Itoire d'exception? - Sepanso

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Itoire d'exception? - Sepanso
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                            R e v u e Tr i m e s t r i e l l e d e l a S E PA N S O                                N       162

                                  Par                      d e  s Pyrénées
                                     c           National ter ritoire d'excepti
                                                       n                        o                                   n?
                                                                    U
N° 162 - Hiver 2014 - 5 €

                            Fédération des Sociétés pour l’Étude, la Protection et l’Aménagement de la Nature dans le Sud-Ouest
Itoire d'exception? - Sepanso
SUD-OUEST NATURE
                                   édité par la

                             SEPANSO
     Fédération des Sociétés pour l'Etude, la Protection
       Aménagement de la Nature dans le Sud-Ouest
                     Association loi 1901 à but non lucratif
     Affiliée à France Nature Environnement - Reconnue d'utilité publique

                                  La SEPANSO agit dans toute l'Aquitaine, et éventuellement dans les

    m m a i r e
 So
                                  départements voisins, dans le but de sauvegarder la faune et la flore na-
                                  turelles, en même temps que le milieu dont elles dépendent et d'oeuvrer
                                  en faveur de la protection des sites et du cadre de vie.

   EDITORIAL                             Inondations, érosion marine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .1
   ACTUALITÉS                            Nouvelles en bref . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .2
   BIODIVERSITÉ                          Trame Verte et Bleue Régionale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .4
                                         Les espèces exotiques envahissantes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .7
                                         Un vendredi 13 qui porte bonheur aux opposants aux OGM ....9
   ZOOM SUR...                           Parc national des Pyrénées, une charte pour un territoire . . . . .
                                         d'exception ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .10
   RÉSERVES NATURELLES                   Marais de Bruges :
                                         L'Ecrevisse de Louisiane Procambarus clarki . . . . . . . . . . . . . . . . .16
                                         Etang de Cousseau :
                                         Observations de la Loutre sur Cousseau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .17
                                         Banc d'Arguin :
                                         Bilan d’un hiver tumultueux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .17

   POINT DE VUE                          Accidents de chasse. Le retour de la chevrotine
                                         est-il la solution ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .18
   POINTS NOIRS                          Points noirs environnementaux en Dordogne                                                               19

 Prix du numéro : 5 €                                                                                                            Hiver 2014

                            En couverture                          (photos 1ère et 4ème de couverture d'André Etchelecou)

                            Les auteurs conservent l'entière responsabilité des opinions exprimées dans les articles de ce numéro.
                            La reproduction, partielle ou intégrale, des textes et illustrations est acceptée après autorisation préalable.

                         Fédération SEPANSO - 1-3 rue de Tauzia - 33800 BORDEAUX
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E D I TO R I A L

    INONDATIONS, EROSION MARINE : LE RETOUR DU REFOULÉ

L
         es intempéries actuelles semblent, tout d’un coup, faire prendre conscience à l’opinion de
         l’incontournable puissance de la nature. Comme si cette opinion se réveillait brutalement d’un long
         sommeil, découvrant soudain sa vulnérabilité vis-à-vis de désordres naturels qui ont toujours exis-
té, mais qui aujourd’hui occupent dorénavant une nouvelle place dans l’espace médiatique. A vrai dire, ce
long sommeil a été celui des fameuses « trente glorieuses » et au-delà, pour lesquelles, on peut le dire
sans exagérer, la nature avait disparu de son agenda. Car, comme le souligne un ouvrage universitaire ré-
cent1, le bilan des ravages écologiques provoqués par cette glorieuse époque, perçue aujourd’hui avec nos-
talgie par les adorateurs des taux de croissance, n’a pas été encore fait. Appartenant à une génération qui
l’a vécue douloureusement comme beaucoup de pêcheurs, chasseurs et naturalistes, je peux effectivement
témoigner de la disparition de la nature dans l’imaginaire collectif, du côté des décideurs comme de celui
des citoyens. C’était l’époque où les communes coupaient les platanes de leurs places pour faire des par-
kings, tandis que les ingénieurs des Ponts et Chaussées faisaient de même le long de nos routes ombragées
pour les élargir au profit de la nouvelle DS automobile ! Où tout le monde ignorait la pollution des rivières
car il s’agissait « de la fatalité du Progrès » !
De leur côté, pour moderniser notre agriculture paysanne jugée archaïque, les bulldozers du remembre-
ment entraient en action pour bouleverser des paysages lentement façonnés par la main de l’homme qui
alors ne disposait pas des moyens techniques pouvant les faire disparaître2. Qu’importaient alors les cris
de quelques lanceurs d’alerte solitaires, il fallait foncer vers l’avenir radieux de la modernisation de la
France ! Toute objection était alors rejetée avec mépris : vous voulez donc revenir au Moyen Âge ?? C’est
ainsi que notre côte aquitaine a vu fleurir de multiples constructions de Soulac à Hendaye en passant par
Lacanau avec son Océanide initiée par la MIACA au début des années 70, alors même que déjà les bloc-
khaus de l’organisation Todt commençaient à glisser lentement dans les flots de l’Océan. Ailleurs, les plai-
nes inondables de la Garonne, de la Dordogne, de l’Adour et des Gaves voyaient progresser inexorablement
l’urbanisation, la mémoire des risques naturels s’étant effacée de la tête des hommes. Il suffisait pourtant
de se référer à la crue de la Garonne en 1930 pour imaginer le désastre représenté par un tel scénario pour
la zone commerciale de Tartifume, le secteur de Latresne, de Bordeaux Nord ou du Bec d’Ambes que l’on
a laissé coloniser par l’industrie et les grandes surfaces, dans l’inconscience la plus totale. Il est vrai que le
rythme des agendas électoraux n’est pas celui de la nature !
Aujourd’hui donc, dans tous les domaines, tant économique que social et écologique, nous voilà arrivés au
bout du chemin, car dorénavant il va nous falloir compter avec la puissance de la nature que nous avions
oubliée, aveuglés par celle de la Technique qui nous avait donné l’impression d’en être émancipés pour
toujours. Désormais, les comptes sont faits et il va nous falloir commencer à passer à la caisse, dès au-
jourd’hui pour la génération actuelle, et demain pour la prochaine. C’est à dire, non seulement réparer les
dommages actuellement émergeants et surtout prévoir ceux à venir, engendrés par le réchauffement cli-
matique que nous continuons à alimenter par notre mode de vie insoutenable. Pour tous ceux qui aiment
et respectent la terre, il s’agit là d’une tâche immense, peut-être d’ailleurs au-dessus des forces de
l’humanité, mais qui devrait être considérée comme une priorité absolue, nous obligeant à sortir urgem-
ment la tête actuelle du guidon.
                                                                                       Simon CHARBONNEAU

1 Céline PESSIS, Sezin TOPCU et Christophe BONNEUIL : Une autre histoire des « trente glorieuses » : modernisation, contes-
tations et pollutions dans la France d’après guerre. Editions La Découverte 2013.
2 Voir le témoignage de mon père récemment réédité : Tristes campagnes. Editions Parangon 2013.

