Bioactualités 9/07 - Bioactualités
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Les champions de la nature. Mois de novembre. «De quoi devrais-je avoir peur?» Peur des campagnols? Ridicule. Ces horribles petits voulais pas me laisser faire. Je secouais ma grosse tête rats des champs brun foncé ont bien essayé. Sortis de de courge avec obstination. Un signe de révolte qui ne la forêt en été, ils voulaient s’en prendre à mes racines devait pas passer inaperçu. et à celles de mes sœurs. Mais ils ont vite abandonné. Quelque part, nous n’étions pas à leur goût. Ensuite, Car brusquement, ça grouilla de partout sur nos ce fut le tour des limaces à venir saliver vers nous. feuilles et nos têtes déjà bien rondes. Les petites coc- Mais les hérissons, les orvets, les carabes et les oiseaux cinelles rouges à pois noirs avaient atterri sur nous et résolurent le problème. C’est bien d’avoir des amis. nous inspectaient de haut en bas. Elles découvrirent vite que nous étions complètement Quoi encore? Ah oui, le exemptes de produits chimi- mildiou. Mais notre ques. L’idéal pour pon- paysan bio a toujours dre leurs œufs sur nos été aux petits soins feuilles. Nous pou- avec chacune d’en- vions donc être par- tre nous, les cour- faitement rassurées. ges. Nous avons Si un puceron osait grossi sans engrais s’aventurer dans les de synthèse ni parages, les bêtes à pesticides chimi- Bon Dieu et leurs ques. Pour engrais, larves n’en feraient nous avions du fumier qu’une bouchée. La et du compost. Non, nous peur du virus avait fait étions fortes, saines et diffé- long feu. Redisons-le: rentes. Le mildiou n’avait de tou- c’est bien d’avoir tes façons aucune chance. De quoi des amis. devrais-je avoir peur? Maintenant, je suis bien Un jour, pourtant, vers la fin de l’été, une certaine mûre. Une courge bio à la chair tendre, prête pour des agitation s’empara de nos feuilles. Elles chuchotaient, milliers de recettes délicieuses. Une véritable courge visiblement troublées. Une rumeur circulait, selon la- bio, bien saine. Une courge au bon goût de courge. quelle des poux transmettaient un virus. Ce fut la pa- Venez faire un tour dans une authentique ferme bio nique. Nous inspections mutuellement nos feuilles. suisse. Une ferme avec le label Bourgeon, où tout est N’y voyait-on pas déjà les premières traces du virus? entièrement biologique. Du fourrage aux engrais et Nous qui, à Halloween, faisons la nique aux mauvais des semences aux récoltes. Sans réserve. Ou rendez- esprits, étions pétrifiées d’effroi. Sauf moi. Non, je ne vous sur le site www.bio-suisse.ch
É D I TO R I A L TA B L E D E S M A T I È R E S N bioactualités Misère au Sud pour mobilité au Nord Un fantôme bio erre dans les riches pays industrialisés: le fantôme des «bio»carburants. Ces carburants n’ont rien à voir avec la production biologique, au contraire, puisqu’en règle générale la AGROCARBURANTS culture des plantes dites énergétiques re- court à tous les moyens de l’agroindus- 4 Toile de fond trie: monocultures, semences transgéni- Dans les pays du Nord, la demande d’agrodiesel et ques, engrais chimiques, pesticides. d’agroéthanol à base de canne à sucre, de maïs ou de céréales ne cesse de croître. Qu’en est-il de l’éco- Mais «bio», ça sonne si bien … et les logie de ces carburants? À quoi en est la Suisse? constructions linguistiques ripolinées comme «Green-power» font le reste … 6 Reportage et voilà nos écolos bon chic bon genre Dans certains pays, la culture des plantes dites qui se précipitent pour faire énergétique est en plein boom. Un reportage du le plein avec ça. Il y a là quel- bio actualités en Amérique latine se penche sur les que chose de tragique: les 4 conséquences écologiques et sociales. gens veulent appliquer une politique environnementale ICI ET MAINTENANT correcte, mais ils n’arrivent (au mieux) à rien et soutien- 8 L’histoire d’un conte bio nent involontairement et Le bio n’est qu’un conte, et encore il est malsain: la inconsciemment un boom «Weltwoche» sort la grosse artillerie. Et Urs Niggli, qui dégrade littéralement la le directeur du FiBL, démolit aisément point par vie de nombreux hommes et femmes du point les arguments de cette diatribe. Sud. Exploitation et misère au Sud pour mobilité au Nord – il est plus que temps d’oser en débattre ouvertement. MARCHÉ 6 10 Entrevue avec Dorothee Stich Saviez-vous qu’aux USA, 20 à 40 pour- Renseignements de première main, notamment cent de la production de maïs finissent sur les tarifs pour les exposants, fournis par la di- déjà dans l’essence sous forme d’étha- rectrice du Bio Marché de Zofingue. nol? Et cela fait inévitablement grimper les prix. Au début de l’année, le Mexique a connu une crise nationale de la tortilla PRODUCTION parce que les défavorisés ne pouvaient 12 La castration des porcelets plus se payer leur aliment de base. Et La castration à vif sera interdite à partir de 2009. les prix des céréales ne flambent pas Vue d’ensemble des alternatives. seulement – mais aussi – parce que la demande surchauffe à cause du boom des agrocarburants. Nombreux sont ceux V U LG A R I S AT I O N qui s’en réjouissent parce que des prix 8 14 Les fiches techniques sont appréciées plus hauts signifient, aussi dans le Sud, Présentation des résultats de l’enquête sur les fiches des revenus agricoles plus élevés et plus techniques du FiBL. sûrs. Jean Ziegler, le rapporteur spécial de l’ONU pour le droit à l’alimentation, décrit le revers de la médaille: chaque BIO SUISSE augmentation d’un seul petit pour-cent 15 L’Euro 08 dans les fermes bio du prix des aliments de base fait bascu- Des fermes diffuseront des matches de foot sur ler dans la sous-alimentation 16 millions d’êtres humains en plus. – Et jusqu’où grand écran pendant l’Euro 08 – et en profiteront l’engouement pour l’agroessence fera-t-il pour faire de la publicité pour les produits bio. monter les prix? RUBRIQUES Augmentation de la population mon- diale, du bien-être, de la consommation 17 Consommation d’énergie et de viande dans les immenses 18 Brèves pays d’Asie: la Terre ne porte pas assez de 20 Agenda terres agricoles pour pouvoir se permettre 21 Petites annonces de maintenir le gaspillage de l’énergie. 21 Impressum 22 Le dernier mot Photo de couverture: Coupeur de canne à sucre à Markus Bär Batatais, au Brésil. Photo: Keystone/Andre Penner bioactualités 9/07 3
