Introduction à la pharmacogénétique - Québec Pharmacie - Profession Santé
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Québec Pharmacie La référence en formation continue Janvier – février 2020 vol. 67 n˚ 1 Introduction à la pharmacogénétique Incontinence urinaire chez la personne âgée Hidradénite suppurée 4 h DE FC N° d’accréditation de l’OPQ : 7734 Le crisaborole Intervenir sur l’asthme
sommaire Janvier – février 2020 | vol. 67 | n° 1 Éditorial À vos soins Place aux questions Nos amis les ATP Incontinence Qu’est-ce que urinaire chez l’hidradénite la personne âgée : suppurée ? traiter prudemment Les pages bleues Avez-vous entendu Introduction parler de… à la pharmaco Le crisaborole génétique (EucrisaMD) Intervenir FC Asthme : retombées QUESTIONS DE de l’implication répondez sur du pharmacien Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca 1/1
par Céline Léveillé-Imbeault, pharmacienne, B. Pharm., M. Sc. éditorial Rédactrice en chef Nos amis les ATP J’écoutais récemment les conversations de mes collègues sur les préoccupations de l’heure dans ce merveilleux monde de la pharmacie. Ce qui a retenu le plus mon attention, c’est la pénurie d’assistants techniques en pharmacie (ATP), qui s’aggrave au fil des ans, à l’instar du manque criant de main-d’œuvre qui frappe le Québec depuis plusieurs années. Malheureusement, en matière de main-d’œuvre, il y a peu d’espoir que le problème se résorbe bientôt, quand les spécialistes prévoient que les taux de croissance de la population active ne dépasseront pas 0,2 % au cours des 10 prochaines années*. Depuis 20 ans, le personnel technique a suivi, en général de bon cœur, les multiples changements dans la profession. Depuis la pénurie de pharmaciens jusqu’à la mise en application des nouveaux actes pharmaceutiques de la loi 41 et bientôt de la loi 31 en passant par l’imposition de nouvelles normes de pratique et d’agrément pour les établissements, nos amis les ATP ont vu eux aussi leur métier subir de nombreuses transformations en raison d’une plus grande complexité de leurs tâches et, évidemment, de leurs responsabilités. Les établissements, les pharmacies et leurs ATP prennent de plus en plus durement la mesure des nombreux bouleversements découlant de l’augmentation du nombre d’ordonnances et d’actes pharmaceutiques, ainsi que de la complexité accrue de la pharmacothérapie chez des personnes de plus en plus malades. Un rehaussement de la formation des ATP se fait sentir plus que jamais afin de seconder efficacement les pharmaciens. Depuis 2011, l’Ordre des pharmaciens du Québec (OPQ) et son groupe de travail, où siège notamment l’Association québécoise des assistants techniques en pharmacie (AQATP), effectuent un travail colossal afin de fournir des balises solides au métier d’ATP. En 2012, il y a eu publication des tout premiers standards de pratique pour le personnel technique créant, du même coup, deux catégories d’ATP, soit le personnel technique et le personnel de soutien technique. En 2014, l’OPQ présentait les profils de compétences de ces deux catégories de personnel technique. Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 1 /2
Depuis l’arrivée au pouvoir du gouvernement caquiste, on a vu se multiplier les demandes de l’OPQ, de l’Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec (APES), de l’Association québécoise des pharmaciens propriétaires (AQPP) et même de l’AQATP pour rehausser la formation des techniciens en pharmacie, tout en améliorant le programme d’ATP en pharmacie de niveau secondaire. Québec a donné son aval au projet à l’automne 2019. Les travaux sont déjà en cours et tout porte à croire qu’on aura nos premières cohortes sur les bancs de cégeps en septembre 2021. Enfin. Mais, dans l’attente d’un nombre suffisant de nouveaux diplômés, il faudra faire preuve de plus de leadership et d’imagination afin que l’élan de la pharmacie ne soit pas freiné par le manque de soutien technique, tant en pharmacie communautaire qu’en pharmacie d’établissement. J’observe présentement que la profession s’engage de plus belle sur un terrain glissant, celui où plus de tâches techniques sont effectuées par les pharmaciens, afin de compenser le manque de personnel technique ou leurs qualifications insuffisantes. C’est un bandage sur une blessure dont il faudrait se préoccuper de manière plus assidue et plus globale. Face au gouvernement, il serait intéressant de s’allier aux ATP pour faire valoir l’importance de leur travail et les appuyer de manière plus concrète dans leurs revendications. Il faut certes revoir nos processus afin d’être plus efficaces et performants, et même envisager de réduire notre panier de services. Attirer les employés avec de nouvelles plateformes, offrir un meilleur suivi de nos nouvelles recrues, rembourser une partie de la mise à niveau collégiale, retenir les plus âgés (en ajoutant des vacances ?) ne sont que quelques exemples de mesures à mettre en place. Soyez inventifs mais pertinents : offrez le transport en commun, associez-vous avec une garderie, rendez disponible la livraison d’un traiteur, achetez un panier de fruits par semaine, engagez un professeur de méditation… Bref, distinguez-vous pour attirer la main-d’œuvre et la retenir en rendant les milieux de travail plus accueillants. Voilà un nouveau défi de taille pour la prochaine décennie. n * Banque de développement du Canada. Graphique 1 : Déclin du taux de croissance de la population active au Canada, page 3. Dans : BDC. Étude : Pénurie de main-d’œuvre : un problème tenace. Septembre 2018. Disponible : https://www.ledevoir.com/documents/pdf/2019-01-15-penurie-main- doeuvre.pdf Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 2 /2