                        S UD -O UEST N ATURE - R EVUE   TRIMESTRIELLE DE LA   SEPANSO - N° 162
Itoire d'exception? - Sepanso
au fil des mois
2
  Le progrès technique                   et internet qui n’ont rien de vir-           Elle revient à la surface dans tous
     est-il un piège ?                   tuel car ils ont besoin d’énergie            les débats entre « les écologistes
                                         électrique provenant du ther-                hors sol » et les représentants po-
Jacques Ellul avait posé le problè-      mique, du charbon par ex.. Cette             litiques « responsables », tels des
me en premier : dans quelle me-          trajectoire de la modernité tech-            économistes, des banquiers, des
sure l’évolution de notre société        nique dépendant largement de                 industriels, des agriculteurs de la
ne se trouve-t-elle pas aujour-          l’électricité peut se rompre et              FNSEA, la gauche en général et les
d'hui déterminée par un progrès          connaître une fin brutale.                   syndicats. Pour ces anthropocen-
technique dont personne ne peut          Il serait trop facile de se laisser al-      tristes, l’homme est en position
contrôler l’expansion ?                  ler au catastrophisme et à la pas-           centrale ou dominante. Ils n’hé-
Il dénonçait alors le piège dans le-     sivité car il existe de nombreuses           sitent pas à affronter ces « farfe-
quel nous sommes tombés : celui          réponses en favorisant par exem-             lus » qui ne s’intéressent qu’à des
de l’homme convaincu « qu’on             ple la proximité, en développant             futilités, à des choses « inutiles »,
n’arrête pas le progrès ». Le dis-       des outils simples, des industries           des petites fleurs, des petits zo-
cours du pouvoir, des lobbies, des       à basse technologie, donner à la             ziaux ou autres bestiaux sans ren-
sciences appliquées (OGM, nano,          lenteur une valeur d’efficacité ce           tabilité (espèces non domes-
biotechnologies, communications          qui permet de réfléchir, de lutter           tiques, non comestibles, non
etc) se construit selon cet adage        contre l’obsolescence program-               chassables, non commercialisa-
commun. Ces discours sont inté-          mée, de se libérer corps et esprit           bles), voire sauvages, effrayantes,
grés par les « évolutionistes ».         des systèmes techniques                      dangereuses ou nuisibles. Ils les
Pourtant, dans les temps anciens,         D’après un article d’Alain Gras Pris dans   présentent alors comme des
il y a eu des résistances au « pro-          la toile de la technique paru dans La    adeptes du « retour au moyen-
grès technique » : par exemple la                         Décroissance - Oct. 2013    âge ». Pour eux les écologistes
Chine a refusé le canon et le mis-                                              FC    sont des empêcheurs de tourner
sile après les avoir expérimentés.                                                    en rond (c’est à dire de produire,
Le progrès : colosse au pied                    Des choses plus                       chasser, exploiter, délocaliser)
d’argile ?                                       importantes...                       Derrière ces phrases se cachent le
Les systèmes techniques sont en                                                       mépris de la nature et d’autres vi-
effet de plus en plus interconnec-       Peut-on tolérer quelque part des             sions des rapports de l’homme à
tés : ainsi les transports ont be-       animaux sauvages qui font ce                 celle-ci. Eux bien sûr sont les vrais
soin de pétrole, de routes, de bi-       qu’ils veulent, qui vont où ils veu-         « écologistes » car ils font du « dé-
tume (encore du pétrole), de télé-       lent ? Au lieu d’être soumis à not-          veloppement durable » depuis
communications...                        re volonté ? La réponse est NON              toujours. Ne changeons surtout
Les villes exigent des canalisations     sans équivoque...                            pas nos pratiques de conso-mma-
d’eau, des réseaux de toutes sor-        Encore une fois la Nature c’est, ce          tion, de production ... ! L’emploi
tes, des égouts avec des pompes,         qui n’est pas nous (François                 est prioritaire par rapport à un
des camions pour la distribution         Terrasson)                                   environnement de qualité.
etc. Tous ces réseaux représen-          Les défenseurs de la Nature font             Chacun a sa vision du monde.
tent l’hyper-complexité de la mo-        sourire certains, en agacent d’au-           Pour comprendre les controver-
dernité : comme l’atome, la molé-        tres : alors ils dénigrent les « éco-        ses, liées à la protection de la
cule, la bactérie autant que le          logistes de salon » défenseurs des           Nature (avant), appelée « envi-
corps qu’elle colonise, la puce          « petites fleurs » ou des « petits           ronnement » maintenant, il faut
électronique, l’ordinateur. Notre        oiseaux »                                    prendre les priorités de chacun en
vie quotidienne est prisonnière          La phrase « il y a des choses plus           compte.
de la toile d’araignée tissée par la     importantes que de s’occuper
                                                                                       D’après Baudouin de Menten déc 2013
méga-machine technicienne. Ce            de... » est un véritable serpent de          http://www.buvettedesalpages.be/2013
macro-système se joue des fron-          mer chez tous les adversaires pro-             /12/des-choses-plus-importantes.html
tières et des états, le dispositif       fonds de la Nature et donc de                                   Brèves SO Janv 2014
technicien multiplie les interdé-        l’écologie.                                                              SO 13-1-14
pendances, sa soif d’énergie ne
fait que croître : vrai pour Google

