N 1 - Les Cahiers du Tourisme - Commissariat général au tourisme
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Les Cahiers du Tourisme Commissariat général N°1 au Tourisme Novembre 2010 Les Cahiers du Tourisme | Commissariat général au Tourisme | Novembre 2010 Les Cahiers du Tourisme Commissariat général au Tourisme N°1 | Novembre 2010 http://strategie.tourismewallonie.be 1
N°1 2 51 La conception des politiques touristiques dans les pays francophones européens et leur mise en œuvre au niveau régional/local formations Tourisme et Internet, Au Centre de Compétences Tourisme, à Marche-en-Famenne. Parmi une série de formations dans les technologies nouvelles, le centre de formation Technofutur TIC, à Gosselies, propose une série de nouvelles sessions d’une journée intéressant le monde du tourisme : E-tourisme : Site, Marketing et Stratégie – les clés du succès ! | Les opportunités du Web 2.0 dans le tourisme | Mise en œuvre et animation d’un portail territorial de promotion touristique | Vendre en ligne des prestations touristiques : quelles solutions à quel coût ? http://www.technofuturtic.be - http://www.formations-tourisme.be Les 29-30 novembre Professionnaliser l’accès des personnes handicapées dans un musée, A l’Hôpital Notre Dame à la Rose de Lessines. et le 7 décembre Vous êtes-vous déjà demandé s’il valait mieux s’asseoir ou rester debout pour s’adresser à une personne en chaise roulante ? S’il fallait prendre le bras d’une personne aveugle pour lui indiquer la direction ? S’il fallait articuler très fort face à une personne sourde ? Et de manière plus générale comment se comporter face à des personnes âgées et/ou porteuses d’un handicap ? Cette formation vise à accroître l’accessibilité comportementale des personnes mal ou non voyantes, sourdes ou malentendantes, handicapées moteur, handicapées mentales par la formation du personnel d’accueil. http://www.repere.be/msw/images/pdf/PRESENTATION%20PMR.pdf Les 13 et 14 décembre Investir en tourisme d’affaires en Wallonie. Une formation pour mieux appréhender les réalités et attentes de ce type de clientèle, d’effectuer les bons choix en matière de développement commercial et de travailler de manière professionnelle avec le secteur “ MICE ”. Les 1er, 8 et 15 décembre Démarche qualité TFE. Dans le prolongement de l’Atelier thématique “ Enseignement ” (mai 2008) et des “ Rencontres ” (novembre 2009) organisés par le Centre de compétence Tourisme, cet atelier a pour but d’aborder les questions plus spécifiques du TFE et du stage en vue de répondre aux exigences de cette démarche et d’optimiser les liens avec les acteurs des secteurs touristiques en informant ou formant les maîtres de stages et de permettre aux enseignants d’être en contact étroit avec le terrain. Le calendrier et la présentation de toutes les formations organisées par le CdC Tourisme est disponible à l’adresse www.formation-tourisme.be et sur http://cms.horus.be/files en 2011 Les 20 et 21 janvier Nouveaux musées, nouvelles ères urbaines, nouvelles mobilités touristiques, Société de Géographie, Paris. Colloque organisé par l’EIREST et la Chaire UNESCO Culture, Tourisme, Développement. L’objectif est d’étudier cette relation complexe entre musées, tourisme, et villes, selon les “ modèles ” de musées, les contextes, et les époques. Il s’agira, d’une part, de voir ce que le musée doit au tourisme et d’autre part, comment l’analyse du lieu spécifique qu’est le musée permet d’apporter un éclairage sur le tourisme et les pratiques touristiques. http://www.univ-paris1.fr/colloques/musee-tourisme/ | Agenda
3 Table des matières ditorial (M. J.-P. Lambot) É La conception des politiques touristiques dans les pays francophones européens et leur mise en œuvre au niveau régional/local 4 Trois pays, trois politiques touristiques Article introductif (M. J. Dagnies) 6 Table ronde (M. A. Schoon, Belgique | M. V. Vles , France | M. P. Keller, Suisse) 11 omment s’expriment les différentes politiques touristiques des pays d’Europe ? Quels moyens pour quelles C priorités ? Quels outils de planification ? Quels niveaux de pouvoir ? Analyse de la situation dans quelques pays à l’heure où le tourisme vient de devenir une compétence européenne. Le Centre d’Ingénierie touristique de Wallonie (M. J. Clossen, Directeur CITW)24 Le CTIW constitue un des éléments fondamentaux du réseau “stratégie” mis en place par le Commissariat géné- ral au Tourisme pour le développement du capital humain dans le secteur touristique public comme privé. Il met à sa disposition les outils techniques, le savoir-faire et l’ingénierie nécessaires au soutien de la compétitivité du tourisme wallon dans une perspective durable. Le Plan Qualité de la Fédération touristique suisse, adopté au Luxembourg (Mme. C. Beck, Fédération touristique Suisse, M. P. Barthelmé Grand-Duché du Luxembourg) 29 Les grandes orientations de la politique touristique d’un pays sont parfois initiées au niveau local, par ceux qui “vivent” le tourisme sur le terrain. Exemple d’un modèle bottom-up réussi : la démarche qualité Suisse. Le programme “Qualité Suisse” a fait ses preuves en 10 ans d’existence, le Luxembourg, parmi d’autres pays, en a acquis le niveau 2 en 2008 : chronique d’une expérience. Traité de Lisbonne, Déclaration de Madrid : une politique européenne du tourisme (Mlle I.G. Aluas et Mlle T.A. Galluci, pour la Commission européenne, DG Entreprises et industrie, Unité Tourisme | Mme S. Carvao, Communication Manager, OMT). 34 Depuis l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne fin 2009, le tourisme est inscrit en tant que nouveau secteur prioritaire de la politique européenne. Il figure en effet parmi les activités économiques les mieux à même de générer la croissance et l’emploi dans l’UE. A la rencontre de la Communauté germanophone (M. R. Langela) 40 Cette rubrique se veut être une ouverture, un moment de rencontre avec d’autres régions, d’autres personnes,…. Pour cette première édition, c’est la Communauté germanophone qui nous accueille. Les atouts de la Wallonie vus par les associations professionnelles du Tourisme 42 En quelques lignes, sept associations professionnelles nous font partager l’enthousiasme des acteurs de terrain pour leurs formules d’hébergement et d’activités sportives ou culturelles. Actualités 45 Publications 46 Agenda 50 | Table des matières
