Ouganda, à la rencontre des derniers gorilles

 
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Ouganda, à la rencontre des derniers gorilles
Ouganda, à la rencontre des
                   derniers gorilles
  Par Bénédicte Menu                                                    Mis à jour le 04/05/2018 à 17:53 / Publié le
                                                25/04/2018 à 07:00

 !   La région des volcans Virunga abrite les derniers gorilles de montagne. Stanislas Fautre

EN IMAGES - En Afrique de l'Est, la région des volcans Virunga abrite les derniers gorilles de
montagne. Vecteur de sauvegarde, l'écotourisme rend désormais possible l'émouvant face-à-face
avec ces grands singes. Un reportage exceptionnel du Figaro Magazine.

Kabale, enfin... À 430 kilomètres de la capitale de l'Ouganda
                                        , la ville, une des plus anciennes du pays, annonce un
changement de décor: cultures en terrasses et champs de papyrus sur une terre fertile trouée de lacs.
Nous découvrirons au retour cette petite Suisse africaine en suivant, non loin de là, les courbes du lac
Bunyonyi, dont les eaux vierges de crocodiles et de bilharziose sont peuplées d'écrevisses. Une
centaine de kilomètres encore et nous atteindrons la Forêt impénétrable de Bwindi, qui s'étale sur 331
kilomètres carrés au pied des volcans Virunga. Nous roulons depuis quatre ou cinq heures, ralentis par
les nids-de-poule et un chassé-croisé de camions et de bus déglingués allant et venant du Burundi, de
la Tanzanie
                                    ou du Congo et du Rwanda voisins.

»LIRE AUSSI - Rwanda, le grand retour
Ouganda, à la rencontre des derniers gorilles
Des panneaux publicitaires vantent les classiques
sodas et réseaux mobiles - on n'y échappe pas -
jusqu'à ce que l'un d'eux interpelle: «Can't wait more to
meet you»,y lit-on ( «Je ne peux pas attendre
davantage pour vous rencontrer»)... L'accroche barre
la photo d'un gorille à dos argenté posant, pensif, sur
ses avant-bras de colosse. Ici, les cibles d'hier sont
devenues les mascottes. Un grand singe bien vivant
rapporte désormais plus qu'un singe mort. Et puis, qui
voudrait encore d'une main de gorille comme cendrier?
«Dire qu'avant, dans les villages, le gorille symbolisait
la mauvaise fortune», souffle Georges, notre guide.

Fa s c i n at ion d e s voy a g e u r s
La fascination des voyageurs pour ce touchant mammifère fait en tout cas de Bwindi le parc national
qui génère aujourd'hui le plus de ressources dans le pays. C'est en 1997 que débute l'histoire de cette
réussite, quand une première famille de gorilles est approchée dans la forêt de Bwindi. Objectif:
habituer l'animal à la présence de l'homme pour démarrer une activité écotouristique viable, pour les
singes comme pour les hommes. Soutenir la population locale en l'impliquant dans une activité
génératrice de revenus est alors, pour l' «International Gorilla Conservation Programme», la seule
manière de l'amener à réduire la pression qu'elle exerce sur la forêt.

                                                  Tandis que nous progressons vers l'ouest, les
                                                  véhicules se font de plus en plus rares. Nous
                                                  dépassons des hommes pliés sur leurs vélos chargés
                                                  de régimes de bananes encore vertes, des femmes
                                                  aux boubous colorés qui marchent, tête droite et haute
                                                  sous leurs fagots de bois. Le jour décline, tant et si
                                                  bien que nous arrivons au crépuscule. Les lambeaux
                                                  de brume s'évaporent dans l'obscurité.

Gorilles des montagnes au Rwanda Club faune-
                                                  L'allée qui mène au «Clouds Mountain Gorilla Lodge»,
voyages
                                                  notre havre pour deux nuits, est éclairée de bougies,
                                                  et un comité souriant nous accueille. Gary, le directeur,
jovial Sud-Africain originaire du Kwazulu-Natal, fait les présentations. Innocent sera notre
«majordome», Oliva, notre intendante. Un feu crépite à l'intérieur d'un solide bâtiment en pierre
volcanique. Passé les 1 000 mètres d'altitude, les soirées sont fraîches. À droite la salle de restaurant,
à gauche un grand salon, des canapés gavés de coussins. D'autres employés s'activent, ils sont 48 en
tout. Tous jeunes et issus des villages voisins.

