Le point sur les oppositions françaises auprès de l'Office Européen des Brevets - Contre le monopole sur les tests de prédisposition aux cancers ...

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Le point sur les oppositions françaises auprès de l'Office Européen des Brevets - Contre le monopole sur les tests de prédisposition aux cancers ...
DOSSIER DE PRESSE DU 30 septembre 2007

Contre le monopole sur les tests de prédisposition
aux cancers du sein et de l'ovaire liés au gène BRCA1
Le point sur les oppositions françaises auprès
de l'Office Européen des Brevets
Le point sur les oppositions françaises auprès de l'Office Européen des Brevets - Contre le monopole sur les tests de prédisposition aux cancers ...
Sommaire

1. Trois oppositions françaises aux brevets délivrés par
l'OEB à Myriad Genetics en 2001                                                        p2
       n Une logique d'opposition face à la logique industrielle                       p2
       n Un monopole inacceptable sur le marché international
         des tests de prédisposition                                                   p2
       n Défendre notre conception de la santé publique                                p4

2. Une forte mobilisation internationale depuis 2001                                   p5
3. Les avancées réalisées depuis 2001                                                  p6
       n Le cadre léglislatif                                                          p6
       n L'organisation et le financement de l'oncogénétique                           p8

4. Trois révocations par l'OEB en 2004 et 2005 suivies
de trois recours                                                                       p9
       n   Révocation totale du brevet 1                                               p9
       n   Révocation partielle du brevet 2                                            p9
       n   Révocation partielle du brevet 3                                            p 10
       n   Trois recours auprès de l'OEB en cours d'examen                             p 10

Annexes
       n 1. Les dates-clés de l'affaire                                                p 11
       n 2. Les 3 brevets de Myriad Genetics                                           p 14
       n 3. Les gènes de prédispositions aux cancers du sein
            ou de l'ovaire                                                             p 17
       n 4. Les cancers héréditaires du sein et de l'ovaire                            p 20
       n 5. La prise en charge des femmes et de leur famille                           p 23
       n 6. Les méthodes de détection des mutations                                    p 27
       n 7. Les 15 laboratoires français                                               p 29
       n 8. Les brevets européens                                                      p 30
       n 9. Glossaire                                                                  p 33
       n 10. Images                                                                    p 36

Contacts presse :
Institut Curie                   Assistance Publique-Hôpitaux de Paris   Institut Gustave-Roussy
Catherine Goupillon              Thierry Girouard                        Chloé Louys
Tél. 01 44 32 40 63              Tél. 01 40 27 32 64                     Tél. 01 42 11 50 59
fax 01 44 32 41 67               Fax 01 40 27 57 01                      Fax 01 42 11 53 09
catherine.goupillon@curie.fr     thierry.girouard@sap.ap-hop-paris.fr    louys@igr.fr
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1       Trois oppositions françaises aux brevets délivrés par
        l'OEB à Myriad Genetics en 2001
    Depuis octobre 2001, 3 oppositions aux brevets détenus par Myriad Genetics ont été déposées à l'Office
    européen des brevets par l'Institut Curie, l'Institut Gustave-Roussy et l'Assistance Publique-Hôpitaux de
    Paris, et par de nombreux opposants européens.
    La démarche française est soutenue par la Fédération Nationale des Centres de Lutte Contre le Cancer
    et la Fédération Hospitalière de France.

    Une logique d'opposition face à la logique industrielle

    Ces trois oppositions contestent en Europe le monopole imposé par Myriad Genetics sur le marché inter-
    national des tests de prédisposition au cancer du sein et de l'ovaire lié au gène BRCA1.
    La logique industrielle de Myriad Genetics, dont l'activité est essentiellement centrée sur le diag-
    nostic, avait pour objectif de couvrir l'ensemble des utilisations potentielles du gène BRCA1.
    Ceci a conduit la société américaine à déposer des brevets complémentaires (du diagnostic à la thérapeu-
    tique) tout en veillant à introduire, dans chacune de ses demandes, des éléments liés au diagnostic afin
    d'obtenir des brevets pouvant se substituer les uns aux autres, en cas d'annulation de l'un ou l'autre.
    Face à cette stratégie, il était logique de la part des opposants français de saisir l'Office européen
    des brevets sur ces trois dossiers ayant chacun des effets bloquants pour la réalisation des tests
    génétiques.
    (voir Annexe 1 : Les dates-clés de l'affaire et Annexe 2 : Les 3 brevets de Myriad Genetics : descriptions,
    opposants, axes d'oppositions, état des dossiers)

    Un monopole inacceptable sur le marché international des tests de prédisposition

    n Des brevets « larges » pour monopoliser le marché et contrôler la recherche

              Couvrant sans restriction toutes les techniques de diagnostic, des mutations spécifiques, des
              kits diagnostiques et le gène BRCA1 isolé, ce portefeuille de brevets - larges, complémentaires
              et « substitutifs » - octroie de facto à Myriad Genetics un monopole d'exploitation sur le marché
              international des tests de prédisposition.
              w Puisque Myriad Genetics n'entend pas accorder de licences d'exploitation pour la réalisation
              des tests de première recherche de mutation familiale1, les laboratoires français et
              européens devront obligatoirement envoyer leurs échantillons d'ADN prélevés sur des
              personnes à risque dans « l'usine à tests » de Myriad à Salt Lake City.
              w Tout laboratoire contrevenant aux termes de ces brevets s'expose à un procès
              en contrefaçon, quelle que soit la technique diagnostique utilisée. Des laboratoires d'analyse
              génétique, comme ceux de l'Institut Curie, de l'AP-HP, de l'Institut Gustave-Roussy et bien d'au-
              tres en France et en Europe, se verraient ainsi interdire toute possibilité de réaliser des tests de
              prédisposition.