                         S UD -O UEST N ATURE - R EVUE   TRIMESTRIELLE DE LA   SEPANSO - N° 162
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Actualités
                                                                                                                       3
                                          - dioxines ou polluants orga-
     La France importe                    niques persistants (POP) cancéri-
                                                                                       Sans être « angélique », le bio est
   illégalement du bois                   gènes de type II s’accumulant
                                                                                       débarrassé des pesticides ou en
      exotique : trafic                                                                tout cas en contient moins, bien
        dénoncé par                       dans les graisses, ainsi le lait ma-
                                                                                       que ceux-ci soient partout dans
        Greenpeace                        ternel en contient ;
                                                                                       l’environnement.
                                          - pesticides dont les champs sont
                                                                                                                       FC
Des grumes de sapelli, sipo, kossi-       largement « tartinés » alors qu’ils
po et bossé, essences de bois exo-        sont limités ou interdits mais leur
tique provenant du bassin du              présence persiste.
Congo ont été saisies par des mili-       Des confrères au professeur                     Le Grand Orchestre
tants de Greenpeace au port de            Coumoul travaillent sur les « mé-                Animal de Bernie
Caen, un des trois ports avec La          langes » de ces polluants car cela                    Krause.
Rochelle et Nantes concernés par          répond à une réalité environne-
                                          mentale à laquelle on est en per-
                                                                                          Flammarion, 2013.
le déchargement de bois exo-
tique.                                    manence exposé. Les dioxines et
Une enquête de terrain a démon-           les pesticides par exemple : le
                                                                                       C’est une approche de la nature
tré que ce bois provenait d’un            cocktail des deux, qui provoque-             originale. Ce n’est plus la vue qui
village non compris dans le péri-         rait un effet différent de celui             est sollicitée pour prendre
mètre de coupe « officiel » car il        provoqué par chacun des pol-                 contact avec notre environne-
ne comportait pas de numéro du            luants, est très peu étudié en               ment, mais l’ouïe. L’auteur,
                                          France et en Europe.                         Bernie Krause né en 1938 est
permis annuel de coupe.                                                                musicien, naturaliste et profes-
Cette action a permis de révéler          Le professeur Coumoul travaille              seur en bio-acoustique. Il a pas-
que la loi sur l’avenir de l’agricul-     plus particulièrement sur le « mé-           sé sa vie à enregistrer sur ma-
ture ne tient pas compte du               lange de dioxine et de pesticides »          gnétophone la musique de la na-
Réglement européen entré en vi-           trouvés dans la chaîne alimentai-            ture : la géophonie (sons de
                                                                                       l’eau, du vent, de la pluie) et la
gueur en mars 2013 réprimant la           re. Il a remarqué que ce « mélan-            biophonie (son animal). « Les
mise sur le marché du bois illégal :      ge » majorait l’agressivité d’une            habitats que j’ai enregistrés
15 à 30 % du bois commercialisé           cellule tumorale du côlon car les            étant en partie dégradés ou
dans le monde est illégal dont            POP se concentrent davantage                 disparus aujourd’hui, ma collec-
40 % du bois importé en Europe.                                                        tion représente des milliers de
                                          dans les aliments gras, les vian-            biophonies que personne ne
C’est ainsi que l’Europe dont la          des, les poissons, les produits lai-         pourra plus jamais entendre
France contribue à la déforesta-          tiers.                                       dans leur état d’origine ». Au tra-
tion en Afrique.                          Son équipe se penche aussi sur               vers de sa quête des espaces na-
                       SOD 12-1-2014                                                   turels sauvages, c’est-à-dire sans
                                          les incidences de l’alcool conjugué          bruit d’origine humaine, il nous
                                          aux dioxines.                                fait découvrir la mélodie des
 Pesticides : le contenu                  A ce stade de leurs recherches, ils          sons de la nature. Les oiseaux,
  de nos assiettes est                    ont constaté que l’addition des              les mammifères, les batraciens
                                                                                       chantent en harmonie les uns
    plutôt alarmant                       différents polluants dans notre
                                                                                       avec les autres. Le bruit d’un
                                          alimentation se révèle plus délé-            avion suffit à les arrêter et par-
A Bordeaux, en décembre 2013 se           tère pour notre santé qu’un seul             fois pendant plusieurs heures. Il
sont tenues les 11e journées fran-        analysé isolément.                           nous donne envie de s’enfoncer
cophones de la nutrition aux-             Que faire pour limiter cet « em-             sans bruit dans un espace sauva-
quelles assistaient professionnels        poisonnement » ? Faire appel aux             ge pour fermer les yeux et écou-
de l’alimentation, chercheurs, in-                                                     ter le « Paysage sonore ».
                                          producteurs locaux, aux produits             Comme il le dit, « les endroits où
dustriels de l’agroalimentaire etc        de saison, simplement parce que              le bruit humain n’a pas encore
Xavier Coumoul professeur de              ces produits sont moins altérés              porté atteinte aux biophonies et
biochimie et toxicologie molécu-          par les pesticides, fongicides ou            géophonies sont merveilleuse-
laire qui travaille sur le contenu        autres conservateurs : tout le               ment revitalisants et sources
de nos assiettes dénonce celui-ci                                                      d’inspiration ».
                                          monde n’ayant pas les moyens de                                           J.M. F.
« riche » en :                            se payer du « bio » , et c’est dom-
                                          mage.

                          S UD -O UEST N ATURE - R EVUE   TRIMESTRIELLE DE LA   SEPANSO - N° 162
Itoire d'exception? - Sepanso
bIODIVERSITé
4
              Trame Verte et Bleue Régionale :
             Le point sur l’élaboration du SRCE
C. Gouanelle,
administratrice SEPANSO
                                         Il faut reconnaître que cette de-            Après une série d’ateliers (thè-
       e Schéma Régional de

L
                                         mande a été satisfaite puisque               mes : Agriculture, Forêt, infras-
       Cohérence         Ecologique      tout le réseau Natura 2000 fait ac-          tructure, urbanisme) effectués au
       (SRCE) est censé assurer la       tuellement partie de la TVB.                 printemps 2013, des listes
cohérence entre les projets              Nous avons également pu propo-               d’objectifs et de mesures à mett-
d’aménagement du territoire et la        ser d’autres zones naturelles (fo-           re en œuvre ont été proposées
Trame Verte et Bleue (TVB) dont
                                         rêts de feuillus ou mixtes, boca-            aux différents groupes de travail
l’élaboration avait été décidée
lors du Grenelle de l’Environne-         ges…) à intégrer dans les sous-              départementaux (automne 2013)
ment. C’était avant qu’il soit dit       trames correspondantes, mais                 qui devaient les affiner, ceci dans
que « l’environnement, ça com-           toujours avec le regret que de               le cadre d’ateliers constitués par
mence à bien faire » !                   nouvelles études de terrain ne               grandes régions naturelles (7
L’objectif du SRCE est de « main-        puissent avoir lieu, permettant              pour l’Aquitaine : Littoral, vallées
tenir ou de restaurer les capacités      d’identifier d’autres sites à pré-           alluviales majeures et marais lit-
de libre évolution de la biodiversi-     server.                                      toraux estuariens ; Massifs fores-
té au sein des territoires, notam-                                                    tiers des Landes de Gascogne, de
ment en maintenant ou en réta-            Etapes de l’élaboration du SRCE             la Double et du Landais ; Périgord
blissant les continuités écolo-                                                       blanc, Sarladais et Nontronnais ;
giques ».                                • En Aquitaine, c’est la Région qui          Coteaux et plateaux agricoles à
En Aquitaine, l’élaboration du           dès 2009 s’est empressée de met-             dominante calcaire du Nord de la
SRCE est co-pilotée par l’Etat via       tre en place le dispositif prélimi-          Garonne ; Coteaux et plateaux
la DREAL et par la Région.               naire à l’élaboration de la TVB : un         agricoles de l’Adour ; Massif
Bien que le travail ait démarré dès      bureau d’études a été engagé                 Pyrénéen)
2009, c’est en 2011 que le Comité        pour faire un inventaire des zones           Au cours de la dernière réunion
régional TVB a été officiellement        naturelles, non fragmentées, déjà            du Comité Régional TVB (31 jan-
mis en place. Il comprend 5 collè-       répertoriées et susceptibles de              vier 2014) ont été présentées la
ges : Etat, Elus, Socio-profession-      constituer des réservoirs de biodi-          Trame Verte et Bleue ainsi que les
nels et usagers, Associations            versité(RB), ainsi que des voies de          propositions de mesures, ceci
(c’est pourquoi la SEPANSO a été         communication ou corridors éco-              avant que ne débutent les consul-
sollicitée), le cinquième collège        logiques (CE) entre les différents           tations et enquête publique en
étant celui des Scientifiques et         RB. Il fallait en outre identifier les       vue de l’adoption du SRCE.
Experts.                                 obstacles (zones urbanisées, in-
L’avis du Comité Scientifique            frastructures…) empêchant la lib-
Régional de Protection de la             re circulation des espèces dans les
Nature (CSRPN) est sollicité à           CE. La TVB résulte de la cartogra-
chaque étape.                            phie des RB, CE et obstacles.

