Littéature étrangère Commentaires - Nuit blanche - Érudit
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Document generated on 08/14/2022 6:10 p.m. Nuit blanche Commentaires Littéature étrangère Number 37, October–November 1989 URI: https://id.erudit.org/iderudit/20167ac See table of contents Publisher(s) Nuit blanche, le magazine du livre ISSN 0823-2490 (print) 1923-3191 (digital) Explore this journal Cite this review (1989). Review of [Littéature étrangère]. Nuit blanche, (37), 46–54. Tous droits réservés © Nuit blanche, le magazine du livre, 1989 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/ This article is disseminated and preserved by Érudit. Érudit is a non-profit inter-university consortium of the Université de Montréal, Université Laval, and the Université du Québec à Montréal. Its mission is to promote and disseminate research. https://www.erudit.org/en/
nnnssE E T R A N G E R E gnent l'œuvre d'une touche d'humour. Ces notes sont par- fois inutiles. Et Wang Wei ne le dit-il pas : « L'éveil merveil- leux se passe de longs dis- cours... » (p. 360) La traduction en soi m'est apparue trop stylisée. En com- paraison, le texte du petit re- cueil publié par les éditions Moundarren (Wang Wei, Le plein du vide, 1986) apparaît d'une plus grande limpidité, L'INVENTION DE LA SOLITUDE d'une légèreté qui, je le pense, Paul Auster est plus proche de cet «éveil Actes Sud, 1988; 31,95$ merveilleux», et le rend de fa- En creusant. Telle est l'image çon plus sensible. qui décrit le mieux Paul Auster Les saisons bleues, ou l'art à mes yeux. de l'œil, le souffle du regard. Dans le sillon laissé vacant « À qui demande un art de diri- par le décès abrupt de son ger l'homme, /Répondez un père, Paul Auster se fond en poème de retour vers les une dérive lente et érudite sur monts» (p. 139). Là se trouve la mémoire, la paternité, l'ap- Wang Wei, allègre. partenance. Inscrites en retours André Girard successifs sur ces trois thèmes, ses anecdotes «[...] aussi vives qu'une écharde dans le pouce » (p. 77), ont partie liée avec la douleur et le silence, la mort : LA FOLLE RUMEUR «Quand j'entrerai dans ce si- DE SMYRNE lence, cela signifiera que mon Claude Gutman père a disparu pour toujours» Payot, 1988; 29,95$ (p. 86). En 1687, José Karillo exerce La première partie de la médecine à l'Hospice L'invention de la solitude s'in- d'Amsterdam. C'est un homme titule « Portrait d'un homme in- tourmenté car, juif par ses ori- visible», la seconde «Le livre gines et athée par conviction, de la mémoire». Paul Auster (Quiconque ayant l'habi- il s'est vu contraint d'adopter marque celle-ci de la présence tude d'errer dans les villes le christianisme. Pour donner de son fils et de leur relation. trouvera dans la THlogie new- un sens à son existence, il Commentant la filiation, il élar- yorkaise (Actes Sud) une mise consacre son temps à soulager git son cadre jusqu'à y englo- en scène, sur fond d'enquête les miséreux, tous ceux qui ber son rôle d'écrivain, parant policière, de cette solitude. souffrent dans leur corps et ainsi son texte d'un tain qui, L'ensemble, malicieux, repro- dans leur âme. Mais cela ne de lui-même, réfléchit l'uni- duit avec humour le ludique Présence. « Ombre légère de la suffit pas à faire disparaître vers. Il en ressort, de toute du labyrinthe urbain et celui bruine, au pavillon... /Cour l'angoisse qui l'habite et qu'il chose, une perception rajeunie, des lignes sur la page. Laby- profonde ouverte, lasse du ne peut confesser faute d'inter- d'éveil. rinthe joyeux.) jour./Assis, je regarde la cou- locuteurs valables en ces Sollicitant des textes an- leur de la mousse/Gagner mes années de trouble. Il décide de André Girard ciens — Collodi, Mallarmé, vêtements. » (p. 205) se confier à des cahiers qui Freud, etc. — son travail fu- Les saisons bleues consti- font revivre son enfance diffi- sionne adroitement le personnel tuent la quasi-totalité des cile, son adolescence plutôt et l'universel. Livre intimiste poèmes de Wang Wei. Ils sont heureuse et le long voyage qui cependant, parce que Paul Aus- LES SAISONS BLEUES l'a amené vingt ans plus tôt regroupés selon le cycle des ter développe ses interrogations Wang wei saisons, à quoi s'ajoutent qua- en Orient à la recherche du sans fausse pudeur ni fausse Phébus, 1989; 35,95$ tre sections : « Le chevalier de Messie Shabtai Zivi. Sur place modestie ; parce qu'une fois les Il y a douze siècles vécut le l'empereur, les belles et la bar- il en a profité pour consigner pages parcourues, un tel che- Chinois