PROGRAMME PRIORITAIRE DE RECHERCHE OCÉAN & CLIMAT 2021 2027 - UN OCÉAN DE SOLUTIONS
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2 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
TA BL E D E S M AT IÈ R E S 5 ENJEUX ET CONTEXTE 17 DÉFI N O 1 Prévoir les impacts des phénomènes extrêmes liés au changement climatique en outremer pour guider les politiques territoriales 20 DÉFI N O 2 Intensifier les recherches dans des océans polaires en pleine mutation et aux enjeux géostratégiques majeurs 22 DÉFI N O 3 Améliorer la protection et la résilience des milieux marins par le développement de nouvelles approches intégratives de gestion 25 DÉFI N O 4 Exploiter durablement les ressources de l’océan en s’appuyant sur la science de la durabilité 28 DÉFI N O 5 Caractériser l’exposome océanique pour protéger les écosystèmes marins 30 DÉFI N O 6 Transversal : Développer des programmes d’observation et de modélisation innovants, pluridisciplinaires, multi-paramètres, multi- échelles et multi-acteurs, en accompagnement des défis identifiés 33 DÉFI N O 7 Transversal : Partager avec le grand public la découverte de l’Océan et les enjeux sociétaux associés 37 GOUVERNANCE DU PPR 39 ANIMATION DU PPR 41 MISE EN ŒUVRE OPÉRATIONNELLE DU PPR 43 ANNEXES 45 Annexe 1 : Paysage international des sciences océaniques 52 Annexe 2 : Les principales infrastructures de recherche océaniques auxquelles la France contribue 63 Annexe 3 : Articulation entre les défis du PPR et les défis de la décennie pour les sciences océaniques au service du développement durable 55 Annexe 4 : Composition du Conseil Scientifique 3 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
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ENJEUX & CONTEX TE enjeux et contexte L’océan recouvre 71 % des 510 millions de présente pourtant un énorme potentiel km² de notre planète. Il joue un rôle crucial pour stimuler la croissance économique, dans la régulation du climat et est un for- l’emploi et l’innovation (rapport de l’OCDE, midable réservoir de ressources biologiques, L’économie de la mer en 2030). L’identifica- énergétiques et minérales. Essentiel pour tion de nouvelles bio-ressources marines l’alimentation et la santé humaine, il permet est une source d’innovations majeures. La depuis toujours la communication entre compréhension des mécanismes évolutifs les peuples et le transport des biens à travers et adaptatifs du vivant permettra, à terme, la planète : près de 30% de la population de prédire l’état de la biodiversité marine mondiale vit ainsi dans une bande littorale ainsi que la pérennité des services qu’elle de moins de 100 km de large, ce qui entraîne soutient. Mais l’effort de recherche actuel une très forte pression sur les écosystèmes sur l’océan représente moins de 4 % de littoraux et côtiers, pression appelée à croître l’effort déployé dans l’ensemble des sciences puisque les projections démographiques (Global Ocean Science Report, UNESCO – prévoient que cette proportion atteigne COI, 2020, https://en.unesco.org/gosr). 75 % d’ici 2035, et 80 % en 2050. L’océan est au cœur des enjeux du développement L’océan est aujourd’hui gravement durable. Sa préservation nécessite la pro- menacé. Les principaux dangers qui pèsent duction et le partage de connaissances sur lui sont les effets du réchauffement scientifiques spécifiques, aux échelles glo- climatique (avec ses conséquences en termes bale et locale, aisément transférables non d’intensification des évènements extrêmes, seulement vers les structures en charge de d’acidification, de désoxygénation, de sa gestion et de sa gouvernance, mais aussi montée du niveau de la mer, de disparition vers les entreprises, la société civile et vers d’écosystèmes ), la pollution (par les subs- le grand public. tances chimiques, les déchets dont les plastiques, la pollution sonore…), la surex- L’océan, par sa capacité à piéger le dioxyde ploitation de ses ressources, la dégradation de carbone, joue un rôle majeur dans la et la destruction des habitats marins. À régulation du climat. Il est aussi une source l’échelle globale de la planète, le récent d’oxygène, via la photosynthèse, plus impor- rapport de l’IPBES (2019) pointe, en parti- tante que celle de toutes les forêts de la culier, la pêche et les usages de l’océan planète. Il contribue, d’après l’OCDE, à la comme les vecteurs principaux de la perte richesse mondiale à hauteur de 2,5 % de biodiversité et de l’altération des services (1500 milliards de dollars US). À tous ces écosystémiques. Renforcer les recherches titres, sa préservation est essentielle pour sur l’océan est donc un enjeu majeur, pour l’humanité toute entière et il représente mieux caractériser son état actuel, com- donc un « bien commun », tant pour ses prendre et anticiper les réponses aux per- riverains que pour l’ensemble des habitants turbations notamment climatiques, et de la planète. développer sa gestion durable dans le respect de sa biodiversité. L’océan reste un monde encore mal connu, avec un volume de 1370 millions de km³ et Plusieurs études prospectives concernant une surface de 360 millions de km² dont les sciences océaniques ont été menées, à seulement quelques pourcents sont carto- l’échelle nationale (groupe thématique de g raphiés avec précision. Seu les l’alliance AllEnvi, prospectives des orga- 270 000 espèces marines sont identifiées nismes de recherche, prospectives plus sur un total de plusieurs millions. L’océan ciblées sur des territoires, des écosystèmes 5 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