Les Cahiers du Tourisme Commissariat N°1 général au Tourisme Novembre 2010 Éditorial La conception des politiques touristiques dans les pays francophones européens et leur mise en œuvre au niveau régional/local Le tourisme est-il une science ? C’est une question qu’on peut légitimement se poser à l’occasion du lancement des Cahiers du Tourisme. D’aucuns le pensent. Ils en sont tellement persuadés qu’ils ont même forgé un néologisme : la tourismologie. C’est peut-être aller un peu loin, ou un peu vite, même si cette démarche n’est pas sans fondement. Tout d’abord, parce que le tourisme est une chose importante, eu égard au chiffre d’affaires et à l’emploi qu’il génère. Ensuite, parce qu’il est une chose sérieuse, qui ne laisse aucune place à l’improvisation ou à l’amateurisme ; tout, ici, doit faire preuve de professionnalisme. Enfin, parce que, s’il n’est sans doute pas lui-même une science, il n’en demeure pas moins qu’il recourt constamment à des disciplines scientifiques. Ces disciplines sont diverses et nombreuses : elles vont du droit à l’économétrie, ou de la géographie à la sociologie, en passant par les statistiques et les sciences du comportement. Le recours à ces disciplines poursuit un unique objectif : le déve- loppement touristique, lequel consiste dans le plus grand contentement du touriste ainsi que dans la plus grande satisfaction de l’opérateur touristique. Le premier - le Les Cahiers du Tourisme touriste -, c’est la demande ; le second - l’opérateur touristique -, c’est l’offre. Le Revue professionnelle éditée par tourisme, assisté des sciences auxquelles il fait appel, se trouve ainsi en plein dans le Commissariat général au Tourisme la loi de l’offre et de la demande. Éditeur Responsable : Mais ce serait avoir une vision fort limitée, voire aberrante, de ce qu’est la complexité Jean-Pierre Lambot, du tourisme, si on se contentait de ces seules approches scientifiques. Nombre de Commissaire général au Tourisme professionnels expliqueront que c’est aussi – sinon davantage – un art, une sensibilité, 74, avenue Gouverneur Bovesse voire une intuition. Pour une bonne part, le succès de l’activité touristique se niche 5100 Jambes au creux des relations humaines. Mais l’hospitalité aussi s’apprend : ce peut être un don, mais c’est surtout un savoir à transmettre. Même les stratégies d’accueil ne Comité de rédaction : sont pas insensibles à l’apport des sciences. Claude Boumal, Vanessa Grandgagnage, Jean-Pierre Lambot, Alexandra Neufcoeur, Cependant, ce serait encore avoir une vision limitée du tourisme que penser en avoir Luc Vandendriessche. fait le tour en y ayant introduit une dose de subjectivité. Car, comme on le sait bien, le tourisme est aussi un humanisme, parce que, par essence, il conduit à la rencontre Contact : de l’autre : d’autres gens, d’autres pays, d’autres mœurs, d’autres civilisations Cahiers@tourismewallonie.be ou sociétés. Toutefois, la véritable communion avec autrui est inséparable d’une découverte s’alliant à la connaissance. Le tourisme conçu comme humanisme est Graphisme et mise en page : donc également au cœur d’un savoir. Globule Bleu, Embourg Impression : Imprimerie Massoz - Liège Par respect pour l’environnement, imprimé sur papier recyclé “Cyclus print”
5 S’il n’est pas une science stricto sensu, le tourisme en est ainsi clairement indis- loisirs, dans laquelle sont amenés à se côtoyer chasseurs et promeneurs, sociable. Du moins est-ce la manière dont le perçoivent les présents Cahiers. Dès cavaliers et piétons, conducteurs de 4x4 et amateurs de quiétude. lors, ils ont une ambition scientifique, du moins dans la démarche. A tout le moins pourrait-on prétendre être une publication d’érudition touristique. Le Commissariat S’il apparaît ainsi que le tourisme est bien complexe, il s’avère encore plus déroutant général au Tourisme pense qu’il y a là un créneau à occuper, d’autant plus que, durant lorsqu’il s’aventure aux confins de la futurologie. Je veux parler ici de la prospective ces dernières décennies, la Wallonie a affirmé sa vocation touristique et en a reconnu touristique et de son arme de choc qu’est la planification. Le problème est simple : toute l’importance économique. Par ailleurs, des investissements publics et privés déjà il s’agit de répondre à la question : qu’est-ce que sera le tourisme demain ?, et conséquents ont été confortés par l’obtention de fonds européens non négligeables. accessoirement : dans quelle mesure peut-on influer sur son cours ? Pour tenter Il est alors normal qu’on veuille gérer le secteur avec toute la réflexion nécessaire. de répondre à ce double questionnement, se mettent en œuvre toutes les disciplines scientifiques et toutes les potentialités technologiques. Car il s’agit d’abord de bien Ceci étant, il serait peu opportun de se réfugier dans une pure théorisation. L’approche appréhender la situation existante. Et rien n’est plus compliqué que d’opérer un scientifique du tourisme ne doit pas perdre de vue qu’elle porte sur des réalités socio- bon survey touristique, tant la réalité est protéiforme. Les “ entrées ”, les “ séjours ” économiques bien concrètes. On le rappelle : les disciplines scientifiques et les moyens et les “ nuitées ” ne donnent qu’une information bien insatisfaisante. Le débat sur techniques auxquels elles recourent, doivent viser cet objectif qu’est le développe- les “ comptes satellites du tourisme ” a suffisamment montré l’extrême difficulté à ment touristique. Or, dans des régions comme la Wallonie - qui malheureusement cerner l’activité touristique. ne possède ni plages où bronzer ni