    1. Les altérations génétiques sont différentes d'une famille à l'autre, alors qu'une même mutation se retrouve chez les membres d'une même
    famille. Les tests génétiques se font en deux étapes : la première recherche de mutation familiale puis le test individuel.
    La première recherche de mutation familiale est une étape difficile et longue, pouvant durer jusqu’à 3 mois car le nombre de mutations possi-
    bles est d'autant plus élevé que le gène BRCA1 est grand (plus de 800 mutations différentes connues). En revanche, dès lors qu'une altéra-
    tion a été identifiée chez un des membres de la famille, le test individuel proposé aux apparentés est rapide (quelques semaines au maxi-
    mum) et d'interprétation simple (porteur ou non porteur de la mutation familiale).
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             w L'envoi « obligatoire » chez Myriad d'échantillons d'ADN de personnes à haut risque per-
             mettra à la firme américaine de se constituer l'unique banque de données génétiques dans
             le monde. Cela lui conférera la maîtrise sans partage des principaux matériaux de la recher-
             che sur les gènes de prédisposition aux cancers du sein et de l'ovaire, et par conséquent la
             réalisation d'autres découvertes et le dépôt éventuel d'autres brevets sur leurs applications.
             w Ne plus permettre aux laboratoires français et européens d'effectuer les tests de première
             recherche de mutation familiale entraînerait une perte d'expertise technique et médicale qui
             serait probablement assortie d'une diminution des moyens alloués à ces laboratoires. Ceci ne
             serait pas sans conséquences sur la recherche fondamentale, cruciale pour l'avenir de
             la génétique médicale, et donc sur la mise au point de véritables moyens de prévention
             pour les femmes à risque (voir annexe 5 « La prise en charge des femmes à risque »).
             Cela freinerait, par exemple, les recherches importantes conduites dans de nombreux labo-
             ratoires de génétique du monde entier pour mettre en évidence des facteurs de modulation
             du risque et découvrir d'autres gènes de prédisposition.

n Le manque de fiabilité de la méthode diagnostique de Myriad

En juin 2001, le Service de Génétique Oncologique de l'Institut Curie, dirigé par le Pr Dominique
Stoppa-Lyonnet, avait montré que les méthodes industrielles focalisées sur la recherche
d'anomalies ponctuelles ou de petite taille, et en particulier la technique de séquençage
direct utilisée par Myriad Genetics, ne détectaient que 80 % à 90 % des mutations2, démon-
trant ainsi qu’il fallait se donner tous les moyens pouridentifier avec plus de fiabilité les
altérations génétiques..
Connaissant l'existence de mutations de grande taille, l'équipe de l'Institut Curie avait utilisé une
méthode différente pour étudier une famille américaine, présentant de nombreux cas de cancers
du sein et de l'ovaire, chez qui Myriad Genetics n'avait trouvé aucune altération. Par analyse glo-
bale du gène, elle avait montré l'existence d'une grande délétion3 représentant 15 % de BRCA1,
à l'origine de la prédisposition au cancer de cette famille.
         w Pour obtenir les résultats les plus fiables, les généticiens ne peuvent se contenter des
         seules analyses issues du séquençage direct, mais doivent pouvoir effectuer des recher-
         ches complémentaires par des techniques plus globales.
         w La position de monopole de Myriad, qui n'utilise que la technique du séquençage direct
         pour la première recherche de mutation familiale, constituerait donc une entrave sérieuse
         à la qualité des tests puisque 10 à 20 % des mutations ne sont pas détectées.

2. « Identification of a large rearrangement of the BRCA1 gene using colour bar code on combed DNA in anAmerican breast/ovarian cancer

family previously studied by direct sequencing », D. Stoppa-Lyonnet, S. Gad et coll., Journal of Medical Genetics, vol. 38, n°6, pp. 388-391,
juin 2001.
3. Délétion : perte d'un fragment d'ADN, pouvant aller d'une seule paire de bases à un gène ou à une grande portion de chromosome.
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Défendre notre conception de la santé publique
n Le prix des tests : une entrave à la prise en charge
Le test de première recherche de mutation familiale effectué par Myriad est trois fois plus cher
puisqu'il est facturé 2 800 euros aux consultantes, contre un coût estimé de 900 euros dans les labo-
ratoires français (pris en charge par le budget hospitalier).
Ce coût imposé par Myriad Genetics, qui doit amortir ses investissements, constituerait un élément
particulièrement préjudiciable pour les familles à risque.
En 2006, en France, 5 000 tests de prédisposition aux cancers du sein et/ou de l'ovaire sont
réalisés4 (contre 1 500 en 2000). Source : www.e-cancer.fr
La grande majorité des tests est pratiquée par les laboratoires des Centres de Lutte Contre le Cancer
et les laboratoires hospitaliers (voir liste en annexe 7).
Ils ne sont pas pris en charge par l’assurance maladie mais par le budget des structures hospitaliè-
res via une enveloppe budgétaire spécifique (depuis 2002) qui est désormais gérée par l'Institut
National du Cancer.
        w L'augmentation des coûts du dépistage, due au monopole de Myriad, serait donc directe
        ment supportée par les budgets des hôpitaux entraînant un surcoût conséquent pour le
        système social et médical français. En l'état des données épidémiologiques5, cela
        engendrerait en France chaque année une dépense supplémentaire de 6,4 millions
        d'euros et 128 millions à euro et volume constants sur 20 ans pour les seuls tests de
        première recherche de mutation. Une telle simulation pourrait être faite pour l'ensemble des
        pays européens.

n Une logique de marché opposée à notre conception de la médecine
La situation de monopole de Myriad a fait émerger aux Etats-Unis un marché commercial de la géné-
tique tendant à dissocier la réalisation proprement dite des tests de la consultation génétique et du
suivi des personnes à risque.
        w Cette logique se heurte à une conception de la santé publique, en France et
        d'ailleurs majoritairement en Europe, où les pratiques des cliniciens sont en effet
        fondées sur un modèle intégrant recherche biologique, exploration clinique et prise en
        charge des personnes, tenant compte des aspects médicaux et psychologiques du
        diagnostic ainsi que des trajectoires cliniques des personnes à risque et de leur famille.
        w Cette logique, aujourd'hui appliquée aux dépistages génétiques des cancers du sein et
        de l'ovaire, va se développer, du fait de l'évolution de la recherche et de la découverte de nou-
        veaux gènes de prédisposition, dont les brevets ont été délivrés aux Etats-Unis. Ce qui se
        passe sur BRCA1 pourrait concerner d'autres formes de cancers (côlon, pancréas, prostate)
        et d'autres formes de dépistages, comme dans les maladies cardiovasculaires. C'est donc
        bien l'ensemble de l'organisation des tests de dépistage en France qui pourrait être
        touché par une organisation commerciale monopolistique.

