OPÉRATIONNELS SOUTIEN LOGISTIQUE DÉFENSE SÉCURITÉ - Aviation militaire Le défi de la Covid, par le général (2S) Laurent Naval " Top Gun Revisited ...

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OPÉRATIONNELS SOUTIEN LOGISTIQUE DÉFENSE SÉCURITÉ - Aviation militaire Le défi de la Covid, par le général (2S) Laurent Naval " Top Gun Revisited ...
OPÉRATIONNELS
                     SOUTIEN LOGISTIQUE DÉFENSE SÉCURITÉ

Aviation militaire
Le défi de la Covid, par le général (2S) Laurent
                                                           AUTOMNE 2020
                                                            NUMERO #50

Naval
« Top Gun Revisited », with Rear-Admiral Brophy

Sécurité
La lumière, arme de première ligne
OPÉRATIONNELS SOUTIEN LOGISTIQUE DÉFENSE SÉCURITÉ - Aviation militaire Le défi de la Covid, par le général (2S) Laurent Naval " Top Gun Revisited ...
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                                          SO

                 4 Editorial

                  Dans l’œil du cyclone
                  Par Murielle Delaporte

                 6 L’analyse du Conseil éditorial

                         Obligation de permanence ...
                         Les défis de l’aviation militaire face aux effets de la Covid-19
                         Par le général de corps aérien (2S) Jean-Marc Laurent

                 12 Formation aéro

                         Pilotes
                         Ecole de l’aviation de chasse de Tours : la fin d’une époque
                         Par Frédéric Lert

                         ESO Aéro
                         Rochefort, creuset de la formation des sous-officiers aéro
                         Par le lieutenant-colonel (R) Pascal Podlaziewiez

                 24 Naval
                         In English
                         Fop Gun Revisited: Preparing for the Great Power Competition
                         An Interview with Rear Admiral Richard Brophy
                         By Robbin Laird

                         Innovation
                         Par Linda Verhaeghe
                         Rencontres du Morbihan :
                         innovation de défense et technologies duales à l’honneur
                         Entretien avec Jean-Michel Jacques

                         Guerre des mines : du nouveau chez RTsys
                         Menaces
                         ... Effet Covid ...
                         Les voies maritimes de plus en plus prisées par les narcotraficants
                         Par Romain Petit

                 36 Sécurité
                        Tactique
                         Eclairer pour vaincre :
                         la lumière comme première ligne de défense
                         Dossier de Claude Corse, avec le retour d’expérience de Thierry Delhief

                         Innovation ... En bref ...
                         Axon : la police de demain
                         Tixeo : la vidéo-collaboration en toute sécurité
                         Par Claude Corse

                         L’US Army et SOCOM renouvèlent leurs armes légères
                         BWA : le pari européen du haut de gamme
                         Par Philippe Couvreur
                                                                         Opérationnels SLDS # 50              3
                                                                        Soutien Logistique Défense Sécurité
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N° 50 - Automne 2020
                  Siège social
                     DIESL
                                                               éditorial
                                                                        « Chacun est responsable de tous.
   Défense interarmées et soutien logistique                                 Chacun est seul responsable.
                 Paris, France                                      Chacun est seul responsable de tous. »
            Dépôt légal / ISSN : 2273-4201                                       Antoine de Saint-Exupéry