montagnes où skier -, en la matière, rien n’est jamais acquis. L’innovation et l’excellence sont donc des conditions absolues à tout A toutes ces thématiques, Les Cahiers du Tourisme ne pourront pas se montrer progrès dans le secteur. On peut même dire que sans elles il n’y a pas de maintien insensibles. En effet, s’il y a bien un domaine où il faut toujours avoir une longueur possible du niveau d’activité touristique. Mais l’innovation et l’excellence (auxquelles d’avance, c’est le développement touristique. En effet, comme on l’a vu, pour une j’associe tout ce qui relève de la politique de la qualité) ne se décrètent pas. Elles région qui ne possède ni littoral ni montagne, se trouver en permanence à l’affût de supposent un long travail en profondeur, qui allie la force de persuasion à la mise l’innovation et de l’excellence, de la qualité et de l’originalité, est cela seul qui consti- en œuvre de savoirs et de technologies. De beaux exemples nous en sont donnés tue l’ “ avantage concurrentiel ”. Il y va donc sans cesse de créativité et de réflexion par le développement des techniques d’interprétation dans les musées ou par la sur cette créativité. L’une et l’autre constitueront les domaines d’investigation des diversification des modes d’hébergement. A cela s’ajoutent la prise de conscience de Cahiers. Ils apporteront ainsi leur pierre à l’édifice touristique. l’importance de l’environnement pour le tourisme ainsi que l’introduction du concept de durabilité tant en matière de gestion que d’investissements. Enfin, comme il se doit en toutes sciences (qui se caractérisent normalement par leur universalité), le lecteur trouvera ici une ouverture sur les autres pays ou régions. Les Cahiers du Tourisme sont donc pleinement conscients de toutes ces Certes, Les Cahiers du Tourisme émanent de Wallonie, mais ils seront volontiers exigences, qui s’avèrent parfois contradictoires. En effet, les intérêts de tel comparatistes, qu’il s’agisse d’idées ou d’expériences. Ce serait vraiment un comble opérateur ne sont pas nécessairement compatibles avec ceux de tel autre. De que, dans le domaine du tourisme, on n’aille pas à la rencontre des autres. même, les attentes des touristes ne sont pas toutes semblables. Il en résulte que ce serait faire preuve d’une grande naïveté que de croire que le tourisme est univoque. Au contraire, il s’agit là d’une mosaïque, et dès lors les regards qu’on doit poser sont multiples et parfois antagonistes. Un des exemples les Jean-Pierre Lambot plus traditionnels de ces paradoxes nous est donné par l’usage de la forêt des Commissaire général au Tourisme.
7 Introduction Depuis plusieurs années, la façon de gouverner le tourisme s’est transformée au sein de nombreux pays de l’OCDE. Plusieurs changements majeurs peuvent ainsi être énumérés comme, par exemple, le fait que les secteurs privés et associatifs participent de plus en plus à la conception et à la mise en œuvre des politiques. Les décisions sont aussi davantage orientées vers les résultats et la performance, d’où la nécessité d’évaluer les impacts des actions menées. La qualité et le développement durable sont également deux thématiques qui occupent une place croissante dans les stratégies formulées par les autorités publiques. Une dernière transformation concerne la multiplication des niveaux institutionnels s’affirmant comme responsables du devenir touristique de leur territoire, et ce pour toutes les missions relevant du management public du tourisme, c’est-à-dire le développement, la promotion et la régulation. Alors qu’auparavant, les niveaux infra- nationaux assumaient essentiellement un rôle opérationnel de la politique nationale, aujourd’hui, leur marge de manœuvre et leur esprit d’initiative ont pris le pas sur cette fonction exécutoire. Le dynamisme des pouvoirs locaux, des départements, des provinces ou encore des régions vient en effet véritablement concurrencer les programmes nationaux habituellement mis en œuvre. A cela, il faut encore ajouter la formation d’organismes intercommunaux (pays touristiques, intercommunales de développement économique, agglomérations…), fruit d’un partenariat entre pouvoirs locaux et dont le but consiste à atteindre une taille critique en termes d’offre touristique et de moyens de promotion. Enfin, certaines nations comme la Belgique ou la Suisse vont très loin dans l’autonomie accordée aux entités fédérées (communautés, régions ou cantons) puisque ceux-ci sont dotés de compétences et © VCO d’une liberté d’action proches d’un véritable Etat. Pour simplifier les choses, nous pouvons Tout cela fait du tourisme un secteur dif- si, en bas, les actions de communications Si les transformations et les mor- actuellement distinguer trois catégo- ficile à gouverner, car quel que soit leur et les investissements partent dans tous cellements compliquent la tâche des ries d’acteurs associés aux politiques échelon territorial, les pouvoirs publics, les sens. Poussé à l’extrême, ce type de institutions publiques, rien n’est perdu touristiques : les opérateurs privés doivent faire face simultanément à trois fragmentation peut mener à un véritable d’avance ! Ces morcellements ont aussi (entreprises, associations…), le pouvoir phénomènes de morcellement. Il y a tout saupoudrage des moyens publics, avec des effets bénéfiques sur le tourisme. Ils central (entité nationale et/ou fédérée) d’abord le morcellement vertical, que nous comme résultat une inefficacité des poli- permettent notamment à de nombreux et les pouvoirs locaux. Entre ces trois venons de présenter, et qui peut aboutir à tiques locales de promotion et de déve- opérateurs publics de s’affranchir de la points peuvent intervenir des acteurs une véritable cacophonie dans la promotion loppement. Il est donc indispensable que hiérarchie et de libérer leur créativité, de intermédiaires (régions françaises, assurée par chaque couche institutionnelle. la fragmentation horizontale soit à la fois se spécialiser dans