID a patronné une au Bureau du Haut Représentant accusant publicité électorale qui invitait les la communauté internationale de violer Bosniaques habitant dans les deux entités à elle-même le droit international par une faire usage de leur droit de vote pour décision qui revenait à accorder une assurer “la paix, la démocratie et l’avenir licence au RT0 sans coordination avec les de leur pays”. L’OSCE a enjoint aux trois autorités légales de Bosnie-Herzégovine, et stations de télévision contrôlées par les une plainte alléguant des interférences partis de diffuser cette publicité. Toutefois, avec les fréquences existantes fut déposée si l’on en croit les journaux bosniaques auprès de l’Union internationale des locaux, une grande partie de la population télécommunications. a jugé ces textes condescendants. A mesure que les difficultés se Bien que les efforts respectifs du multipliaient, il apparut nettement que ni RTO, du RREL, de 1’OTAN et d’autres les Bosniaques ni les donateurs n’étaient encore aient eu un impact négligeable pour satisfaits du RT0 dont peu de ce qui était de fournir au public le plus mal téléspectateurs regardaient les émissions. informé des informations plus objectives et Finalement, en avril 1997, I’OSI retira son bien que les stations de télévision argent et son soutien, portant ainsi au nationalistes contrôlées par un parti dans réseau le coup le plus dur qu’il eût encore chaque entité aient continué à avoir le plus reçu. Le bruit courut que tout le projet d’influente sur leurs groupes ethniques allait être abandonné, mais les pays respectifs, I’OSCE alla de l’avant avec les donateurs et l’Union européenne 11
s’engagèrent à poursuivre leur financement et de radio ainsi que les journaux aidés par et, en août 1997, le Bureau du Haut I’OTI contribuèrent à informer le public de Représentant fit appel à une nouvelle la lutte pour le pouvoir entre Plavsic et équipe de Bosniaques auxquels il donna Karadzic. Les nouveaux médias financés une formation pour qu’ils puissent gérer la par I’OTI s’efforcèrent de dévoiler des station. scandales passés : corruption du gouvernement, misère économique et E. L’AIDE DIRECTE - USAID, occasions perdues. Cela fournit à Plavsic SOROS, COMMISSION ET un soutien pour consolider son pouvoir. UNION EUROPÉENNES, ETC. En plus des efforts ainsi déployés par Le RT0 ne fut pas le seul moyen I’USAID, l’Union européenne et l’OS1, auquel I’USIA et I’USAID, entre autres, plusieurs gouvernements accordèrent aussi aient recouru pour créer et développer une des subventions directes, pour la formation presse plus pluraliste. L’Europe et les Etats et l’équipement, à divers médias nouvellement indépendants, ainsi que indépendants dont les uns étaient implantés I’USAID, financèrent des contrats avec dans la Republika Srpska et les autres dans Intemews et IREX afin de former du la Fédération croate-musulmane. C’est personnel et d’acheter du matériel pour des ainsi que I’OSI, conjointement avec la stations de télévision autres que le RTO. BBC, créa une école de formation à la L’Office of Transition Initiatives (OTI), radio et à la télévision où de jeunes autre branche de I’USAID, ouvrit des journalistes, venus de toute la bureaux à Banja Luka, Sarajevo, Tuzla et Bosnie-Herzégovine, passaient six Zenica et commença à accorder des semaines à Sarajevo pour y recevoir une subventions directes à des médias formation dispensée par des journalistes et indépendants. LOTI déboursa 6,3 millions des producteurs de la BBC. de dollars en faveur des médias de Bosnie-Herzégovine entre février 1996 et Malgré ces efforts pour créer de novembre 1998. nouvelles sources d’information dans toute la Bosnie-Herzégovine, les médias sont Le printemps de 1997 venu, la restés divisés en trois composantes situation avait un peu changé. Plusieurs mutuellement antagonistes basées dans la mois avant les élections municipales, les Republika Srpska, dans le territoire de la Etats-Unis avaient décidé de soutenir Fédération sous contrôle bosniaque et dans Biljana Plavsic, ancienne collaboratrice de le territoire de la Fédération sous contrôle Karadzic qui s’était retournée contre ce croate. Les stations de télévision sous dirigeant de