www.operationnels.com

Directrice de publication / Rédactrice en chef
Murielle Delaporte
m.delaporte-laird@operationnels.com
                                                             Dans l’œil du cyclone
06 89 74 24 31                                                     Par Murielle Delaporte
Communication
Claire Colat-Parros
clairecolatparros@gmail.com                             La crise Covid a vulgarisé l’approche
06 83 50 08 58                                          d’un « monde d’avant » et d’un « monde
                                                        d’après ». Si on peut être sceptique sur une
Publicité
Sylvana Desforges                                       telle rupture et de tels propos tendant à
h4com@wanadoo.fr                                        l’exagération, il n’en reste pas moins que
06 10 17 29 41                                          cette pandémie a au moins deux effets
                                                        indiscutables : d’une part, l’exacerbation
Développement
Claude Corse
                                                        des tendances sous-jacentes avant mars
claudecorse.ops@gmail.com                               dernier et, d’autre part, l’accélération
06 09 17 74 07                                          du changement de paradigme qui sévit
                                                        au sein de nos sociétés et au regard des
Contributeurs et Interviewés                            équilibres mondiaux, et que nul ne peut
Colonel Guillaume Bourdeloux
Raphaël Bourdon                                         contester. Nous sommes dans l’œil du
Contre-amiral Richard Brophy                            cyclone à bien des égards et, comme
Claude Corse                                            dans la plupart de ces phénomènes
Philippe Couvreur
Thierry Delhief                                         météoroligiques extrêmes, nous sommes
Lieutenant-colonel G.                                   confrontés en son sein à de multiples
Jean-Michel Jacques                                     tornades auxquelles nous devons faire
Robbin Laird
Général de corps aérien (2S) Jean-Marc Laurent          face tant bien que mal.
Frédéric Lert
Romain Petit
                                                        Le cyclone, dans le domaine qui nous
Lieutenant-colonel (R) Pascal Podlaziewiez              préoccupe, quel est-il ? Il s’agit en
Linda Verhaeghe                                         l’occurrence du bouleversement de
                                                        l’équilibre des puissances à l’échelle
Relecture & Prepresse
Nicole Cointement                                       planétaire et du retour à la compétition
Claire Colat-Parros                                     militaire directe entre grandes puissances,
Pauline Schaltegger                                     dans laquelle l’Europe se trouve à la fois
Impression
                                                        actrice et spectatrice.
Imprimerie de Champagne                                 Les tornades sont multiples et ce numéro
Abonnement
                                                        aborde - au travers de ses reportages et
contact@operationnels.com                               analyses - deux d’entre elles :
Site internet Operationnels.com                         • La première est la transition numérique
Murielle Delaporte                                      et le défi qu’elle représente au niveau de
Marc Passarelli
Romain Petit
                                                        la formation de militaires « zoomers » que
                                                        les Armées ont parfois du mal à conserver
Vidéos OPS
Claude Corse

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Murielle Delaporte                                                                            Photo de couverture
                                                                                                   EFSOAA
Les opinions exprimées au sein de cette
publication n’engagent que leurs auteurs. Les                                               © Pascal Podlaziewiez, 2020
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dans leurs rangs sur longue période. Les reportages de Frédéric
Lert et de Pascal Podlaziewiez mettent en avant une partie des
changements et des révolutions discrètes que l’armée de l’Air est
en train de mettre en place. Le cursus de formation des pilotes,
mais aussi des sous-officiers - c’est à dire tous les maintenanciers
aéronautiques , quel que soit leur milieu d’appartenance (armée
de l’Air, de Terre, Marine et Gendarmerie nationales) est ainsi
en pleine mutation. Une immersion au sein du NAWDS – Naval
Aviation Warfighting Development Center - centre d’excellence
de l’US Navy pour la formation et le développement des tactiques
et procédures de combat (TTPs pour « Tactics, Training and
Procedures ») dans le domaine aéronaval et nouvelle école Top
Gun depuis les années quatre-vingt-dix – offre un regard croisé
sur les thématiques évoquées plus haut, au travers d’un entretien
avec son commandant, le contre-amiral Richard Brophy : y est
notamment décrite la mise à disposition d’approches numériques
récemment défrichées au service de nouveaux scenarii de
combat face à un - ou des - adversaires « de haut du spectre ».
• La seconde tornade est bien-sûr celle de la Covid-19 qui n’a
de cesse de perturber le fonctionnement normal de nos sociétés
tout en accélérant la première. Dans le domaine de la défense
et de la sécurité, ce sont tout d’abord les menaces qui évoluent
malgré, ou à cause de, la pandémie. Un exemple caractéristique
est celui de la recrudescence de l’utilisation des voies maritimes
– et notamment des narcosubs – dans le traffic de drogue
international, dont Romain Petit nous relate l’historique en détail.
Ce sont aussi les tests de nos solidarités au sein des alliances
internationales, alors que la désorganisation économique actuelle
n’a pas fini d’accumuler les conséquences d’ordre budgétaire.
Les premières victimes pourraient en être des pans entiers de
notre industrie affectant nos capacités de protection contre des
prédateurs tirant actuellement profit de cette crise. Le général
(2S) Jean-Marc Laurent tire ainsi la sonnette d’alarme en ce qui
concerne les attaques en règle contre le secteur aéronautique
dans son ensemble et parle du risque d’un véritable « Pearl
Harbour stratégique », si l’on n’y prend garde.
Contrairement aux sirènes actuelles vantant les mérites
d’alternatives sociétales type décroissance, notre première ligne
de défense consiste plus que jamais à ne pas baisser la garde
en continuant à investir dans nos forces armées et de sécurité,
tant sur le plan humain que sur le plan des équipements et
des innovations technologiques, dont vous trouverez quelques
exemples dans les pages qui suivent au travers de reportages
réalisés par Linda Verhaeghe dans le domaine naval (Rencontres
du Morbihan) et par Claude Corse, Thierry Delhief et Philippe
Couvreur dans le domaine de la sécurité (lampes tactiques et
munitions en particulier).
Si la Covid agit comme une tornade, c’est à nous tous de veiller
à ce qu’elle ne génère pas une lame de fond sonnant le glas de
nos démocraties occidentales …
Bonne lecture à tous !