N AGROCARBURANTS L’essence d’origine végétale est censée sauver le climat Dans les pays du Nord, la demande d’agrodiesel et d’agroéthanol à base de canne à sucre, de maïs ou de céréales ne cesse de croître. Aux USA, les agrocarburants représentent déjà 5 pour-cent de la consommation totale de carburants, et l’augmentation de cette proportion est considérée comme po- litique éclairée. La Suisse n’a pas encore de grosse industrie des agrocarburants, mais il y a des projets. Il est donc encore temps de se demander ce qui nous attend et à quoi ressemblent ces carburants du point de vue écologique. L a plus grande fabrique d’agroéthanol d’Europe se trouve à Zeitz, dans l’est de l’Allemagne. Quelque 120 semi-re- tonnes d’aliment protéique. Tant l’Union Européenne que les États-Unis d’Améri- que ont promulgué des lois qui stipulent d’agrodiesel, les moteurs spéciaux 100 pour-cent. Le réseau de pompes est ici plus dense: rien que la Migrol dispose de morques arrivent chaque jour dans cette la proportion fixe de carburants végétaux 230 colonnes avec de l’agrodiesel (vendu fabrique à 200 millions d’euros pour livrer qui doivent être mélangés à l’essence et au sous le nom de «Greenlife Plus»). la matière première: des céréales! diesel: l’UE veut atteindre 5,75 pour-cent Le plus gros fabricant d’agrodiesel de Le Moloch de Zeitz dévore chaque an- en 2010, les USA 10 pour-cent en 2020. Suisse est EcoEnergie à Étoy VD. Cette née 700 000 tonnes de céréales, avant tout Taux atteints en 2007: UE 1 pour-cent, société utilise du colza livré par quelque du blé (à titre de comparaison: la Suisse USA 5 pour-cent. 1000 entreprises agricoles. Avec une ca- produit chaque année environ 540 000 pacité de 5 millions de litres par année, tonnes de blé et 515 000 tonnes de cé- État du développement EcoEnergie est un petit poisson dans réales panifiables). L’usine produit ainsi en Suisse l’océan: en Allemagne par exemple, les 260 000 mètres cubes d’éthanol et 260 000 La Suisse n’a pas mis en place une grosse nouvelles installations produisent plus de industrie de production d’agrocarburants, 100 millions de litres. L’agrodiesel vaudois Morceaux choisis seules des usines pilotes aux capacités li- est acheté surtout par Flamol Mineralöl mitées sont autorisées. La part des agro- et Migrol. Il y a encore d’autres fabricants et pistes de réflexion carburants à la consommation totale de de diesel alternatif en Suisse: Biocarb N Pour qu’une voiture de classe moyenne puisse par- carburants est actuellement de moins de (GE), MP Biodiesel (FR) et RB Bioenergie courir 10 000 kilomètres, il faudrait cultiver 5000 0,1 pour-cent. (BE). Ils ne travaillent pas toujours avec mètres carrés de colza pour produire l’agrodiesel. Ceux qui veulent rouler à l’éthanol des plantes énergétiques: RB Bioenergie Pour produire l’électricité nécessaire à une voiture peuvent faire le plein avec de l’essence qui transforme par exemple seulement de électrique de même puissance et de même confort pour couvrir la même distance, il faudrait 37 mètres contient 5 pour-cent d’éthanol («E 5»). Elle l’huile de friture usagée. carrés de cellules photovoltaïques. convient à tous les moteurs à essence habi- L’éthanol est produit en Suisse exclusi- N La Société pour les peuples menacés avertit que le tuels. Il y a en Suisse quelque 125 pompes vement à Delémont JU et à Schachen LU boom des agroénergies mettra en difficultés des à «E 5». Le plein à 85 pour-cent d’éthanol par Alcosuisse, une entreprise de la Régie millions d’indigènes des pays du Sud. Rien qu’en peut être fait par ceux qui ont une Saab, fédérale des alcools. Alcosuisse produit Indonésie et en Malaisie, «47 millions d’habitants une Volvo ou une Ford «Flexi-Fuel». Les annuellement 40 millions de litres d’étha- autochtones sont menacés par l’expansion plani- pompes «E 85» sont plutôt rares – il y en nol à base de déchets de bois. fiée des cultures de palmiers à huile.» a actuellement 25 dans le pays – et les mé- N Du semis à la station service, la production d’un litre langes ne sont pas toujours en stock. Exonérer d’impôts le diesel d’éthanol nécessite environ 4000 litres d’eau. Il en va de même pour le diesel: les vé- d’huile de palme et l’essence N Au mois d’août, lors de la Semaine mondiale de hicules normaux supportent 5 pour-cent de canne à sucre? l’eau de Stockholm, 2500 experts de 140 pays ont vu émerger une «massive raréfaction des ressour- Les agrocarburants – du moins ceux qui ces en eau» due à la production de masse d’agro- sont fabriqués dans notre pays – sont en carburants. Ils comptent d’ici à 2050 sur un dou- Suisse exonérés de l’impôt sur les huiles blement de la demande en eau pour les systèmes minérales. Une révision de la Loi sur l’im- d’irrigation agricole nécessités par le boom des position des huiles minérales promulguée agrocarburants. par le Parlement veut favoriser tous les N Et, en octobre, Jean Ziegler, le rapporteur spécial de l’ONU pour le droit à l’alimentation, a exigé un carburants renouvelables – aussi importés moratoire immédiat de cinq ans sur la production – en les exonérant de cet impôt à condi- de biocarburants, car ce serait la seule possibilité tion qu’ils présentent un écobilan positif d’éviter une nouvelle flambée des prix des aliments et qu’ils respectent des normes sociales de de base qui aurait pour conséquence d’aggraver en- production. core la faim dans le monde. Selon Ziegler, il faut 200 La révision de la Loi sur l’imposition kilos de maïs pour un plein d’essence de 50 litres. des huiles minérales aurait dû entrer en La même quantité de maïs permet à un homme de vigueur au début 2008, mais cela ne sera se nourrir pendant une année. mb pas possible: la balle est dans le camp du 4 bioactualités 9/07