Wang Wei, poète et barie», «Poèmes de cour», dans ses carnets l'histoire sin- minement en soi continue. peintre, fervent adepte du «La saison du centre», «Di- gulière d'un mouvement millé- «Se souvenir». Par ces ch'an — la version taoïste chi- dacta», ainsi qu'une très belle nariste né à Smyrne et qui s'est mots se clôture L'invention de noise du bouddhisme indien prose : « Le secret de la peintu- étendu au Proche-Orient et en la solitude, indiquant par là la qui, au Japon, devint le zen. re». Europe avant de s'écrouler voie à suivre, la voix à écouter. Ses poèmes comme ses ta- Le traducteur, Patrick complètement lorsque le faux Car s'il est vrai que la mémoire bleaux, furtives saisies de Carré, a cru bon d'ajouter aux messie, Shabtai Zivi, s'est «[...] garde la mort à distance » l'éternité d'un instant, insistent textes quelques notes d'érudi- converti à l'Islam. (p. 146), elle est aussi ce qui sur l'expérience de l'éveil à tion. Insérées entre les poèmes, Le roman de Claude Gut- permet de « [...] vivre son exis- notre nature véritable. Et tou- celles-ci expliquent et précisent man réussit à nous faire ressen- tence sans rien en perdre » (p. jours, évoquant une vie érémi- des détails historiques, tracent tir les doutes que José Karillo 170). tique et logeant à une « sublime le portrait des gens de l'entou- entretient à l'égard des reli- Habiter ce qui, irréducti- terrasse», Wang Wei cherche rage de Wang Wei, ou simple- gions du temps. Les descrip- blement, est à soi : la mémoire. à se dissoudre dans la Toute- ment commentent et accompa- tions de la cité d'Amsterdam 46 NUIT BLANCHE
Tatiana Tolstoï navigateurs de ce temps-là I I l _ l \ IHS I \ M . [ I s au XVIIe siècle, de l'état de la médecine en cette époque étaient tous pareils à nous Carlo Emilio autres corsaires, et qu'ils ne reculée — c'est un des grands mérites de l'œuvre — font s'en allaient pas seulement Gadda connaître l'époque avec plus de pour faire plaisir au pape... » bonheur qu'un livre d'histoire Dommage pour le pape sans ne saurait le faire. doute, mais fort heureusement La folle rumeur de Smyrne, pour nous ! Car suivent alors roman érudit, dont les princi- des histoires toutes plus corsai- pales qualités littéraires rési- res et truculentes les unes que dent dans un rythme rapide et FEU les autres qui font revivre, d'un une narration elliptique, aurait ET POUSSIÈRE seul bond, l'histoire de la Ca- Des accouplements dû connaître un plus large pu- raïbe du 18e, notre histoire, blic. NOUVEI U S TRAOtlTKS IMf RUSSt M< > HKI -K i
IhiHfUiTH E T RA G E EINSTEIN ET SHERLOCK HOLMES Alexis Lecaye Payot, 1989; 24,95$ Depuis le début du siècle — qu'ils utilisent comme tel le nom de Sherlock Holmes, le modi- fient ou le sous-entendent — divers auteurs ont tenté, avec un bonheur relatif, de redonner vie au héros après la mort de qui, au cours de la nuit, ne son concepteur. Les amateurs cessent de gagner en force, en savent que, dans le domaine beauté et en pureté. Au lever francophone, René Réouven et du jour, après le départ du der- Alexis Lecaye comptent parmi nier invité, Nadège et Oudalle les plus talentueux. découvrent n'avoir plus aucune Ayant mis face à face il y raison de se séparer. Ils ont a quelques années « Marx et trouvé « une maison de mots Sherlock Holmes » (actuelle- où habiter ensemble». ment en Livre de poche), Un mot, celui de commémo- Lecaye récidive cette fois-ci en ration, commande toute l'orga- faisant se rencontrer en Suisse, nisation du recueil. D'une part à Berne, le célèbre enquêteur il y a le médianoche considéré et un certain Albert Einstein. comme symbolique et primor- HERVÉ OLIBERT Sir Arthur peut dormir tran- dial en qui s'abolit la durée quillement et les amateurs se temporelle ordinaire. D'autre précipiter : Holmes reste aussi part il y a le retour à ce temps LES GANGSTERS observateur, génial, présomp- des origines que le rituel de tueux et acerbe que Watson est la répétition rendra sacré. En fidèle, laborieux et sensible. effet, la commémoration de 1905. Holmes coule une "m cette nuit première est techni- paisible retraite dans le Sussex. quement rendue possible pour (1977), comme une «histoire Lui parvient une coupure de le couple grâce au soin qu'il a fondamentale ». journal helvétique relatant une pris de fixer sur ruban magné- Il faut lire avec dévotion ces mort mystérieuse. Herr Doctor __s Énmirsti m: __v rr tique les dix-neuf histoires ra- nouvelles et ces contes magni- Gruz, un savant bernois contées. De plus, le mouve- fiques qui «élèvent