enjeux et contexte spécifiques ou des ressources), à l’échelle européenne (JPI Ocean, European Marine Board…) et mondiale (UNESCO ; UN World Ocean Assessment ; think tanks, plateformes et agences, tels que ICSU, Future Earth, PO SI T ION FR A NÇ A ISE Belmont Forum, GIEC, IPBES…). Les enjeux associés à l’océan et à son évolution sont donc bien documentés et il faut désormais La France a une situation particulière vis- focaliser les recherches sur les verrous à-vis de l’océan : présente dans la plupart scientifiques qui restent à lever pour conce- des mers du globe et à toutes les latitudes voir et expérimenter des solutions efficaces (Atlantique, Manche, Mer du Nord, Médi- permettant la préservation de l’océan et terranée, Océan Pacifique, Océan Indien, son exploitation durable. De même, il faudra Caraïbes, Antarctique), avec 11 millions de veiller au partage des connaissances et des km² sous souveraineté ou juridiction natio- capacités entre tous les acteurs et pays nale (dont 97 % situés Outre-mer), c’est le concernés. 2e État en termes de zone économique exclu- sive marine, juste après les États-Unis et C’est dans ce contexte que l’Europe a lancé assez loin devant l’Australie. L’océan est la Mission Starfish 2030 : Restore our Ocean donc porteur d’enjeux forts pour la France and Waters proposée, dans le cadre d’Ho- en termes de préservation des écosystèmes, rizon Europe, par le Mission Board on Healthy de ressources (biologiques, minérales, éner- Oceans, Seas, Coastal and Inland Waters et gétiques) et de durabilité des activités éco- que les Nations Unies ont lancé la décennie nomiques associées, mais aussi en termes des sciences océaniques au service du déve- de géostratégie, de souveraineté et de loppement durable (2021-2030). diplomatie. Dans ce contexte, la recherche française en sciences marines a un rôle important à jouer pour anticiper les modifications de l’océan liés aux changements globaux en cours, pour proposer des solutions scien- tifiquement valides d’atténuation, d’adap- tation et de développement durable et pour éclairer les décideurs. La stratégie proposée par les acteurs français de l’enseignement supérieur et de la recherche est de s’appuyer sur les compétences développées dans leurs laboratoires pour contribuer à la connais- sance de l’océan et au transfert vers les décideurs, les gestionnaires et les entre- prises, et pour favoriser l’adaptation des sociétés aux modifications profondes que subit l’océan. 6 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
enjeux et contexte COMMUN AU T É • la restauration et l’ingénierie écologique FR A NÇ A ISE marines ; • la modélisation, la gestion et la gouver- DE RECHERCHE nance des systèmes socio-écologiques ; EN SCIENCES • le droit et l’économie maritimes ; • le génie maritime et les technologies E T T ECHNOLOGIES marines. M A RINES Réalisée par le Comité spécialisé pour la recherche marine, maritime et littoral La France a une implication en recherche (COMER) et l’Ifremer à la demande du remarquée dans de nombreux domaines Conseil National de la Mer et des Littoraux intéressant l’océan, mais avec des approches (CNML), la cartographie de 2020 des res- encore fragmentées entre disciplines comme sources de la recherche publique française entre laboratoires et entre organismes. Les dans le domaine des sciences et technologies compétences reconnues s’inscrivent dans marines et des thématiques investies a mis plusieurs domaines : en évidence qu’avec 7000 ETP répartis dans • l’océanographie physique, chimique et 222 entités, cette communauté représente biogéochimique ; 4,2 % de l’effort public de recherche. Si cette • l’étude des interfaces océan-atmosphère, ressource est majoritairement regroupée océan-lithosphère et le continuum terre- dans des entités orientées exclusivement mer, incluant les interactions eau/ sur une thématique maritime, force est de sédiment ; constater que 2000 ETP sont présents dans • le développement de modèles océaniques des entités pour lesquelles la thématique et climatiques ; maritime est secondaire. Les chercheurs • la biologie, l’écologie et l’évolution de la au sens « statutaire » représentent 40 % de biodiversité marine ; l’effectif. NORD NOMBRE D’ENTITÉS STM 61 16 1 STM 100 % maritime STM partiellement maritime STM contributive Outre-mer EFFECTIFS DE RECHERCHE (ETP) 0 - 68 69 - 170 171 - 294 Source : Étude STM 295 - 928 Réalisation : Ifremer/Sismer 929 - 1895 Date : juin 2020 Figure 1. Répartition des entités de recherche en sciences et techniques marines et de leurs effectifs dans les différentes régions françaises en fonction du profil des entités (Étude STM, Ifremer/SISMER, juin 2020). 7 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
enjeux et contexte En termes de répartition géographique, la Un autre atout des équipes françaises de moitié de l’effectif s’ancre sur la façade recherche est qu’elles déploient, grâce aux Atlantique tandis que la Méditerranée implantations ultramarines, à la flotte concentre le quart des forces vives du sec- océanographique française et à l’IPEV, teur, le reste des compétences est partagé leurs activités sur l’ensemble des mers du entre le littoral de la Manche-Mer du Nord, globe, dans des environnements très variés les régions parisienne et toulousaine et les (milieux tempérés, polaires, tropicaux et outremers (Figure 1). intertropicaux et conditions extrêmes des grands fonds). Elles sont aussi intégrées En termes de thématiques, une analyse dans de nombreux dispositifs internatio- des citations basée sur 9 catégories montre naux (IOC, IPBES, GIEC, European Marine que l’environnement, la surveillance et Board, European Polar Board ; Plateforme l’observation côtière sont les thématiques Océan Climat ) et très impliquées dans le principales avec ¼ des citations. Elles sont pilotage d’infrastructures de recherche de suivies par l’océanographie physique et dimension européenne, voire mondiale. chimique, d’une part, et la biologie marine, d’autre part. Le droit et la socio-économie arrive en 7e position alors que les sciences de l’atmosphère et de la cryosphère ferment le classement en 9e position. La prise en compte de ces différentes thématiques est variable en fonction des régions comme l’illustre la figure 2. NORD NOMBRE D’ENTITÉS STM 61 29 16 Environnement Valorisation des ressources biologiques marines Recherche marine «de base» Outre-mer Ports transport et infrastructures Intervention publique sécurité sureté Énergies marines renouvelables Navale Nautisme Offshore et ressources minérales Biotechnologie Source : Étude STM Transverse et divers Réalisation : Ifremer/Sismer Régions Date : juin 2020 Figure 2. Répartition des thématiques de sciences et techniques marines traitées dans les différentes régions (Étude STM, Ifremer/SISMER, juin 2020). 8 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