Photos: Südzucker AG gebana lance le carburant «Bio&Fair» En collaboration avec la Migrol, l’orga- nisation suisse de commerce équitable gebana a mis sur le marché à la fin août le premier agrocarburant cultivé biolo- giquement et commercialisé équitable- ment. La base énergétique est l’huile de soja produite à Capanema, dans le sud-ouest du Brésil, par 350 familles de petits paysans. Pas de déforestation ni d’irrigation pour la production agricole. «L’huile est un produit du traitement de soja de deuxième qualité et ne concur- Essence de blé: Cette fabrique d’éthanol située dans l’est de l’Allemagne dévore chaque rence donc pas la production alimen- année 700 000 tonnes de céréales. taire», peut-on lire dans le communiqué de presse de gebana. positif, et le conseiller national Hans le diesel: le biodiesel d’huile de soja Par rapport à un carburant fossile, Rutschmann (UDC ZH) se demande en (Brésil), l’éthanol de pomme de terre «Bio&Fair» doit permettre d’économiser effet lui aussi, dans une interpellation du (CH), l’éthanol de seigle (UE) et l’étha- quelque 70 pour-cent d’émissions de mois de juin, comment le Conseil fédéral nol de maïs (USA). CO2, ce qui serait un record absolu. La politique de développement de la pense tenir compte des résultats de l’étude N Si on compare l’ensemble de la pollu- Communauté de travail Alliance Sud, de l’Empa (cf. ci-dessous) et si une exoné- tion environnementale (ce qui est bien qui œuvre pour une politique de déve- ration d’impôt a encore un sens. sûr très complexe et toujours contro- loppement équitable, a analysé le pro- versé à cause du choix des facteurs de jet et l’a jugé digne de soutien – mais L’écobilan des agrocarburants pondération des différents éléments), pointe tout de même clairement du Plusieurs études faites par des institutions une autre image se dessine: on ne peut doigt le fait qu’une expansion de la pro- renommées arrivent à des conclusions plus retenir que le biodiesel de vieille duction augmenterait la pression sur la plutôt préoccupantes sur la durabilité huile comestible (CH ou F), l’éthanol forêt primaire et pourrait indirectement provoquer des déforestations. écologique des agrocarburants. d’herbe (CH), l’éthanol de betterave Pour en savoir plus: gebana ag, Les auteurs d’une nouvelle étude de sucrière (CH), l’éthanol de bois (CH) 8005 Zurich, tél. 043 366 65 00, l’OCDE se demandent si le remède «bio- ainsi que le méthane de lisier, de dé- www.gebana.com mb carburants» ne serait pas pire que le mal: chets verts ou de bois (CH). Tous les dans les pays du Sud, où l’agriculture est autres, même le biodiesel de colza Conseil fédéral, dont l’ordonnance d’ap- moins chère, des écosystèmes entiers se- (CH), sont nettement moins bons que plication doit d’un côté protéger la pro- raient sacrifiés: les forêts qui peuvent fixer l’essence ou le diesel fossiles. duction suisse, ce qui sera difficile compte des gaz à effet de serre seraient abattues, Faisons encore remarquer que c’est tenu des accords de l’OMC, et de l’autre la biodiversité s’amenuiserait, les sols s’aci- surtout la culture des plantes énergéti- résoudre les problèmes posés par les exi- difieraient et seraient surfertilisés et em- ques, donc l’utilisation d’engrais, de pesti- gences sociales imposées par le Parlement. poisonnés par des pesticides. Les dégâts cides et de machines, qui grève l’écobilan Selon le département des finances, l’heure écologiques pourraient donc facilement des agrocarburants. Leur transport, même n’est pas encore à la définition de ces nor- dépasser ceux de l’utilisation du diesel. si on importe du diesel d’huile de palme mes. On attend apparemment l’émergence L’étude la plus discutée actuellement de Malaisie ou de l’éthanol de betterave d’un label analogue au FSC créé pour le en Suisse est celle de l’Empa («Ökobilanz sucrière du Brésil, joue un rôle beaucoup bois. Les producteurs suisses d’agrocarbu- von Energieprodukten: Ökologische moins important. rants et l’Union Suisse des Paysans préco- Bewertung von Biotreibstoffen»), réali- La conclusion de l’étude de l’Empa nisent aussi un label de durabilité. sée par Rainer Zah, Heinz Böni, Marcel est très claire: écologiquement, seule la Au sein d’un groupement internatio- Gauch u.a. et publiée en mai de cette an- transformation en agrocarburants de dé- nal d’autres hautes écoles, de représentants née. Voici un bref résumé de ses résultats chets, de sous-produits, d’herbe, de bois de l’industrie et du WWF, l’Energy Center pour les principaux agrocarburants: et éventuellement de betterave sucrière a de l’EPF Lausanne bidouille un catalogue N Si on ne compare que les émissions de un sens. Tout le reste tombe – du moins de critères pour la production durable des gaz à effet de serre, certains carburants provisoirement, puisqu’il n’est pas interdit carburants non fossiles dont la deuxième alternatifs s’en tirent mieux que le die- d’espérer des progrès dans la sélection des version, datée du 23 octobre 2007, semble sel ou l’essence fossiles. Présentent de plantes énergétiques ou dans les processus encore assez vague (point 6: «La produc- nets avantages: le biodiesel de vieille de transformation. Markus Bär tion de biocarburants ne doit pas menacer huile comestible (provenance: CH ou la sécurité alimentaire.»). Rosmarie Bär, F), le biodiesel de colza (CH), l’éthanol i Un débat sur cette question de l’Alliance Sud, affirme au contraire que d’herbe (CH), l’éthanol de betterave ces critères sociaux existent depuis long- sucrière (CH), l’éthanol de bois (CH), Le FiBL et Bio Suisse organisent le 22 novembre un dé- temps et que le projet gebana (cf. encadré l’éthanol de betterave sucrière (Brésil), bat sur les agrocarburants: informations et discussions ci-dessus) le prouve. le méthane de lisier, de déchets verts avec des spécialistes de l’agriculture, de la recherche, de l’industrie et de la collaboration au développement. Il sera sans doute aussi difficile d’in- ou de bois (CH). Sont à peu près aussi Voir à ce sujet l’agenda à la page 20. clure dans la loi l’exigence d’un écobilan bons ou mauvais que l’essence ou bioactualités 9/07 5