L' aub e s e lè ve s u r u n p a n or a m a roy al q ue s o ul ig n e u n e c o u ron n e d e
volcans
Ouganda, à la rencontre des derniers gorilles
La construction du Clouds n'a pris qu'un an pour un rendu plus que parfait. Fruit d'un partenariat entre
The Uganda Safari Company (la TUSC, qui gère également, via Wild Places, plusieurs lodges en
Ouganda) et l'African Wildlife Foundation, le Clouds offre à Bwindi le fleuron qui manquait pour l'accueil
de voyageurs en quête d'émotion, de nature mais aussi de charme et de confort. De l'étonnement nous
passons au ravissement en découvrant les chambres. Elles sont huit, huit maisonnettes disséminées
dans un jardin botanique. Une cheminée en guise de séparation entre le salon et la chambre. Le lit,
king size, douillet (et chauffé par une bouillotte), promet un sommeil réparateur.

L'aube se lève sur un panorama royal que souligne
une couronne de volcans, en Ouganda.

L'aube se lève sur un panorama royal que souligne
une couronne de volcans. Des myriades d'oiseaux
piaillent dans les ramures, composant une singulière
symphonie. À 6 h 30, nous descendons au village pour
valider nos précieux «permis gorille» (600 dollars
pièce) au bureau de l' «Uganda Wildlife Authorit».
                                                            Stanisla Fautré / Le Figaro Magazine

Dans une petite salle, Augustin rassemble les huit
chanceux du jour (pas un de plus, c'est la règle) qui partiront à la rencontre de la famille Nkuringo, une
des plus intéressantes, car une des plus grandes. Avec la naissance en 2008 de jumelles (fait rare pour
l'espèce), la famille compte désormais vingt et un membres dont deux dos argentés. Nous remerciant
de contribuer à la préservation de l'espèce, le ranger précise que«20% des sommes perçues pour cette
aventure sert au financement de projets communautaires».Des malades dans le groupe? Si oui, il
faudra renoncer: le gorille est bien trop fragile pour être exposé aux germes humains.«La rencontre
avec les gorilles n'est pas garantie»,prévient Augustin, avant d'ajouter que«ces trois dernières années,
ils n'ont jamais raté un rendez-vous».

S o u d a i n , u n g ron d e m e nt s o u r d romp t le s ile n c e . . .
Une piste abrupte descend vers la forêt dont les frondaisons sombres drapent le relief. Très vite, nous
nous félicitons d'avoir embauché un porteur pour la journée, tant il est vrai que cette forêt, dense joyau,
est impénétrable. À la machette, les rangers ouvrent des passages. Les porteurs parent nos glissades
et le guide suit la progression des pisteurs dans son talkie-walkie. Une branche débarrassée de son
écorce, des excréments encore humides sont autant d'indices qu'ils sauront interpréter. La canopée
bruisse. Bien des espèces y cohabitent. Des chimpanzés notamment, et le très rare éléphant forestier...

Vaguement désespérés, nous progressons depuis quatre heures dans ce labyrinthe végétal quand,
enfin, nous apercevons les pisteurs.«Ils sont là»,chuchote Augustin avant un ultime rappel des
consignes de sécurité: pas de flash, du silence, du calme et, en cas de charge, surtout, préférer à la
fuite une attitude de soumission. Nous abandonnons là nos sacs, la nourriture pouvant créer des
incidents fâcheux, et suivons les traqueurs le cœur battant.

Des branches craquent ici et là, dans toutes les directions. Une ombre furtive passe derrière nous.
Soudain, un grondement sourd rompt le silence, une main grisâtre aux doigts comme des saucisses
écarte les feuillages où vient s'encadrer la face sombre d'un gros silverback. Le groupe se fige,
Ouganda, à la rencontre des derniers gorilles
l'émotion nous étreint. La joie plus que la peur. Il nous observe un instant, puis, désabusé, s'étale de
tout son long par terre. Derrière lui, une petite boule hirsute aux yeux brillants caracole dans les
branches. Une femelle caresse la joue de son bébé. Plus loin, le deuxième dos argenté envoie
valdinguer d'une pichenette un mâle plus jeune et turbulent qui se met à tambouriner des poings sur sa
poitrine. Dans la forêt de Bwindi, pour nous, ce jour-là, le temps s'est arrêté...

CARNET DE ROUTE

Des vélos chargés de régimes de bananes vertes en Ouganda Stanislas Fautré / Le Figaro Magazine

● Utile

Visa (50€ ) auprès de l'ambassade d'Ouganda à Paris (01.56.90.12.20 et
http://ougandafrance.ifrance.com) ou sur place à l'aéroport d'Entebbe.

Décalage horaire: plus 1h en été par rapport à Paris, plus 2h en hiver.

Vaccin contre la fièvre jaune et traitement antipaludéen recommandés.

Adaptateur électrique: indispensable.