un métier particulier provinces, départements, groupe- Si les poupées russes ne sont pas bien encadrée par le haut (réglementation, sé- ou certaines missions de service public ments de communes, fédérations emboîtées les unes dans les autres, chaque lectivité, stratégie commune…) et jugulée ou encore de mobiliser les énergies au- professionnelles…). Enfin, au dessus action promotionnelle vient brouiller celle par le bas (dynamiques de regroupement tour d’un territoire en compétition avec du niveau national, les organisations du niveau supérieur ou inférieur. de communes). d’autres. Tout cela crée de la valeur ajou- internationales (Union européenne, tée ! Il faut donc trouver le bon équilibre, OCDE, Organisation mondiale du Le morcellement horizontal reflète la Enfin, le morcellement transversal cor- “ l’optimum ”, entre une intégration totale tourisme) analysent l’industrie tou- concurrence qui peut persister entre des- respond à l’étendue des métiers (hé- et un morcellement extrême. ristique et les politiques menées à tinations de taille comparable issues d’un bergement, restauration, commerces, l’intérieur des États afin de diffuser même territoire national ou régional. C’est accueil et information…) et des politiques D’où la nécessité d’ouvrir le débat sur la des diagnostics et des recommanda- le cas, par exemple, de Liège, Namur, (aménagement du territoire, transport, manière dont il est possible d’optimiser la tions qui peuvent intéresser n’importe Charleroi, Mons et Tournai, des villes d’art formation…) directement ou indirecte- contribution de chaque échelon territorial quel échelon territorial. Elles jouent et d’histoire wallonnes qui captent leurs ment concernés par le tourisme. Une à la performance globale d’un État ou également un rôle central dans la clientèles sur des marchés forts sem- approche coordonnée ou intégrée des d’une entité fédérée comme la Wallonie, création et l’harmonisation de normes blables. D’une manière ou d’une autre, politiques est alors préconisée, à chaque en fonction de leurs compétences, de internationales. Enfin, dans le cadre elles entrent donc en compétition, malgré niveau de pouvoir. La mise en réseau leurs spécificités, de leurs forces et de des fonds structurels, l’Union euro- leur volonté de coopérer sur plusieurs des opérateurs publics et privés permet leurs faiblesses. Inversement, comment péenne intervient financièrement dans plans. Le morcellement horizontal peut également de renforcer la cohérence des un pouvoir central peut-il intelligemment de nombreux projets d’investissement perturber la cohérence de l’image et le actions et les synergies entre acteurs. aider les pouvoirs locaux à améliorer touristiques. positionnement d’un pays ou d’une région leurs résultats ? | Trois pays, trois politiques touristiques
8 Ce premier Cahier du tourisme se penche donc sur le flanc droit du triangle. Quatre experts confrontent leur réflexions sur nisations internationales Orga les rôles que jouent et que devraient jouer respectivement le pouvoir central, les intermédiaires et les pouvoirs locaux. Ils Pouvoir central décrivent également les relations mon- tantes (bottom-up) et descendantes (top- down) qui se concrétisent entre les deux Fédérations Régions et Communautés belges extrêmes et cherchent à savoir comment Associations professionnelles Cantons suisses, optimiser celles-ci. Leur analyse se fonde Länders, ... sur l’observation des politiques mises Réseaux d’opérateurs Régions et départements français, en œuvre depuis plusieurs années en provinces belges... France, en Suisse et en Belgique, soit trois pays qui se différencient tant par Groupement de communes leur taille que par leur système insti- tutionnel. Opérateurs privés Pouvoirs locaux Organismes touristiques locaux (S.I., O.T. ...) Avant de leur donner la parole, nous évo- En effet, les autorités publiques doivent faire prendre la mayonnaise avec les “ Il est nécessaire d’ou- quons de manière très générale com- tout d’abord accompagner le processus nombreux ingrédients que comprend vrir le débat sur la ma- ment le pouvoir central et les pouvoirs de production de l’offre touristique du un territoire. En fait, l’enjeu consiste à intermédiaires et locaux sont capables territoire. Plus concrètement, il s’agit concevoir et développer un ensemble nière dont il est possible d’intervenir ou collaborer judicieuse- de favoriser l’innovation et le déve- cohérent de produits et services sus- d’optimiser la contribu- ment. Dans quelle mesure et sous loppement de nouveaux produits, les ceptibles de répondre aux attentes, aux tion de chaque échelon quelles conditions chaque échelon terri- investissements extérieurs ou encore envies, aux préférences de certaines territorial à la perfor- torial peut-il agir sur l’un des trois grands l’entrepreneuriat touristique. Les res- catégories de visiteurs afin de les sé- problèmes touristiques ? Qui doivent-ils ponsables politiques et l’administration duire et qu’ils passent un bon moment mance globale d’un État impliquer dans la conception des poli- doivent également veiller au respect des lors de leur séjour sur le territoire. Pour ou d’une entité fédérée tiques et dans leur mise en œuvre ? Quels réglementations en vigueur (sécurité- les attirer et les satisfaire, la destination comme la Wallonie, en instruments utiliser ? incendie, reconnaissance et classe- doit en effet bénéficier d’un avantage fonction de leurs com- ment,…) tout comme à l’amélioration de comparatif sur la concurrence (présence pétences, de leurs spé- Pour rappel, qu’ils se situent à un ni- la qualité des biens et services existants. de sites et d’attractions exceptionnels, veau central, intermédiaire ou local, les Ils sont aussi amenés à mettre en place d’hébergements, de services et de faci- cificités, de leurs forces pouvoirs publics ont un rôle clé à jouer des infrastructures et des équipements lités adaptés aux clientèles ciblées, bon et de leurs faiblesses. ” dans le développement, la promotion et (énergie, transport…) nécessaires au rapport qualité/prix). la régulation des activités touristiques bon fonctionnement des activités touris- situées sur leur territoire, soit les trois tiques ainsi qu’à aménager les espaces La mise sur le marché et la communi- problèmes publics essentiels auxquels publics pour les rendre plus agréables et cation constituent le deuxième enjeu les destinations sont confrontées dans pratiques. Enfin, il faut “ maillager ” l’en- crucial. Une destination bénéficiant de leur cycle de vie. semble du système, en d’autres termes, très bons atouts n’attirera pas plus de © SPW • Jean-Louis Carpentier - 1428 Les Cahiers du Tourisme | N°1