Texte rédigé par Yamina Belghache, étudiante au programme de qualification en pharmacie (QeP) à vos soins Révision : Peggah Badii, B. Pharm., et Simon Moretti, B. Pharm., clinicien associé à l’Université de Montréal, Pharmacie Gaétan Couillard et Simon Moretti, affiliée à Uniprix, Laval. L’auteure et les réviseurs scientifique ne déclarent aucun conflit d’intérêts lié à la rédaction de cet article. Texte original soumis le 3 décembre 2019. Texte final remis le 6 décembre 2019. Cette chronique présente un cas clinique selon une note SOAP, suivi d’une liste de conseils et d’actes pharmaceutiques s’appuyant sur les différentes étapes de prestation de soins pharmaceutiques. Responsables de cette chronique : Christophe Augé, pharmacien, M. Sc., Ph. D. Annie-France Gingras, B. Pharm. Incontinence urinaire chez la personne âgée : traiter prudemment Discussion L’incontinence urinaire (IU), perte involontaire d’urine, est un sujet peu abordé par nos patients, souvent à cause de la gêne et même de la honte qu’ils éprouvent. Considérant que ce problème est une conséquence normale du vieillissement, ils ne se doutent pas qu’ils pourraient bénéficier d’un arsenal thérapeutique permettant d’améliorer leurs symptômes ainsi que leur qualité de vie. QUESTION DE Objectifs d’apprentissage 1. Comprendre l’impact 2. Connaître l’importance des 3. Évaluer les traite- de l’incontinence mesures non pharmacolo- ments pour l’inconti- urinaire sur le quotidien giques dans la prise en charge nence urinaire chez du patient âgé. de la problématique. la personne âgée. Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 1 /8
Une patiente de 76 ans vient renouveler ses ordonnances avec un léger retard. En discutant avec elle, vous apprenez qu’elle a l’impression d’avoir des troubles de mémoire Cas clinique 1/1 depuis quelque temps. Elle vous dit aussi oublier parfois certaines tâches qu’elle avait prévu de faire, ce qui est contraire à ses habitudes. Elle se dit inquiète et se demande si ce ne serait pas un effet secondaire d’un de ses médicaments. L’IU est souvent de type mixte chez les personnes âgées, c’est-à-dire qu’elle combine incontinence de stress (relâchement du sphincter urétral qui provoque une fuite d’urine à la suite d’un effort, tel que toux ou éternuement) et incontinence par impériosité (vessie hyperactive due à une contraction du muscle de la vessie qui entraîne un besoin immédiat d’uriner avant que la vessie ne soit pleine). Selon l’étude canadienne de Herschorn et coll., la prévalence des symptômes de vessie hyperactive s’accroît avec l’augmentation de l’espérance de vie chez les deux sexes, soit de 23,8 % chez les plus de 60 ans comparativement à 12,2 % chez les moins de 60 ans1,2,3. Bien que l’IU ne mette pas en danger la vie du patient, plusieurs études ont montré l’impact négatif de ce problème sur la qualité de vie, principalement sur le plan social et psychologique. Les patients choisissent souvent de rester à la maison, car leur état engendre de l’inconfort et de la gêne. Les nycturies ont également un impact sur la qualité du sommeil, occasionnant une fatigue diurne. Ainsi, l’anxiété et l’isolement social seraient des conséquences fréquentes de l’IU, ce qui va à l’encontre des objectifs de prise en charge des personnes âgées, soit le maintien de l’autonomie et des activités fonctionnelles le plus longtemps possible1,3. Afin de prévenir cette problématique, la prise en charge de l’incontinence chez les sujets âgés est primordiale. Les mesures non pharmacologiques (MNP) constituent le traitement de première ligne, principalement chez les aînés, étant donné leur sensibilité plus élevée aux effets indésirables des médicaments. Avant même l’instauration des MNP, l’éducation du patient est une étape importante étant donné que les interventions sont liées au comportement et à des modifications du style de vie. Une bonne compréhension du patient améliore son observance du traitement et son implication dans la prise en charge de la problématique. Ainsi, une explication avec des termes adaptés quant au fonctionnement normal et aux modifications physiologiques du système urinaire est pertinente. Plusieurs intervenants de la santé peuvent être impliqués dans ce volet d’éducation, dont le pharmacien. Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 2 /8
Les MNP comportent deux volets. Le premier concerne la modification des habitudes de vie, telle que la restriction de liquides après 18 h afin de réduire les nycturies, la diminution de la consommation de café et de boissons contenant de l’aspartame étant donné leur propriété diurétique, la perte de poids ainsi que la régularisation du transit intestinal (la constipation étant souvent associée à l’IU). Le second volet porte sur les techniques comportementales avec entraînement de la vessie et du périnée (exercices de Kegel). L’entraînement vésical vise à modifier les habitudes mictionnelles au moyen de différentes stratégies. Il inclut une planification Mme M.O. vient renouveler ses ordonnances avec un léger retard, elle nous dit que, récemment, elle a eu des petits oublis de plus en plus fréquents. Femme de 76 ans. Non-fumeuse. 79 kg Rx au dossier : n Solifénacine 10 mg die (incontinence urinaire) n Venlafaxine 37,5 mg die (anxiété) n Apixaban 2,5 mg bid (prévention thromboembolie) ClCr : 73 ml/min Aucune allergie connue Solifénacine depuis six ans Selon les critères de BEERS, les anticholinergiques peuvent entraîner chez les personnes âgées un déclin de la mémoire et des fonctions cognitives à long terme8. Si on ne peut se passer de ces molécules, le choix dépendra du potentiel de passage de la barrière hémato- encéphalique (BHE). La solifénacine, en raison de son passage de la BHE, pourrait être responsable du déclin de la mémoire de la patiente. D’autres solutions de rechange plus sécuritaires sont disponibles, telles que la fésotérodine (recommandations FORTA7). Le trospium serait aussi un bon choix vu qu’il présente un faible passage BHE, en plus d’un potentiel moins élevé d’interactions médicamenteuses (il est métabolisé par les estérases). Cependant, la prise BID à jeun pourrait avoir un impact négatif sur l’observance du traitement. Le mirabegron, avec un mécanisme d’action diffèrent (agoniste β3- adrénergique), pourrait également être utilisé étant donné que la patiente ne présente pas de contre-indications. n Réviser les MNP avec Mme M.O. n Discuter avec elle des choix de traitement sécuritaires pour son incontinence urinaire n Suggérer au médecin de remplacer la solifénacine par la fésotérodine ou le mirabegron (opinion pharmaceutique) n Suivi : tolérance 2 semaines postchangement – efficacité après huit semaines – efficacité, tolérance et adhésion aux renouvellements n Note au dossier Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 3 /8