les gestes membre du « Perpetuum Mobi- ment circulaire que suggère la répétés chaque jour et chaque le», un club de sept présumés commémoration est mis en évi- nuit à la hauteur d'une cérémo- farfelus à la recherche du mou- dence par les dernières phrases nie fervente et intime». vement perpétuel, est trouvé du dernier récit : « Les deux noyé dans un immense bocal banquets ou la Commémora- Denise Cliche ne se dépouille par charité plein de bichlorure de sodium. tion », lesquelles reprennent in- chrétienne. Mais tout rentre Watson est envoyé en eclaireur tégralement les dernières dans l'ordre, au fil de jours. et rencontre, à la police locale phrases du premier récit inti- Notre ami mène sa vie entre et au club bizarre, de courtois tulé « Les amoureux tacitur- LES GANGSTERS deux visites à ses vieilles pa- Helvètes qui lui fournissent nes». Hervé Guibert rentes, de petites réunions de quelques informations supplé- Cette architecture que l'on Minuit, 1988; 15,50$ familles et ses rendez-vous ga- mentaires. Mais l'enquête est pourrait qualifier de mytho- Le narrateur de ce court roman lants qui donnent lieu au déve- déjà dans l'impasse. Heureuse- logique s'accorde avec le con- visite souvent ses deux grand- loppement du thème de l'ho- ment Holmes se manifeste, tenu du recueil qui met l'accent tantes, Suzanne et Louise. La mosexualité, surtout vers la fin sous un déguisement comme il sur les grandes questions de première, malade et soucieuse du livre ; le narrateur apparaît se doit. l'humanité. La descente aux de ses biens, la deuxième, soi- aussi un peu comme un enfant Les deux amis sont amenés enfers illustrée dans « Le men- gnant sa sœur et s'intéressant sage à qui on aurait donné des à rencontrer, au bureau des diant aux étoiles », les rites ini- aux bonnes œuvres. Tout ce émotions et des pulsions libidi- Brevets, un jeune homme tiatiques — épreuves et mort petit monde se porte relative- neuses pour mettre du piquant « rondouillard aux cheveux fri- symbolique — qui marquent ment bien, jusqu'au jour où de par rapport au quotidien en- sés », passionné de mathéma- « Angus » lors de son passage prétendus ouvriers viendront nuyeux des grand-tantes. Je tiques et connaisseur en philo- de l'enfance à l'adolescence, rafraîchir les alentours de la n'apprécie guère la vision qu'a sophie. Après une première et les frères ennemis Gerbois et maison des deux vieilles l'auteur de l'homosexualité, civilisée passe d'armes intellec- Crevet dont le tragique destin dames. tout se résumant par «je t'aime tuelles, le jeune Albert se lie est raconté dans « Pyrotechnie Leur petit-neveu réalise bien et si tu avais du temps, au détective retraité pour com- ou la Commémoration », l'en- bientôt qu'il s'agit d'une nous ferions... » prendre comment fonctionne fant rédempteur adoré par « Le fraude. Les travaux sont mal Néanmoins, l'originalité de son esprit, comment la magie Roi mage Faust» et l'âge d'or faits, malgré la somme impor- ce livre réside dans la mise de l'intuition et de la déduction évoqué dans « La légende de tante versée. La police enquête en présence de la vieillesse et font merveille chez lui à partir la musique et de la danse » té- et suspecte le neveu de vouloir de l'homosexualité, deux thè- de données accessibles à tous. moignent de l'immense et extorquer l'argent des aïeules. mes qui ne sont pas faciles à Holmes aura bien besoin de continuel intérêt de Michel Alors que Suzanne pense sé- traiter et à développer en paral- son aide car le sage Watson, Tournier pour ce mythe qu'il rieusement à modifier son tes- lèle. à qui on fait boire une étrange définit, dans Le vent paraclet tament, craignant que sa sœur Paul Eliani mixture, est involontairement 48 NUIT BLANCHE
affligé de violentes crises de François Augiéras priapisme. Bientôt un second assassinat implique un autre savant du club : à moitié nu, attaché à un pédalier, le cadavre à la tête couverte d'un casque de IM voyage scaphandrier. Mobiles et sus- au Mont Athos pects sérieux paraissent introu- Préface de Jean Chai o n vables. Et si Berne héberge des savants douteux, la ville recèle aussi de jeunes réfugiés russes mettant au point la révolution, des fonctionnaires zélés, une femme mystérieuse rôdant au- Flammarion tour de Holmes (liaison coupa- ble?)