                                                              Opérationnels SLDS # 50              5
                                                             Soutien Logistique Défense Sécurité
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... L’ANALYSE DU CONSEIL EDITORIAL ... POSTURE STRATEGIQUE ET COVID ...

                                                                          ... Obligation de
                                                                            permanence ...
                                                                                      Les défis de
                                                                               l’aviation militaire
                                                                              face aux effets de
                                                                                       la Covid-19
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Par le général de corps aérien (2S) Jean-Marc Laurent

     Crédit photo : permanence au Commandement des forces aériennes stratégiques
                    © Alexandre Beuzeboc, armée de l’Air, BA 125 d’Istres, mars 2018
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L’aviation militaire n’a pas échappé aux effets de la COVID-19
    L’impact économique et humain de la crise sanitaire de la COVID-19 sur la filière
    aéronautique est assurément majeur, partout dans le monde et bien entendu en
    France. Ses effets ont été fortement ressentis dans l’aviation commerciale dont les
    flottes, brutalement clouées au sol, ne reprennent que progressivement les Airs. Par
    voie de conséquence, c’est tout l’écosystème du transport aérien qui a dû contracter
    son activité et certains de ses acteurs ont d’ores et déjà été condamnés à disparaître.

    Si la loupe médiatique s’est largement portée sur l’aviation grand public, l’aéronautique
    militaire n’a pas été épargnée par la pandémie. Les forces armées françaises, mais
    aussi européennes et alliées, n’ont ainsi pas échappé au cataclysme sanitaire et ont
    été confrontées au double défi de se protéger en adoptant des mesures conservatoires
    tout en répondant à l’obligation de permanence opérationnelle, que ce soit au
    titre de la souveraineté (dissuasion, défense aérienne, action outre-mer, etc.) ou
    des engagements internationaux (Levant, Sahel, Baltique, etc.). Contrairement à
    l’aviation civile, cet impératif stratégique leur a interdit toute interruption des vols
    et les a obligés à assurer coûte que coûte une continuité de leur action sécuritaire
    dans la troisième dimension.

    La poursuite de ces missions de première ligne n’a pas bénéficié d’un réel éclairage
    médiatique et est mal appréhendée par une opinion que la réalité quotidienne a
    détournée vers des préoccupations plus personnelles. Certes, des événements liés
    à la COVID-19 ont parfois permis aux forces aériennes interarmées de sortir de
    l’ombre, qu’ils relèvent de la contribution à la réponse étatique (rapatriement de
    nationaux depuis différentes zones du monde, déplacement de malades entre régions
    européennes, etc.) ou qu’ils mettent en évidence des situations inhabituelles comme
    l’épisode de contagion sur le porte-avions Charles de Gaulle. Les manifestations
    de la fête nationale française ont aussi rappelé le rôle des armées dans la gestion
    de la crise et le volet aérien n’a pas été oublié. Pour autant, on doit constater que
    ces événements, médiatisés dans l’instant, n’ont pas empêché l’effet d’occultation
    de l’immense tension que les forces en général, et aériennes en particulier, ont
    supportée pour continuer à garantir la sécurité des Français, des Européens et des
    Alliés.                                                                                     Photos : atelier M88
                                                                                                © SIAE, 2013
    Il faut dire qu’il est toujours difficile, pour ceux qui ne les vivent pas directement,
    de se représenter la réalité des engagements militaires. Leur éloignement, leur
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dissémination, leur diversité et leur nature confidentielle ne facilitent pas leur
appropriation à l’échelle de l’individu. En outre, il est difficile, pour un citoyen,
confronté à une crise sanitaire qui peut le mettre personnellement en danger, de
s’attarder sur une action militaire vue comme distante. Mais il doit savoir que la
communauté de défense, et tout spécialement l’aviation militaire, a dû produire un
puissant effort pour répondre aux engagements sécuritaires nationaux, européens et
alliés, malgré les mesures sanitaires qu’elle a dû appliquer.