I RÉPARTITION DES RÉCEPTEURS MUSCARINIQUES DANS LE CORPS HUMAIN4 Cinq sous-types de récepteurs muscariniques dans un ou plusieurs organes chez le rat et l’homme di M1 Cerveau (cortex, hippocampe), ganglions sympathiques et glandes. Son inhibition peut entraîner des troubles cognitifs et une perte de mémoire. M2 Cœur, muscle lisse, cerveau. Son inhibition peut provoquer une prolongation de l’intervalle QT, ce qui risque d’entraîner de l’arythmie et de la tachycardie. M3 Muscle lisse, glandes, cerveau. Son inhibition peut entraîner une sécheresse buccale, de la constipation et des troubles de la vision. M4 Cerveau. Son inhibition peut entraîner des troubles cognitifs. M5 Hippocampe et autres zones du cerveau (substance grise), œil. Son inhibition peut entraîner des troubles cognitifs8,10. de la miction sans attendre l’envie pressante d’uriner ou le recours à des horaires de miction fixes avec allongement progressif des intervalles intermictionnels en fonction de la réponse du patient. Les exercices de Kegel, qui consistent à contracter uniquement les muscles du plancher pelvien en évitant de contracter fesses, ventre ou cuisses, renforcent les muscles du périnée et améliorent le contrôle urinaire. Ils doivent être effectués dans différentes positions, soit debout, assis et allongé. Selon une étude comparative Cochrane, les techniques comportementales présentent une efficacité comparable à celle des médicaments, et même une supériorité dans certaines études (réduction des épisodes d’incontinence, réduction de la fréquence des mictions et de la nycturie, et amélioration de la qualité de vie). Ces techniques sont toutefois souvent difficiles à instaurer chez les personnes âgées sans l’accompagnement du personnel soignant (physiothérapeute, personnel infirmier, etc.), ce qui en limite l’implantation1,3. Un suivi de l’efficacité des MNP est recommandé après au moins six mois afin d’évaluer la nécessité d’introduire un traitement pharmacologique1,3. Traitement pharmacologique L’arsenal thérapeutique pharmacologique repose principalement sur deux classes de médicament : les anticholinergiques et les agonistes β3-adrénergiques. Les anticholinergiques constituent la pierre angulaire du traitement de l’IU. Plusieurs molécules sont commercialisées (oxybutynine, toltérodine, solifénacine, darifénacine, trospium, fésotérodine). Elles inhibent les récepteurs muscariniques M3 au niveau des voies urinaires, ce qui permet de réduire les contractions détrusoriennes Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 4 /8
II CARACTÉRISTIQUES DES DIFFÉRENTS ANTIMUSCARINIQUES6 Lipophilicité Sélectivité des Pénétration Élimination Dose récepteurs potentielle (M3 et M1) de la BHE 5 Oxybutynine ++++ M1 et M3 ++++ Hépatique, 5 mg B-TID (IR) (DitropanMD) 3A4 5 à 10 mg DIE (LA) Darifénacine +++ M3 (9,3 :1) ++ Hépatique, 7,5 à 15 mg DIE (EnablexMD) 2D6 et 3A4 Toltérodine ++ Non sélectif +++ Hépatique, 1 à 2 mg BID (IR) (Detrol MD) 2D6 et 3A4 2 à 4 mg DIE (LA) Fésotérodine ++ (moindre Non sélectif + Hépatique, fésoté- 4 à 8 mg DIE (Toviaz MD) avec le mé- rodine en 5-HMT tabolite actif via les estérases, 5-HMT +) 5-HMT, 2D6 et 3A4 Solifénacine ++ M3 (2,5 :1) +++ Hépatique, 5 à 10 mg DIE (Vesicare MD) surtout 3A4 Trospium 0 Non sélectif 0 Rénale, inchangé 20 mg BID 1 heure (Trosec MD) avant les repas, sur un estomac vide lors de la phase de remplissage sans compromettre la contractilité du détrusor durant la miction. Cependant, ces molécules agissent sur les autres récepteurs M situés dans tout l’organisme (tableau I ), responsables des nombreux effets secondaires cholinergiques connus3. Plusieurs études ont démontré que l’efficacité des différentes molécules sur le nombre de mictions par 24 heures et le nombre d’épisodes de fuites était comparable5. Ainsi, le choix de la molécule dépendra davantage des caractéristiques de la molécule (voir tableau II ) et d’autres considérations. Avec les agents antimuscariniques, les effets secondaires les plus souvent observés et responsables de l’inobservance thérapeutique affectent principalement le système digestif, tels que la sécheresse de la bouche et la constipation. Les effets secondaires sur le système nerveux ne sont pas à négliger non plus, car ils sont plus préjudiciables, notamment chez les personnes âgées. Les pharmaciens ont un rôle à jouer sur ce point, étant donné leur contact régulier avec les patients. Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 5 /8