Guerre agricole en Amérique latine L’écobilan des divers agrocarburants peut être ici ou là meilleur ou moins bon de quelque pour-cent, et notre conscience – peut-être même l’air que nous respirons – un peu plus pure lorsque nous fai- sons le plein avec de l’agrodiesel. Dans les pays du Sud cependant, l’importante – non: l’énorme surface consacrée aux cultures énergétiques est devenue un élément important et un moteur supplé- mentaire d’une désastreuse spirale écologique et sociale. Un reportage en Amérique latine écrit par un paysan biologique suisse, Reto Sonderegger. Ou quand l’essence verte devient rouge. L a forêt pluviale amazonienne compte en ce moment 17 000 foyers d’incen- die. Le défrichage par le feu fait progresser Au lieu de remettre en question la consommation effrénée d’énergie du Nord, une malsaine alliance de grands ac- des dernières années. Qui dit monocultu- res dit augmentation des ravageurs et des maladies – surtout si les derniers refuges l’extension des surfaces agricoles consa- teurs de l’agrobusiness, de l’industrie auto- de la biodiversité sont détruits partout aux crées au soja, à la canne à sucre ou aux mobile et pétrolière ainsi que du secteur alentours. pâturages extensifs. des biotechnologies tente de faire passer la Pendant ce temps, le poumon vert de consommation des agrocarburants pour Soja au Paraguay: Exode rural, la planète bleue se désagrège et se dessè- une grande prouesse écologique. Lorsque violence et destruction che toujours plus. La perte de biomasse Syngenta, Ford, Cargill et Shell se plantent Dans les régions paraguayennes situées par la déforestation et le défrichage par le soudainement en avant-garde écologiste, au cœur des cultures de soja, dans le dé- feu a dramatiquement diminué la capacité nous devrions nous méfier. Car c’est bel et partement Alto Paraná, les affluents du d’évapotranspiration de l’écosystème de la bien l’espoir de hauts rendements du ca- lac du barrage d’Itaipú – le plus grand du forêt pluviale. La formation des nuages et pital et non pas une nouvelle conscience monde – peuvent être considérés comme les pluies diminue de plus en plus. Cette écologique qui stimule les investisse- biologiquement morts. Empoisonnés par évolution provoque une baisse des rende- ments par milliards effectués au Brésil, en un cocktail de pesticides comme le gly- ments agricoles et menace, selon le clima- Argentine ou au Paraguay. phosate (alias round-up), l’endosulfan et tologue anglais Peter Bunyard, de détruire Les conséquences des monocultures le paraquat. Des douzaines de petites co- totalement – ces prochaines années! – les sont connues. Les dimensions qu’elles lonies agricoles ont été avalées par les mo- restes desséchés de l’Amazonie dans un prennent dans ces grands pays agricoles nocultures. Si on observe attentivement immense brasier infernal. sont cependant inimaginables pour nous: le paysage monotone qui défile, on peut au Brésil, les champs de canne à sucre de apercevoir çà et là les croix d’un cimetière. De manière récurrente, les sans-terres et 40 000 hectares ne sont pas rares, et, en Des dizaines de milliers de petits paysans les petits paysans subissent la terreur de Argentine, on peut rouler pendant des abandonnent chaque année leurs terres l’armée, de la police ou de bandes de mer- cenaires. En bas et au milieu: Au Paraguay, heures sans rien voir d’autre que du soja. pour émigrer vers les centres urbains les forces anti-émeutes brisent la résis- Contrairement aux promesses de du Paraguay, vers la capitale argentine tance des campesinos. À droite: Juin 2005, l’industrie de l’ingénierie génétique de Buenos Aires ou vers l’Espagne. Les zones Tekojoja, Paraguay: Attaque contre un vil- baisser grâce à ses semences brevetées la rurales se vident à vitesse grand V et se lage. Deux paysans assassinés, 56 cabanes quantité de produits phytosanitaires uti- transforment en «désert vert» dépeuplé: incendiées, toutes les cultures détruites. Commanditaire et commandant: un célè- lisés, l’utilisation des pesticides a bruta- en Argentine, grâce aux technologies de bre baron local du soja. lement augmenté dans ces pays au cours pointe (soja transgénique round-up ready, Photos (de gauche à droite): Ultima Hora (2), Kregg Hetherington 6 bioactualités 9/07
glyphosate et semis direct), deux unités de ainsi que de véritables épidémies de mala- formées en réfugiés internes. Le pays leur main-d’œuvre suffisent toute l’année pour dies des voies respiratoires. appartient pourtant légalement puisqu’ils cultiver 1000 hectares. Joao Pedro Stedile, la tête pensante détiennent les titres terriens collectifs. Les membres des organisations pay- du Mouvement des Travailleurs Ruraux Sous la protection d’organisations des sannes que les villages dressent contre les sans Terre du Brésil fournit volontiers cet droits de l’homme et en s’appuyant sur des monocultures sont souvent menacés voire exemple quand il s’agit des conséquences décisions de tribunaux internationaux, assassinés. Depuis la fin de la dictature de sociales des monocultures sucrières: «La une minorité décidée d’entre eux organise Strössner en 1989, plus d’une centaine de région qui entoure Ribeirao Preto, une leur retour, mais de grandes entreprises se paysans ont été assassinés au Paraguay ville des environs de São Paulo, est consi- sont établies sur leurs terres et les parami- dans des conflits terriens. Après la reddi- dérée comme la Californie brésilienne à litaires sont engagés comme surveillants tion des campesinos, la forêt pluviale a dû cause de son haut niveau technologique par les plantations. céder elle aussi. Alors qu’il y a cinquante dans le domaine de la production du sucre. Le commandant paramilitaire «Ro- ans la forêt couvrait encore plus de la moi- Il y a 30 ans, le district produisait encore drigo» racontait le 1er septembre 2003 tié du territoire du Paraguay, il en reste des denrées alimentaires de toute sorte, il au journal «El Tiempo» que «les projets aujourd’hui moins de cinq pour-cent. y avait une paysannerie importante à l’in- d’huile de palme dégoulinent de sang, de térieur des terres, et c’était réellement une misère et de corruption. La manière dont Canne à sucre au Brésil: région aisée avec une répartition