Cet effort, dont on se rend mal compte de l’ampleur, aura inévitablement des
répercussions humaines, techniques et donc capacitaires à court et moyen termes.
Mais cela pourrait arriver à un moment où les esprits verront dans la COVID-19 une
crise passée qui ne justifie plus la même urgence. Il est donc essentiel de souligner
dès à présent une situation éminemment critique pour ne pas laisser penser
que l’aviation militaire sortira indemne de l’épisode. Il s’agit de comprendre la
nécessité, comme pour d’autres secteurs d’activité de première ligne, d’une réponse
politique, économique, voire juridique à la hauteur, mais aussi du besoin d’un retour
d’expérience approfondi sur le concept d’emploi des forces armées, en général, et
aériennes, en particulier.

                              La pandémie,
   révélateur des fragilités du concept d’emploi des forces aériennes
Il serait certainement prématuré et présomptueux de vouloir évaluer exhaustivement
les conséquences de la crise sanitaire sur l’action des forces aériennes françaises,
quelle que soit l’armée qui les met en œuvre. En effet, derrière les impacts les plus
manifestes se cachent toujours des contrecoups pervers qu’il est difficile de percevoir
et de mesurer quand la crise est encore en cours. Il s’agit donc ici de seulement
partager trois réflexions qui me viennent immédiatement à l’esprit et dont la prise
en compte me paraît essentielle au regard de l’avenir de ces forces de l’Air.

Ma première réflexion concerne la situation organique des armées françaises et de leur
composante aérienne. Les profondes transformations qu’elles ont subies depuis une
décennie (« subir » est le juste mot) et la forte diminution des effectifs militaires qui
en a résulté rendent désormais très laborieuse la gestion opérationnelle et technique
des moyens aériens en mode dégradé. Certes, la situation est en voie de redressement
depuis la revue stratégique nationale de 2017 et la loi de programmation militaire
qui a suivi. Mais son plein effet n’est pas encore atteint – en espérant qu’il le soit à
                                                                     Opérationnels SLDS # 50              9
                                                                    Soutien Logistique Défense Sécurité
OPÉRATIONNELS SOUTIEN LOGISTIQUE DÉFENSE SÉCURITÉ - Aviation militaire Le défi de la Covid, par le général (2S) Laurent Naval " Top Gun Revisited ...
... L’ANALYSE DU CONSEIL EDITORIAL ... POSTURE STRATEGIQUE ET COVID ...   terme -, car il est plus facile de « casser » que de « reconstruire ». Ainsi, la remise à niveau
                                                                               du système technico-opérationnel aérien, qui exige la formation d’experts techniques
                                                                               de haut niveau, demandera de nombreuses années. En attendant, la COVID-19 a
                                                                               été un révélateur et a plongé les forces aériennes dans une problématique humaine
                                                                               d’ampleur, en nombre et en expertise. Elles ont ainsi dû combiner l’absolue nécessité
                                                                               de confiner une partie des effectifs pour éviter un effet de contagion massif, tout
                                                                               en palliant une activité industrielle momentanément stoppée en grande partie.
                                                                               Cette situation technique a fortement impacté la capacité de maintien en condition
                                                                               opérationnelle (MCO), tant en métropole que sur les théâtres d’opération, d’autant
                                                                               qu’elle a en outre été soumise à la mise en place d’une logique de « sas sanitaires
                                                                               » (c’est-à-dire des quarantaines) afin d’assurer des rotations sûres de personnels. Il
                                                                               en a découlé une gestion complexe des spécialités et l’aggravation de phénomènes
                                                                               de suractivité sur certaines d’entre-elles qui ont inévitablement perturbé l’activité
                                                                               aérienne. Cette situation, de nature à altérer la capacité de défense et de souveraineté
                                                                               du pays, aurait pu être très critique s’il avait dû affronter un autre événement
                                                                               sécuritaire. Elle montre, si besoin en est, que les effectifs associés à un modèle d’armée
                                                                               ne peuvent se limiter à une « juste suffisance » économique, mais qu’ils doivent être
                                                                               calculés en fonction d’une contingence trop longtemps oubliée ou volontairement
                                                                               occultée, et pourtant intimement associée au monde combattant, qui est l’attrition.