Avec le vieillissement, les modifications pharmacocinétiques (absorption, distribution, métabolisme, élimination) et pharmacodynamiques (réduction de l’activité cholinergique ou diminution des récepteurs cholinergiques et augmentation de la perméabilité de la barrière hémato-encéphalique [BHE]) rendent les personnes âgées plus sensibles aux effets anticholinergiques des médicaments. La polypharmacie fréquente chez ces patients augmente le risque de combiner plusieurs de ces médicaments dont les effets peuvent être additifs (fardeau anticholinergique). Ce phénomène peut entraîner des troubles cognitifs, tels que perte de mémoire, confusion et délirium dans les cas les plus graves1,5. La molécule idéale serait la plus spécifique aux récepteurs M3 avec un faible passage de la BHE (en fonction de la lipophilie, de la polarité et de la taille de la molécule). D’autres critères, tels que les comorbidités et les interactions médicamenteuses, devraient également être pris en compte. Parmi les différents outils de prise de décision pour les médicaments inappropriés en gériatrie, seule l’oxybutynine fait l’unanimité : elle ne devrait pas être utilisée en gériatrie5,7. Le choix parmi les autres molécules anticholinergiques diffère selon les sources. Toutefois, plusieurs études soutiennent l’utilisation privilégiée du trospium et de la fésotérodine chez la personne âgée. Le trospium (ammonium quaternaire) et la fésotérodine présentent plusieurs avantages. D’abord, ils ne traversent pas la BHE. De plus, leurs métabolites, en tant que substrats de la glycoprotéine P (P-gp), sont soumis à un mécanisme d’efflux efficace à travers la BHE, contrairement à la solifénacine et à l’oxybutynine. Le trospium présente moins de risques d’interactions, étant donné que son métabolisme se fait via les estérases. Néanmoins, la prise BID à jeun limite son utilisation en compromettant l’adhésion au traitement8,9. Selon les recommandations FORTA7, la fésotérodine constitue le traitement à recommander, contrairement aux autres anticholinergiques qui doivent être utilisés avec précaution. Le mirabegron, un β3-adrénergique, dont l’action repose sur l’activation des adrénorécepteurs présents dans l’urothélium et le détrusor, provoquant ainsi une relaxation musculaire, présente, selon les études10, une efficacité comparable à celle des anticholinergiques, jumelée à un profil sécuritaire concernant les fonctions cognitives. Par contre, le risque d’allongement de l’intervalle QT et l’augmentation de la tension artérielle peuvent limiter son utilisation. Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 6 /8
Opinion pharmaceutique Docteur, Lors de sa plus récente visite à la pharmacie, Mme M.O. nous a fait part de son inquiétude quant à des pertes de mémoire de plus en plus fréquentes. À la suite d’une analyse de son dossier phar- macologique, nous avons constaté que Mme M.O. prenait de la solifénacine 10 mg die depuis six ans. Ce médicament est un anticholinergique à fort passage de la BHE et son utilisation à long terme pourrait être une cause de ses troubles cognitifs. Afin de remédier à cette situation, il me semble approprié de remplacer la solifénacine par une molécule aussi bénéfique, mais plus sécuritaire, telle que : 1. Fésotérodine 4 mg die à augmenter selon tolérance et efficacité 2. Mirabegron 25 mg die à augmenter selon tolérance et efficacité 3. Autre En toute collaboration, Le pharmacien Conclusion La prise en charge de l’IU repose en premier lieu sur l’implantation des MNP. Si un trai- tement pharmacologique s’avère nécessaire, le choix devrait reposer sur des molécules ayant un meilleur profil d’effets secondaires et un impact moindre sur les fonctions cognitives, en particulier lors de leur utilisation par des patients âgés. Actuellement, le trospium, la fésotérodine et le mirabegron seraient les molécules de choix. Acte pharmaceutique facturable Innocuité : substituer un médicament prescrit par un autre...... WV n Références Les références en gras indiquent au lecteur les références principales de l’article, telles que choisies par l’auteur. 1. P, MEYER. Algorithmes et incontinence urinaire des séniors : évaluations, traitements, recommandations et niveaux de preuve. Revue de la littérature : Progrès en urologie (2017), 27,111-45. 2. Pamela L. Ramage-Morin et Heather Gilmour. Incontinence urinaire et solitude chez les personnes âgées au Canada, n° 82-003-X au catalogue de Statistique Canada. Octobre 2013. 3. Jacques Corcos, FRCSC1, Dr Mikolaj Przydacz1, Dre Lysanne Campeau, et coll. Guide de pratique de l’AUC sur la prise en charge de la vessie hyperactive chez l’adulte, 9 mai 2017 https://www.cua. org/themes/web/assets/files/4586_oab_guidelines_french.pdf Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 7 /8
4. Abdelmounaim Qarro, MD, Mohammed Asseban, et coll. Anticholinergiques et hyperactivité vésicale, Can Urol Assoc J. 2014 Jan-Feb ; 8 (1-2): E36–E43. 5. Geoffrion R. N(o) 353 - Traitements visant la vessie hyperactive : Accent sur la pharmacothérapie - Addenda. J Obstet Gynaecol Can. 2017; Dec; 39 (12): 1230-39. 6. Nancy Audet. Quel est le meilleur traitement antimuscarinique de la vessie hyperactive chez une patiente atteinte d’Alzheimer ? Québec Pharmacie, février-mars 2014, 41-2, www.professionsante.ca 7. Oelke M, Becher K, Castro-Diaz D, Chartier-Kastler E, Kirby M, Wagg A, Wehling M. Appropriateness of oral drugs for long-term treatment of lower urinary tract symptoms in older persons: Results of a systematic literature review and international consensus validation process (LUTS-FORTA 2014). Age Ageing. 2015 Sep; 44 (5): 745-55. 8. Geoffrion R. N (o) 283. Traitements visant la vessie hyperactive : Accent sur la pharmacothérapie. J Obstet Gynaecol Can. 2018 Jan; 40 (1): e33-e44. 9. Gamé X, Peyronnet B, Cornu JN. Fesoterodine: Pharmacological properties and clinical implications. Eur J Pharmacol. 2018 Aug 15; 833:155-7. 10. Wagg A, Staskin D, Engel E, Herschorn S, Kristy RM, Schermer CR. Efficacy, safety, and tolerability of mirabegron in patients aged ≥ 65yr with overactive bladder wet: A phase IV, double-blind, randomised, placebo-controlled study (PILLAR). Eur Urol. 2019 Nov 13. pii: S0302-2838(19)30768-7. QUESTIONS DE Répondez à ces questions en vous rendant sur eCortex. Date limite : 28 février 2021. Donne 4 h. N° d’accréditation : 7734 1. Lequel parmi les énoncés suivants est vrai ? n L’IU chez la personne âgée est de type mixte. n L’IU est une conséquence normale du vieillissement. n La prise en charge de l’IU n’est pas si importante, puisqu’elle n’a aucun impact sur la santé des aînés. 