enjeux et contexte ainsi qu’à de nombreuses campagnes inter- nationales. L’annexe 1 présente une vision PO SI T IONNEMEN T synthétique du paysage international de IN T ERN AT ION A L la recherche en sciences océaniques et des priorités des principaux pays. DE L A RECHERCHE FR A NÇ A ISE EN SCIENCES M A RINES La figure 3 ci-dessous montre que la France INFR A S T RUC T URES est un des 10 pays qui publient le plus en sciences océaniques, et parmi les 3 pays DE RECHERCHE d’Europe les plus actifs du domaine. Malgré ce bon score, le Global Ocean Sciences À l’échelle nationale, ces infrastructures Report 2020 de l’UNESCO1 positionne la sont principalement financées par le MESRI 1 — https://unesdoc. France en 19e position en terme de nombre et les organismes de recherche. Certaines unesco.org/ark:/48223/ pf0000375147 de publications rapportées à un million ont aussi bénéficié de financements du d’habitants. Par contre, ce même rapport Programme Investissements d’Avenir (PIA) confirme la très forte implication des équipes ou de financements régionaux. Plusieurs françaises dans les coopérations interna- d’entre elles sont des composantes natio- tionales, dont le rôle essentiel en terme nales d’infrastructures de portée européenne d’impact est souligné. En effet, les scien- (financées dans le cadre de H2020, notam- tifiques français participent activement à ment de ESFRI), voire globale. de nombreux programmes européens et internationaux en sciences de la mer, tels En France, le MESRI a élaboré une feuille que ceux déployés dans le cadre de la JPI de route des infrastructures d’observation Ocean (Joint Programme Initiative de la marine in situ (voir en annexe 2 la descrip- Commission Européenne) et de Future tion de ces infrastructures), hors TGIR flotte Earth (IMBeR, SOLAS, bioDISCOVERY), océanographique française : elle comprend Figure 3. Ocean related publications records – 2014 – 2018 (from Web of Science). 9 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
enjeux et contexte une Très Grande Infrastructure de Recherche À noter que la gestion de données d’obser- (TGIR EURO ARGO), deux Infrastructures vation in situ de l’océan servant à la fois les de Recherche (IR ILICO et EMSO) et un besoins de l’océanographie opérationnelle projet d’IR (OHIS). Le CNRS et l’Ifremer ont et de la recherche s’organise au niveau produit une note commune de vision et national et européen. Le projet inter-orga- ambition pour les infrastructures marines nismes CORIOLIS dispose d’une expérience en lien avec la décennie des Nations Unies unique en matière de base de données pour les sciences océaniques au service du d’observation en temps réel de l’océan développement durable : ce document pro- étalonnées et validées pour les besoins de pose une synergie, à terme, entre les com- l’océanographie opérationnelle, dans les posantes françaises des infrastructures domaines hauturier et côtier. De nombreuses existantes (EMSO-France, France-Euro- données sur l’océan et sur les espaces côtiers Argo, ILICO-JERICO) pour constituer une sont collectées dans le cadre de missions structure de type FrOOS (French Ocean conduites par le CNES, en partenariat avec Observing system) qui pourrait être le miroir d’autres agences spatiales (SARAL et SWOT du European Ocean Observing System (EOOS) avec la NASA pour l’océanographie physique et de GOOS (Global Ocean Observing System) et l’altimétrie, SMOS avec l’ESA et l’Espagne au niveau mondial. Par ailleurs, la France sur la salinité de l’océan, CFOSAT avec la participe activement à l’infrastructure Chine pour l’océanographie physique) et ICOS (Integrated Carbon Observation System), dans le cadre du programme spatial euro- qui a un volet marin important, à ECORD péen Copernicus dans lequel la France joue (European Consortium for Ocean Research un rôle de leader dans le domaine marin Drilling) qui donne accès aux moyens de avec Sentinel 3 et Sentinel 6. forage océanique profond au sein d’IODP (International Ocean Drilling Program), et à l’European Research Infrastructure Consor- tium EMBRC (European Marine Biological Resources Centre), qui donne accès aux écosystèmes, aux ressources biologiques marines et à leurs moyens d’étude. Des initiatives structurantes pilotées par des équipes françaises ont permis de créer des coopérations européennes et internationales favorisant un premier niveau de diffusion des connaissances. La France occupe ainsi une position centrale dans le domaine de l’océanographie opérationnelle en Europe au travers du Copernicus Marine Service piloté par Mercator Ocean International qui opère un service de couverture mondiale soutenant le développement d’applications et le besoin de connaissance de milliers d’abonnés à partir des données d’observations et de modèles préparés par les experts. Mercator Océan International se positionne aujourd’hui au niveau Européen comme fédérateur du concept de Jumeau Numérique de l’Océan, permettant l’intégration de données spatiales et in situ dans des modèles numériques de haute résolution. 10 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