équili- les terres et l’argent – prétendument issu Retour au temps de l’esclavage brée des revenus. Aujourd’hui, la région – des crédits agricoles ont été acquis fait Contrairement à la culture du soja, celle n’est plus qu’un champ infini de canne partie d’une chaîne de blanchiment de de la canne à sucre crée des emplois. Mais à sucre avec 30 fabriques qui contrôlent l’argent de la drogue composée d’hom- quels emplois! Au Brésil, des milliers de toute la région. Sur un demi-million d’ha- mes de paille, de violence, d’expulsions et sans-le-sou sont recrutés dans le Nord- bitants, plus de 100 000 vivent dans les bi- de morts.» À Curvarado pourtant, des fa- Ouest du pays, affamé, pour aller couper donvilles. La région compte 3813 détenus milles revenues de leur errance et placées la canne à sucre dans les champs infinis de et il n’y a plus que 2412 personnes (y.c. les sous la protection internationale ont abat- la région de São Paulo. Si le pensum quo- enfants) qui vivent de l’agriculture. Voilà tu au début août 45 hectares de palmiers à tidien pesait 3 tonnes il y a encore 30 ans, le modèle de société forgé par la monocul- huile pour semer du maïs et des haricots il est aujourd’hui souvent de 12 tonnes. Et ture sucrière: il y a plus de monde dans les pour leur propre consommation. on parle de récoltes record de 20 tonnes prisons que dans l’agriculture!» Dans ce sens, la lutte des campesinos par jour. Il n’y a bien sûr que les hom- d’Amérique latine se concentre toujours mes forts d’une vingtaine d’années qui y Colombie: De l’huile de palme plus sur la préservation ou la rétrocession parviennent. Une partie de leur salaire pour les paramilitaires de leur territoire et plus seulement sur le leur est d’ailleurs souvent payée en crack, En Colombie, les surfaces de palmiers à droit de cultiver un petit bout de terrain ce dérivé de la fabrication de la cocaïne, huile augmentent à toute vitesse sur le pour leurs familles. La lutte pour les ter- toxique et qui rend dépendant. Avant la dos de la forêt primaire. Dans le cadre du res comprend des dimensions historiques, récolte, les champs sont amenés à matu- désarmement et de la «pacification» des culturelles, sociales, écologiques et spiri- rité par un épandage d’un herbicide bien bandes paramilitaires qui ont brutalement tuelles. Ici, en effet, le sauvetage d’écosys- connu, le 2,4-D, un des composants du assassiné comme guérilleros présumés tèmes entiers est inséparable du respect tristement célèbre défoliant Agent Orange des milliers de paysannes et de paysans, des droits fondamentaux de ceux qui, en utilisé pendant la guerre du Vietnam. Les le gouvernement distribue les terres aux tant que parties d’un tout, vivent dans cet champs sont ensuite brûlés, ce qui produit anciens paramilitaires et aux entrepre- espace géographique. dans les régions concernées d’immenses neurs amis. Quatre millions de personnes nuages de fumées contenant de la dioxine ont été déportées de leurs terres et trans- Reto Sonderegger, Asunción, Paraguay bioactualités 9/07 7
N ICI ET MAINTENANT Quel Bionocchio a le plus long nez? Dans l’hebdomadaire Weltwoche du 20 septembre, le journaliste Michael Miersch prétend que l’agri- culture biologique est un mythe qui repose sur un tissu de mensonges. Les produits seraient seule- ment plus chers, pas meilleurs. Et l’agriculture biologique serait dangereuse pour l’environnement et cacherait des risques pour la santé. Urs Niggli, le directeur du FiBL, réfute ces critiques point par point. D ans son analyse de l’agriculture biolo- gique, le journaliste Michael Miersch pose des questions importantes comme peinte dans la Weltwoche est fausse. Ni le professeur Beda Stadler, qui signe ré- gulièrement dans la presse quotidienne mais aussi du CO2 et du N2O. Ces trois gaz à effet de serre sont ensuite addition- nés comme équivalents CO2. Les vaches par exemple celles de la sécurité et de la des articles venimeux et polémiques laitières à haut rendement ont besoin de qualité nutritionnelle des produits, ou contre l’agriculture biologique («métho- plus de concentrés et sont donc à l’origine encore celles de l’écobilan et de la produc- des moyenâgeuses de production»), ni le d’émissions de CO2 et de N2O nettement tivité. Nous sommes donc ainsi en pleine prix Nobel de la Paix de 97 ans Norman plus élevées. Des études montrent que discussion sur la durabilité, cette notion Borlaug («Avec la technique agricole qui les vaches bio sont plus avantageuses du qui préoccupe actuellement beaucoup était habituelle en 1950 et qui correspond point de vue des émissions de gaz à effet scientifiques, spécialistes et politiciens. assez exactement à l’agriculture biologi- de serre par litre de lait produit. J’aimerais citer à propos des questions que d’aujourd’hui…») ne sont des experts soulevées par Miersch les faits les plus quand il s’agit de l’état de la technique en 3ème critique: récents provenant exclusivement de pu- agriculture biologique. Les produits bio sont moins sûrs et pas plus blications scientifiquement vérifiées par Il est vrai que la production mondiale sains que les produits conventionnels. Peer Review. de denrées alimentaire a quasiment triplé Ce sont des affirmations non scien- L’article de Miersch n’est pas un travail depuis 1950, mais les causes en sont la sé- tifiques. Miersch écrit que la science n’a original. Il ressemble fortement à celui lection variétale, le machinisme, l’azote, encore jamais pu prouver que les pro- d’Elisabeth Finkel publié dans le Cosmos les pesticides et un meilleur stockage. Les duits bio sont plus sains. Il a raison sur le Magazine australien d’août 2007 sous le agriculteurs bio utilisent la plupart de ces plan purement méthodologique, car cette titre «Organic Food Exposed» et à l’arti- techniques et, à défaut, ils ont développé preuve nécessiterait des études dites d’in- cle intitulé «Voting with your trolley. Can des alternatives pour obtenir des résultats tervention et de cohorte qui coûteraient you really change the world just by buying comparables. des millions. Il y a malgré tout entre les certain foods?» paru dans le british The produits bio et les produits conventionnels Economist en décembre 2006. 