2. Lequel parmi les énoncés suivants est vrai ? n Les MNP sont moins efficaces que les traitements pharmacologiques. n L’efficacité des MNP doit être évaluée après deux mois de mise en place. n Les exercices de Kegel doivent être effectués en position assise, debout et couchée. n Une restriction liquidienne toute la journée fait partie des MNP à recommander. 3. Lequel parmi les énoncés suivants est vrai ? n L’oxybutynine est un anticholinergique de choix chez les personnes âgées. n La fésotérodine est la molécule à recommander aux personnes âgées. n Le mirabegron est sécuritaire chez les sujets avec fibrillation auriculaire. Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 8 /8
Texte rédigé par Thomas Weil, pharmacien, M. Sc., Pharmacologie appliquée, place Pharmacie François Lalande. aux questions Réviseure : Rébecca Paré, B. Pharm., candidate au DESS en pharmacie communautaire de l’Université Laval, Pharmacie Frédéric Lahoud. L’auteur et la réviseure scientifique ne déclarent aucun conflit d’intérêts lié à la rédaction de cet article. Texte original soumis le 15 janvier 2019. Texte final remis le 17 septembre 2019. Cette chronique fournit une information claire et concise à des questions d’ordre clinique posées par des pharmaciens. Elle a l’avantage de proposer des réponses courtes à des questions touchant un ensemble de sujets d’intérêt pour les cliniciens exerçant aussi bien en milieu communautaire qu’en établissement de santé. Responsable de cette chronique : Sandra Bélanger, B. Pharm. Geneviève Tirman, B. Pharm., diplôme de 2e cycle en pharmacie communautaire Qu’est-ce que l’hidradénite suppurée ? L’hidradénite suppurée est une maladie inflammatoire cutanée chronique qui se présente sous la forme de lésions récurrentes souvent douloureuses. Elle est aussi appelée « hidrosadénite » ou « acné inversée ». Cette maladie affecte les glandes sudoripares apocrines; on la retrouve donc surtout au niveau des régions à forte pilosité, comme les aisselles, le périnée et la région inguinale1-3. Les lésions se présentent d’abord sous forme de nodules, d’abcès et de comédons. Elles sont associées à de la douleur et à une mauvaise odeur. Dans les formes sévères, les lésions se rejoignent et évoluent vers une fistulisation, la formation de tractus sinusaux Objectifs d’apprentissage QUESTIONS DE 1. Savoir ce qu’est 2. Connaître les principaux 3. Savoir conseiller le patient l’hidradénite médicaments utilisés sur ses traitements dans suppurée. dans le traitement de le cadre de cette maladie. l’hidradénite suppurée. Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 1 /8
Monsieur B, 54 ans, fumeur, IMC 29 kg/m2, vient régulièrement à la pharmacie chercher des antibiotiques pour des folliculites récurrentes. En effet, au cours de la dernière année, il Cas clinique a reçu quatre traitements par cloxacilline, un par céfadroxil, un par amoxicilline-acide 1/2 clavulanique et un par clindamycine, pour 7 à 10 jours chacun. Au terme de sa consultation chez le dermatologue ce jour même, il a reçu une ordonnance de clindamycine 300 mg en association avec de la rifampicine 300 mg par voie orale deux fois par jour pour trois mois. Dans son dossier pharmacologique, vous constatez qu’il prend de l’atorvastatine 20 mg une fois par jour. Il vous demande si ce nouveau traitement est indiqué dans sa situation. Le dermatologue lui a parlé d’hidradénite suppurée. et une suppuration chronique, avec l’apparition de cicatrices. Outre les complications locales comme les fistules (par exemple, au niveau de l’anus), des complications générales peuvent survenir (sepsis, anémie). L’hidradénite suppurée a des répercussions sur la qualité de vie des patients, notamment en raison de la peur d’être stigmatisé. C’est une maladie qui n’altère pas l’espérance de vie, mais qui a un fort retentissement psychosocial, ce qui ne doit pas être négligé lors de la prise en charge du patient1-3. Il existe diverses comorbidités associées à l’hidradénite suppurée, dont le syndrome métabolique, le syndrome du côlon irritable, l’acné vulgaire, l’acné conglo- bata et le sinus pilonidal. On retrouve aussi différentes maladies inflammatoires ou auto-immunes, dont la maladie de Crohn, la colite ulcéreuse et la spondylarthropathie1-3. Selon différentes estimations, la maladie touche entre 1 % et 4 % de la population. Les symptômes apparaissent généralement à la puberté et avant l’âge de 40 ans. Les femmes sont plus souvent atteintes que les hommes. Il existe différents facteurs de risque associés à l’apparition ou à l’exacerbation de la maladie, tels que le tabagisme (la nicotine stimulerait l’occlusion du follicule), le stress mécanique par la pression et la friction (pouvant induire des lésions ailleurs que celles citées précédemment, soit sous les seins, sur les fesses ou à l’intérieur des cuisses), l’obésité et les antécédents familiaux d’hidradénite suppurée. Étant donné leur rôle hormonal, certains médicaments pourraient favoriser l’apparition de la maladie ou en aggraver les symptômes, tels que les progestatifs androgéniques (acétate de médroxyprogestérone intramusculaire ou stérilet contenant du lévonorgestrel). Le lithium est également impliqué chez certains patients1,3,4. La physiopathologie, bien que non complètement élucidée, impliquerait une occlusion du follicule pileux suivie d’une rupture de celui-ci, associée à une réponse immunitaire locale exagérée. Les bactéries pourraient aussi jouer un rôle dans l’apparition des lésions, Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 2 /8