la période de guerre et avait contrôle respectif des partis sont établi sa base à Banja Luka. Les initiatives demeurées les organes d’information les des médias locaux en faveur de Plavsic plus influents et la source principale de avaient des chances de leur valoir un nouvelles pour chacun des groupes soutien financier accru de la part des ethniques de la Bosnie. Les tentatives Etats-Unis. Au printemps de 1997, I’OTI faites par la communauté internationale accorda 4 millions de dollars de subvention pour créer une source d’information de aux médias, à savoir 19 journaux, rechange n’avaient pas été suffisantes pour 27 stations de radio et 8 stations de combattre les stations de télévision télévision. Au printemps de 1996, les nationalistes qui continuaient à attiser sources indépendantes d’information l’hostilité. D’ailleurs, les différents médias disponibles dans la Republika Srpska n’étaient pas seulement hostiles les uns étaient rares sinon inexistantes, mais, envers les autres, mais aussi envers la l’année suivante, les stations de télévision communauté internationale et la Sfor. La 12
Sfor et le Bureau du Haut Représentant F. SAISIE D’ÉMETTEURS avaient le sentiment qu’une grande partie de leur action en faveur d’une Cette dernière disposition réconciliation était compromise par les extraordinaire de la Déclaration de Sintra informations et la propagande de la semblait conférer à la Sfor et au Bureau du télévision et de la radio nationalistes. Haut Représentant le pouvoir de bloquer des organes d’information dans toute la Le 30 mai 1997, les membres du Bosnie, et ce pouvoir fut exercé avec la comité directeur du Conseil de la mise en saisie de pylônes de télévision dans la oeuvre de la paix du Groupe de contact Republika Srpska. Pendant plus de six tinrent leur réunion semi-annuelle à Sintra, mois, à la fin de 1997 et en 1998, la Force au Portugal, pour faire le point de la mise de stabilisation de I’OTAN, obéissant aux en oeuvre des Accords de Dayton. En ce ordres du Bureau du Haut Représentant, qui concernait les rapports entre les médias exerça son contrôle sur les principaux et les Accords de Dayton, le comité émetteurs situés dans le territoire pour directeur conclut qu’il fallait faire “protéger la sécurité”. Au milieu d’une davantage pour “encourager les directeurs campagne électorale décisive, une des organes de presse, de radio et de candidate, Biljana Plavsic, qui avait les télévision indépendants” afin de préparer le faveurs de la communauté internationale terrain “pour les élections [et de permettre] pour s’opposer et succéder à Radovan un accès plus large à l’information et de Karadzic dans la Republika Srpska, fut promouvoir le pluralisme politique”. Ces brutalement attaquée sur les médias conclusions trouvèrent leur expression électroniques. Elle était dépeinte par la officielle dans la Déclaration de Sintra que SRT comme “traître à la nation serbe” et le Bureau du Haut Représentant a “manoeuvrée par la communauté considérée comme une extension des internationale”. Faute de pouvoir toucher Accords, et ce bien que ni les élus plus efficacement les téléspectateurs de la bosniaques ni les signataires initiaux des SRT, Plavsic était considérée comme Accords n’eussent été invités à signer la n’ayant que fort peu de chances de Déclaration. remporter la bataille électorale. La Déclaration cherchait à Pour cette raison et pour faire encourager les médias indépendants selon obstacle à certaines expressions virulentes des modalités variées. Non seulement elle d’hostilité envers la Sfor, des appels à demandait un soutien accru pour- le l’action et des réactions à ces appels se développement du RTO, mais elle invitait succédèrent avec une violence croissante. les autorités de Bosnie-Herzégovine à Le 14 août, un sénateur américain influent accorder “toutes les formes possibles suggéra que des avions des Etats-Unis d’assistance pratique en matière de brouillent les émissions de la SRT et licences, de fréquences, de liberté d’accès diffusent en même temps “des émissions aux organes d’information pour le Haut exposant les raisons véritables de Représentant et la possibilité d’émettre l’isolement du peuple serbe et de sa pour le RT0 et autres médias mauvaise réputation dans la communauté indépendants”. La Déclaration affirmait internationale”. Le ministre bosno-serbe de ensuite que le Haut Représentant avait “le l’information, Miroslav Toholj, déclara que droit de limiter ou de suspendre tout réseau toute action officielle des Etats-Unis pour ou programme en contradiction persistante brouiller la SRT serait considérée comme et flagrante avec l’esprit ou la lettre de un acte de guerre. Plusieurs jours plus tard, l’Accord de paix”. le 18 août, le Bureau du Haut Représentant demanda que la SRT diffuse une 13