2ème critique: quelques différences qui sont importantes Ces articles sont à prendre au sérieux L’agriculture biologique n’est pas écologique pour les consommateurs. Elles sont décri- surtout parce qu’ils font partie d’une vaste et nuit à la protection de la nature. tes dans le Dossier du FiBL «Qualité et campagne contre l’agriculture biologique Miersch écrit: «Généraliser le bio si- sécurité des produits bio». Contrairement qui se déroule depuis longtemps dans le gnifierait la fin des forêts, des steppes, des à l’article de Miersch, la rédaction de ce monde entier. Ils se nourrissent du li- régions humides et du gibier – un désastre dossier repose non pas sur une sélection vre «The Truth About Organic Foods» pour la nature.» La littérature démontre de deux méta-études mais sur toutes les d’Alex Avery, de l’Hudson Institute de exactement le contraire. Les effets positifs méta-études parue depuis 1997. Washington. Cet institut est chargé des de l’agriculture biologique sur la fertilité Les affirmations comme celle-ci, fai- mandats de relations publiques (RP) du du sol, la diversité des plantes, des ani- tes dans la Weltwoche le plus souvent sans gouvernement Bush, des agriculteurs ré- maux et des microorganismes dans et sur indication des sources, sont bel et bien publicains conservateurs et de la société le sol, sur la diversité des structures agri- non scientifiques: Monsanto. Dennis C. Avery, le père d’Alex, coles et des éléments du paysage, sur la N Escherichia coli entérohémorrhagi- avait déjà lutté pendant des années contre qualité des eaux souterraines et de surface que sur produits bio après utilisation l’agriculture biologique. Cela remonte à ainsi que sur le changement climatique d’«engrais fécaux» (citation Beda une stratégie RP de Monsanto développée sont prouvés et documentés par d’innom- Stadler et Alex Avery). Plusieurs cas par la société de RP Burson-Marsteller: brables travaux scientifiques. mortels et quelques centaines de cas «Ne te défends plus contre les attaques Les affirmations de Miersch au sujet en Allemagne et aux USA. contre l’ingénierie génétique, mais atta- de l’écobilan de la production animale La Food and Drug Administration que le bio avec les mêmes arguments qui biologique sont scientifiquement dou- (FDA) américaine a étudié depuis 1995 sont employés pour critiquer les OGM.» teuses: «Les vaches libèrent du méthane 18 cas d’EHEC, dont l’un concernait des avec leurs gaz intestinaux. Vu qu’en gé- épinards produits par une ferme bio. Il a 1ère critique néral elles donnent moins de lait dans les pu être prouvé que les bactéries avaient été L’agriculture biologique est une méthode fermes bio, le bilan du méthane par litre apportées par le vent depuis un troupeau rétrograde. est mauvais.» Cette affirmation ignore le de chevaux parqué dans le voisinage. Et les Non. L’agriculture biologique est une fait bien connu que le bilan climatique ne cas allemands ne concernent aucun pro- technologie moderne qui utilise le progrès peut être établi qu’en prenant la somme de duit bio ou producteur bio. scientifique avec discernement. L’image tous les gaz à effet de serre. Or l’agricul- d’une méthode agricole rétrograde dé- ture produit non seulement du méthane, 8 bioactualités 9/07
4ème critique: Photo: Thomas Alföldi Pas de danger à cause des pesticides, mais augmentation du risque posé par les poisons produits naturellement par les plantes. Le baroud d’honneur de Miersch pour réhabiliter les pesticides arrive un peu tard. Dans le monde entier en effet, tous les États ont imposés des conditions strictes pour diminuer l’utilisation des pesticides en vue de protéger l’environne- ment. Le rejet définitif de nombreux pes- ticides est cependant venu du commerce de détail européen. En effet, les nouvelles normes EUREPGAP et SwissGAP exigent de plus en plus souvent – aussi pour les produits conventionnels – une tolérance zéro pour les résidus. La Weltwoche affuble l’agriculture biologique d’un nez de Pinocchio. En lisant cet article, Miersch: «Ce que ne sait pratique- Urs Niggli bute à longueur de nez sur des absurdités. ment aucun acheteur: Même les plantes non traitées ne sont pas exemptes de pes- mon moldave» est plus connu sous le nom 7ème critique: ticides. En effet, les plantes elles-mêmes de trichogramme. On l’utilise depuis un Une reconversion générale à l’agriculture produisent des poisons sensés empêcher quart de siècle pour lutter contre la pyrale biologique nécessiterait de doubler la sur- les animaux de les manger. Le 99,99 pour- du maïs en agriculture conventionnelle, face agricole utile, ce qui menacerait les fo- cent des pesticides que nous ingérons sont intégrée et biologique. rêts tropicales et les réserves naturelles. donc d’origine naturelle.» On trouve alors Les modèles et les études montrent une parmi ces «monstres empoisonnés» par 6ème critique: image totalement différente. Les scien- exemple le chou, qui contient 46 substan- Le cuivre, ce «poison bio». tifiques conventionnels sous-estiment ces bioactives du groupe des substances Miersch cite l’auteur de best-sellers fortement la productivité de l’agriculture végétales secondaires. Cette notion re- Udo Pollmer: «Le fait que le bio utilise du biologique. Norman Borlaug estime ainsi groupe toutefois des milliers de substances cuivre convainc de mensonge l’ensemble qu’en cas de reconversion au bio il faudrait qui peuvent être classées selon leurs ca- de la propagande bio. Le cuivre est un mé- 1100 millions d’hectares de terres ouver- ractéristiques et fonctions: caroténoïdes, tal lourd comme le cadmium ou le mercu- tes en plus, soit une augmentation de 72 saponines, polyphénols, glucosinolates, re qu’il est impossible de jamais ressortir pour-cent sur le dos des forêts pluviales et phytostérines. D’après le rapport alimen- du sol. Il nuit massivement à la vie du sol, des réserves naturelles. Les craintes de ce taire de 1996 de la Deutsche Gesellschaft surtout aux vers de terre. Dernièrement, genre sont balayées par diverses études. für