I MESURES NON PHARMACOLOGIQUES2,3,6 Éviter les traumatismes, dont le rasage (ils peuvent favoriser l’apparition de lésions); préférer des vêtements amples en coton et éviter la chaleur excessive, ainsi que les frottements (p. ex. : gants abrasifs, crèmes exfoliantes). Utiliser un antiseptique topique sous la douche (de type chlorhexidine 4 %) une fois par semaine à quotidiennement selon la tolérance. Abandonner le tabac (le pharmacien peut jouer un rôle important dans le cadre de la loi 41 pour prescrire au patient des substituts nicotiniques). Perdre du poids grâce à une alimentation saine. bien que les cultures soient souvent négatives ou montrent uniquement des bactéries commensales (de la flore cutanée normale). Cette hypothèse est donc de plus en plus controversée et on s’attarde davantage au processus inflammatoire4. Le diagnostic est clinique et repose sur la présentation des lésions (type et localisation) et sur leur caractère récidivant. Le temps moyen avant d’établir celui-ci est de sept ans, puisqu’un diagnostic erroné de furoncle récidivant est parfois posé6. L’examen physique des lésions doit évaluer la surface et le type de lésions selon la classification clinique de Hurley : n Stade 1 (léger) : abcès unique ou abcès multiples sans tractus sinusaux ni cicatrices. n Stade 2 (modéré) : abcès récidivants avec tractus sinusaux et cicatrices. n Stade 3 (sévère) : tractus sinusal diffus ou multiples tractus sinusaux interconnectés et abcès sur toute la région3. Le traitement dépend alors du stade de la maladie. Les objectifs sont de réduire la fréquence des nouvelles lésions afin de diminuer la douleur et la suppuration, de prévenir la progression de la maladie pour éviter les cicatrices et de traiter les lésions existantes, tout cela dans le but d’améliorer la qualité de vie du patient6. Un diagnostic adéquat posé tôt permet de limiter la progression de la maladie vers les stades plus sévères en utilisant rapidement les traitements appropriés1. Mesures non pharmacologiques Il est important de rassurer le patient en lui rappelant que cette maladie n’est pas liée à un manque d’hygiène et n’est pas contagieuse. Les patients peuvent se sentir stigmatisés et avoir besoin d’un soutien psychologique. Les mesures non pharmacologiques sont présentées dans le tableau I . Bien que non démontrées dans des études randomisées, ces mesures semblent aider certains patients2,3,6. Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 3 /8
Traitement pharmacologique Les recommandations sont basées notamment sur les lignes directrices européennes sur le traitement de l’hidradénite suppurée. Il est à noter que, vu la rareté de la maladie, il existe peu d’études randomisées fiables avec un échantillon intéressant de patients. Les traitements diffèrent selon le stade de la maladie, mais, dans tous les cas, les mesures non pharmacologiques doivent être appliquées. Outre les traitements spécifiques, il ne faut pas négliger la maîtrise de la douleur (AINS, acétaminophène ou opioïdes au besoin), ainsi que le traitement de la dépression ou de l’anxiété, si le patient en présente les symptômes. Il faut savoir que les récidives sont fréquentes; le patient doit aussi en être informé. Parfois, les lésions nécessitent un traitement chirurgical, ce qui ne sera pas abordé dans le cadre de cet article3,5. Stade 1 Au stade 1, le traitement local est privilégié. Tout d’abord, la solution de clindamycine topique 1 % est utilisée à raison d’une application deux fois par jour au niveau des lésions. Les effets indésirables sont principalement locaux avec des sensations de brûlure ou d’irritation au site d’application6-8. Une crème de résorcinol à 15 % appliquée deux fois par jour au niveau des nodules est aussi parfois utilisée pendant la poussée active. La fréquence est ensuite diminuée à une fois par jour en entretien. Cette molécule a des effets kératolytiques et anti- inflammatoires. N’étant pas commercialisé au Canada, ce médicament doit être obtenu auprès des pharmacies faisant des préparations magistrales. L’effet indésirable principalement observé est la desquamation de la peau2,6. Des injections intralésionnelles de corticostéroïdes sont possibles, mais elles ne seront pas abordées dans cet article6. Quant aux traitements à base d’antibiotiques par voie orale de courte durée, comme les bêta-lactamines, ils semblent inefficaces pour ralentir la progression, tout en favorisant la sélection de souches bactériennes résistantes. Ils devraient donc être évités.6. Pour les patients de stade 1 pour lesquels les traitements topiques sont inefficaces ou chez lesquels les lésions sont étendues sur plusieurs sites, on envisage l’utilisation d’une tétracycline par voie orale6. Les détails sont présentés dans la section suivante. Stade 2 Les antibiotiques par voie orale sont souvent employés bien qu’on ne sache pas exactement si leur efficacité résulte de la réduction de la colonisation bactérienne ou de leurs effets anti-inflammatoires. Les principaux antibiotiques utilisés sont de la famille des tétracyclines, soit la tétracycline à 500 mg deux fois par jour, la doxycycline Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 4 /8