... Plein de surprise et de drôle- rie, ce pastiche est un régal. Quant au match Holmes-Eins- là de subornation et que ce tein, il serait criminel d'en dé- Dieu était mineur. À croire voiler l'aboutissement: disons qu'il lui demande (et obtient) seulement qu'il eût été plausible la Suprême Main au panier à qu'un esprit british l'imagine. lire ses dernières stances. Pris comme farce ou canu- Martial Bouchard lar, ce roman, non pas honteux mais sournois, pourrait entrer dans le répertoire des carabins. UN VOYAGE AU MONT ATHOS Nous imaginons cependant que François Augiéras tout plein de gogos risquent de Flammarion, 1988; 27,50$ se complaire à croire ces écrits pour fins de fantasmes ou de Certaines littératures sont mesquineries. Son préfacier piégées. Odeur sulfureuse et nous dit de François Augiéras présentation de carmélites. Il qu'il mourut à l'hospice de en est ainsi d'histoires à propos Domme en 1971 et que les de franc-maçonnerie ou de l'in- hommes lui avaient tourné le timité des papes. Il en fut de dos. Terrible imprudence ! même de cette fiction, Les Pro- tocoles des Sages de Sion, pa- Jean Lefebvre piers inspirés de Drumont et authentifiés par l'Okrana afin de justifier des pogromes ven- geurs pour cause de subversion HÔTEL STYX juive. Les faux papiers ont la Yves Navarre vie plus dure que les vrais. Albin Michel, 1989; 19,95$ Le tsar n'existe plus et, pour- À l'hôtel Styx, le bien nommé, tant, les Protocoles courent en- puisque dans les eaux du fleuve core. L'imagination de l'igno- qui le borde disparaissent sans rant s'enflamme facilement au laisser de traces les êtres venus contact d'écrits sacrés, ou ré- en finir avec une vie qui ne putés tels. Tous les massacres leur dit plus rien, on ne s'em- en découlent. Ou les ignomi- barrasse pas de détails. Nul ne nies. Et un mensonge s'appuie s'intéresse à la vie que les toujours sur la justification de autres menaient avant cette es- précédents mensonges. cale. À peine y apprend-on Dans le livre de François qu'un jeune homme a le sida, Augiéras, on relate un présumé époque oblige, qu'un profes- voyage initiatique au mont seur trop vieux n'a plus de dis- Athos, une région semée de ciples, qu'une femme veut que monastères, où les moines, des sa famille la regrette. On ne hommes, vivent reclus, loin demande qu'à partir et le plus des femmes, redoutant leurs vite possible, puisqu'on est tentations. François Augiéras venu pour ça. En attendant, on en profite pour rôder autour voit à satisfaire ses désirs im- des monastères tel un diable, médiats, sexe et bonne bouffe. cherchant l'assouvissement pé- Tout marche fort bien pen- dérastique là où il le soupçonne dant (des années ?) en tout cas, de dormir. À des fins person- longtemps, le mari de la pro- nelles. Sa recherche est toute priétaire de l'hôtel, dit l'aiguil- sensualité et sournoiserie. S'il leur, envoyant de loin des finit par trouver Dieu, nous clients à sa femme. Jusqu'au sommes convaincu qu'il s'agit jour où la patronne, qu'on NUIT BLANCHE 49
E T R J N G È R II et difficile dans une ville sans nom du sud de l'Europe. « Toute personne susceptible de donner des précisions sur une corbeille de fruits confits ou- bliée le 9 mai 1965 [...] est priée d'écrire à Radio-Mun- dial. » Voilà pour l'objet perdu. «Quand je l'ai aperçue, as- sise près de la grille en fer ouvragé qui sépare le café de n'appellera jamais autrement la salle de billard, je n'ai pas que Madame, en a assez. Avec tout de suite distingué les traits la complicité de son fils, Ca- de son visage. » Voilà pour le ron, qui l'a toujours aidée dans visage oublié. Quand il sortira ses tâches, elle veut disparaître de l'ombre, la ressemblance à son tour, comme les autres. antérieure s'imposant, Jimmy Ce livre est fort intrigant. Sorano partira malgré lui à la On ne sait trop ce qui se passe recherche du souvenir d'une dans cet hôtel et, en même fillette qu'il a connue des temps, on le sait. Le seul sus- années plus tôt à Paris. pense, pour nous et pour les La volonté d'oubli du héros personnages, est de savoir qui est sans cesse reprise et abolie partira la nuit prochaine et par les détails que suscite la combien ils seront à partir. rencontre fortuite de ce visage. Sujet macabre, me direz- Exilé par nécessité d'oubli, le héros voit sa solitude et son vous. Mais non, tout est propre JACQUES isolement incessamment sollici- propre comme le feu qui en- lève toute trace. Et les cendres STERNBERG tés par les détails qui revien- déversées dans le fleuve ne nent entourer le visage perdu semblent pas aggraver la pollu- Le puis redessiné à même les tion... contours de nostalgies d'en- shlenuhl fance. Nulle sensiblerie, je dirais même presque pas de sensibi- Suggestive et mystérieuse, lité. On ne reconnaît pas Yves juif, futur raté déjà