Ernährung (DGE), les substances dans le Bade-Wurtemberg, il a même fallu Catherine Badgley a modélisé les végétales secondaires contenues dans changer toute la terre d’une ferme bio à rendements présentés par 293 études l’alimentation contribuent à diminuer les cause d’une contamination par ce ‹poison publiées dans le monde entier. Dans les risques de maladies. La DGE prône donc bio›.» pays développés dotés d’une agriculture une augmentation des apports de ces Arriver à dire autant de contre-véri- intensive, les rendements moyens de substances via l’alimentation. Miersch ne tés en aussi peu de phrases tient du grand tous les produits végétaux et animaux confond-t-il pas certaines choses? art. Premièrement, le cuivre ne peut pas représenteraient, en cas d’agriculture bio- être comparé au cadmium et au mercure, logique généralisée, 92 pour-cent de la 5ème critique: qui sont extrêmement toxiques pour l’en- production conventionnelle. Des auteurs La lutte biologique contre les ravageurs re- vironnement et l’homme, car le cuivre de l’université du Michigan ont comparé présente un risque incontrôlé. est un oligo-élément essentiel pour la vie les rendements biologiques atteints dans «En agriculture biologique, on dissé- des plantes, des animaux et des hommes. les pays en développement: ils se situent, mine n’importe où des organismes étran- Deuxièmement, c’est surtout l’agricul- pour l’ensemble des produits végétaux, à gers sans que personne ne s’en soucie», ture conventionnelle qui utilise le cuivre 174 pour-cent des champs convention- écrit la «Weltwoche». Cette affirmation en grandes quantités comme fongicide. nels de référence. Les chercheurs sont est fausse. Tous les produits phytosanitai- Troisièmement, les effets négatifs sur les ainsi parvenus à la conclusion qu’en cas res utilisés en bio sont testés et autorisés êtres vivants du sol n’apparaissent qu’à de reconversion générale à l’agriculture exactement selon les mêmes critères que haute concentration. C’est tout au plus le biologique, les actuelles surfaces agrico- les pesticides chimiques, et cela aussi bien cas dans les vieux vignobles où on a na- les mondiales permettraient de produire au niveau de l’UE qu’en Suisse pour l’ho- guère (donc avant l’apparition de l’agri- autant de nourriture qu’actuellement, mologation par l’Office fédéral de l’agri- culture biologique) utilisé jusqu’à 80 kilos mais aussi qu’une progression de la pro- culture. de cuivre pur par hectare et par année. duction alimentaire serait possible avec L’exemple mentionné par Miersch L’agriculture biologique n’autorise en vi- l’agriculture biologique. Urs Niggli d’un «ichneumon moldave» qui supplan- ticulture que 4 kilos par hectare et par Les arguments contre l’article de la terait les ichneumons indigènes et attaque- année. Weltwoche se trouvent au complet (en alle- rait d’inoffensifs papillons est rapporté de mand) sur http://orgprints.org/11368/01/ manière totalement biaisée. Cet «ichneu- niggli-2007argumentarium.pdf bioactualités 9/07 9
N MARCHÉ «Nous nous concentrons sur le marché suisse» Le Bio Marché de Zofingue peut se réjouir d’être très apprécié du public, et le nombre d’exposants continue d’augmenter. L’image d’être toujours plus cher colle cependant à la peau de ce marché qui se déroulera pour la 9 ème fois l’été prochain. Ce n’est absolument pas le cas, dit Dorothee Stich, la direc- trice du Bio Marché. Au contraire, les modifications de prix ont jusqu’ici toujours été faites vers le bas. bio actualités: Les marchés bio sont ap- «le bébé» d’un groupe de producteurs bio préciés. Le Marché Bio de Saignelégier ou mais qu’on trouve derrière lui des hom- l’Ostschweizer Biomarkt de Weinfelden mes, des femmes et des institutions pour sont organisés par des paysans et paysan- qui, bien que ce soit pour des raisons très nes bio. Qu’est-ce que ces marché ont en différentes, la publicité pour le bio est très commun avec le Bio Marché, qu’est-ce qui importante. les différencie? Dorothee Stich: Les noms de tous ces Le sponsor principal du Bio Marché est la marchés expriment leur principal point Migros. Or il y a toujours des paysans bio commun: il s’agit du bio! Et ils ont aussi qui se demandent pourquoi ils devraient certainement en commun le fait que, sans participer à un «Marché Migros». beaucoup d’esprit pionnier et de passion, Si on veut faire de la publicité pour le bio et ils n’auraient jamais existé ou n’existeraient si on veut atteindre les consommateurs qui plus. La plus grande différence concerne ne sont pas ou pas encore bio, les grands l’histoire de leur création et leur orienta- distributeurs sont incontournables. Pour tion. Contrairement aux marchés régio- promouvoir le bio, l’important à mon avis naux de Saignelégier ou de Weinfelden, le est tout d’abord d’assurer l’accès aux pro- Bio Marché a dû remplir dès sa première duits bio et non de savoir si cela se passe édition en août 2000 toutes les exigences chez un grand distributeur, dans un ma- posées à une foire nationale. Le 1er Bio gasin bio, au marché hebdomadaire, sur Marché était en effet en même temps la «Le Bio Marché grandit chaque année, un site de vente par internet ou dans un et les prix ont déjà baissé plusieurs fois 3ème Exposition biologique mondiale de pour les exposants – mais ils n’ont en- magasin fermier. En outre, un événement l’IFOAM. Une autre différence réside core jamais été augmentés»: La directrice comme le Bio Marché n’aurait jamais été dans le fait que le Bio Marché n’est pas Dorothee Stich. possible sans le généreux soutien de la Migros. Les producteurs et productri- Que coûte le monde du Bio Marché? ces bio profitent donc indirectement de cette campagne publicitaire pour le bio, Taxe de base (par exposant): Fr. 400.–, Fr. 150.– pour une conduite d’évacuation même si elle est fortement financée par la y. c. inscription au registre des exposants des eaux usées. Place de stockage frigori- Migros. du magazine de la foire (tirage: 50 000 fique: Fr. 80.