9 © VCO des desiderata de visiteurs extérieurs. un grand consommateur/transformateur nationales demeurent l’échelle la plus “ Les pouvoirs publics Toute politique vise avant tout à maintenir d’espaces, les communautés d’accueil pertinente pour de nombreux touristes ont un rôle clé à jouer et améliorer la situation des citoyens. sont particulièrement sensibles aux internationaux. Les niveaux intermé- Voilà pourquoi nous évoquons comme nouveaux aménagements touristiques. diaires cherchent à mettre les acteurs dans le développement, troisième problème essentiel la question Le citoyen peut enfin participer, en tant en réseaux, en essayant de jouer sur leur la promotion et la régu- de la régulation des effets économiques, que partenaire ou public-cible, au déve- ancrage et leur attachement au territoire. lation des activités tou- sociaux et environnementaux du tou- loppement touristique et à la réussite En atteignant une taille critique, ils per- risme sur les territoires et communau- des actions menées par les pouvoirs mettent à l’ensemble de leurs membres ristiques situées sur leur tés d’accueil : création d’entreprises, de publics. Il convient alors, pour ces der- d’engager des projets de développement territoire ” richesses et d’emplois, conditions de niers, de convaincre les opérateurs privés de plus grande envergure (investisse- travail, cadre de vie, maintien de services ou encore les employés d’organismes ments, aménagements, formations…) dont les populations locales sont bénéfi- publics touristiques qu’ils ont tout intérêt ainsi que des actions de promotion touristes si elle n’est pas vendue, peu ciaires, nuisances sonores et visuelles, à adhérer à certains projets ou à adopter ambitieuses qui valorisent l’identité et connue ou mal perçue auprès du mar- accumulation des déchets, congestion du des comportements définis et ce, dans un l’image de marque du territoire. Enfin, ché. Les institutions politico-adminis- trafic routier, pression foncière, crimina- climat de confiance et de respect mutuel. les pouvoirs locaux mettent en place tratives sont donc amenées à vendre la lité, dégradation du patrimoine culturel leurs propres mesures de développe- destination lors de salons ou auprès de ou naturel, etc. Ces effets sont nombreux, Néanmoins, la priorité accordée à cha- ment ou de promotion, dans les limites prescripteurs (agences de voyage, tour- complexes et parfois visibles trop tardi- cun des trois problèmes peut varier de leurs budgets. Ce niveau est aussi le opérateurs, transporteurs…) ou aider vement. Il convient dès lors de mettre d’un pays à l’autre, d’une destination à plus proche du terrain et semble donc le les opérateurs à commercialiser de en place un système d’observation et de l’autre, ou encore d’un échelon territo- mieux placé pour assurer l’animation, la manière optimale leurs produits. Elles veille chargé d’évaluer les composantes rial à l’autre. Par exemple, de nombreux sensibilisation, voire l’accompagnement conçoivent et pilotent généralement des de “ l’empreinte touristique ” sur le terri- territoires wallons recherchent avant des opérateurs. stratégies de marketing territorial plus toire, d’en apprécier les risques à court, tout une plus forte compétitivité auprès ou moins élaborées (positionnement, moyen et long terme et de surveiller leur des marchés alors qu’en France et en Le processus d’élaboration des politiques destination branding…), financent inté- évolution dans le temps. Suisse, certaines stations touristiques touristiques se caractérise par un certain gralement ou partiellement des études sont victimes de leur succès et doivent degré d’ouverture vers le secteur privé de marché et de nombreux éléments En relevant ces trois défis, les institutions prendre à bras le corps la question de la et associatif, mais aussi vers d’autres du mix de communication (campagnes publiques espèrent répondre aux exi- régulation des effets. En ce qui concerne niveaux de pouvoir. Comme ce fut le publicitaires, site internet, marketing gences et aux besoins du touriste, mais les différents niveaux de pouvoir, le ni- cas lors du Printemps du Tourisme en direct, relations publiques…), ou incitent pas uniquement, car son principal inter- veau national/central semble le plus à mars dernier, le pouvoir central peut par les nombreux opérateurs à s’unir et locuteur reste le citoyen. Ce dernier peut, même de poursuivre quatre objectifs: exemple impliquer les pouvoirs locaux s’organiser afin de réaliser des actions en effet, endosser le costume de contri- assurer un environnement propice au et intermédiaires dans la définition de de promotion communes. Ce genre de buable face auquel il faut “ justifier ”, développement du tourisme (sécurité, sa politique à travers l’organisation de partenariat peut enfin s’opérer entre “ légitimer ” les dépenses publiques stabilité politique, accès au territoire…), colloques participatifs. Il peut aussi pré- plusieurs destinations, ce qui leur per- consacrées au tourisme et qui pour- installer un cadre réglementaire structu- voir des réunions informelles ou encore met d’atteindre une taille critique suf- raient être affectées à d’autres projets. rant le secteur ainsi que l’ensemble des la réalisation d’enquêtes de terrain. Il est fisante renforçant ainsi l’efficacité des Le citoyen peut aussi être un électeur actions menées par les pouvoirs locaux, clair que la réussite d’une politique natio- actions de communication. dont le jugement sur les gouvernants encadrer les initiatives venant du bas nale dépend largement de l’adhésion des est fondé sur sa situation personnelle, (normalisation, accompagnement…) et opérateurs privés ainsi que des autres Une bonne politique touristique ne peut en tant que travailleur, entrepreneur ou enfin travailler sur l’image de marque échelons territoriaux. Il en va de même avoir comme seule finalité la satisfaction encore simple résident. Le tourisme étant du pays, sachant que les destinations pour les pouvoirs intermédiaires, qui ont | Trois pays, trois politiques touristiques