célèbre. la fiction développée par Pa- Navarre, cet écorché vif qui Dans un torrent de souvenirs ïmiglii trick Modiano nous emporte se raconte dans tant d'autres et de fabulations, Sternberg dès les premières pages. Son livres. Cette fois, il s'agit s'approprie ce mot, mais aussi écriture apparemment dépouil- d'une description froide, vo- des silhouettes, des femmes, lée, mais qui agit à la façon lontairement détachée, mais il sans oublier les planètes qu'il d'un envoûtement, fait basculer ne faut pas s'y fier. L'auteur a parcourues à pied, en solex, J U L L I A R D la lecture dans une suite d'évo- ne cite-t-il pas en exergue cette en dériveur. Sans repères, sans cations où la mémoire refor- phrase de Jacques Chardonne : horaires, l'écrivain comprend mule les souvenirs comme un «Tout ce qui nous touche de cruellement qu'une menace paysage assiégé, repoussé, dé- près est la seule matière d'extinction pèse non seule- coupable peut-être d'appartenir serté puis reconquis peu à peu. d'art. » ? Ou, si l'on veut : la ment sur l'absurdité de toutes au même univers que l'auteur ; Reine Bélanger seule matière d'art est ce qui les situations humaines et fic- mais déjà l'écrivain, ivre d'une nous touche de près. tives, mais sur lui, navigateur comédie qui n'a que trop duré, L'écriture du roman est un solitaire qui perd le goût d'er- embarque à ses côtés pour un régal. Style dépouillé, efficace, rer, de savourer et de succom- dernier cent mètres une autre ber. C'est la plainte rageuse créature, plus insipide et plus RÊVES DIURNES musical. et cocasse de l'homme à tout fade que l'eau plate : une façon ET AUTRES NOUVELLES Louise G. Mathieu faire, à ne rien faire, incapable magistrale de régler un « 189 e vassilis vassilikos d'un exploit sportif, littéraire conte » à nos désirs si désespé- Gallimard, 1988; 26,95$ ou amoureux. Pourtant, à 50 rément terrestres. Vassilikos, auteur de Z, aborde ans passés Sternberg accumule Antoinette de Robien avec ce recueil de nouvelles LE SCHLEMIHL 40 livres publiés, 30 000 kms très diverses, le thème du rêve Jacques Sternberg sur un vélo à moteur ou une éveillé. C'est dans l'imaginaire Julliard, 1989; 24,00$ coquille de bois, et le vertige que les personnages, tout au- Que se passe-t-il quand un écri- des chiffres. Il interroge la lit- tant que le narrateur, retrou- vain qui a toujours en lui la térature, les prix, les gens célè- VESTIAIRE DE L'ENFANCE vent la plénitude de l'être, au- rage de « vivre à pleins nerfs », bres : rien. Effrayés par sa soif Patrick Modiano trement fragmenté. Le récit lie à haute tension, doit se conten- de vivre, les êtres qu'il Gallimard, 1989; 22,95$ étroitement le merveilleux au ter de survivre? Fou du roi éprouve se retirent dans une Un visage oublié, un objet quotidien grec de notre fin de qui cherche un sens à la plus frauduleuse condescendance. perdu reviennent en mémoire. XXe siècle. La Grèce, actuelle grande des lubies, l'existence, Quand la plus glacée des Et voilà un élément suffisant à ou historique, sert donc de toile Sternberg touche ici le fond, femmes s'offre à lui, la lucide Patrick Modiano pour basculer de fond, mais pas uniquement. le grand bleu. Ou peut-être la et parfaite Nathalie, Sternberg sans réserve dans la fiction ro- Et c'est peut-être quand l'au- terre ferme, où son dernier ro- chavire, bouleversé. On aime- manesque. teur fait de l'histoire de son man «échoue». Titre modeste rait retrouver plus longtemps Ecrivain reconnu, Jimmy pays une parabole à peine voi- et moqueur, le schlemihl est ce personnage singulièrement Sorano, alias Jean Moreno, est lée, quand le message politique le nom qu'on donne au gamin plus sincère que les autres, venu gommer un passé trouble est par trop évident, qu'il de- 50 NUIT BLANCHE
1_0»D. £ - ^ La juxtaposition de détails OUDE j . attristé par la disparition de son réalistes, souvent crus, du fan- !» fils et de sa femme. « Sushi », VASSILIS VASSILIKOS tastique et du surnaturel, est de Kanako Okamoto (1939), RÊVES toutefois déroutante, d'autant Anthologie est une nouvelle aux réso- DIURNES plus que le ton du narrateur, de nouvelles nances de psychologie et d'épi- et nuire* mntrrllr* toujours un peu bon enfant, ne japonaises curisme qui met en scène un change pas d'un iota. Il se peut contemporaines homme éprouvant une aversion bien que ce soit parce que, pour la nourriture. Dans «On pour un Vassilikos dans la ne vit qu'une fois», l'auteure 'IHP force de l'âge, bien des choses sont possibles, « puisque la vie Kiku Amido (1966), en évo- quant la