déclaration destinée à informer le public Sfor et les autres organisations serbe de la teneur de la Déclaration de internationales appliquant les Accords de Sintra et de l’obligation faite aux dirigeants Dayton ; la SRT de Pale devait réserver de toutes les partles en Bosnie de respecter régulièrement une heure de grande écoute ce texte. La SRT refusa et, dans un pour l’expression d’opinions politiques communiqué mémorable, compara la Sfor autres que celles du parti au pouvoir ; la aux nazis en la qualifiant de “force SRT de Pale devait mettre chaque jour une d’occupation”. Avec le graphisme “SS-for” demi-heure de grande écoute à la au lieu de S-for, l’émission faisait alterner disposition du Haut Représentant pour lui des images de soldats de la Sfor avec celles permettre de se présenter et de parler de troupes d’assaut allemandes pendant la d’événements récents ; enfin, la République deuxième guerre mondiale. serbe devait accepter de respecter toutes les règles instaurées par ce qui allait Réagissant à cette initiative, le devenir le groupe consultatif de la 23 août, le nouveau Haut Représentant, communauté internationale pour le soutien Carlos Westendorp, adressa une lettre à des médias. Momcilo Krajisnik, le membre serbe de la présidence de Bosnie-Herzégovine, Le 26 septembre, le procureur exigeant que la SRT diffuse une général du Tribunal criminel international déclaration du Haut Représentant pour l’ex-Yougoslavie, Louise Arbour, expliquant la Déclaration de Sintra avant donna à Sarajevo une conférence de presse 22 heures le jour même. Westendorp qui fut couverte par la SRT. Un annonceur qualifia l’émission où la Sfor était de la SRT de Pale présenta la conférence comparée aux nazis d”‘absolument de presse d’Arbour avec un commentaire inacceptable”. Il laissa entendre que la Sfor suivant lequel le Tribunal était un pourrait agir en saisissant les pylônes de instrument politique et qu’il avait un télévision pour mettre un terme à la préjugé contre les Serbes. L’ONU, qui fait propagande des médias de Pale contre les partie du comité consultatif pour le soutien forces de paix en Bosnie. La SRT se des médias, estima qu’il s’agissait là dune soumit aussitôt aux exigences de violation des accords antérieurs et exigea Westendorp et diffusa le communiqué que la SRT de Pale fasse des excuses avant l’heure limite tout en se plaignant publiques à la télévision. C’est ce que la que la décision du Haut Représentant eût SRT de Pale fit le 30 septembre dans les dépassé les limites des Accords de Dayton termes suivants: et en rediffusant le clip comparant la Sfor aux nazis. La radiotélévision serbe tient a s’excuser ainsi sans reserve pour l’idée Le 22 août, étape suivante de ce qui erronée qu’elle a donnée d’une conférence devait être la transformation de la SRT, les de presse du procureur du Tribunal de La troupes des Etats-Unis saisirent un pylône Haye, Louise Arbour. Nous allons donner de télévision à Udrigovo, ville du nord-est, lecture d’une déclaration faite à cet effet en alléguant qu’elles tentaient d’empêcher par le procureur. Cette déclaration sera des heurts possibles entre les partisans de suivie de la vidéo complète et non Plavsic et ceux de Karadzic. Une semaine retouchée de la conférence de presse que plus tard, en application d’un accord, la Mme. Arbour a donnée vendredi dernier Sfor restitua le pylône à la direction de la lors de sa visite en Bosnie Herzégovine. SRT à Pale. L’accord comportait les conditions suivantes : les médias de la République serbe devaient cesser de diffuser des textes incendiaires contre la 14
Vous pouvez aussi lire