10 tout intérêt à inviter le pouvoir central et conditions, concours EDEN, remise de Il est clair que chaque instrument affecte actions menées au niveau régional. Les les pouvoirs locaux autour d’une même prix…), conventionnels (partenariats directement la coordination des actions conditions d’éligibilité aux fonds struc- table afin de renforcer la cohésion ver- publics-privés, contrats Etat-collecti- menées par les divers niveaux de terri- turels et les critères de sélections ont ticale de leurs actions, autrement dit vité, conventions pluriannuelles entre toire. Par exemple, la réglementation poussé les acteurs locaux à mieux penser s’inscrire dans la stratégie nationale institutions, contrats de gestion, grou- wallonne sur les organismes touristiques et préparer leurs projets. Grâce aux nou- et les pratiques locales, et obtenir le pement de communes, clubs de pro- wallons encadre le travail des fédérations veaux statuts de l’OPT, les organismes soutien de leurs bailleurs de fonds. Les motion…), informatifs (processus par- provinciales, des maisons du tourisme, touristiques locaux peuvent, s’ils le sou- pouvoirs locaux s’engagent aussi de plus ticipatif d’élaboration d’une stratégie, des offices du tourisme et des syndicats haitent, intégrer l’assemblée générale en plus dans une démarche participative formations, manuels de méthodologie, d’initiatives. Le plan stratégique “ Des- de l’agence ou encore participer à des lorsqu’ils élaborent leurs politiques en colloques professionnels, recherche et tination 2015 ” a permis aux nombreux campagnes de promotion via les clubs. consultant régulièrement l’ensemble développement, diffusion de l’innova- opérateurs touristiques, dont les pouvoirs des opérateurs de leur ressort. tion, accompagnement de projets…) locaux, de s’exprimer sur son contenu. Enfin, la mise en œuvre des politiques et communicationnels (campagnes de L’organisation du concours EDEN peut être prise en charge par les services Afin d’opérationnaliser leurs déci- sensibilisation, site Internet, Cahiers (European Destinations of Excellence) administratifs tombant directement sous sions, les pouvoirs publics centraux, du tourisme, mise en réseau, promo- par le CGT incite les destinations locales à la responsabilité des décideurs publics. intermédiaires et locaux ont recours tion touristique…) et enfin normatifs mettre en œuvre une politique touristique Mais parfois, l’implémentation est “ ex- à différents types d’outils. Les instru- (marques, labels, chartes, certifications durable et de qualité. Les bonnes pra- ternalisée ” vers ou partagée avec des ments peuvent être réglementaires ISO…). Ces instruments sont amenés tiques venant d’en bas (Durbuy, Wallonie partenaires privés (sociétés spécialisées, (lois, ordonnances, décrets, circu- à se combiner ou à s’emboîter les uns picarde, BEPN…) ont inspiré plusieurs fédérations professionnelles et associa- laires, arrêtés, règlements provinciaux, dans les autres comme l’illustre le tions…) ou publics (organismes publics départementaux ou communaux…), décret wallon du 18 décembre 2003 locaux, pouvoirs locaux…), d’où l’impor- économiques et financiers (affectations relatif aux hébergements touristiques. “ Il est important pour tance pour le pouvoir central ou intermé- budgétaires, fiscalité, aides publiques, Il s’agit d’un instrument réglementaire le pouvoir central ou diaire de suivre de près la façon dont les investissements publics, recherche contenant des modalités économiques intermédiaire de suivre dossiers sont gérés à ce niveau, mais de modes de financement…), organi- (octroi de subsides), organisationnelles aussi et surtout de gagner la confiance de près la façon dont sationnels (création, réforme ou ins- (exécution par le personnel du CGT), et le soutien des acteurs locaux lors des truction de structures publiques ou incitatives (conditions de reconnais- les dossiers sont gérés étapes préalables et de maintenir cette parapubliques), incitatifs (services sance et de classement) et normatives à ce niveau, mais aussi relation à long terme. ou subsides accordés sous certaines (normes de sécurité et de confort…). et surtout de gagner la confiance et le soutien M. J. Dagnies des acteurs locaux lors des étapes préalables et de maintenir cette rela- tion à long terme. ” © Photowedding Jérémy Dagnies Assistant aux Facultés Universitaires Catholiques de Mons Diplômé d’études spécialisées en Administration et Gestion et assistant de recherche et d’enseignement à l’Université des Facultés Universitaires Catholiques de Mons, Jérémy Dagnies se spécialise depuis plusieurs années dans le Domaine de la Qualité appliquée au Tourisme. Il réalise actuellement une thèse en vue de l’obtention du titre de “Docteur en Sciences Politiques et Sociales”sur les “Destinations touristiques performantes et performance de l’action publique” (Promoteur : Pr. Alain Schoon - FUCAM). Il apporte également son expertise scientifique dans différents projets tels que l’organisation en Wallonie du concours européen EDEN “European Destinations of Excellence” (2007, 2008, 2009 et 2010) ainsi que dans des publications portant sur le sujet. Il est également chargé d’études “Qualité” auprès du Commissariat général au Tourisme sous la direction du professeur Alain Schoon (FUCAM). Les Cahiers du Tourisme | N°1