vie d'un acteur de Ka- t>lf est un songe. » (p. 254) buki, s'interroge sur le suicide Nicole Côté et la mort. « Le chrysanthème tardif», de Fumiko Hayashi (1948), trace le touchant por- trait d'une femme, une ex- ANTHOLOGIE geisha dans la cinquantaine se préparant à la visite d'un an- DE NOUVELLES JAPONAISES vient ennuyeux. Mais la plu- CONTEMPORAINES cophone. Chaque nouvelle est cien amant. Cette nouvelle part du temps, sa verve de accompagnée d'une brève no- échappe à toute catégorisation. conteur prolixe nous emmène, TOME II tice biographique qui présente Son lyrisme touchant, « fémi- étonnés, ravis, vers des rivages Gallimard, 1989; 50,00$ et situe historiquement l'au- nin», surprend d'un pays qui, où les échos des problèmes po- Voici un volume qui, très cer- teur(e), en indiquant, s'il y a plus souvent qu'autrement, litiques ne parviennent qu'af- tainement, plaira autant aux lieu, les œuvres disponibles en nous donne à lire des témoi- faiblis. amateurs de littérature japo- français. gnages empreints d'une cer- Le métier d'écrivain s'ins- naise qu'aux lecteurs de nou- Les nouvelles qui suivent taine misogynie. « De minus- crit en filigrane dans ces divers velles. Cette anthologie, la sont particulièrement frap- cules coquillages », de Haruo récits, grâce au narrateur, qui deuxième publiée par les édi- pantes. «Le vieux Gen», de Umezaki (1947), propose un en vient à posséder tout autant tions Gallimard, regroupe Doppo Kunikida (1897), repré- récit de l'après-guerre évo- d'épaisseur que ses person- trente écrivains. Mis à part sente un très bel exemple de quant le trouble d'un ancien nages, qui les rejoint même Kôbô Abe et Sôseki Natsume, littérature « naturaliste » ; il soldat et ses questions sur sa parfois à la frontière entre la les auteurs présentés sont peu s'agit du portrait d'un homme responsabilité face à autrui. fiction et l'autobiographie. ou pas connus du public fran- simple, passeur de son métier, « Sous les fleurs de la forêt de ». Nouveautés roman, récits et nouvelles, poésie Anne Altwrt l t-voscjur Gérald Leblanc Du haut Concerto L'EXTRÊME p o u r huit jjijjjjjjiiiiiiijj FRONTIÈRE des terres VOIX tofemn 1972198ft ©r Du haut des terres Concerto pour huit voix L'Extrême frontière, Anne Albert-Lévesque (récits et nouvelles) poèmes 1972-1988 156 pages, 12,95$ Collectif Gérald Leblanc ISBN 2-7600-0157-1 98 pages, 9,95 $ 168 pages, 10$ PRIX FRANCE-ACADIE 1989 ISBN 2-7600-0158-x ISBN 2-7600-0156-3 Les Éditions d'Acadie Chez votre libraire édition/ C.P. 885. Moncton, N.-B. E1C 8N8 ou auprès d e l'éditeur dacadie (506) 857-8490 COMMANDES TÉLÉPHONIQUES ACCEPTÉES NUIT BLANCHE 5 1
rnmsïïE E T RA G E R E La fuite du temps et la han- tise de la mort demeurent parmi les thèmes privilégiés de Buzzati. Il y a beaucoup de nostalgie et de déception chez cet écrivain, mais jamais il ne verse dans des atermoiements interminables. Son humour et son cynisme lui servent en quelque sorte de garde-fou dans la dénonciation de la bê- cerisiers», de Ango Sakaguchi tise humaine autant que de ce (1947), nous présente un bri- contre quoi il ne peut rien : le gand qui vit retiré et retrouve temps. La première nouvelle, la forêt de cerisiers pour un « Une ombre au sud », constitue cérémonial annuel. Presqu'un un très bon exemple de l'habi- tableau surréaliste, cette nou- leté narrative de l'auteur tant velle est aussi le récit d'une que de l'univers qu'il affec- solitude absolue comme unique tionne. Parfait mélange de ce raison d'être. Dans «Le ma- qui est dit et de ce qui est tu, lade de beauté», de Katai l'action n'est ici prétexte qu'au Tayama (1907), un écrivain lent déploiement d'une atmo- prend le train de Tokyo, fé- sphère trouble. brile, dans l'espoir d'observer proprement parler. Malgré Certains textes annoncent déjeunes adolescentes. Glisse- l'unité de ton et la récurrence les carnets qu'il publiera quel- ments d'érotisme. de certains thèmes, il manque ques années plus tard sous le Et il y a plus, beaucoup à l'ensemble une cohérence in- titre de En ce moment précis plus, et surtout, la finesse japo- terne à laquelle Buzzati avait (titre tout à fait révélateur des naise de l'évocation, touchante habitué ses lecteurs avec ses préoccupations temporelles de de simplicité. Survol de ce autres recueils. Ceci dit, la lec- Buzzati). L'humour qui s'y siècle qui s'achève, ces trente ture de Panique à la Scala est manifeste prend souvent une de personnages, versions par- loin d'être inintéressante. Si valeur corrosive. nouvelles constituent autant de