Participation de la SEPANSO :            • En 2012 la première phase ex-
Nous avons été invités à donner          ploratoire (TERA) a été suivie de
notre avis à chacune des étapes          l’état des lieux des continuités
de cette élaboration, et n’avons         écologiques, l’identification des
pas hésité à marquer notre désac-        enjeux et la cartographie de la fu-                Les éléments du SRCE
cord lorsque des zones déjà re-          ture TVB, en même temps que
connues comme d’importance               démarrait l’élaboration des plans            Le document se compose de plu-
nationale, voire européenne tel-         d’action stratégiques.                       sieurs volets (diagnostic, descrip-
les que les sites Natura 2000,                                                        tion des RB et CE, enjeux, atlas
n’étaient pas systématiquement           • Où en est-on en ce début de                cartographique, plans d’action
intégrées dans le projet de TVB.         2014 ?                                       stratégiques.. :

                         S UD -O UEST N ATURE - R EVUE   TRIMESTRIELLE DE LA   SEPANSO - N° 162
Itoire d'exception? - Sepanso
Biodiversité
                                                                                                                          5
• Le diagnostic du territoire régio-          même que les éléments fragmen-             Les enjeux infra-régionaux par
nal présente les grandes régions              tants (infrastructures de trans-           grandes régions naturelles ont été
naturelles avec leurs caractéris-             port, urbanisation, obstacles aux          discutés lors de la concertation
tiques et la biodiversité régionale           continuités aquatiques), sont pré-         par département.
(espèces à enjeux majeurs de                  sentés par grande région naturel-
conservation, faune et flore sau-             le (7 régions citées plus haut).
vages avec les politiques existan-            Sont également présentés les ob-
tes de conservation), les grandes             jectifs de préservation ou de re-
continuités naturelles (terrestres,           mise en état des RB et des CE, les
aériennes et aquatiques), ainsi               cours d’eau classés et les zonages
que les interactions entre les acti-          du SDAGE 2010-2015 à préserver.
vités humaines et la biodiversité
(problèmes liés à l’agriculture et            • Les enjeux relatifs à la préserva-
la sylviculture, à l’urbanisation             tion et la remise en bon état des
croissante et au maillage                     continuités écologique, à l’échelle
d’infrastructures de transport,               régionale : les cartes présentent
l’activité touristique, l’exploita-           les zones où l’urbanisation et
tion des ressources minérales                 l’artificialisation des sols sont à li-
l’implantation d’activités produc-            miter, le réseau d’infrastructures         • Un atlas cartographique (cartes
trices d’énergies renouvelables).             à maitriser, les zones humides, les        à l’échelle du 1/100 000ème) fait
                                              continuités latérales et longitudi-        apparaître les composantes et les
• La présentation et la description           nales des cours d’eau à préserver          objectifs de préservation pour les
des continuités écologiques rete-             ou remettre en bon état, un                RB, les CE, les cours d’eau et les
nues dans la TVB régionale : ces              maillage de milieux ouverts à              éléments fragmentants.
continuités sont constituées de               maintenir, une mosaïque de mi-             • Des plans d’action stratégiques
réservoirs de biodiversité (RB) des           lieux favorables au déplacement            présentés sous forme de ta-
zones vitales riches en biodiversi-           des espèces dans le massif des             bleaux (d’objectifs, de niveau de
té et des corridors écologiques               Landes de Gascogne à préserver,            priorité, d’actions à entreprendre,
(CE) qui les relient.                         de même que dans l’arc forestier           d’outils existants ou à développer,
L’approche retenue est une cons-              du Périgord, le littoral très fragile,     de partenaires et de finance-
truction par type de milieu (sous-            l’espace montagnard et le mailla-          ments potentiels).
trames) : six sous-trames pour la             ge de milieux naturels diffus des          Les actions sont catégorisées en :
trame verte, deux sous-trames                 grandes régions naturelles à do-            - actions répondant aux orienta-
pour la trame bleue.                          minante agricole du Nord de la              tions transversales et aux enjeux
Les continuités écologiques, de               Garonne et de l’Adour.                      transversaux (amélioration des
                                                                                          connaissances pour identifier les
                                                                                          continuités écologiques et leur
                                                                                          diffusion auprès des acteurs du
                                                                                          territoire, sensibilisation et for-
                                                                                          mation des acteurs du territoire,
         Trame Verte                                        Trame Bleue                   limitation de l’urbanisation,…)
                                       Interface
                                                                                          - actions territorialisées par gran-
         • Boisements de feuillus et forêts mixtes                                        de région naturelle, en fonction
    • Boisements de conifères                                                             du particularisme des régions
    et milieux associés                                          • Cours d'eau            naturelles citées plus haut.
    • Milieux ouverts et semi-      • Milieux humides                                    Des fiches concernant les mesu-
    ouverts
    • Milieux côtiers
                                                                                         res relatives aux actions prioritai-
    • Milieux rocheux d'altitude                                                         res figurent également dans le
                                                                                         document.
                           • Systèmes bocagers
                                                                                         • Un dispositif de suivi et
                                                                                         d’évaluation sera également mis
                                                                                         en place.