11 La table ronde BELGIQUE Les mutations du tourisme ont amené les pouvoirs publics à revoir leur vision du tourisme Il y a un peu plus de trente ans, l’État belge tés la compétence exclusive du tourisme. Auparavant, le tourisme avait pour pre- jouait un rôle central dans l’élaboration et Enfin, en 1994, la Communauté française mière mission de contribuer au bien-être la mise en œuvre des politiques touris- transfère ce portefeuille vers la Région physique et à l’épanouissement intellec- tiques sur le territoire national. Durant wallonne et la CoCof. tuel des ménages belges bénéficiant d’un les années 70, les communautés cultu- nombre croissant de jours de congés et relles voient le jour (néerlandophone, Si nous simplifions les choses, en ce qui ce, en veillant à ce que toutes les catégo- francophone et germanophone) et sont concerne le tourisme wallon, on peut ries sociales puissent accéder à ce type dotées d’un parlement pouvant légiférer donc dire que le “ pouvoir central “ dans de loisir. La priorité, c’était de “ booster “ sur plusieurs matières parmi lesquelles le domaine du tourisme était assumé la demande. La massification du tou- certaines questions liées tourisme. A par l’État Belge jusqu’en 1980, puis par risme, entre la fin de la seconde guerre cette époque, le Commissariat général la Communauté française jusqu’en 1994 mondiale et le début des années 70, a au Tourisme épouse encore une struc- et enfin, par la Région wallonne. logiquement généré une massification de ture nationale mais son organigramme l’offre et donc l’installation d’un véritable se scinde déjà en deux branches, l’une A travers l’histoire, nous pouvons ob- secteur économique créateur de valeur flamande, l’autre francophone et ger- server des changements mais aussi ajoutée et d’emplois. L’évolution des manophone. de la continuité dans la façon dont les mœurs a également conduit les Belges politiques touristiques destinées à la à s’expatrier durant les congés et à des En 1980, la seconde réforme de l’État va Wallonie ont été définies, construites et étrangers à venir séjourner en Belgique. plus loin et attribue aux trois Communau- mises en œuvre. | Trois pays, trois politiques touristiques
12 Ces deux mutations ont amené les En 1994, lors du transfert de la com- pour les habitants, plus équitable pour pouvoirs publics à revoir leur vision du pétence vers la Région wallonne, la les travailleurs et les populations fra- tourisme dont le rôle sera dorénavant fonction économique du tourisme sera giles, plus éthique…), en témoigne le plan d’abord économique (créer de l’emploi encore plus fortement affirmée. Quant “ Destination 2015 “. et des revenus), et ensuite social (per- aux préoccupations environnementales, mettre au plus grand nombre de partir elles sont apparues timidement dans Depuis 1921, les pouvoirs publics natio- en vacances). Dans les années 70, 80 les années 70 et 80, suite notamment à naux, puis communautaires et régio- et le début des années 90, l’attention quelques événements malheureux sur- naux, ont toujours veillé à impliquer des responsables politiques se tourne venus sur des terrains de campings ou de manière officielle ou informelle les aussi vers l’offre touristique, perçue encore à des mobilisations de riverains à opérateurs privés, les intermédiaires comme insuffisante et mal encadrée. l’encontre de projets d’implantation d’in- et les pouvoirs locaux dans le proces- Il faut augmenter la capacité d’accueil frastructures touristiques. Mais il faudra sus d’élaboration des politiques tou- tout en réfléchissant à l’occupation attendre ces dernières années pour voir ristiques. Sur le plan officiel, en 1925, des espaces. C’est l’ère de la planifi- la politique wallonne du tourisme intégrer un Conseil supérieur du Tourisme et cation de l’espace où le tourisme est véritablement ce type de problématique de l’hôtellerie est institué afin de per- intégré aux politiques d’aménagement dans ses objectifs. Aujourd’hui, même si mettre aux hôteliers de s’exprimer sur du territoire. C’est aussi l’époque où on le premier but de la politique demeure les actions gouvernementales. Dans les se rend compte que pour remplir les économique et qu’il y a encore du chemin années 60, les fédérations provinciales nouveaux équipements touristiques, à parcourir, le Gouvernement wallon n’a du tourisme font remonter jusqu’au il est nécessaire de mettre en place de jamais autant intégré certains enjeux du Commissariat général au Tourisme, plus importantes actions de promotion “ développement durable “ (un tourisme les demandes de subventions et les auprès des marchés internationaux. plus viable économiquement, plus vivable problèmes rencontrés par les com- Les Cahiers du Tourisme | N°1
13 munes. En 1988, un décret met en place peuvent se tenir avec les cabinets ministé- bien penser et construire leurs politiques le Conseil supérieur du Tourisme et riels, certains experts ou l’administration, Les pouvoirs locaux touristiques. Enfin, il y a les “ bonnes prévoit un comité technique spéci- lors de la préparation de nouveaux décrets sont incités ou invités à pratiques “, les innovations venues des fique aux syndicats d’initiatives, aux ou programmes. Ces rencontres visent à contribuer, en tant que échelons infrarégionaux, que le pouvoir offices du tourisme et aux fédérations prendre le pouls des opérateurs publics régional peut prendre en considération partenaires, au succès provinciales. En 1999, 2007 et 2010 se locaux, à les rassurer et à prendre au dans la définition de sa politique. La sont tenus plusieurs rassemblements maximum leurs points de vue en consi- des actions menées par marque “ Esprit des vallées “ lancée (congrès et colloques) au cours des- dération. Le pouvoir régional n’a en effet la Région. L’enjeu pour par le BEPN ou le contrat de dévelop- quels les