4. Sur près de 5 000 tests effectués en France en 2006 : 3 500 premières recherches de mutation et 1 500 tests individuels.
5. On observe 5 à 10 % de formes héréditaires de cancers du sein et de l'ovaire sur les 42 000 nouveaux cas annuels en France.
Le développement et l'organisation de la médecine prédictive conduiront inéluctablement à une augmentation du nombre de tests.
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2      Une forte mobilisation internationale depuis 2001
    Depuis le début de cette démarche, les opposants français ont pu constater une prise de conscience
    forte et croissante de la part des scientifiques et des politiques européens, en particulier belges et
    hollandais, sur ce dossier.
    En octobre 2001, aux côtés de l'Institut Curie, de l'Institut Gustave-Roussy et de l'Assistance-
    Publique-Hôpitaux de Paris, la Société belge de génétique humaine, réunissant les centres belges
    et hollandais de génétique humaine, et les sociétés de génétique allemande, danoise et britannique,
    s'était opposée au 1er brevet de Myriad Genetics sur une argumentation similaire à celle développée
    par l'opposition française.
    Au même moment, le Parlement Européen annonçait dans une résolution son appui à la démarche
    française et invitait « les autres institutions de l'Union européenne et les gouvernements des Etats
    membres à faire de même ».
    En février 2002, trois nouvelles oppositions s'étaient déclarées en particulier les ministères belges
    de la Santé, des Affaires sociales et de la Recherche scientifique, le ministère hollandais de
    la Santé et la Ligue allemande contre le cancer.
    En septembre 2002, contre le 3e brevet, plusieurs oppositions européennes ont été déposées,
    notamment par :

           w Un collectif mené par la Société belge de génétique humaine, réunissant :
           les centres belges de génétique humaine,
           les centres hollandais de génétique humaine,
           la Société de génétique allemande,
           la Société de génétique danoise,
           la Société de génétique tchèque,
           la Société de génétique suisse,
           la Société de génétique autrichienne,
           la Société de génétique italienne,
           la Société de génétique finlandaise,
           la Société de génétique britannique,
           le Centre national de la recherche scientifique grec,
           l'Institut suisse pour la recherche appliquée sur le cancer,
           une association belge de patients,
           une association hollandaise de patients
           w Le ministère de la Santé hollandais
           w Le ministère de la Santé autrichien
           w Le Parti social démocrate suisse
           w Greenpeace

    Au-delà de ces oppositions et du ralliement de la communauté scientifique européenne, c'est une
    véritable mobilisation internationale qui est née depuis octobre 2001. En témoignent la multitude d'ar-
    ticles de presse parus sur ce sujet dans de nombreux pays, ainsi que toutes les interventions scien-
    tifiques, juridiques et politiques programmées dans de nombreux colloques en Europe, prenant l'af-
    faire Myriad Genetics comme illustration exemplaire et représentative des problèmes posés par les
    revendications de certains détenteurs de brevets.
    C'est ainsi que plusieurs pays, comme le Canada ou l'Australie, s'intéressent à l'introduction dans
    leur législation de mesures équivalent au régime des licences d'office (voir infra).
    Ceci tend à montrer que la position française exprimée à l'occasion de ces oppositions, visant à
    contrecarrer les exigences abusives touchant la santé publique, gagne du terrain depuis quelques
    mois au niveau international.
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3      Les avancées réalisées depuis 2001
    Le cadre législatif