Monnaie : le shilling ougandais (1€= 45.070 UGS environ).

Permis Gorille: accessible aux plus de 15ans, il est valable pour une entrée (la rencontre avec les
gorilles ne dure pas plus d'une heure). À réserver plusieurs semaines avant le départ (600$ par
personne).

● Forfait
Ouganda, à la rencontre des derniers gorilles
Spécialiste du voyage haut de gamme sur mesure et grand connaisseur de l'Afrique, Tselana
Travel (01.55.35.00.30 et www.tselana.com) a concocté un programme de 9 jours/6 nuits incluant deux
nuits à l'Emin Pasha Hotel avec petits-déjeuners à l'arrivée à Kampala (avec un tour de ville guidé), le
transfert en petit avion vers la forêt de Bwindi, 2 nuits au Clouds Mountain Gorilla Lodge en pension
complète, le permis Gorille et clôt cette belle aventure par un séjour de 2 nuits en pension complète au
Mihingo Lodge, dans le Parc national du lac Mburo. À partir de 5327€ par personne au départ de Paris
sur Air France en classe économique incluant les taxes, les transferts terrestres et entrées dans les
parcs nationaux. À noter: en optant pour un transfert vers la forêt de Bwindi en voiture, le coût du
voyage sera moins élevé. Le trajet est long (compter 10h de route via Kabale), mais rythmé par
d'intéressantes scènes de vie quotidienne.

● Hôtels

À Kampala, le Emin Pasha Hotel (00.256.414.236.977 et www.eminpasha.com). À partir de 220 € la
nuit en chambre double avec petit-déjeuner. Ce boutique-hôtel d'une vingtaine de chambres
parfaitement équipées est une oasis de charme au cœur de la bourdonnante capitale. Terrasse,
piscine, salon cosy et spa.

À la lisière de la forêt de Bwindi, le Clouds Mountain Gorilla Lodge (00.256.414.251.182 et
www.wildplacesafrica.com). Compter 338€ par personne en chambre double et pension complète. Huit
cottages en pierre volcanique, agrémentés d'une large terrasse et disséminés dans un jardin botanique.
Pour chacune des «maisons», un artiste ougandais a peint des toiles exclusives qui donnent un
supplément d'âme à la décoration, déjà très soignée. Le bâtiment principal, lui aussi doté de plusieurs
cheminées, abrite la salle à manger, le salon bibliothèque, une boutique et le bar.

Dans le Parc national du lac Mburo, le Mihingo Lodge
(00.256.752.410.509 et www.mihingolodge.com). À
partir de 260€ la nuit par personne en chambre double
et pension complète. Le seul endroit, en Ouganda, à
proposer des safaris à cheval! Dans une réserve
privée en bordure du parc national, ce lodge érigé sur
un roc offre un panorama à 180 degrés sur son
environnement. Dix tentes safari tout confort
aménagées sur des plates-formes en bois. Restaurant,
salon bibliothèque, boutique et piscine. Alimentation
par panneaux solaires. Le lodge contribue à la            Le Clouds Mountain Gorilla Lodge, en Ouganda.
préservation des léopards et des hyènes                   Stanislas fautré / Le Figaro Magazine
(compensation financière aux éleveurs pour les
dissuader d'empoisonner les prédateurs de leur bétail). À noter: 80% des employés du lodge sont issus
des villages ankoles voisins. Le lodge promeut également l'artisanat local à travers ses boutiques à
Kampala (www.bananaboat.co.ug).

● Envie d'agir?

Au Clouds Mountain Gorilla Lodge, vous assisterez à une représentation de danses traditionnelles par
les enfants du Nkuringo Orphans Group (inabondfoundation.org/the-nkuringo-orphans-group/)
Ouganda, à la rencontre des derniers gorilles
. L'association prend soin d'une cinquantaine
d'orphelins (privés de leurs parents par le sida et autres drames). Vos dons sont les bienvenus!

● L'instant magique

Avant le dîner au Mihingo Lodge, un détour sur la plate-forme en contrebas du bar permet d'observer
un groupe de bush babies. Drôles de petites bêtes aux yeux ronds, dont le cri évoque celui des bébés
(d'où leur nom).

● Le coup de cœur

Pour le programme Friend aGorilla, mis en place par UWA (Uganda Wildlife Authority). Pour la modique
somme de 1$ par an (ou plus selon vos souhaits), vous devenez l'«ami» virtuel d'un gorille et
contribuez à la sauvegarde de l'espèce. Sur le site dédié (www.friendagorilla.org), des photos et des
vidéos permettent de suivre l'évolution des animaux. Six familles sont présentées, dont celle de
Nkuringo.

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