– par europalette. exemplaires) et sur www.biomarche.ch Extras qui peuvent être – mais ne sont En comparaison avec d’autres marchés, la et y. c. 1 place de parc gratuite pour les pas toujours – facturés: Désir concret participation au Bio Marché est chère pour 3 jours au parking des exposants. pour l’emplacement Fr. 250.–, lien dans Taxe de stand (par stand): dès Fr. 900.–, le registre online (internet) des exposants les producteurs bio. Comment les prix sont- y. c. la surface du stand (3 x 3 m), le banc Fr. 50.–, commandes supplémentaires et ils formés? de marché (3 x 0,9 m), le toit étanche, le changements Fr. 50.– par incident ou On ne peut bien sûr pas comparer le Bio montage et le démontage du stand, l’en- annonce – mais seulement à partir du Marché avec un marché régional ou local, seigne du stand, l’annonce de 1/16ème de 01.05.2008, taxes de rappel Fr. 50.–. car le Bio Marché est une foire d’impor- page dans le magazine de la foire, d’une Possibilités d’économies: Stand com- tance et de portée nationale qui se pré- valeur de fr. 450.–. Taxe de stand pour ins- mun avec un ou plusieurs partenaire-s: sente sous la forme d’un marché. Le rap- cription jusqu’au 31.12.2007: Fr. 900.– (= la taxe de stand est répartie proportion- port prix-prestations doit être comparé à prix pour réservations avancées), jusqu’au nellement. Renoncement à l’annonce celui des foires professionnelles, et le Bio 31.03.2008: Fr. 1100.–(= prix normal), à publicitaire dans le magazine: rabais de partir du 01.04.2008: Fr.1200.– (= prix Fr. 200.–. Pour les petites entreprises Marché sort très avantagé de cette com- pour inscription tardive). agricoles dont l’assortiment commercia- paraison! Certaines perceptions sont en Extras qui sont facturés dans le prix lisé comprend au moins 2/3 de produits outre tout simplement fausses. Il y a ainsi de revient: raccordement électrique Fr. propres et qui réalisent un chiffre d’affai- des exposants qui disent, convaincus que 50.–, forfait pour la pose de la ligne Fr. res annuel de moins de 100 000 francs: c’est vrai, que le Bio Marché est plus cher 30.– par prise 220 V ou par appareil (y. rabais sur la taxe de stand pouvant aller chaque année, et des visiteurs qui disent c. consommation électrique). Eau: Fr. jusqu’à 50 pour-cent. que le Bio Marché est chaque année plus 350.– pour une conduite d’eau courante, petit, alors que c’est exactement le contrai- 10 bioactualités 9/07
Photos: Bio Marché AG re dans les deux cas! Le Bio Marché gran- En l’an 2000, l’Italie était le pays invité de la C’est au Bio Marché que Bio Suisse a lancé dit chaque année, et les prix ont déjà baissé première édition parce qu’il y avait de très ses distinctions de qualité, et ce concours plusieurs fois pour les exposants – mais ils bons contacts entre Via Verde et ce pays. s’est déroulé pour la deuxième fois cette an- n’ont encore jamais été augmentés. Cette foire a tellement plu aux Italiens née. Quelle importance accordez-vous à ces qu’ils sont revenus les années suivantes, distinctions de qualité? Ce marché reste cependant considéré com- ce qui a pratiquement empêché les autres Le Bio Marché a toujours eu pour objectif me cher. Y a-t-il des possibilités de profiter pays d’y venir en tant que pays invité, par- de promouvoir le bio par la qualité et le de tarifs plus avantageux? ce qu’ils devraient en fait dépasser le nom- plaisir gustatif. Les distinctions de qualité Malgré une forte augmentation des coûts bre de stands atteint par les Italiens. Pour de Bio Suisse me réjouissent évidemment dans le domaine de la sécurité, les prix les producteurs étrangers, le Bio Marché beaucoup puisqu’elles vont dans la même ne seront de nouveau pas augmentés (resp. le marché Suisse) n’est d’ailleurs vé- direction. Je serais heureuse que Bio Suisse en 2008. Ceux qui s’inscrivent assez à ritablement intéressant que s’ils ont déjà développe encore cet engagement. Il serait l’avance, qui n’ont pas de désirs particu- un partenaire commercial en Suisse, car pensable que les visiteurs n’élisent plus le liers quant à l’emplacement et qui n’ont sinon l’importation de marchandises plus beau stand mais le meilleur produit. pas de modifications ou de compléments pour le Bio Marché se heurte – suivant C’est sûr que cela encouragerait les com- à demander au dernier moment s’en tire- les produits – à des obstacles quasiment paraisons et que les produits Bourgeon ront certainement à bon compte. On peut infranchissables. ne seraient plus les seuls à être honorés, aussi économiser de l’argent en renonçant mais, de l’autre côté, ce serait une bonne à mettre une annonce dans le magazine. Vous ne cherchez donc pas activement de occasion de faire preuve de grandeur et Et les petits producteurs et entreprises nouveaux pays invités. d’unité pour démontrer qu’une seule cho- ont depuis des années la possibilité de de- Non. Nous proposons activement à des se importe: le bio! mander une diminution du prix pouvant régions suisses d’être notre hôte d’hon- atteindre 50 pour-cent (cf. encadré). Les neur, mais pas à d’autres pays. Nous vou- Nous avons très envie de proposer une «Rue producteurs peuvent encore prendre un lons promouvoir surtout les produits bio- Bio Suisse» du même genre que la «Rue des stand à plusieurs, c’est tout à fait permis logiques suisses, et notre prospection s’est Italiens». Que pensez-vous de cette idée? – et nous avons même assez souvent pro- toujours concentrée sur le marché suisse. Super! Un rêve deviendrait réalité! posé nous-mêmes des partenaires à ceux Les quelques rares nouveaux exposants qui en cherchaient. étrangers s’annoncent d’eux-mêmes parce Interview: Jacqueline Forster-Zigerli, Bio Suisse qu’ils ont entendu parler du Bio Marché La «Rue des Italiens» est une spécialité du par d’autres exposants ou lors d’autres foi- Bio Marché. Comment cette étroite relation res à l’étranger. Nous ne prévoyons donc avec les producteurs italiens s’est-elle nouée? pour le moment aucune nouvelle pros- i Le 9 ème Bio Marché de Zofingue se Serait-il pensable d’inviter ainsi d’autres pection pour augmenter le nombre d’ex- déroulera du 20 au 22 juin 2008. producteurs européens? posants étrangers. bioactualités 9/07 11
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