                            S UD -O UEST N ATURE - R EVUE   TRIMESTRIELLE DE LA   SEPANSO - N° 162
Itoire d'exception? - Sepanso
Biodiversité
    6
                                                               Application au niveau                       Un comité de suivi et évaluation
                                                                  infra-régional                           est également prévu.
    Articulation de la TVB avec les
                                                                                                           La demande peut être faite en
         politiques publiques
                                                       L’échelle régionale (1/100 000)                     phase de démarrage ou en cours
                                                       n’étant pas adaptée pour une uti-                   d’élaboration d’un SCoT ou PLU.
Afin, théoriquement, de ne pas
                                                       lisation locale, des trames plus                    Ce serait gratuit pour les porteurs
ajouter une strate supplémentai-
                                                       précises devraient être élaborées                   de projets (financement par l’Etat
re au mille-feuille existant, il
                                                       localement. Les RB, CE et enjeux                    et la Région).
convient de mettre le SRCE en co-
                                                       devront faire l’objet d’un travail
hérence avec tous les documents
                                                       spécifique à l’échelle des SCoT                     • En Béarn : une expérience de re-
dont les objectifs sont censés al-
                                                       avant une prise en compte au ni-                    connexion de tourbières (plaine
ler dans le même sens. Ainsi :
                                                       veau des PLU.                                       d’Ogeu) par le Conservatoire des
• Le SRCE doit prendre en compte
                                                                                                           Espaces Naturels (CEN Béarn)5.
les orientations nationales et le
                                                                                                           Un inventaire des zones humides
Schéma Directeur d’Aménage-
                                                                                                           a montré que des tourbières à
ment et de Gestion des Eaux
                                                                                                           Sphaignes étaient déconnectées
(SDAGE), celui-ci devra en retour
                                                                                                           et en régression dans ce secteur.
intégrer la TVB.
                                                                                                           En partenariat avec un agriculteur
• Le SRCE doit être pris en comp-
                                                                                                           le CEN a entrepris de réhabiliter
te dans les documents de planifi-
                                                                                                           les connexions.
cation et les projets de l’Etat (ex.
infrastructures de transport) ainsi                    La grande question étant de sa-                     Tout en reconnaissant la qualité
que dans les Documents de plani-                       voir avec quels moyens les por-                     du travail effectué par les services
fication et projets des collectivités                  teurs de projets (SCoT, PLU et au-                  publics, nous restons pessimistes
territoriales et de leurs groupe-                      tres) vont pouvoir mettre en œu-                    quant à l’efficacité de cet outil
ments (ex. SCoT, PLU, DTADD,                           vre ce SRCE, deux expériences lo-                   supplémentaire, sans portée juri-
SRADT, PRAD, PPRDF…)1 ;                                cales ont été présentées lors de la                 dique réelle, et dont l’application
                                                       dernière réunion du comité régio-                   reste tributaire de la volonté des
• D‘autres documents doivent                           nal TVB :                                           élus territoriaux. Malgré les expé-
être articulés avec le SRCE
                                                                                                           riences intéressantes qui existent
(ORGFH, SCAP, SRCAE, SRIT…)2.                          • En Dordogne : les CAUE4 propo-                    dans certains secteurs, seule une
                                                       sent une « Assistance Continuités                   volonté politique permettra une
Au regard des différents niveaux                       écologiques » aux porteurs de                       réelle préservation de notre envi-
d’opposabilité existants3, on au-                      projets SCoT et PLU. Une expé-                      ronnement.
rait souhaité que le niveau retenu                     rience est en cours sur des espa-
pour la mise en œuvre du SRCE                          ces naturels sensibles (ENS) de
soit nettement supérieur.                              2009 à 2015.
Le SRCE d’Aquitaine sera égale-                        Cette assistance comprend un vo-
ment articulé avec ceux des ré-                        let expertise (en relation avec des
gions voisines (Midi-Pyrénées,                         naturalistes et recherche appli-
Poitou-Charentes et Limousin).                         quée) et un volet accompagne-
                                                       ment (avec écologues, géogra-
                                                       phes…).

1 SCoT (Schéma de Cohérence Territoriale), PLU (Plan Local d’Urbanisme), DTADD (Directive Territoriale d’Aménagement et de Développement
Durable), SRADT (Schéma Régional d’Aménagement et de Développement du Territoire), PRAD (Plan régional d’Agriculture Durable), PPRDF (Plan
Pluriannuel Régional de développement Forestier)
2 ORGFH (Orientations Régionales de la Faune Sauvage et de ses Habitats), SCAP (Stratégie de Création d’Aires Protégées), SRCAE (Schéma Régional
Climat Air Energie), SRIT (Schéma Régional des Infrastructures, des Transports et de l’Intermodalité)
3 Trois niveaux d’opposabilité : la Prise en compte étant le plus bas (possibilité de déroger sous contrôle d’un juge), la compatibilité (nécessité de ne
pas empêcher ou contrarier l’application de la norme de degré supérieur), la conformité (identité obligatoire à la norme de degré supérieur) est la
seule véritable opposabilité.
4 CAUE : Conseil Architecture Urbanisme et Environnement (un par département)
5 Contact CEN : Maud Briand 05 59 04 49 13 ou http://patrimoine-naturel.aquitaine.fr/aquitaine-nature/le-reseau-aquitaine-nature/218-la-carte-des-sites-du-
reseau-aquitaine-nature/tourbiere-de-buzy-et-de-la-plaine-d-ogeu-130/

                                S UD -O UEST N ATURE - R EVUE           TRIMESTRIELLE DE LA   SEPANSO - N° 162
Itoire d'exception? - Sepanso
BIODIVERSITE
                                                                                                                                             7
     Les espèces exotiques envahissantes
Georges Cingal
SEPANSO, administrateur FNE,
membre du Comité Economique                                C’est ainsi que la Commission en
et Social Européen.                                        2006 en définissant le plan
                                                           d’action de l’Union européenne
        e revenons pas sur les dé-