enjeux et contexte Les liens avec l’IR DATA TERR A se construisent dans le cadre du pôle ODATIS (portail national de données océaniques) de cette infrastructure. Le tableau ci-dessous montre l’articulation de c e s i n f r a s t r uc t u re s à l’é chel le européenne. IR / T GIR N AT ION A L E S INF R A H2020 ERIC / E SFRI T GIR E URO-A RG O E URO-A RG O, E-A IMS, E SF RI L A NDM A RK PI A N A O S RISE, MO C C A , ERIC E URO-A RG O AT L A N T O S, E URO SE A IR EMS O E S ONE T, EMS O DE V, EMS O E SF RI L A NDM A RK EMS O L INK … ERIC IR IL IC O JERIC O, JERIC O-NE X T, JERIC O-RI JERIC O-S 3, JERIC O-D S PRO JE T E SF RI C O T IER PH A SE 1 PRO JE T IR OHIS INF R A-I A E URO SI T E, F I X03 C OPERNIC U S B G 7 AT L A N T O S, E URO SE A C ORIOL IS TA C IN-SI T U O D AT I S IR P ÔL E SE A D ATA NE T/ DE D ONNÉE S SE A D ATA CL O UD F O R M@ T E R D ATAT ERR A AERIS EMODNE T THEIA IR EMBRC-F R ? EMBRC ERIC IR RE SIF/EP O S ? EP O S ERIC IR IC O S ? IC O S ERIC 11 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
enjeux et contexte Un autre objectif du programme structurant D’UN PROGR A MME était de focaliser les thématiques de S T RUC T UR A N T recherche sur quelques zones prioritaires sur lesquelles des enjeux forts de boule- À UN PROGR A MME versement climatique, de préservation des PRIORI TA IRE écosystèmes, d’économie durable, de sou- veraineté ou de diplomatie sont identifiés. DE RECHERCHE L’Océan Arctique, les Outre-mer et l’océan profond avaient ainsi été identifiés comme répondant à ces critères et mis en avant au Au vu des enjeux scientifiques, de la nature sein du programme. À noter que ce pro- et de la complémentarité de leurs compé- gramme se focalisant sur l’anticipation des tences, les organismes et établissements changements globaux d’origine anthropique de recherche et d’enseignement supérieur impactant les océans (changements clima- français impliqués dans les sciences pour tiques, exploitation, pollutions, espèces l’océan et rassemblés au sein de l’alliance invasives), les géosciences relatives à la AllEnvi, ont ainsi souhaité se fédérer en tectonique ou à la sismologie ne sont pas 2019 autour de questions de recherche inclus dans le périmètre de ce programme, prioritaires auxquelles ils sont en mesure de même que le littoral (aménagement, d’apporter une contribution notable. ports, estuaires,…) sauf dans sa dimension de limite de la zone côtière océanique. Le programme structurant proposé en 2019, rassemblant les thématiques identifiées Les thématiques et les zones prioritaires comme prioritaires au niveau national dans proposées dans ce programme structurant le domaine des sciences et technologies ont été discutées au sein des instances de marines, s’inscrivait résolument dans le gouvernance d’AllEnvi et de son GT Océan, contexte de la Décennie des Nations Unies afin que ses membres se les approprient, pour les sciences océaniques au service du les amendent et identifient les moyens développement durable (2021-2030). Il se nécessaires à leur déploiement. Ces dis- voulait être une contribution à la program- cussions ont été étendues au Comité National mation nationale et européenne de la français pour la Commission Océanogra- recherche dans le cadre de la préparation phique Intergouvernementale (CN-COI) de du programme-cadre Horizon Europe. l’UNESCO dans le cadre de la décennie des sciences océaniques au service du déve- Un des objectifs principaux de ce programme loppement durable ainsi qu’au Comité structurant était d’accompagner la transi- spécialisé pour la recherche marine, mari- tion d’une recherche disciplinaire sur l’océan time et littorale (COMER) du Conseil national (physique, biologie, économie,…) vers une de la mer et des littoraux (CNML). recherche intégrative et interdisciplinaire en capacité de répondre aux défis de la En décembre 2019, sur la base de ce pro- Décennie des Nations Unies et aux enjeux gramme structurant, le Président de la de la société française. Les thématiques République a annoncé aux Assises de l’Éco- prioritaires choisies autour de l’adaptation nomie de la Mer le lancement d’un Pro- aux changements globaux, de préservation gramme Prioritaire de Recherche sur l’océan et d’exploitation durable ou de réduction dont le pilotage est confié au CNRS et à de la pollution reflètent cette ambition de l’Ifremer. Les deux organismes se sont donc donner un cadre permettant aux différentes appuyés sur le programme structurant et communautés scientifiques travaillant sur sur le contenu de la lettre de mission qu’ils l’océan de collaborer et de se structurer ont reçue, pour construire le PPR dont pour y répondre. l’architecture générale ci-dessous a été 12 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
enjeux et contexte validée à l’occasion du premier comité de DÉFI 1 pilotage en septembre 2020 : Prévoir les impacts des phénomènes extrêmes liés au changement climatique 1. TROIS GRANDS OBJECTIFS en outremer pour guider les politiques • Prévision de la réponse de l’océan territoriales au changement climatique et scéna- rios d’adaptation DÉFI 2 • Exploitation durable de l’océan et Intensifier les recherches dans des océans préservation de sa biodiversité et de polaires en pleine mutation et aux enjeux ses services écosystémiques géostratégiques majeurs • Réduction de la pollution océanique : approche intégrée des stress d’origine DÉFI 3 anthropique et de leurs effets sur le Améliorer la protection et la résilience milieu marin des milieux marins par le développement de nouvelles approches intégratives de 2. UNE APPROCHE gestion MÉTHODOLOGIQUE TRANSVERSE • L’océan à l’ère du numérique : obser- DÉFI 4 vation, données et modélisation