    La législation française contient une disposition permettant de soumettre un médicament à une
    licence d'office si les exigences financières du breveté apparaissent contraires à l'intérêt de la santé
    publique. En 2004, cette disposition a été élargie à tous les brevets liés à la santé publique, et notam-
    ment aux méthodes de dépistage génétique.
    L'opposition française aux brevets de Myriad Genetics fait écho aux nombreuses contestations en
    France, en Europe et aux Etats-Unis sur les conséquences d'un monopole sur les tests génétiques.
    De nombreux généticiens considèrent d'ailleurs ce dossier "emblématique d'un abus de droit".
    L'Office Européen des Brevets et les juges vont, de plus en plus, devoir accorder des brevets et
    interpréter les revendications en tenant compte de l'apport inventif réel effectué par le breveté
    à l'état de la technique. Il faut souhaiter qu'il n’accorde plus de brevet reposant essentiellement sur
    l'habilité des rédacteurs alors que l'apport réel et "inventif" ne serait que relativement réduit.
    D'autre part, le risque de constitution de position dominante du fait de revendications larges des
    détenteurs de brevets est considéré comme dangereux pour les progrès de la recherche au
    moment où la connaissance du génome humain doit permettre des avancées majeures, accessibles
    à tous, en biologie, en diagnostic et en thérapeutique.
    L’évolution des positions de l'Office Européen des Brevets
    Les Directives relatives à l'examen et à la délivrance des demandes de brevets pratiqués à l'OEB,
    en vigueur depuis juin 2005, sont utilisées par les examinateurs de l'OEB chargés d'examiner et, le
    cas échéant, de délivrer les brevets européens. Ce document indique qu'une matière biologique iso-
    lée de son environnement naturel ou produite à l'aide d'un procédé technique, même lorsqu'elle
    existe par ailleurs à l'état naturel, peut constituer une invention brevetable. La séquence d'un gène
    n'est pas, par principe, exclue du champ de la brevetabilité car elle est le résultat de procédés tech-
    niques l'ayant identifié. Une demande de brevet portant sur des séquences de gènes doit être ensuite
    soumise aux mêmes critères de brevetabilité que pour tous les autres domaines technologiques : les
    brevets européens sont délivrés pour les inventions nouvelles, impliquant une activité inventive et
    susceptibles d'application industrielle, selon l'Article 52(1) de la Convention sur le Brevet Européen.
    Dans le cas de séquences totales ou partielles de gènes, l'application industrielle de ces séquences
    doit toutefois être concrètement exposée dans la demande de brevet.
    Une décision récente de l'OEB (mai 2005) conclut qu'un produit dont la structure est indiquée (par
    exemple une séquence d'acide nucléique) mais dont la fonction est indéterminée ou mentionnée de
    façon vague peut ne pas remplir le critère d'applicabilité industrielle, et donc ne pas être brevetable.
    Les licences d'office et licences obligatoires
    Pour assurer la meilleure exploitation possible d'un brevet, plusieurs catégories de licences particu-
    lières existent dans la législation française.
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La licence d'office : Acte de la puissance publique, elle permet à l'Etat d'accorder une licence d'ex-
ploitation de brevet lorsque la santé publique le justifie et à défaut d'accord amiable avec le titulaire
du brevet. L'article L. 613-16 du Code de la Propriété Intellectuelle (CPI) prévoit qu'une licence d'of-
fice peut être imposée pour un brevet délivré protégeant un médicament, un dispositif médical de
diagnostic in vitro, un procédé d'obtention de ces produits, une méthode de diagnostic in vivo ou un
produit thérapeutique annexe. Ce régime a été élargi en 2004 par rapport à l'article en vigueur aupa-
ravant qui était restreint aux brevets de médicaments.
La licence obligatoire : elle sanctionne le défaut d'exploitation de l'invention brevetée. A l'expiration
d'un délai de trois ans après la délivrance du brevet, ou quatre ans après le dépôt de la demande de
brevet, si le titulaire du brevet n'a pas commencé à exploiter l'invention, toute personne peut deman-
der auprès du tribunal de grande instance une licence obligatoire du brevet (article L. 613-11 du CPI).
L'établissement de ce régime correspond au fait qu'une telle inaction est contraire à l'intérêt public et
constitue une sorte d'abus de monopole.
La position de l'office américain des brevets (USPTO)
Les directives établies en 2001 requièrent notamment que les inventions brevetables présentent une
utilité spécifique, substantielle et crédible. Une décision américaine datant de 2005 et portant sur la
brevetabilité d'EST (Expressed Sequence Tag, ou séquences d'ADN correspondant à des portions
de gènes) isolées de feuilles de maïs a conclu que ces EST ne procuraient pas de « bénéfice spéci-
fique » dans la forme dans laquelle elles sont décrites et ne répondaient donc pas au critère d'utilité.
Un projet de loi américain
Ce projet de loi, déposé par la députée Lynn Rivers au Congrès américain en mars 2002, prévoyait :
1- une exemption des séquences génétiques pour usage diagnostique, justifiée par le souci que des
médecins ne puissent se voir interdire des pratiques médicales - en 1996, une loi exemptait de pour-
suite pour contrefaçon les chirurgiens qui utiliseraient une procédure brevetée ;
2- une exemption des séquences génétiques à usage de recherche - des enquêtes viennent de révé-
ler aux EU de fortes restrictions rencontrées par les chercheurs pour accéder à des outils et maté-
riels de recherche brevetés ;
3- une dernière disposition prévoit de raccourcir le délai de publication des séquences qui seraient
incluses dans des demandes de brevet déposées aux Etats-Unis. Le délai de publication est actuel-
lement de 18 mois après le dépôt de la demande.
L'exemption de l'usage des séquences à des fins diagnostiques et l'argumentation qui s'y attache -
accessibilité des tests et souci de ne pas restreindre les pratiques médicales - épousent pleinement
l'opposition française et européenne aux brevets détenus par Myriad.
Un rapport publié en 2006 du « Committee on Intellectual Property rights in Genomic and innovation,
National Research Council » recommande de modifier la loi afin de créer une exemption des droits
de brevets pour les recherches sur une invention brevetée dans le domaine des biotechnologies. Il
recommande aussi d'élever le niveau d'exigence pour l'application des critères de brevetabilité d'in-
ventions situées « en amont » dans le domaine des biotechnologies.
Le brevetage des gènes : la fin d'une époque ?
Une étude statistique européenne a été menée sur plus de 15.000 familles de brevets du monde
entier et demandes de brevets déposées entre 1980 et 2003 et revendiquant des séquences totales
ou partielles d'ADN humain. En 2005, environ un tiers seulement de ces familles comprenaient au
moins un brevet délivré en Europe, au Japon, ou aux Etats-Unis.
Le point sur les oppositions françaises auprès de l'Office Européen des Brevets - Contre le monopole sur les tests de prédisposition aux cancers ...
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Parmi ces dernières, la quasi-totalité comprend un brevet délivré par l'office américain, mais seule-
ment environ 10 % un brevet délivré par l'Office japonais ou l'Office européen. Il existe donc de gran-
des disparités entre les Etats-Unis et les autres régions. Par ailleurs, la proportion de brevets accor-
dés par l'Office européen semble fortement diminuer depuis les années 1990, et près de la moitié
des demandes déposées à cette époque ont été abandonnées. Le nombre de demandes de brevets
déposées a fortement diminué depuis 2001, date de la publication de la séquence du génome
humain. Les auteurs concluent de ces chiffres et d'un sondage parmi les principaux déposants de
demandes de brevets que le degré d'exigence des offices de brevets s'est nettement élevé ces der-
nières années.
Hopkins et al, Nature Biotechnology, vol. 25, N°2, Feb. 2007 et projet PATGEN.