N       bats sémantiques (invasi-
        ve/envahissante, exogè-
ne/exotique). L’expression est
                                                           (UE) pour enrayer la biodiversité a
                                                           souligné que des envahissantes
                                                           dominaient certaines espèces in-
                                                           digènes et qu’il convenait de
désormais consacrée par des tex-
                                                           prendre des mesures générales
tes officiels
                                                           puisque les expériences locales
                                                                                                                          Ecrevisse de Louisiane
Ce sujet préoccupant a fait l’objet                        étaient vouées à l’échec (ce qui ne
                                                           signifiait pas qu’il fallait cesser               La Commission décida de sensibi-
d’un lobbying important de la SE-
                                                           d’agir localement !). En 2008, la                 liser le public en publiant une ex-
PANSO au niveau régional, natio-
                                                           Commission lança une communi-                     cellente plaquette (4 pages) en
nal et européen. Nous souhai-
                                                           cation vers une stratégie de l’UE                 mai 2009
tions que le mal soit traité dès
l’apparition des premières mani-                           relative aux espèces envahissan-                  Les propositions d’action tardè-
festations du problème. Hélas il a                         tes. Les trois étapes se résument                 rent à arriver, mais après l’alerte
fallu attendre que le problème                             ainsi :                                           lancée en février 2013 par
environnemental devienne un                                                                                  l’Agence européenne de l’envi-
                                                           • la prévention reste la démarche
problème économique pour qu’il                                                                               ronnement, la Commission a
                                                           la moins onéreuse et la plus effi-
soit enfin traité.                                                                                           présenté en septembre 2013 une
                                                           cace. Elle nécessite d’instaurer
                                                           des contrôles plus stricts aux fron-              proposition législative pour pro-
Antérieurement la SEPANSO a pu-
                                                           tières et d’échanger les informa-                 téger la biodiversité : « Proposi-
blié en un numéro spécial (120-
                                                           tions aux niveaux régional, natio-                tion de Règlement du Parlement
121 - 2003 ), téléchargeable sur
                                                           nal et international. Ainsi « la                  européen et du conseil relatif à la
notre site Internet1.
                                                           mise en application de la conven-                 prévention et à la gestion de
Déjà à cette époque divers ac-                                                                               l’introduction et de la propaga-
teurs furent sensibilisés à la pro-                        tion pour le contrôle et la gestion
                                                           des eaux de ballast pourrait régler               tion des espèces exotiques enva-
blématique à tel point que                                                                                   hissantes » COM(2013) 620 final –
l'Agence de l’Eau et les Conseils                          un certain nombre de problè-
                                                           mes ».                                            2013/0307 (COD)2.
généraux de Dordogne, de
                                                           • L’éradication est la mesure qui                 Dès lors le Comité Economique et
Gironde, du Lot & Garonne ap-
                                                           s’impose lorsque des espèces en-                  Social fut saisi pour émettre un
portèrent un soutien financier
                                                           vahissantes sont implantées.                      avis. Un groupe de travail fut
pour que nous puissions rééditer
                                                           « Pour couvrir ces zones étendues,                constitué et je fus désigné comme
ce numéro. L’arrivée du frelon
                                                           de telles actions nécessitent une                 rapporteur. Les travaux furent
asiatique en 2005 montra que
                                                           coordination et un financement                    d’autant plus intéressants que
chacun pouvait être affecté.
                                                           centralisé. »                                     l’expérience française (invasives
Le lobbying des scientifiques et                           • Le confinement et l’endigue-                    apportées par les Américains lors
des associatifs a permis dans un                           ment, si l’éradication est impossi-               du débarquement en juin 1944)
premier temps d’obtenir une                                ble, sont nécessaires pour préve-                 fut complétée par les expériences
écoute au Parlement européen et                            nir la propagation des envahissan-                hongroise et polonaise (invasives
au Conseil de l’Europe, puis dans                          tes. « Les autorités locales sont                 apportées par les troupes russes).
un deuxième temps de l’Agence                              souvent les premières concernées                  Toutefois l’immense majorité des
Européenne de l’Environnement                              pour traiter ces problèmes, et doi-               invasives sont les conséquences
et enfin celle de la Commission de                         vent donc être accompagnées. »                    d’actions humaines en temps de
l’Union européenne.                                                                                          paix.
1http://www.sepanso.org/so_nature/son120-121.php.
2http://eurlex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=CELEX:52008DC0789:FR:NOT

                                      S UD -O UEST N ATURE - R EVUE              TRIMESTRIELLE DE LA   SEPANSO - N° 162
Itoire d'exception? - Sepanso
Biodiversité
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                                                                                     Nous espérons une validation ra-
                                                                                     pide par le Conseil et la gestion
Nous sommes directement res-                                                         efficace de la problématique.
ponsables des situations catastro-
phiques identifiées : au niveau de                                                   Conclusions et recommanda-
l’Union Internationale pour la                                                       tions du Comité Economique et
Conservation de la Nature, les ex-                                                   Social Européen
perts ont établi que 80% des pro-
blèmes résultent des échanges                                                        1 - Le CESE apprécie la communi-
commerciaux                                                                          cation de la Commission et la vo-
                                                                                     lonté de faire adopter un instru-
L’avis souligne que le problème                                                      ment juridique communautaire
                                                                     Ragondins
des espèces exotiques envahis-                                                       d’autant plus nécessaire en raison
santes nous concerne tous à un ti-                                                   des problèmes climatiques (mi-
                                         On s’accorde à penser que la fac-
tre ou à un autre puisqu’il y a des                                                  grations naturelles vers le nord),
                                         ture risque encore de s’aggraver.
milliers d'espèces et que tous les                                                   mais il tient à souligner que la ré-
                                         A titre de comparaison les cata-
milieux sont concernés (même si                                                      ponse risque d’apparaître tardive
                                         strophes naturelles sur notre pla-
les zones les moins fréquentées                                                      à ceux qui avaient lancé des aler-
                                         nète ont coûté 92 milliards.
sont les plus touchées : zones hu-                                                   tes il y a longtemps. Le CESE esti-
mides, délaissés, friches … et si la     Le sujet est donc plutôt consen-            me que la Commission aurait in-
gravité est plus ou moins impor-         suel comme nous avons pu le                 térêt à s’assurer que le titre
tante)                                   constater lors de nos travaux, les-         même de la communication con-
                                         quels nous ont amené à dialoguer            vient aux scientifiques dans les di-
• Atteinte à la biodiversité : la        avec divers experts et responsa-            verses langues de l’Union. Nous
compétition interspécifique se           bles politiques des Etats memb-             préférerions le terme d’espèces
traduit toujours par un vainqueur        res. Nous avons fait le même                allogènes invasives (ou envahis-
et un vaincu. C’est ainsi que les        constat lors de nos échanges avec           santes, EEE).
populations d’écureuils roux, de         la Commission et en examinant
vison d’Europe, de cistudes,                                                         2 - Le CESE estime que la lutte
                                         comment le sujet a été traité au
d’écrevisses européennes (pieds                                                      contre les espèces invasives de-
                                         niveau du Parlement qui a organi-
rouges ou blanc), de truites fario,                                                  vrait être considérée comme une
                                         sé une conférence à ce sujet le 17
de certains anatidés et de diver-                                                    grande cause européenne. Il se
                                         décembre. L’immense majorité
ses plantes se sont avérées possé-                                                   félicite de l’engagement de la
                                         pense que nous avons trop tardé
der un dynamisme inférieur à ce-                                                     Commission qui souhaite mettre
                                         et qu’il est urgent de passer à
lui de leurs compétiteurs (écu-                                                      en place un dispositif général de
                                         l’action dans la mesure où l’on
reuil gris de Sibérie, vison d’Amé-                                                  lutte contre les espèces allogènes
                                         peut craindre des effets de syner-
rique, tortue de Floride, écrevisse                                                  invasives. Le CESE conseille toute-
                                         gie entre les invasions et les chan-
de Louisiane, truite arc-en-ciel,                                                    fois à la Commission d’expliquer
                                         gements climatiques. Nous som-
jussies…).                                                                           plus clairement les causes de ces
                                         mes directement responsables
• Atteinte aux infrastructures                                                       problèmes afin que la nécessité
                                         des situations catastrophiques
• Atteinte aux secteurs écono-                                                       d’une mobilisation massive
                                         identifiées : au niveau de l’Union
miques primaires : agriculture, fo-                                                  d’acteurs apparaisse nettement
                                         Internationale pour la Conserva-
resterie, pêche                                                                      pour apporter tous les éléments
                                         tion de la Nature, les experts ont
• Atteinte à la santé : les organis-                                                 utiles à l’organisme en charge du
                                         établi que 80% des problèmes ré-
mes vivants réagissent parfois                                                       dossier.
                                         sultent des échanges commer-
très mal en présence de ces espè-        ciaux.
ces auxquelles ils n’étaient pas ha-
bitués, au point de développer           Vous serez sans doute heureux
des allergies parfois sévères.           d’apprendre que nous avons fait
Le bilan économique, probable-           les mêmes analyses que le groupe
ment sous-évalué mérite toute            de parlementaires et que nous
notre attention : 12,5 milliards         sommes arrivés pratiquement
d’euros par an pour l’UE.                aux mêmes conclusions.
                                                                                      Marais envahi de jussies en fleurs