à 100 mg une à deux fois par jour ou la minocycline à 100 mg une à deux fois par jour. Les traitements doivent durer plusieurs mois. En fait, le seul de ces antibiotiques ayant été étudié dans une étude randomisée en double aveugle contre placébo est la tétracycline, et ce, pendant une durée de 16 semaines6. Dans le cas de contre-indication ou d’absence de réponse au traitement par une tétracycline, on peut utiliser l’association de rifampicine 300 mg et de clindamycine 300 mg à raison d’une prise deux fois par jour pendant 10 à 12 semaines. On s’attend à une réponse chez près de la moitié des patients. Par contre, les rechutes sont possibles à l’arrêt du traitement, soit chez 60 % des patients, après cinq mois. Cette association entraîne des effets indésirables gastro-intestinaux chez un tiers des patients (diarrhées et nausées). La prise de clindamycine est aussi susceptible de favoriser Clostridium difficile. En revanche, certains auteurs avancent l’hypothèse selon laquelle la prise de rifampicine diminuerait ce risque, étant donné que cet antibiotique est actif contre cette bactérie6,9,10. De plus, la rifampicine est un puissant inducteur de plusieurs enzymes et transporteurs métabolisant les médicaments. Le nombre d’interactions possibles est élevé et doit être étudié minutieusement pour chaque patient. Entre autres, il est important de mentionner qu’elle peut réduire l’efficacité des contraceptifs oraux combinés. Ce médicament a également la particularité d’entraîner une coloration rouge-orangée des sécrétions (larmes, urine, selles, sueur, salive) et parfois même de la peau3,6,9,10. D’autres antibiotiques ou associations d’antibiotiques sont parfois utilisés : dapsone ou association rifampicine, moxifloxacine et métronidazole, par exemple. Dans tous les cas, après la durée initiale, il est possible de répéter la cure d’antibiotiques si le traitement est efficace et bien toléré6. D’autres classes pharmacologiques sont employées, comme les rétinoïdes oraux : acitrétine, isotrétinoïne ou alitrétinoïne. De petites études ont montré une efficacité chez certains patients, avec les effets indésirables habituels de ces médicaments (sécheresse de la peau et des muqueuses, dyslipidémie, dépression, etc.). On rappelle que ces médicaments sont tératogènes et qu’ils doivent être utilisés avec une méthode contraceptive efficace chez la femme en âge de procréer. Les grossesses doivent être évitées cinq semaines après ces traitements, sauf pour l’acitrétine pour laquelle il est recommandé d’attendre trois ans3,6. Enfin, un traitement hormonal peut être indiqué en raison du rôle des androgènes dans l’apparition de l’hidradénite suppurée. Les traitements antiandrogènes comprennent l’acétate de cyprotérone, les contraceptifs oraux combinés, la Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 5 /8
Vous rassurez Monsieur B. L’association rifampicine et clindamycine pendant trois mois est indiquée dans sa situation. Environ la moitié des patients obtient une réponse Cas clinique adéquate avec ce traitement. Vous lui expliquez les effets indésirables possibles et 2/2 l’informez de la coloration rouge-orangée des sécrétions. Un suivi quant à l’apparition de diarrhées ou d’autres troubles digestifs doit être réalisé. Vous lui indiquez qu’il existe une interaction entre la rifampicine et l’atorvastatine (diminution de l’efficacité de l’atorvastatine) et lui suggérez une intervention auprès du prescripteur pour changer de statine (rosuvastatine, par exemple). Vous lui rappelez les principales mesures non pharmacologiques et l’assurez de votre soutien s’il souhaite arrêter de fumer. Vous n’oubliez pas de le questionner sur son humeur et sur la maîtrise de la douleur, tout en lui rappelant que les récidives de cette maladie sont fréquentes. spironolactone et le finastéride. Ces traitements nécessitent une surveillance étroite en raison du risque de thromboses veineuses2,3,6. Stade 3 Outre les rétinoïdes oraux, les agents biologiques et les immunosuppresseurs sont envisagés dans cette situation. Parmi les inhibiteurs du facteur de nécrose tumorale alpha, l’infliximab et l’adalimumab ont été étudiés, l’étanercept ne semblant pas efficace dans cette maladie6. Seul l’adalimumab (Humira MD) a reçu l’indication officielle de Santé Canada pour traiter l’hidradénite suppurée modérément à fortement évolutive chez les adultes et chez les adolescents (de 12 à 17 ans et pesant 30 kg ou plus) qui n’ont pas répondu à un traitement classique, y compris un traitement par des antibiotiques à action générale. Par contre, à l’heure actuelle, le traitement n’est toujours pas couvert par la RAMQ pour cette indication. Les lecteurs intéressés par d’autres détails pourront lire l’avis de l’INESSS disponible en ligne11,12. Chez l’adulte ou chez l’adolescent de 60 kg et plus, l’adalimumab est utilisé à raison de 160 mg (soit 160 mg le même jour ou divisé en deux doses de 80 mg pour deux jours consécutifs) en injection sous-cutanée la première semaine (semaine 0), puis de 80 mg deux semaines après la première injection, puis de 40 mg chaque semaine à partir de la semaine 4. L’utilisation toutes les deux semaines ne semble pas efficace chez l’adulte6. Chez les adolescents de 12 ans et plus de moins de 60 kg, on utilise plutôt une dose initiale de 80 mg suivie d’une dose de 40 mg la semaine suivante et de 40 mg toutes les deux semaines ensuite. On peut rapprocher les injections à 40 mg toutes les semaines si nécessaire. Une amélioration doit être visible Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 6 /8
en 12 semaines maximum, sinon, il y a lieu de reconsidérer l’utilisation de ce traitement. On peut continuer de prendre des antibiotiques pendant la prise d’adalimumab. Le suivi est le même que pour les autres médicaments de cette classe. Pour rappel, ils augmentent le risque d’infection, d’insuffisance cardiaque, de maladie démyélinisante et de cancer. Des cas d’aggravation paradoxale d’hidradénite suppurée ont même été rapportés3,6. D’autres immunosuppresseurs plus traditionnels sont parfois utilisés, comme les glucocorticoïdes par voie orale ou la cyclosporine. D’autres agents biologiques sont aussi en cours d’évaluation, comme l’ustékinumab (anti-interleukine 12/23, Stelara MD), l’anakinra (anti-interleukine 1, KineretMD) et le canakinumab (anti- interleukine 1-bêta, IlarisMD)6. Les lecteurs peuvent se référer aux lignes directrices européennes pour avoir davantage d’informations3. n Références Les références en gras indiquent au lecteur les références principales de l’article, telles que choisies par l’auteur. 