L'organisation et le financement de l'oncogénétique en France

Au-delà des aspects éthiques, juridiques et politiques, le dossier Myriad a montré la nécessité de :
       w défendre la spécificité de l'organisation de la génétique médicale française garantissant
       une prise en charge globale de qualité (prescription des analyses, rendu des résultats)
       par des équipes pluridisciplinaires rassemblant des compétences génétiques et cliniques,
       du test diagnostique au suivi spécialisé en cas de haut risque avéré ;
       w mieux répondre aux besoins (au moins 3 000 tests de premières recherches de
       mutation par an) ;
       w améliorer la qualité des tests et de raccourcir les délais.
Dès 2002, un premier soutien financier a été accordé aux laboratoires effectuant des examens
d'oncogénétique moléculaire par le biais d'un appel à projets lancé par le Ministère.
Puis, le développement du diagnostic des prédispositions et le renforcement des consultations d'on-
cogénétique ont été intégrés dans le Plan Cancer élaboré en 2003.
Mesure 22 du Plan Cancer : Conforter l'accès aux tests de prédisposition génétique des cancers du
sein, du cancer du colon et des maladies rares par la mise en place d'un réseau de laboratoires
d'analyse qualifiés.
Mesure 23 du Plan Cancer : Renforcer le réseau des consultations d'oncogénétique afin d'offrir un
accès équitable à l'ensemble de la population.
Depuis 2003, de nouveaux moyens budgétaires, 12 millions d'euros par an, reconductibles ont été
affectés. Source : www.e-cancer.fr

                                         Entre 2003 et 2005
Consultations
       w nombre moyen de consultations pour 100 000 habitants : + 57,5 %
       w nombre de consultations liées aux cancers du sein et de l'ovaire
       (de 6 000 en 2003 à près de 11 000 en 2005) : + 80,7 %

Analyses génétiques
Cas index (première recherche dans la famille)
       w   recherche de mutations ponctuelles pour BRCA1 : + 47,4 % et BRCA2 : + 43,8 %
       w   recherche de mutations de grande taille pour BRCA1 : + 126,6 %

Tests chez les apparentés
       w recherche de mutations ponctuelles pour BRCA1 : + 40,1 % et BRCA2 : + 87,1 %
Le point sur les oppositions françaises auprès de l'Office Européen des Brevets - Contre le monopole sur les tests de prédisposition aux cancers ...
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4       Trois révocations par l'OEB en 2004 et 2005
        suivies de trois recours
    Révocation totale du brevet 1 « Méthode diagnostique d'une prédisposition à un cancer
    du sein ou de l'ovaire associé au gène BRCA1 »
    A l'issue de la procédure orale qui a eu lieu les 17 et 18 mai 2004 à Munich, la division d'opposition de
    l'Office européen des brevets (OEB) a révoqué le brevet européen EP 699 754 détenu par Myriad
    Genetics portant sur des méthodes pour le diagnostic d'une prédisposition à un cancer du sein ou de
    l'ovaire.
    Après avoir rejeté successivement toutes les requêtes présentées par Myriad Genetics, la division d'op-
    position a révoqué ce brevet qui « ne satisfait pas aux exigences de la Convention sur le Brevet
    Européen (CBE) ».
    Dans le cadre d'une procédure orale publique, la division d'opposition de l'OEB a examiné pendant 2
    jours les arguments invoqués en faveur et à l'encontre du brevet litigieux.
    Le grand nombre d'insuffisances mises en évidence, notamment dans la séquence du gène, et l'excès
    de revendications demandées ont conduit la division d'opposition à rejeter le brevet et ses nombreuses
    requêtes auxiliaires pour défaut de clarté et d'inventivité. En effet, dans un contexte de coopération
    scientifique internationale, Myriad Genetics avait déposé seul et précipitamment sa demande de brevet
    en 1994.
    Cette révocation totale est une victoire pour l'Institut Curie, l'AP-HP et l'Institut Gustave-Roussy ainsi que
    les autres opposants européens qui contestent depuis 2001 le monopole imposé par les trop larges
    revendications de Myriad Genetics.

    Révocation partielle du brevet 2 « Mutations du gène BRCA1 liées aux prédispositions
    au cancer du sein ou de l'ovaire »

    A l'issue de la procédure orale qui a eu lieu du 19 au 26 janvier 2005 à Munich, la division d'opposition de
    l'Office Européen des Brevets (OEB) a rejeté l'essentiel des revendications du brevet EP 705 903 litigieux.
    Ce brevet portait initialement sur 34 mutations du gène BRCA1 qui pouvaient chacune être la base d'un
    test de prédisposition aux cancers du sein ou de l'ovaire.
    La requête présentée finalement par les brevetés lors de la procédure d'opposition était limitée à une
    seule mutation : 185delAG, une délétion de deux nucléotides. Il s'agit d'une mutation fréquente, en par-
    ticulier dans la population juive ashkénaze.
    Au cours de la procédure orale, de longues discussions portant sur les dates de priorité dont pouvaient
    bénéficier les séquences de référence ont conduit à limiter considérablement la portée de cette requête.
    Après le rejet de la requête principale, de deux requêtes auxiliaires et la non recevabilité d'une troisième,
    seule une sonde de 15 à 30 nucléotides encadrant la mutation 185delAG fait l'objet du brevet.
    Le brevet obtenu ne limitera pas la recherche de cette mutation puisqu'elle pourra être identifiée avec
    d'autres sondes ne présentant pas les caractéristiques de longueur et de position citées plus haut.
10

Révocation partielle du brevet 3 « Gène BRCA1 de prédisposition au cancer du sein
ou de l'ovaire »

A l'issue de la procédure orale qui a eu lieu du 19 au 26 janvier 2005 à Munich, la division d'opposi-
tion de l'Office Européen des Brevets (OEB) a rejeté l'essentiel des revendications du brevet EP 705
902 litigieux.
Ce brevet revendiquait le gène BRCA1 isolé (molécule chimique), la protéine correspondante et les
applications thérapeutiques envisageables (thérapie génique, criblage de médicaments, animal
transgénique…), ainsi que des kits de diagnostics (utilisation de sondes ou d'amorces spécifiques de
certaines mutations).
La division d'opposition a rejeté la revendication principale portant sur le gène lui-même et l'essentiel
des autres revendications, au titre de la non conformité de la Convention sur le Brevet Européen
(CBE).
Seules ont été accordées des revendications secondaires qui portent sur une sonde d'acide nucléi-
que et des vecteurs comprenant certaines séquences du gène, ce qui est sans incidence sur les acti-
vités diagnostiques.
En conclusion, la portée du brevet EP 705902 ainsi limitée n'est pour l'essentiel plus gênante pour la
mise en œuvre des tests diagnostiques pratiqués dans les institutions et hôpitaux français.