                        S UD -O UEST N ATURE - R EVUE   TRIMESTRIELLE DE LA   SEPANSO - N° 162
BIODIVERSITé
                                                                                                                       9
Le CESE conseille également à la          experts, des animateurs sur le ter-
Commission de rappeler les ef-            rain et des porteurs de projets.             Un vendredi 13 qui porte
forts déjà consentis pour condui-
re des expériences de lutte contre        5 - Le CESE espère que le disposi-           bonheur aux opposants
des proliférations d’espèces intro-       tif sera effectivement présenté au                  aux OGM
duites posant des problèmes:              cours de la présente mandature
programmes LIFE par exemple. Le           du Parlement européen, ce qui                En janvier 2012, BASF annonçait
Comité émet des doutes quant à            permettrait qu’il soit opération-            qu’il renonçait à vendre Amflo-
                                          nel avant 2016. Le système de                ra, cette pomme de terre OGM
la limitation de la liste des espè-                                                    pour laquelle la Commission de
ces invasives à cinquante espèces.        surveillance tel qu’il est proposé
                                          devra reposer sur une validation             l’Union européenne, sous l’in-
                                                                                       fluence de son président José
3 - Le CESE apprécie la volonté de        des communautés scientifiques
                                                                                       Manuel Barroso, avait délivré
la Commission d’associer les ci-          et contribuer à la définition d’une          une autorisation de commercia-
toyens à la lutte contre les prolifé-     liste d’indicateurs recommandés              lisation en 2010. Le succès com-
rations d’espèces allogènes qui           par la Convention sur la diversité           mercial n’était pas au rendez-
sont constatées actuellement.             biologique, en particulier dans              vous puisque quelques centai-
Mais le CESE apprécierait que la          l’objectif 9: “D’ici à 2020, les espè-       nes d’hectares seulement
Commission invite également les           ces exotiques envahissantes et les           avaient été mis en culture en
citoyens à s’informer et à partici-       voies d’introduction sont identi-            Allemagne, en Suède et en
per à la lutte préventive.                fiées et classées en ordre de prio-          République Tchèque. La SEPAN-
                                                                                       SO avait à Bruxelles en diverses
                                          rité, les espèces prioritaires sont
Le CESE souligne le rôle important                                                     occasions souligné l’ineptie de la
                                          contrôlées ou éradiquées et des              démarche de BASF puisque cha-
joué par des organisations de la          mesures sont en place pour gérer             cun sait qu’il est impossible de
société civile, en particulier pour       les voies de pénétration, afin               récolter 100% des tubercules ;
la gestion d’espaces naturels ou          d’empêcher l’introduction et                 n’est-ce pas d’ailleurs la raison
récréatifs.                               l’établissement de ces espèces”.             pour laquelle aussi peu d’agri-
                                          Le CESE invite la Commission à               culteurs se sont montrés intéres-
4 - Le CESE invite donc la Com-                                                        sés ?
mission à examiner la possibilité         envisager la création d’un Groupe
                                          d’examen scientifique (Scienti-              Nous n’avions pas été les seuls à
de créer un Observatoire des                                                           contester. Au plus haut niveau, la
plantes allogènes invasives, le-          fic Study Group) sur la base du rè-
                                          glement (CE) n° 338/97 qui puisse            Hongrie déposa un recours pour
quel serait à la fois en charge du                                                     obtenir l’annulation de la déci-
tableau de bord européen et en            modifier la liste.
                                                                                       sion européenne ; ce pays reçut
charge des échanges avec les pays         Le document complet est télé-                le soutien de l’Autriche, de la
en dehors de l’UE. Le CESE entend                                                      France, du Luxembourg et de la
                                          chargeable dans toutes les lan-
par Observatoire européen un                                                           Pologne… Le vendredi 13 dé-
                                          gues de l’UE à l’adresse suivante :          cembre la Cour Européenne de
point focal bien identifié qui per-       http://www.eesc.europa.eu/?i=portal.fr.
mettrait de rapprocher les scienti-                                                    Justice a donné raison à ceux qui
                                          nat-opinions.30555
                                                                                       voulaient la fin des champs
fiques et les citoyens de l’UE en                                                      d’Amflora.
les mobilisant sur des problèmes
                                                                                       La SEPANSO s’est réjouie ; elle
concrets. Il serait alors possible                                                     considère comme José Bové que
de valoriser les initiatives locales                                                   la décision juridique est un ca-
et de souligner les convergences                                                       mouflet pour J.M. Barroso.
dans un programme léger de                                                             Nous espérons que la Commis-
communication (pages du site                                                           sion, au moment où il va falloir
Internet). Le CESE estime que la                                                       prendre une décision concer-
création d’un Observatoire, en                                                         nant le maïs OGM Bt de Pioneer
charge de la gestion des ques-                                                         renoncera à passer en force
tions transversales et transdisci-                                                     comme elle l’avait fait pour
plinaires, serait probablement un                                                      Amflora.
élément favorable à la mobilisa-                                                                               G. Cingal
                                                           Myriophylle du Brésil
tion générale indispensable des

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                                       Parc national des Pyrénées,
                                       Une Charte pour ...

Textes et photos :
André Etchelecou
                                           Art. L. 331-1. − Un parc national peut être créé à partir d’espaces ter-
Membre du Conseil Scientifique             restres ou maritimes, lorsque le milieu naturel, particulièrement la
du Parc national des Pyrénées de-          faune, la flore, le sol, le sous-sol, l’atmosphère et les eaux, les paysa-
puis 1980, Président (1995-2009).          ges et, le cas échéant, le patrimoine culturel qu’ils comportent pré-
Coordinateur de la Conférence              sentent un intérêt spécial et qu’il importe d’en assurer la protection
des Présidents de Conseils scien-          en les préservant des dégradations et des atteintes susceptibles d’en
tifiques des Parcs nationaux               altérer la diversité, la composition, l’aspect et l’évolution
(2006-2008).