faites, dont, nécessité de cohé- portraits aussi humains qu'atta- Buzzati peut parfois décevoir, Un mot enfin sur la nouvelle rence et de mise en page et il n'ennuie par contre jamais. éponyme : en 1948, l'Italie est chants. Elles portent les traces mise en scène, il devra tran- de multiples recherches, de dif- cher de l'ultime conservation. férents styles, nous permettent Rarement nous aurons eu un de découvrir ce Japon dont tel plaisir à être introduit dans nous savons peu de choses. les coulisses de la création litté- André Girard raire. Nouvelles, commen- taires, hypothèses de travail, tout ce matériel-là nous donne le goût d'une résurrection. Ra- PROSES EPARSES Robert Musil rement nous n'aurons autant déploré que tous les hommes soient mortels. Musil nous fait Henri Seuil, 1989; 30,95$ On constate qu'une époque est définitivement morte lors- que nous sommes submergés donc, à titre posthume, encore un bout de compagnie. À ses côtés, nous faisons les morts... Bergeron d'écrits en forme de reliquats, Jean Lefebvre lumières voulues définitives sur Un bavard se tait... un discours inachevable. Ro- bert Musil est à classer parmi pour écrire les hommes-phares qui tentè- PANIQUE À LA SCALA rent d'interpréter le destin de Dino Buzzati l'homme globalement. Fin De la ferme au cours classique, de d'une ère. Nous croyions alors Robert Laffont, 1989; 25,80$ la campagne à Saint-Boniface, à l'interprétable, à la philoso- d'une enfance joyeuse au début de phie et à l'avenir. Les cathé- D'abord publiés chez Mondari drales humanistes fleurissaient. en 1958 sous le titre de Ses- l'âge adulte, Henri Bergeron nous L'une d'elles était L'homme senta racconti, les textes réunis amène à découvrir son entourage, sans qualités (Gallimard). Im- ici constituent un choix opéré son com de pays et nous invite à pression, devant cette quintes- dans l'œuvre originale. On partager avec lui ces moments sence de l'œuvre, d'une réalité trouve un peu de tout dans ce précieux. des mythes, d'un sens à la vie. regroupement de vingt-quatre D'une religion ! nouvelles, du très bon au ISBN 0-920640-73-7 19,95 $ Dans ces Proses éparses, moins bon. Bien que ce choix nous retrouvons le Musil cu- soit tout à fait représentatif de rieux de tout, humoriste, l'univers de Buzzati (une pré- ^ % Les Éditions du Blé homme détaché qui joue dans face aurait quand même été //ilV Distribuées par Québec livres les greniers de son imaginaire. souhaitable), il n'en constitue Qui projette plusieurs versions pas pour autant un recueil à 52 NUIT BLANCHE
Fiction di Cie où l'aveugle cherche à discer- Mario Fortunato une fois encore en proie à Jacques Roubaud l'agitation politique. Buzzati Le grand incendie ner l'exhaustivité des moments Lieux naturels transpose ici sa vision des évé- de Londres passés, épuisés, resoulevés en rrwluil d. I italien rest François Bouchard RécK.avac inciaaa . t bifurcations nements dans les salons du cé- pleine lumière par une brusque Rivages lèbre théâtre milanais où, au contraction du réel. Terre cours d'une nuit durant laquelle Gaste, que Roubaud sonde sans chaque heure distille les grande illusion, tant est inévi- craintes et les angoisses de cha- table pour lui la confrontation cun, le monde, que l'on croyait du deuil et de l'effort inné vers stable et immuable, lentement la solitude. Mais s'aperçoit-il se fissure pour ne laisser entre- qu'il trace mot après mot, voir que désordre et anarchie. comptant ses accidents d'écri- Chez Buzzati, rien n'est moins vain comme des empreintes sûr que le lendemain. appuyées, les conditions d'une expérience la plus quotidienne Jean-Paul Beaumier possible de prose? Roubaud | bouleverse, car il ne tente pas de séduire le lecteur ; simple- Poursuivant la double tâche ment il situe la démesure LE GRAND INCENDIE DE d'écrire Le grand incendie de consciente de son travail LONDRES Londres et Le projet, fictions d'écrivain dans un ensemble LIEUX NATURELS Jacques Roubaud que sa solitude rend désormais maintenant restreint, projet Mario Fortunato Seuil, 1989; 33,95$ improbables, Roubaud énu- d'existence disséqué à la loupe. Rivages, 1989; 21,95$ Portrait d'un artiste absent, mère au fil de paragraphes nu- Un chef-d'œuvre de patience «... Myriam séparait la vie de érémitique et limpide. Rou- mérotés le modus vivendi de une gratuité qui recrée doulou- la mort à l'aide d'un simple baud, qu'on a connu humo- Yhomo lisens. Il part d'une reusement, impartialement une souvenir, d'un sursaut de son riste, humaniste, policier et po- image remontée du sommeil, communication