organismes et pouvoirs locaux aucun intérêt à se fâcher avec ses prin- la Région consiste donc pement pour un tourisme durable de la ont pu exprimer leur opinion sur les cipaux partenaires, dont les organismes à convaincre les orga- commune de Durbuy ont, par exemple, actions envisagées par le CGT et le locaux et les institutions communales nismes infrarégionaux inspiré les concepteurs du plan qualité Ministre du tourisme, notamment en font partie. Cette logique d’implication pour le tourisme wallon. qu’ils ont tout à gagner matière de qualité. officielle et informelle des acteurs dans le processus de conception des politiques à soutenir la politique Il faut également savoir que les nouveaux prévaut également avec les opérateurs qu’elle mène. statuts de le WBT permettent aux orga- privés et de nombreuses associations. A la logique descendante nismes touristiques locaux de siéger, est progressivement moyennant cotisation, dans l’assemblée Par ailleurs, depuis les années 80 et le générale et donc de peser dans la gestion fameux plan “ Reynaud “, des experts venue se greffer une de cette agence francophone de promotion indépendants, issus d’universités ou de approche ascendante touristique. Sur le plan informel, des réu- sociétés de consultance, viennent régu- (bottom-up) nions de concertation ou de consultation lièrement aider les pouvoirs publics à © SPW • Jean-Louis Carpentier - 5378 | Trois pays, trois politiques touristiques
14 Les instruments gouvernementaux se versification des instruments puisqu’il le concours EDEN (European Destinations à contribuer, en tant que partenaires, au sont également diversifiés. Certes, les met en place des outils conventionnels of Excellence) qui offre aux destinations succès des actions menées par la Région. instruments réglementaires et écono- (contrats-programmes triennaux) avec wallonnes l’opportunité d’être recon- L’enjeu pour la Région consiste donc à miques demeurent encore aujourd’hui les Maisons du tourisme. nues et valorisées dans leur manière de convaincre les organismes infrarégionaux dominants dans l’arsenal de la Région développer le tourisme durablement. Le qu’ils ont tout à gagner à soutenir la poli- et se justifient par la nécessité de mieux Mais la diversification ne s’arrête pas lancement des Cahiers du Tourisme per- tique qu’elle mène. encadrer les structures touristiques lo- là. Les années 90 coïncident aussi avec mettra aux acteurs locaux de s’informer cales et les initiatives venues d’en bas. le début des programmes structurels des innovations et réflexions relatives au A la logique descendante est progressi- Déjà en 1963, l’État belge avait légiféré européens (1994-1999, 2000-2006 et secteur. Enfin la mise en place du Centre vement venue se greffer une approche en matière de subvention à la promotion 2007-2013). Ceux-ci étaient assortis de d’Ingénierie Touristique Wallon (CITW) ascendante (bottom-up). La dynamique et était représenté au sein des structures conditions d’éligibilité et de critères de sé- vise à accompagner les communes, via des OT et des SI n’a cessé de se ren- provinciales. Dans le domaine de l’amé- lection, ce qui a forcé les pouvoirs locaux des études, des conseils et la publication forcer depuis la loi de 1921 relative aux nagement du territoire, le rôle joué par à construire des projets plus élaborés et de manuels méthodologiques. asbl. Les acteurs communaux élaborent les communes est également régi par de à évaluer leurs actions pour obtenir les leurs propres politiques qu’ils mettent en nombreux actes législatifs adoptés dans financements. On se trouve ici clairement Depuis 1921, la mise en œuvre des poli- œuvre, parallèlement aux actions venues les années 70 et 80. Un décret datant dans le cas de figure d’un instrument tiques touristiques s’opère selon une d’en haut. Ce phénomène s’est accentué de 1999, et remplacé en 2004 par un économique et incitatif. Depuis peu, le approche essentiellement descendante à l’occasion de la première program- autre texte, définit de manière précise WBT a également lancé des clubs de pro- (top-down). Le pouvoir central prend mation des fonds structurels. En effet, les conditions de reconnaissance des motion ouverts aux organismes touris- ses décisions, définit des plans d’action ceux-ci encouragent les pouvoirs locaux organismes touristiques et d’octroi des tiques prêts à cofinancer les campagnes que l’administration et les pouvoirs à développer et soutenir leurs propres financements. Il organise aussi le pro- promotionnelles. Enfin, on peut observer provinciaux et locaux doivent exécuter. projets touristiques, provoquant ainsi une cessus de regroupement des organismes ces dernières années l’apparition d’ins- Néanmoins, ces dernières années, avec émulation “ par le bas “ des actions. Cette locaux en Maisons du tourisme et impose truments innovants de nature informative l’adoption de nouveaux instruments gou- rencontre entre les deux approches nous également aux fédérations provinciales et communicationnelle ou normatives : vernementaux (incitatifs, conventionnels, amène finalement à un modèle mixte où du tourisme non seulement d’inscrire le plan qualité mis en œuvre par le CgT communicationnels, normatifs), la dé- la dynamique locale est toujours bien leurs actions dans la politique menée prévoit le lancement d’un label de cer- marche descendante de mise en œuvre présente mais avec un suivi plus présent au niveau régional, mais également de tification qui sera notamment destiné des politiques ne s’opère plus sur une de la Région et un cadre général mieux coordonner les Maisons du tourisme. aux SI, OT et Maisons du tourisme. La base autoritaire, mais plutôt volontaire. défini, permettant ainsi de préserver les A travers ce décret, il y a également di- Région wallonne organise chaque année Les pouvoirs locaux sont incités ou invités forces créatrices émanant des territoires Les Cahiers du Tourisme | N°1
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