Exploiter durablement les ressources de l’océan en s’appuyant sur la science 3. QUATRE ZONES PRIORITAIRES de la durabilité • Les territoires d’outre-mer • L’océan profond DÉFI 5 • Les océans polaires Caractériser l’exposome océanique pour • Les écosystèmes littoraux et côtiers protéger les écosystèmes marins sensibles métropolitains DÉFI 6 4. UNE INTERFACE SCIENCE EN (transverse) : Développer des programmes SOCIÉTÉ d’observation et de modélisation inno- • La « littératie océanique » pour impli- vants, pluridisciplinaires, multi-para- quer la société civile dans la protec- mètres, multi-échelles et multi-acteurs, tion et la valorisation de l’océan en accompagnement des défis identifiés DÉFI 7 À partir de cette architecture, et après une (transverse) : Partager avec le grand analyse des grandes questions dans les public la découverte de l’Océan et les 10 ans à venir concernant les quatre zones enjeux sociétaux associés prioritaires croisées avec les trois grands objectifs, 7 défis ont été définis pour aborder Ces 7 défis doivent permettre la mise en les enjeux de recherche associant des ques- place de projets de recherche interdiscipli- tions d’économie bleue, de droit, de géos- naires, ambitieux et structurants et qui tratégie, de gestion globale des socio-éco- sont en phase avec les priorités de la décennie systèmes et du bien être des sociétés. pour les sciences océaniques de l’UNESCO et sur lesquelles la France pourra apporter une contribution d’envergure. La figure 4 ci-dessous montre la façon dont ces défis se projettent sur les 4 zones prioritaires. Les recherches qui seront menées dans le cadre du PPR « Océan de solutions » pour- ront relever de plusieurs défis et/ou plusieurs zones géographiques. 13 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
enjeux et contexte Le contexte, les enjeux et les axes de recherche de ces différents défis sont décrits dans la suite du document et leur articu- lation avec les priorités de la décennie pour les sciences océaniques de l’UNESCO est présentée en annexe 3. OCÉ ANS POL AIRES : DÉFI 2 St Pierre et Miquelon France C Ô T I E R M É T R O P O L I TA I N : métropolitaine D É F I S 3, 4, 5 Antilles Clipperton Guyane Wallis Nouvelle et Futuna Calédonie Tromelin Polynésie Mayotte La Réunion française et îles éparses O U T R E - M E R : D É F I S 1,3,4,5 St Paul Crozet et Amsterdam Kerguelen OCÉ ANS POL AIRES : DÉFI 2 Terre Adélie OCÉ A N PROFOND : DÉFIS 4 ET 5 TR A NS V ERSE À TOUTES LES RÉGIONS : DÉFIS 6 ET 7 Figure 4 : Projection géographique des défis sur les zones prioritaires du PPR. 14 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
SEP T DÉFIS 15 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
enjeux et contexte 16 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
DÉFI 1 P R É V O I R L E S I M PA C T S DÉFI 1 P R É V O IR L E S IMPA C T S D E S P HÉ N O MÈ NE S E X T R Ê ME S L IÉ S DES PHÉNOMÈNES EXTRÊMES LIÉS AU CHANGEMENT A U C H A N G E ME N T C L IM AT I Q U E C L I M AT I Q U E E N O U T R E M E R E N O U T R E ME R P O U R G U ID E R LES POLITIQUES TERRITORIALES intégrées incluant les impacts à venir du changement climatique. Avec 123 000 km² (18 % des terres émergées françaises) répartis sur les 3 océans du EN JEU X globe et une population de 2,7 millions E T CON T E X T E d’habitants, les territoires français d’outre- mer sont connus pour leur vulnérabilité face au changement climatique. Quasi Dans les outremers, nous proposons un exclusivement insulaires, ces territoires et défi spécifique qui concerne la prévision leurs domaines maritimes associés (97 % et l’anticipation d’évènements extrêmes de la ZEE française) sont soumis à des liés au changement climatique impliquant évènements climatiques extrêmes comme l’océan et impactant le périmètre de la zone les ouragans, les pluies extrêmes ou les côtière des territoires ultramarins (e.g. vagues de chaleur océaniques associés à montée des eaux, température de l’eau, la variabilité et à l’évolution de l’océan et tempêtes tropicales, vagues ). de ses paramètres physiques. La réduction de la vulnérabilité de chacun de ces terri- Ces territoires placent la France, et par toires face à ces risques et à leurs impacts extension l’Europe, sur presque tous les — comme l’érosion côtière qui prend une océans du monde. Cette présence globale dimension particulière du fait de l’insularité est le fondement de partenariats scienti- de ces territoires — impose des actions fiques et politiques d’importance stratégique pour la résilience des écosystèmes marins pour la France et dont la préservation et le mais également de larges capacités d’adap- développement sont essentiels. Ils peuvent tation des sociétés humaines dont il est servir de support au développement de important d’étudier (1) la durabilité écono- partenariats scientifiques et diplomatiques mique et sociale, et (2) les modes actuels dans différentes régions du monde. Pelagos et passés d’adaptations pour construire et benthos présentent des richesses spéci- avec ces sociétés les moyens de se préparer fiques encore incomplètement décrites aux évolutions futures. mais déjà reconnues comme étant parfois extraordinaires (nombre, endémisme, orga- La France possède un positionnement inter- nisation, fonctions écologiques, ... ) dans national fort dans le domaine des recherches de nombreux habitats tels que les massifs océaniques en zone intertropicale avec d’une coralliens, les herbiers… Et leurs ressources part une participation de premier plan aux halieutiques, ainsi que les processus éco- réseaux d’observation comme PIRATA en logiques qui s’y développent, doivent être Atlantique, TPOS dans le Pacifique et INDOOS considérés comme des richesses qu’il dans l’océan Indien ainsi qu’au réseau global convient de préserver au travers de gestions de flotteurs-profileurs ARGO, et d’autre 17 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