Trois recours auprès de l'OEB en cours d'examen

Les trois révocations prononcées par l'OEB en 2004 et 2005 ont fait l'objet d’appel de la part des
brevetés.
Chaque brevet va être réexaminé par la chambre de recours.
La première procédure d’appel qui a eu lieu du 24 au 27 septembre 2007 concerne le brevet 3 (gène
BRCA1 de prédisposition au cancer du sein ou de l'ovaire). Voir le communiqué de presse du 1er
octobre 2007.
En ce qui concerne les brevet 1 et 2, les dates de procédure ne sont pas fixées à ce jour.
11

Annexe 1     Les dates-clés

      1989              Création du Breast Cancer Linkage Consortium (Consortium internatio-
                        nal sur le cancer du sein), réunissant de nombreux laboratoires de recher-
                        che européens et américains, à l'initiative de Gilbert Lenoir, chercheur
                        français alors au Centre International de Recherche sur le Cancer à Lyon
                        (CIRC).

      1990              Localisation de BRCA1, premier gène de prédisposition aux cancers du
                        sein et de l'ovaire, par une équipe du Consortium, sous la direction de
                        Marie-Claire King..

      1991              Création de Myriad Genetics, société de génomique médicale, par Mark
                        Skolnick, chercheur de l'Université de l'Utah et membre du Consortium.

      1994              Identification du gène BRCA1 par Myriad Genetics qui obtient des bre-
                        vets américains.

      1995              Identification de BRCA2 par des équipes britanniques. Myriad Genetics
                        rachète plus tard la licence exclusive pour BRCA2 à la société américaine
                        OncorMed. Myriad Genetics dépose ses brevets sur BRCA1 en Europe.

      1996              Commercialisation des premiers tests BRCA aux Etats-Unis.

      1998              Myriad Genetics invite les généticiens européens, dont le Dr
                        Dominique Stoppa-Lyonnet (Institut Curie), à Salt Lake City pour visiter ses
                        laboratoires et son « usine à test ». A cette occasion, les dirigeants améri-
                        cains exposent leurs revendications (monopole d'exécution, tarifs des
                        prestations…).

      10 janvier 2001   Délivrance du brevet 1 (EP 699 754) à Myriad Genetics par l'Office
                        européen des brevets. Ce premier brevet couvre toutes les méthodes
                        diagnostiques de prédisposition au cancer du sein ou de l'ovaire à partir de
                        la séquence normale de BRCA1.

      23 mai 2001       Délivrance du brevet 2 (EP 705 903) à Myriad Genetics par l'Office
                        européen des brevets. Ce deuxième brevet concerne le gène BRCA1
                        muté (34 mutations spécifiques) et les méthodes diagnostiques pour
                        détecter ces mutations et ainsi mettre en évidence une prédisposition.

      1er juin 2001     Le Service de Génétique oncologique de l'Institut Curie, dirigé par le
                        Dr Dominique Stoppa-Lyonnet, met en évidence, dans une famille
                        américaine, une altération du gène BRCA1 non détectée par Myriad
                        Genetics. En effet, la méthode industrielle de la société américaine
                        laisse échapper 10 à 20 % des mutations, car elle ne permet pas de
                        détecter les mutations de grande taille.
12

6 septembre - 9 octobre Opposition au brevet 1 (EP 699 754)
2001                    L'Institut Curie déclare son opposition au monopole de Myriad
                        Genetics sur les tests de prédisposition aux cancers du sein et de l'ovaire,
                        en engageant une procédure auprès de l'OEB.
                          Roger-Gérard Schwartzenberg, ministre de la Recherche, et Bernard
                          Kouchner, ministre délégué à la Santé, déclarent leur soutien à l'initia-
                          tive de l'Institut Curie et envisagent d'étendre le régime des licences d'of-
                          fice aux diagnostics génétiques.
                          Le Parlement Européen annonce dans une résolution son appui à la
                          démarche française et « s'associe aux instances qui, comme l'Institut
                          Curie, prévoient d'opposer des objections à la délivrance de ces brevets
                          (…) et invite les autres institutions de l'Union européenne et les gouverne-
                          ments des Etats membres à faire de même ».
                          L'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris et l'Institut Gustave-
                          Roussy s'associent à la procédure d'opposition initiée par l'Institut
                          Curie, qui reçoit par ailleurs le soutien actif de la Fédération Nationale des
                          Centres de Lutte Contre le Cancer et de la Fédération Hospitalière de
                          France.
                          Le mémoire d'opposition français au brevet EP 699 754 est formelle-
                          ment déposé auprès de l'OEB le 9 octobre 2001.
                          Une opposition est également déposée par la Société belge de géné-
                          tique humaine, réunissant les centres belges et hollandais de génétique
                          humaine, et les sociétés de génétique allemande, danoise et britannique, dont
                          les arguments sont similaires à ceux développés par l'opposition française.
28 novembre 2001          Délivrance du brevet 3 (EP 705 902) à Myriad Genetics par l'Office
                          européen des brevets. Ce troisième brevet concerne le gène BRCA1 lui-
                          même et la protéine correspondante. Les revendications générales du bre-
                          vet concernent les applications thérapeutiques du gène BRCA1, applica-
                          tions qui n'existent pas encore (thérapie génique, criblage de médicaments,
                          fabrication de protéines, animal transgénique…) et des kits diagnostiques.
22 février 2002           Opposition au brevet 2 (EP 705 903)
                          L'Institut Curie, l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris et l'Institut
                          Gustave-Roussy, avec le soutien de la Fédération Nationale des Centres
                          de Lutte Contre le Cancer et la Fédération Hospitalière de France, dépo-
                          sent une opposition au brevet EP 705 903 détenu par Myriad Genetics
                          depuis le 23 mai 2001. Ce brevet, comme le précédent, concerne le diag-
                          nostic de prédisposition au cancer du sein ou de l'ovaire. Il porte sur le
                          gène BRCA1 muté (34 mutations spécifiques) et les méthodes de détection
                          de ces mutations.
                          Une opposition européenne est également déposée par les ministères
                          belges de la Santé, des Affaires sociales et de la Recherche scientifique, le
                          ministère hollandais de la Santé, les centres belges et hollandais de géné-
                          tique humaine, ainsi que par la Ligue allemande contre le cancer et
                          Greenpeace Allemagne.
13