d'homme à esprit. Et le souvenir s'amplifia lisson, n'est plus ici théoricien mêle l'anecdote, l'érudition homme. Indispensable à la sur- en elle au point de devenir une de l'OULIPO. Enfermé entre abandonnée, pour reconstruire vie de l'auteur, ce récit s'im- seconde vie, de s'imposer l'obscurité et le lever du jour, un environnement mental où mobilise ; maintenant les lec- comme une éternité infime, né- il bute sur les ramifications de plane le silence des diver- teurs devraient s'en approcher. cessaire (p. 124). » sa mémoire, depuis que sa gences. C'est une narration en- Mario Fortunato a cons- compagne Alix est morte. trelacée à la nuit, un parcours Antoinette de Robien truit un roman aux fines at- SieOrHfo GILLES M-A-R-C-O-T-T-E LA PROSE DE RIMBAUD Essai Une lecture nouvelle de l'œuvre de Rimbaud qui nous fait découvrir le poète «compromis» dans les débats idéologiques. 196p. — 15,95$ LA VIE REELLE Nouvelles La vie, l'amour, la folie, le voyage et la littérature en seize histoires qui nous mènent au plus vrai: la vie réelle. 240p. — 19,95$ AUX EDITIONS DU BOREAL NUIT BLANCHE 53
EUEEÏÏE E T RA G E R E Avec la complicité du poète américain Jerome Ro- thenberg (Shaking the Pump- kin) qui les a en quelque sorte initiés, c'est l'émerveillement plutôt que la rigueur scienti- fique qui a (heureusement) guidé Florence Delay et Jacques Roubaud dans le choix des textes de Partition Rouge. Leur livre, en effet, s'inspire taches. Celles, perçues aux très largement de celui de Ro- confins, en des lieux qui dans thenberg, qui a lui-même puisé leurs durées portent l'em- dans les nombreux travaux des preinte de l'éphémère. Du pas- tout premiers anthropologues américains encore sensibles à sage des gens, en des refuges LA CONTREVIE derniers, il saisit leurs dou- la dimension poétique du maté- leurs, leurs préoccupations face riel recueilli. à la maladie, la mort, la mater- Divisé en quatre parties : nité. Dans l'irréversible, ces « Naissances », « Noms », « Mé- processus entraînent tout, ne tamorphoses», «Médecines», laissant que peu ; ne subsiste Partition Rouge fait également Le narrateur-écrivain de La appel à des œuvres plus qu'une fine douleur. tuf contrevie est cette fois encore contemporaines issues de la re- Neuf volets, comme autant Nathan Zuckerman, un double de battements de paupières sur naissance indienne des vingt- que Roth affectionne depuis le cinq ou trente dernières des lieux que l'on quitte. Ten- milieu des années soixante-dix sion des climats, incisive l'écri- années. et qu'il a déjà mis en scène Mis en valeur par un en- ture. L'échéance atteinte, il dans quatre ou cinq de ses der- reste toutefois un témoin à qui semble de courts textes explica- niers romans. Roth trouve sû- tifs à l'érudition jamais tatil- l'on s'adresse. Vers qui l'on rement, comme son héros, tend. Vainement. De l'évide- lonne, Partition Rouge plaira qu'il n'y a rien de plus amusant particulièrement à ceux que la ment, le roman de Mario For- (pour un écrivain) que d'es- tunato en est le puzzle, conte- l'imagination traîtresse, de la poésie de l'essence des choses sayer de maîtriser sa propre intéresse. nant les traces jusqu'à la perte.tâche de l'écrivain, du retour subjectivité. L'auteur de Port- Vainement, comme les person- (ou non) à Sion, de la bataille noy et son complexe (traduit François Mailhot nages du dernier récit, intitulé des mariages, de l'impuis- chez Gallimard en 1970), y «Télévision», observant le sance, de la mort, et pour finir parvient-il dans La contrevie ? poste, muets ; en attente de ré- de la chrétienté, on ne peut La seule réponse possible à pliques qui pourraient être les s'empêcher de penser à l'af- cette question, dirait Z., c'est leurs. faire Rushdie, en se disant que que l'auteur ne sait plus, ne En ces extrêmes, le dé- Roth aurait très bien pu imagi- sait plus du tout, une fois que mantèlement inévitable, ne sub- ner pour son irrévérencieux hé- son livre a été imprimé, tra- siste qu'une ultime parenthèse ros, un destin aussi funeste que duit, maltraité, ou simplement — un lieu naturel — de conver- celui qui a frappé l'auteur des lu avec plaisir. gence «... en quête d'une ré- Versets satanique s. G gion tranquille pour un atterris- Pas tendre pour Israël, François Mailhot sage de fortune» (p. 136). « pays devenu complètement Pour mitiger la douleur. Pour fou» (p. 195), féroce avec la se dissoudre dans la familiarité chrétienté anglo-saxonne et son «horreur essentielle du sexe»
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