DÉFI 1 part une contribution majeure à la modé- Ce défi aborde des questions importantes P R É V O I R L E S I M PA C T S lisation océanique de grande échelle grâce pour le Ministère de l’Enseignement Supé- DES PHÉNOMÈNES EXTRÊMES LIÉS au modèle NEMO développé en France et rieur, de la Recherche et de l’Innovation, AU CHANGEMENT utilisé par de nombreux pays européens. le Ministère des Outre-mer, le Ministère C L I M AT I Q U E E N O U T R E M E R En parallèle, la France étudie et surveille de la mer et le Ministère de la transition depuis longtemps l’état environnemental écologique, ainsi que la question de la sou- et écologique des milieux côtiers de ses veraineté et du rayonnement international territoires ultramarins. Ce défi centré sur de la France dans l’ensemble des océans. les évènements extrêmes liés au change- Plusieurs actions gouvernementales ment climatique doit permettre de faire le confortent ce défi dont trois principales : lien entre les recherches de grande échelle sur la variabilité et l’évolution de l’océan • La Trajectoire Outre-mer 5,0 qui apporte et du climat, en particulier dans la zone un cadre durable à l’application des poli- intertropicale, et celles menées localement tiques publiques du Livre bleu outre-mer. sur le fonctionnement et la résilience des Elle traduit une nouvelle manière de écosystèmes marins en outremer et la pré- construire les outre-mer de demain autour servation des services qu’ils apportent aux de 5 objectifs dont l’objectif « zéro vul- populations locales. nérabilité : des territoires résilients face au changement climatique et aux risques naturels » ; • Le Plan d’Innovation Outre-mer piloté par la Caisse des dépôts qui vient soutenir la trajectoire 5.0 pour le développement économique ; • Les plateformes MESRI-MOM rassem- blant les forces de recherche et d’inno- vation pour répondre aux enjeux des territoires dont la première a été ouverte à Saint-Pierre et Miquelon. Mots-clés : outremer, phénomènes extrêmes, climat, impacts, risques, sociétés, adapta- tion, crise. 18 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
DÉFI 1 P R É V O I R L E S I M PA C T S DES PHÉNOMÈNES EXTRÊMES LIÉS AU CHANGEMENT C L I M AT I Q U E E N O U T R E M E R L ES AX ES DE RECHERCHE Ce défi pourra s’articuler autour de trois a xes de recherche principau x pour co-construire des recherches avec les poli- tiques locales et les acteurs locaux de l’ESR afin de le traduire en capacité de gestion répondant aux vulnérabilités identifiées : 1. Améliorer notre connaissance 3. Accompagner les acteurs locaux, des évènements extrêmes liés au y compris ceux de l’ESR, dans la changement climatique, en parti- définition de leurs politiques de culier dans la zone intertropicale, formation et de gestion répondant (tempêtes tropicales, ouragans, aux vulnérabilités identifiées. L’ap- vagues de chaleur océanique, propriation sociétale des risques associés montée du niveau de la mer, aug- passe par la construction de « récits » mentation de la température de (narratives en anglais) basés sur des l’eau) et leur évolution à l’échelle scénarios climatiques et socio-écono- décennale. miques rendus ainsi accessibles aux Les grandes échelles océaniques jouent populations concernées et aux décideurs un rôle central vis-à-vis de ces questions sur leur territoire. à fort impact régional, y compris pour la modélisation des phénomènes extrêmes atmosphériques qu’elles contrôlent largement. 2. Prévoir les impacts de ces évè- nements sur les territoires ultra- marins, en particulier sur les écosys- tème s ma r in s (fonc t ion nement, biodiversité, résilience) et le littoral sous contraintes environnementales, phy- siques et anthropiques. Une approche couplée interdisciplinaire est nécessaire pour aborder ces questions à des échelles régionales et locales. 19 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
DÉFI 2 INTENSIFIER DÉFI 2 IN T E N S IF IE R L E S R E C HE R C HE S D A N S D E S O C É A N S P O L A IR E S E N LES RECHERCHES DANS DES OCÉANS POLAIRES EN PLEINE P L E INE M U TAT I O N E T A U X E N J E U X M U TAT I O N E T A U X E N J E U X G É O S T R AT É G I Q U E S MAJEURS G É O S T R AT É G I Q U E S M A J E U R S estivale. La probabilité d’un océan Arctique libre de glaces en été avant la fin du siècle est relativement élevée. Associé à l’aug- mentation des températures, l’océan Arc- tique et l’océan Austral connaissent des EN JEU X modifications radicales de leurs propriétés E T CON T E X T E hydrologiques et biogéochimiques (la dis- tribution en eau douce, en sel et en chaleur, pH, teneur en carbone dissous…) et de leur Le 14 juin 2016, la France s’est dotée d’une circulation. Feuille de Route Nationale sur l’Arctique impliquant plusieurs ministères et ayant La situation en Antarctique se différencie pour but de préciser les enjeux stratégiques de celle de l’Arctique, car marquée par pour la France dans cette région en lien 35 ans d’augmentation globale de l’étendue notamment avec la recherche et la coopé- de la glace. Cependant les moyennes ration et la protection de l’environnement annuelles d’étendue de glace pour 2017 et marin arctique. La France est aussi signa- 2018 sont les plus faibles de toute la taire du Traité de l’Antarctique (1959) impli- période 1979-2018, effaçant ainsi la tendance quant une coopération internationale sur précédente. Cette inversion spectaculaire ce territoire partagé pour la science. La des changements qui se produisent dans France prendra en 2021 la présidence de ce la glace de mer de l’Antarctique fournira Traité pour la première fois depuis 30 ans. des informations supplémentaires précieuses Les recherches polaires, en Arctique comme