... Charte, un terme nouveau qui
s’applique désormais aux parcs na-
tionaux français, depuis la loi de
2006 qui a rénové le régime juri-
dique des espaces naturels d’ex-
ception. La complexité naturaliste
dépend maintenant de dispositions
très compliquées, entraînant des
appréciations fort divergentes dans
la conduite des parcs. Une nouvelle
loi, un nouveau décret de création
du parc même pour les parcs natio-
naux existants, et, pour chaque
parc, un décret en Conseil d’Etat
approuvant une charte qui a pour
objet de poser pour la zone cœur,
les modalités d’application des
dispositions réglementaires et les
objectifs de protection, et pour
l’aire d’adhésion, les orientations
de gestion.                                                                                       Vue sur le Pic d'Anie

Autant dire que, localement, la
                                         On a ajouté une instance supplémentaire : outre le conseil d’administration,
Charte devient le document de ré-
                                         son bureau, le conseil scientifique, les parcs nationaux ont désormais un
férence même si, du strict point de
                                         conseil économique, social et culturel. La tutelle de l’Etat est juridiquement
vue juridique, c’est d’abord la loi
                                         maintenue mais très affaiblie, de fait, par une majorité d’élus locaux dans
qui sera la référence des arbitrages
                                         l’instance délibérante, le conseil d’administration.
à faire, et notamment l’article fon-
dateur.
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  un territoire d’exception ?
                                                                      Panorama du Cirque de Lescun, d'Ansabère au Pic de Coutende

Le Parc national des Pyrénées, trois quarts des communes ... favorables
Seuls les Parcs nationaux du Mercantour, des Ecrins et des Pyrénées ont, à ce jour, bouclé l’ensemble de la lourde
procédure instituée par la nouvelle loi de 2006 (arrêtés préfectoraux “constatant l’adhésion des communes à la
Charte” : respectivement 12 août, 8 août, 18 novembre 20131).
On note ainsi que, sur les 86 communes de l’ancien découpage territorial du Parc des Pyrénées, seules 12 commu-
nes des Pyrénées-Atlantiques et 51 communes des Hautes-Pyrénées ont accepté la Charte. Restent donc 23 com-
munes qui ont refusé d’adhérer ou de voter sur l’adhésion.

  Légende :
            Limite Nord du Parc national des Pyrénées
            Limite départementale
            Limite de l'Aire otpimale d'adhésion
            Limite administrative des communes en aire optimale
            d'adhésion
            Zone coeur du Parc national des Pyrénées
            Commune ayant délibéré favorablement
            Commune ayant délibéré défavorablement

1 Je remercie Gilles Landrieu (Parcs nationaux de France) pour la communication de ces arrêtés.

                                   S UD -O UEST N ATURE - R EVUE         TRIMESTRIELLE DE LA      SEPANSO - N° 162
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                                                           « La Charte du parc national définit des
                                                           zones, leur vocation et les priorités de
                                                           gestion en évaluant l’impact de chaque
                                                           usage sur le patrimoine » (art. 2 Arrêté
                                                           du 23 février 2007 arrêtant les principes
                                                                                                                    La vie du PNP : une
Refuser d’être dans la zone                                fondamentaux applicables à l’ensemble                     histoire toujours
d’adhésion conduit théoriquement                           des parcs nationaux)
                                                                                                                       compliquée ...
à la suppression des possibilités de                       Le Parc national des Pyrénées a été struc-
                                                           turé en sept types d’espace avec trois ty-
subventions liées à l’appartenance                         pes d’enjeu :                                         Le Parc national des Pyrénées a
au territoire du parc2 et à une ac-                        Espace à vocation urbaine et architectu-              toujours été en controverses per-
                                                           rale
tualisation du périmètre du PN,                            Espace à vocation agricole et urbaine                 manentes. Rappelons succincte-
pour tracer l’aire d’adhésion obte-                        Espace naturel à vocation agricole et                 ment que le Conseil de l’Europe
                                                           agro-pastorale
nue. En réalité, bon nombre de ces                         Espace naturel à vocation agro-pastorale              avait alerté les autorités françaises
communes récalcitrantes ont fait                           et forestière                                         en 1981 pour que soit davantage
un vote malin : afficher une opposi-                       Espace naturel à vocation forestière
                                                           Espace naturel à vocation touristique                 prise en compte la finalité biolo-
tion de façade tout en gardant les                         Espace rocheux d’altitude à vocation na-              gique du PNP, puis avait décidé, dix
avantages de l’appartenance terri-                         turelle
                                                           Enjeu écologique                                      ans après, la non reconduction du
toriale au coeur (Borce, Lescun,                           Enjeu culturel                                        Diplôme européen tant que des
Urdos, Laruns, Aragnouet).                                 Enjeu paysager                                        compensations substantielles n’au-
                                                                                                                 ront pas été obtenues par un plan
     Un coeur de parc                                   Les instances du parc des Pyrénées                       de protection efficace de l’Ours des
      avec de lourds                                    n’ont pas attendu pour identifier                        Pyrénées et par la protection de la
                                                        sans délai un programme quadrien-                        vallée du Soussouéou.
     arbitrages à venir                                 nal d’actions qui ne peut laisser in-                    Rappelons encore que, si l’inscri-
                                                        différent : la première action étant                     ption au Patrimoine mondial du
Le Parc national des Pyrénées reste                     la réhabilitation du centre de jour                      massif transfrontalier du Mont-
donc un espace valorisant très por-                     du Somport.                                              Perdu a été obtenue en 1997,
teur pour la très grande majorité                                                                                l’UNESCO demande, d’ici le 1er fé-
des communes. Toutefois, plus que                                                                                vrier 2014, un rapport sur la reloca-
des inquiétudes, des problèmes de                                                                                lisation du Festival de Gavarnie (qui
compatibilité entre actions pro-                                                                                 se déroule tous les ans dans le
grammées et vocations prioritaires                                                                               coeur du parc) et la fermeture de la
de protection du patrimoine vont                                                                                 route de Troumouse (dans le coeur
inévitablement se poser.                                                                                         du parc).
Car, à vouloir à tout prix une Charte
la plus consensuelle possible, on y
trouve rassemblées toutes les de-
mandes formulées tant en matière
d’aménagements que d’activités.
Pointons notamment les déroga-
tions réglementaires très larges
pour les personnes exerçant des ac-
tivités agricoles, pastorales, fores-
tières (article 20 du décret 2009-
406), ainsi que la carte des voca-
tions du coeur du parc qui conduit
à considérer que le coeur du parc
peut avoir, selon le secteur, des
dispositions d’aménagements et
d’activités spécifiques (Annexe à la
Charte du parc3) avec une énorme
question pour le choix des priorités
de gestion lorsque se superposent
des vocations différentes.                                                                                                              Grange patrimoine

2 En 2013, les aides liées à l’appartenance au parc national des Pyrénées ont concerné 78 projets pour un montant de 764 485 euros (source : Empreintes, n°34 p. 6).
3 Pour toutes les références, le téléchargement des textes est possible au site du parc national des Pyrénées : http://www.parc-pyrenees.com/diffusion-des-don-
nees.html

                                   S UD -O UEST N ATURE - R EVUE         TRIMESTRIELLE DE LA         SEPANSO - N° 162
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