1. Ingram JR. Hidradenitis suppurativa: Pathogenesis, clinical features, and diagnosis [Internet]. UpToDate. [Cité 15 janvier 2019.] Disponible : https://www.uptodate.com/contents/hidradenitis- suppurativa-pathogenesis-clinical-features-and-diagnosis 2. Lee EY, Alhusayen R, Lansang P, Shear N, Yeung J. What is hidradenitis suppurativa? Can Fam Physician. Février 2017; 63(2): 114-20. 3. Zouboulis CC, Desai N, Emtestam L, Hunger RE, Ioannides D, Juhász I, et coll. European S1 guideline for the treatment of hidradenitis suppurativa/acne inversa. Journal of the European Academy of Dermatology and Venereology. Avril 2015; 29(4): 619‑44. 4. van der Zee HH, Laman JD, Boer J, Prens EP. Hidradenitis suppurativa: Viewpoint on clinical phenotyping, pathogenesis and novel treatments. Experimental Dermatology. Octobre 2012; 21(10): 735‑9. 5. Isak V, Feldman S, Pichardo R. Hidradenitis suppurativa: A comparison of guidelines. Journal of Dermatology and Dermatologic Surgery. 2018; 22(2): 48. 6. Ingram JR. Hidradenitis suppurativa: Treatment [Internet]. UpToDate. 2018 [Cité le 15 janvier 2019.] Disponible : https://www.uptodate.com/contents/hidradenitis-suppurativa-treatmen 7. Monographie DalacinMD T, Solution topique - RxTx (eCPS) [Internet]. 2018 [Cité le 15 janvier 2019.] Disponible : https://www.e-therapeutics.ca 8. Saunte DML, Jemec GBE. Hidradenitis Suppurativa: Advances in Diagnosis and Treatment. JAMA. 28 nov 2017; 318(20): 2019. 9. Monographie Tétracyclines Monographie de l’APhC - RxTx (eCPS) [Internet]. 2018 [Cité le 12 mai 2019.] Disponible : https://www.e-therapeutics.ca 10. Scheinfeld N. Why rifampin (rifampicin) is a key component in the antibiotic treatment of hidradenitis suppurativa: A review of rifampin’s effects on bacteria, bacterial biofilms, and the human immune system. Dermatol Online J. 15 juin 2016; 22(6). Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 7 /8
11. Dessinioti C, Zisimou C, Tzanetakou V, Stratigos A, Antoniou C. Oral clindamycin and rifampicin combination therapy for hidradenitis suppurativa: A prospective study and 1-year follow-up. Clin Exp Dermatol. déc 2016; 41(8): 852‑7. 12. INESSS. HUMIRA – Hidradénite suppurée – Avis de refus d’ajout d’une indication reconnue aux listes des médicaments – Valeur thérapeutique [Internet]. 2016 [Cité le 15 janvier 2019.] Disponible : https://www.inesss.qc.ca/fileadmin/doc/INESSS/Inscription_medicaments/Avis_au_ministre/ Octobre_2016/Humira_HS_2016_10.pdf QUESTIONS DE Répondez à ces questions en vous rendant sur eCortex. Date limite : 28 février 2021. Donne 4 h. N° d’accréditation : 7734 4. Parmi les facteurs de risque suivants, lequel n’est pas un facteur de risque démontré pour l’hidradénite suppurée ? n Le tabac n L’alcool n L’obésité n Certains médicaments comme le lithium n La génétique 5. Parmi les propositions suivantes concernant le traitement non pharmacologique et pharmacologique de l’hidradénite, quel énoncé est faux ? n Pour les lésions uniques sans tractus, un traitement par clindamycine topique 1 % peut être suffisant. n L’association de la rifampicine avec de la clindamycine peut être utilisée pour une période de 10 à 12 semaines pour les patients de stade 2. n Il est recommandé au patient d’utiliser un savon antibactérien et d’appliquer régulièrement une crème exfoliante sur les lésions pour permettre leur bonne cicatrisation. n L’adalimumab est le seul anti-TNF alpha indiqué officiellement par Santé Canada à ce jour pour le traitement de l’hidradénite suppurée. n Une répétition de traitement par cloxacilline est à éviter en raison de la sélection de souches bactériennes résistantes. Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 8 /8
Texte rédigé par Simon de Denus, B. Pharm., M. Sc. (Pharm), Ph. D., titulaire de la Chaire en les pages pharmacogénomique Beaulieu-Saucier de l’Université de Montréal, chercheur, pharmacien, bleues Institut de cardiologie de Montréal, professeur titulaire, Faculté de Pharmacie, Université de Montréal. Révision : Isabelle Laverdière, B. Pharm., M. Sc., Ph. D., chercheur-boursier clinicien J1, FRQS; professeur adjointe, Faculté de pharmacie, Université Laval, chercheur régulière, Centre de Recherche du CHU de Québec-Université Laval, Axe oncologie, pharmacienne, Département de pharmacie du CHU de Québec-Université Laval. Déclaration de conflit d’intérêts : au cours de la dernière année, Simon de Denus a reçu une subvention de recherche de Pfizer, Dalcor et Roche Molecular Sciences. Ces subventions ne sont pas reliées aux sujets discutés dans cet article. Isabelle Laverdière ne déclare aucun conflit d’intérêts lié à la rédaction de cet article. Texte original soumis le 1er novembre 2019. Texte final remis le 12 novembre 2019. Bien connue comme le « cœur » de Québec Pharmacie, cette chronique offre l’occasion de faire une mise à jour des connaissances en physiopathologie, en pharmacologie et en pharmacothérapie sur une grande variété de pathologies et de traitements. Responsables de cette chronique : Delphine Rochefort, Pharm. D., M. B. A. Thi Thanh Yen Nguyen, B. Pharm., D. E. S. S. Alice Collin, B. Pharm., D. E. S. S., M. Sc. Introduction à la pharmacogénétique D’énormes progrès ont été réalisés dans la compréhension de l’impact des variations génétiques sur les besoins posologiques, l’efficacité et l’innocuité des médicaments. La pharmacogénétique/pharmacogénomique, discipline récente, vise à optimiser la QUESTIONS DE Objectifs d’apprentissage 1. Définir et illustrer les concepts 2. Comparer les 3. Expliquer l'influence de validité analytique, de vali- différentes définitions des polymorphismes dité clinique et d’utilité clinique de « données génétiques sur certains des tests pharmacogénétiques. probantes ». médicaments. Janvier – février 2020 Québec Pharmacie www.ProfessionSanté.ca ·ca 1 /27
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