pour mieux comprendre les processus en Antarctique, se font nécessairement en d’augmentation à long terme de la glace de forte collaboration avec d’autres pays. Les mer de l’Antarctique. recherches océaniques polaires offrent donc une belle opportunité à la communauté Dans des écosystèmes polaires encore trop scientifique française de consolider la posi- peu décrits y compris lorsque l’on s’intéresse tion de la France dans des coopérations aux cycles de la matière (Si, C, N... ), l’en- internationales déjà solidement ancrées. semble de ces changements climatiques a Au cours des deux prochaines décennies, de vastes conséquences sur la dynamique une augmentation supplémentaire de 4 à écologique marine polaire. En effet, la 5 °C est prévue en automne et en hiver en productivité et les interactions entre espèces Arctique soit une augmentation deux fois (trophique, pathogènes nouveaux,... ) supérieure à celle prévue pour le reste de peuvent perturber fortement l’endémisme la planète. (en Antarctique) et la biodiversité excep- tionnels de ces territoires. En conséquence de ce réchauffement, l’Océan Arctique aurait ainsi perdu environ Dans ce contexte, il est crucial que les 75 % du volume de ses glaces de mer depuis recherches futures s’intéressent simulta- 1979 et plus de 40 % de sa couverture nément aux propriétés/bouleversements 20 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
DÉFI 2 physiques des océans polaires et à la bio- INTENSIFIER diversité des organismes marins, leur capa- LES RECHERCHES DANS DES OCÉANS cité à s’adapter aux changements, et leur POLAIRES EN PLEINE rôle dans les grands cycles biogéochimiques M U TAT I O N E T A U X E N J E U X G É O S T R AT É G I Q U E S et dans l’atténuation du changement cli- L ES AX ES MAJEURS matique (sequestration du carbone et effet albedo). DE RECHERCHE Par ailleurs, la diminution de la banquise en Arctique ouvre la voie à une augmenta- Ce défi pourrait être décliné selon les quatre tion des activités humaines dans ces régions axes suivants, en privilégiant la construc- autrefois réputées inaccessibles, entraînant tion de questions scientifiques interdisci- un usage inédit de l’espace polaire, notam- plinaires, et en support à la construction ment en lien avec la navigation, la pêche de scénarios pour les décennies à venir : ou l’exploitation minière, et introduisant des perturbations additionnelles telles que 1. Prévoir la réponse des premiers la pollution chimique (incluant les microplas- échelons de la chaîne trophique tiques), la pollution sonore, la migration aux changements physiques dans de nouvelles espèces et l’arrivée d’espèces les océans hauturiers de l’Arctique invasives dont il nous faudra mesurer l’im- et de l’Antarctique (structure et cir- pact sur les écosystèmes et les populations culation de l’océan, interactions avec locales afin d’établir des mesures de la banquise et impacts sur les flux bio- gestion. géochimiques conditionnant production Ce défi est donc l’occasion de mettre en primaire et secondaire). œuvre quelques projets structurants pour regrouper des communautés de différents 2. Anticiper l’impact des change- champs disciplinaires travaillant dans ments globaux sur les écosystèmes l’océan Arctique côtier et hauturier. côtiers et la biodiversité des océans polaires et sur les populations Mots-clés : climat, glace de mer, biodiver- autochtones en Arctique dans un sité, circulation océanique, biogéochimie, contexte de fonte du pergélisol côtier, services écosystémiques, pollutions, conti- d’érosion sous-glaciaires des glaciers nuum terre-mer, socio-écosystèmes. maritimes et des ice-shelves, de chan- gements de la distribution de la banquise côtière et de modifications hydrologiques des eaux côtières. 3. Caractériser la distribution et l’impact des pollutions polaires actuelles (métaux, pesticides…) et émergentes (bruit, plastiques, liées à la navigation, introduction d’es- pèces…) dans un contexte de change- ment climatique modifiant lui-même les compar timents pélagiques et benthiques. 4. Intégrer les enjeux géostraté- giques liées aux océans polaires, en particulier pour anticiper les consé- quences de l’évolution de la banquise en termes d’usage, sur les plans juridique, géopolitique et opérationnel. 21 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
DÉFI 3 AMÉLIORER L A PROTECTION DÉFI 3 A MÉ L I O R E R L A P R O T E C T I O N E T L A R É S IL IE N C E D E S MIL IE U X ET LA RÉSILIENCE DES MILIEUX MARINS PA R L E D É V E LO P P E M E N T M A R IN S PA R L E D É V E L O P P E ME N T DE NOUVELLES APPROCHES I N T É G R AT I V E S D E G E S T I O N D E N O U V E L L E S A P P R O C HE S IN T É G R AT I V E S D E G E S T I O N découlent d’un ensemble de causes sous- jacentes, qui reposent sur des valeurs sociales et des pratiques incluant les sys- tèmes de production et les modes de consom- mation, la dynamique et les tendances EN JEU X démographiques, les flux financiers et E T CON T E X T E commerciaux, les innovations technolo- giques et la gouvernance, depuis le niveau local jusqu’au niveau mondial. Les changements globaux survenus au cours des 50 dernières années se sont pro- Les trajectoires actuelles en termes de duits à un rythme inédit dans l’histoire de conservation et d’exploitation durable de l’humanité, entraînant une diminution l’océan ne permettront pas d’atteindre les drastique de la biodiversité marine mais objectifs 2030 du développement durable, aussi des biens et services écosystémiques et notamment l’ODD 14. Pour les atteindre, pourtant clés qui lui sont associés. Les des changements en profondeur sur les facteurs directs qui ont eu les incidences plans économique, social, politique, tech- les plus lourdes sur la détérioration de la nologique voire juridique sont indispen- nature à l’échelle