Mars 2002              Au Congrès américain, un projet de loi visant à exclure les tests géné-
                       tiques du champ des brevets est déposé par Lynn Rivers, député du
                       Michigan. Il a pour objectif de limiter les revendications des détenteurs de
                       brevets pour réduire les impacts négatifs en médecine et en recherche, et
                       pouvoir mettre ces outils diagnostiques à la disposition de l'ensemble du
                       système de santé.
Juin 2002              Aux Etats-Unis, Myriad Genetics déclenche une polémique en lançant
                       une campagne de publicité directe auprès des femmes en leur recomman-
                       dant de réclamer les tests de prédisposition à leur médecin. En parallèle,
                       Myriad Genetics lance une vaste action auprès de 200 000 médecins
                       généralistes.
27 août 2002           Opposition au brevet 3 (EP 705 902)
                       L'Institut Curie, l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris et l'Institut
                       Gustave-Roussy poursuivent l'action engagée contre Myriad
                       Genetics depuis 12 mois en déposant une opposition au brevet EP
                       705 902, délivré le 28 novembre 2001, avec le soutien de la Fédération
                       Nationale des Centres de Lutte Contre le Cancer et la Fédération
                       Hospitalière de France.
                       Ce troisième brevet, très large, concerne le gène et la protéine, des appli-
                       cations thérapeutiques qui n'existent pas encore et des kits diagnostiques.
                       Une opposition européenne collective est également déposée par la
                       Société belge de génétique humaine, réunissant les centres belges et
                       hollandais de génétique humaine, les sociétés de génétique allemande,
                       danoise, tchèque, suisse, autrichienne, italienne, finlandaise et britannique,
                       le centre national de la recherche scientifique grec, l'institut suisse pour la
                       recherche appliquée sur le cancer, ainsi que deux associations de patients
                       (Belgique et Hollande).
                       Les ministères hollandais et autrichien de la Santé, le Parti social démo-
                       crate suisse, Greenpeance Allemagne et le Dr Wihelms (Allemagne) dépo-
                       sent également un dossier d'opposition à ce 3e brevet.
18 mai 2004            Révocation totale par l'OEB du brevet 1 (EP 699 754) portant sur une
                       méthode diagnostique d'une prédisposition à un cancer du sein ou de
                       l'ovaire associé au gène BRCA1.
Novembre 2004          Myriad Genetics cède toutes ses parts des brevets BRCA1 et BRCA2
                       à l'University of Utah Research Foundation, déjà copropriétaire des bre-
                       vets sur BRCA1. Désormais, Myriad Genetics n'est donc plus propriétaire
                       desdits brevets, mais détient des licences d'exploitation exclusives.
20 janvier 2005        Révocation partielle par l'OEB du brevet 2 (EP 705 903) portant sur des
                       mutations du gène BRCA1 liées aux prédispositions au cancer du sein ou
                       de l'ovaire.
                       Révocation partielle par l'OEB du brevet 3 (EP 705 902) portant sur le
                       gène BRCA1 de prédisposition au cancer du sein ou de l'ovaire.
23-27 septembre 2007   Procédure orale à l'OEB dans le cadre de l’appel déposé par Myriad
                       Genetics/Université de l’Utah sur le brevet 3 (EP 705 902).
14

Annexe 2   Les 3 brevets de Myriad Genetics

     u Brevet EP 699 754
     Méthode diagnostique d'une prédisposition à un cancer du sein ou de
     l'ovaire associé au gène BRCA1
     Basé sur la comparaison d'une séquence de référence du gène BRCA1 avec une séquence
     de patient, il couvre toutes les techniques de diagnostic sans restriction.
     10 janvier 2001 : délivrance du brevet par l'OEB
     9 octobre 2001 : opposition française et européenne
     18 mai 2004 : révocation totale du brevet par l'OEB
     procédure de recours en cours

     Opposants      w Institut Curie, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris et Institut Gustave-
                    Roussy soutenus par la Fédération Nationale des Centres de Lutte Contre le Cancer
                    et la Fédération Hospitalière de France, les ministères français de la Santé et de la
                    Recherche, le Parlement européen.
                    w Société belge de génétique humaine, réunissant les centres belges et hollandais
                    de génétique humaine, et les sociétés de génétique allemande, danoise et britannique.
     Axes           Le défaut de priorité et l'absence de nouveauté
     d’opposition   Le gène BRCA1 et la protéine sont définis par leurs séquences qui sont erronées
                    dans les premières demandes de brevet américaines (priorités) déposées par Myriad,
                    en 1994. Par conséquent, les séquences de référence ne sont plus celles de septem-
                    bre 1994 mais celles de mars 1995. A la date réelle de priorité dont peut bénéficier le
                    breveté (mars 1995), le gène BRCA1 ayant été isolé et sa séquence complète correcte
                    étant disponible dans les bases de données scientifiques, il y a absence de nouveauté.
                    Le défaut d'activité inventive
                    Si Myriad Genetics a gagné, en 1994, la dernière étape de la course au gène BRCA1,
                    il faut rappeler qu'entre 1990 et 1994 c'est le consortium public international qui a
                    localisé finement ce gène et a fourni un grand nombre d'informations sur celui-ci et
                    sur son intérêt dans la détection des prédispositions aux cancers du sein et de
                    l'ovaire. Restait à effectuer le séquençage final, une opération technologique dont les
                    résultats ne peuvent au mieux que faire l'objet d'un brevet limité.
                    L'insuffisance de description
                    La séquence protéique qui a servi de base au premier brevet de Myriad Genetics sur
                    les méthodes diagnostiques s'avère en soi insuffisante pour réaliser un test de prédis-
                    position, puisque ce test est basé sur la comparaison d'une séquence génétique de
                    référence (normale) avec la séquence génétique d'une personne à risque (porteuse
                    d'une mutation).

     Motifs de la   Le grand nombre d'insuffisances mises en évidence, notamment dans la
     révocation     séquence du gène, et l'excès de monopole demandé ont conduit la division d'opposi-
     totale         tion à rejeter totalement le brevet et ses nombreuses requêtes auxiliaires pour défaut
                    de clarté et d'inventivité.
15

v Brevet EP 705 903
Mutations du gène BRCA1 liées aux prédispositions au cancer du sein
ou de l'ovaire
Concerne le gène BRCA1 muté (34 mutations spécifiques) et les méthodes diagnostiques
pour détecter ces mutations et ainsi mettre en évidence une prédisposition au cancer du sein
et/ou de l'ovaire.
23 mai 2001 : délivrance du brevet par l'OEB
22 février 2002 : opposition française et européenne
20 janvier 2005 : révocation partielle du brevet par l'OEB
procédure de recours en cours

Opposants      w Institut Curie, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris et Institut Gustave-
               Roussy soutenus par la Fédération Nationale des Centres de Lutte Contre le Cancer
               et la Fédération Hospitalière de France
               w Ministères belges de la Santé, des Affaires sociales et de la Recherche scientifi-
               que, ministère de la Santé hollandais, centres belges et hollandais de génétique
               humaine, Ligue allemande contre le cancer et Greenpeace Allemagne.
Axes           Le défaut d'activité inventive
d’opposition   D'une part, l'homme du métier avait toutes les connaissances nécessaires pour isoler
               le gène BRCA1 et, d'autre part, une fois connue la séquence du gène BRCA1, le fait
               de rechercher des mutations dans la séquence de ce gène chez des patients avec
               des méthodes basiques ne présente aucune activité inventive.
               Le défaut d'application industrielle
               Les gènes BRCA1 mutés n'ont aucune application industrielle clairement exposée.

Motifs de la   Si ce brevet portait initialement sur 34 mutations du gène BRCA1, pouvant chacune
révocation     être la base d'un test de prédisposition aux cancers du sein et de l'ovaire, la requête
partielle      présentée finalement par les brevetés lors de la procédure d'opposition était
               limitée à une seule mutation : 185delAG, une délétion de deux nucléotides. Il
               s'agit d'une mutation fréquente, en particulier dans la population juive ashkénaze.
               Au cours de la procédure orale, de longues discussions portant sur les dates de prio-
               rité dont pouvaient bénéficier les séquences de référence ont conduit à limiter consi-
               dérablement la portée de cette requête.
               Après le rejet de la requête principale, de deux requêtes auxiliaires et la non receva-
               bilité d'une troisième, seule une sonde de 15 à 30 nucléotides encadrant la muta-
               tion 185delAG fait l'objet du brevet.
               Le brevet obtenu ne limitera pas la recherche de cette mutation puisqu'elle pourra être
               identifiée avec d'autres sondes ne présentant pas les caractéristiques de longueur et
               de position citées plus haut.
16

w Brevet EP 705 902
Gène BRCA1 de prédisposition au cancer du sein ou de l'ovaire
Protection du gène isolé en tant que tel (molécule chimique), de la protéine correspondante,
ainsi que des applications thérapeutiques envisageables (thérapie génique, criblage de médi-
caments, animal transgénique…) et des kits de diagnostics, présentant ici une portée assez
limitée (utilisation de sondes ou d'amorces spécifiques de certaines mutations) mais poten-
tiellement bloquante pour la réalisation des tests.
28   novembre 2001 : délivrance du brevet par l'OEB
27   août 2002 : opposition française et européenne
20   janvier 2005 : révocation partielle du brevet par l'OEB
24   au 27 septembre 2007 : procédure orale dans le cadre du recours

Opposants      w Institut Curie, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris et Institut Gustave-
               Roussy soutenus par la Fédération Nationale des Centres de Lutte Contre le Cancer
               et la Fédération Hospitalière de France
               w Société belge de génétique humaine, réunissant les centres belges et hollandais
               de génétique humaine, les sociétés de génétique allemande, danoise, tchèque,
               suisse, autrichienne, italienne, finlandaise et britannique, le Centre national de la
               recherche scientifique grec, l'Institut suisse pour la recherche appliquée sur le cancer,
               ainsi que deux associations de patients (Belgique et Hollande)
               w Ministère de la Santé hollandais, ministère de la Santé autrichien, Parti social démo-
               crate suisse, Greenpeance Allemagne, Dr Wihelms (Allemagne)

Axes           Le défaut de priorité et l'absence de nouveauté
d’opposition   Le gène BRCA1 et la protéine sont définis par leurs séquences qui sont erronées
               dans les premières demandes de brevet américaines (priorités) déposées par Myriad,
               en 1994. Elles ne correspondent pas au gène concerné par ce brevet et ne sont donc
               pas valables. Par conséquent, les séquences de référence ne sont plus celles de sep-
               tembre 1994 mais celles de mars 1995. Or, à cette date, le gène ayant été isolé et sa
               séquence correcte étant disponible dans les bases de données, il y a absence de
               nouveauté.
               Le défaut d'activité inventive
               Il était possible d'isoler le gène avec les éléments déjà connus à la date de dépôt du
               brevet.
               L'insuffisance de description
               Les applications thérapeutiques et notamment les méthodes de thérapie génique ne
               sont pas décrites dans le brevet.
Motifs de la   La division d'opposition a rejeté la revendication principale portant sur le gène
révocation     lui-même et l'essentiel des autres revendications, au titre de la non conformité de
partielle      la Convention sur le Brevet Européen (CBE).
               Seules ont été accordées des revendications secondaires qui portent sur une sonde
               d'acide nucléique et des vecteurs comprenant certaines séquences du gène. La por-
               tée du brevet EP 705902 ainsi limitée n'est pour l'essentiel plus gênante pour la mise
               en œuvre des tests diagnostiques pratiqués dans nos institutions.
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