mondiale sont, par ordre sables. Et si la mise en œuvre des stratégies décroissant : la modification de l’utilisation et mesures de conservation et de gestion des terres et des mers, l’exploitation directe plus durable de l’océan a progressé ces dix des organismes, les changements clima- dernières années, avec une augmentation tiques, la pollution et les espèces exotiques notable du nombre d’Aires Marines Proté- envahissantes. gées (AMP) et un taux de couverture de 22 % de l’espace maritime français en 2019, Dans les écosystèmes marins, il est reconnu seuls 1,6 % des aires protégées bénéficient que c’est l’exploitation directe des orga- d’une protection renforcée (0,04 % si l’on nismes, principalement la pêche, qui a considère les seules eaux territoriales l’incidence relative la plus importante sur métropolitaines). la dégradation des ressources biologiques, suivie par le changement d’utilisation des Des études scientifiques basées sur des terres et des mers (cf Rapport IPBES 20192). retours d’expériences3 ont montré que les Mais les changements globaux, au-delà de bénéfices des AMP sont nombreux, de nature leur impact sur les ressources biologiques, écologique, halieutique, et socio-écono- 2 — www.ipbes.net/global- entraînent aussi des modifications profondes mique, et débordent le plus souvent à l’ex- assessment des écosystèmes marins, en particulier des térieur des limites de l’aire. Ces bénéfices 3 — Rebuilding marine habitats côtiers comme les récifs lagonaires, sont d’autant plus importants que les aires life — Carlos M. Duarte et al. — Nature | Vol 580 | 2 dont le rôle dans la protection naturelle du protégées sont grandes, établies depuis April 2020 | 39 littoral peut être affaibli. Ces forçages directs longtemps, font l’objet d’une protection 22 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
DÉFI 3 forte et s’intègrent au sein d’un réseau bien déjà obtenues ou des zones susceptibles de AMÉLIORER L A PROTECTION relié permettant une connectivité écolo- l’être, il sera important d’étudier les ques- ET LA RÉSILIENCE DES MILIEUX MARINS gique. À court terme, la qualité de l’habitat tions relatives à leurs usages, à leur gestion PA R L E D É V E LO P P E M E N T est améliorée : des espèces disparues opèrent et à leur gouvernance en tenant compte DE NOUVELLES APPROCHES un retour, et d’autres voient leurs effectifs des enjeux de souveraineté, de protection I N T É G R AT I V E S D E G E S T I O N et leurs caractéristiques se régénérer. et d’exploitation. Cette question fait natu- rellement le lien avec le défi 4. C’est ainsi qu’en octobre 2019, à la suite de sa rencontre avec les scientifiques de la Mots-clés : biodiversité, services écosys- Plateforme Intergouvernementale sur la témiques, zones étendues, préservation, Biodiversité et les Services Ecosystémiques résilience, restauration, compensation, 4 — Stratégie (IPBES), porteurs de constats alarmants aires marines protégées, parcs naturels nationale pour les aires sur le déclin des espèces vivantes, le Pré- marins, gouvernance, gestion durable, protégées 2030 https:// www.ecologie.gouv.fr/ sident de la République a annoncé vouloir océan bien commun. sites/default/files/DP_ protéger 30 % des eaux et du territoire natio- Biotope_Ministere_strat- aires-protegees_210111_5_ nal d’ici à 2022, dont « un tiers en pleine GSA.pdf naturalité »4. C’est une ambition particu- lièrement forte pour le milieu marin, puisque la France dispose du deuxième espace maritime le plus étendu au monde (plus de 10 millions de kilomètres carrés avec les outremers), rassemblant 10 % des récifs L ES A X ES coralliens et 20 % des atolls de la planète, et accueillant en outre-mer près de 10 % de DE RECHERCHE la diversité mondiale des espèces marines. Trois axes de recherche pourront être envi- En parallèle, des actions à grande échelle sagés pour ce défi qui nécessitera des en faveur de la préservation de l’océan approches très interdisciplinaires et qui peuvent être envisagées. Des négociations impliquera aussi des parties prenantes : menées sous l’égide des Nations Unies sont en cours, sur le plan juridique et politique, 1. Définir les conditions environ- pour donner un statut aux zones marines nementales et de gouvernance situées au-delà des juridictions nationales optimales de mise en œuvre des (ZAJN), qui représentent 45 % de la surface AMP (Aires Marines Protégées) et de la Terre, et en protéger la biodiversité des Parcs Naturels Marins, en ana- et en encadrer l’utilisation à travers le projet lysant les expériences antérieures de traité dit BBNJ — pour Biodiversity (contraintes, bénéfices obtenus, mode Beyond National Jurisdiction. Au-delà de de gouvernance, implication des parties cet instrument intergouvernemental en prenantes, moyens de surveillance cours d’élaboration, une initiative inter- déployés…) et en proposant de nouvelles nationale se déploie actuellement afin de approches. qualifier, plus largement, l’Océan de « Bien Commun ». 2. Analyser les verrous scientifiques, Depuis 2003, la France a engagé un grand juridiques, politiques, socio-éco- programme d’extension de son plateau nomiques et émotionnels pour continental : plus de 700 000 km² ont ainsi promouvoir la notion d’« Océan, d’ores et déjà été obtenus. Ce programme bien commun ». Les projets portés est appelé à se poursuivre jusqu’en 2030, par les communautés SHS (politologues, avec un enjeu qui porte sur plus de économistes, sociologues, anthropolo- 500 000 km² supplémentaires. Au regard gues, géographes et juristes), en asso- de la richesse des fonds marins des zones ciation ou en collaboration avec des 23 P R O G R A M M E P R I O R I TA I R E D E R E C H E RC H E « O C É A N E T C L I M AT » : U N O C É A N D E S O LU T I O N S
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