                                                                               Ma seconde réflexion concerne la relation entre armées et industrie. Il faut ici en
                                                                               souligner sa spécificité dans un pays où l’industrie de défense nationale n’est pas
                                                                               seulement considérée comme un fournisseur de matériels, mais, avant tout, comme un
                                                                               acteur à part entière de la posture de défense. Derrière le volontarisme des entreprises
                                                                               de la base industrielle et technologique de défense (BITD), il est un cadre légal qui
                                                                               ne leur permet pas, souvent à leur corps défendant, d’agir dans la même dynamique
                                                                               d’exception que les militaires. La crise de la COVID-19 en a été une démonstration
                                                                               marquante, puisque les règles du confinement et le droit civil du travail ont quasi
                                                                               instantanément figé la capacité d’action des principaux partenaires industriels des
                                                                               forces aériennes. Ces dernières ont alors dû prendre à leur compte une partie du
                                                                               MCO de niveau industriel, en fait celui qui aurait bloqué l’exigence de continuité
                                                                               et de permanence opérationnelles. Cette situation nous rappelle que la capacité
                                                                               de résilience de ce qu’il est convenu d’appeler le niveau de soutien opérationnel
                                                                               et le nécessaire empiètement de ce NSO sur des tâches de niveau industriel ont
                                                                               fait l’objet d’âpres – et hélas vains - débats lors de la transformation de la défense
                                                                               caractéristique de la décennie précédente. Nombreux, hors des armées, ont alors
                                                                               voulu réduire la capacité technique des forces à sa plus simple expression, au nom de
                                                                               l’idée aussi innocente que dangereuse de recentrer le militaire sur le seul emploi des
                                                                               armes, excluant de fait sa capacité technique à les maintenir en situation industrielle
                                                                               dégradée. Heureusement, l’aviation militaire a su habilement garder, contre ces
                                                                               vents idéologiques mauvais, une partie de son expertise avancée et construire une
                                                                               complémentarité résiliente avec ses partenaires industriels. Mais elle n’a pu éviter
                                                                               la réduction des effectifs militaires et l’affaiblissement capacitaire en cas de crise
                                                                               grave. La COVID-19 est aujourd’hui un révélateur du choix à faire entre efficience
                                                                               et efficacité, entre logique économique et robustesse stratégique. La relation Etat-
                                                                               Industrie doit certes se construire sur une complémentarité de compétences, mais
                                                                               aussi sur un recoupement, voire une redondance, qui, si ils ne sont par nature pas les
                                                                               moins coûteux, s’avèrent indispensables à la protection du pays.

                                                                               Ma troisième réflexion concerne les risques liés à la concentration des forces, en
                                                                               général, et celui des forces aériennes tout spécialement. La logique économique -
                                                                               qui ne date pas de la dernière décennie, mais court depuis la fin de la Guerre froide
                                                                               - a conduit à fortement réduire le nombre des bases aériennes et à concentrer les
                                                                               moyens sur quelques emprises. Cette concentration aurait pu être encore plus
                                                                               drastique, puisque l’optimum économique recherché prônait des bases aériennes
                                                                               abritant quatre à cinq mille personnes et non deux à trois mille conformément aux
                                                                               modèles qui prévalent à l’heure actuelle. En effet, pour des raisons stratégiques et
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FFDJ © Murielle Delaporte, Djibouti, 2014
environnementales – notamment la limitation de l’impact de l’activité aérienne sur
les populations -, les armées ont réussi à contenir les tentations technocratiques.
Cette réduction a certes été en adéquation avec le nombre des aéronefs qui, lui
aussi, a lourdement décru. Elle a également permis de créer des synergies technico-
logistiques devenues indispensables. Mais la crise de la COVID-19 a non seulement
montré la vulnérabilité des concepts qui favorisent la concentration des forces, mais
doit nous servir de guide pour en éviter leur développement à l’avenir. Cette exigence
ne se limite pas au seul risque sanitaire et ce qui est vrai pour une pandémie l’est
aussi pour d’autres menaces à effet collectif comme celles des armes NRBC ou des
attaques par la voie des Airs. Je pense ici aux missiles qui seront les « agresseurs »
aériens du siècle et dont on constate à la fois la prolifération et l’augmentation de la
précision. Ces risques plaident pour une dispersion des forces, principe militaire qui
n’est pas innovant, mais qui a largement été oublié au profit de dispositifs obligeant
à les rassembler en un même lieu. Les épisodes médiatisés des porte-avions Charles
de Gaulle ou Théodore Roosevelt sont, à cet égard, marquants et instructifs. Réunir
autant de personnels sur de tels bâtiments crée un risque majeur face à une menace
à laquelle il n’est pas possible d’échapper : aujourd’hui un virus, demain un missile
balistique ou armes sous-marines hyper véloces telles que nombre de puissances
militaires développent actuellement. La problématique est la même pour certains
dispositifs à terre qui, ayant progressivement abandonné les réflexes de durcissement
de la Guerre froide, constituent de véritables pièges stratégiques. Je pense ici aux
bases aériennes massives, comme celles qui ont été créées en Afghanistan (Kandahar
ou Bagram), avec leurs trente mille combattants chacune, ou au centre de gestion des
opérations aériennes (CAOC) d’Al Udeid au Qatar qui accueille plus de dix mille
militaires et constitue un cœur vital des opérations aériennes. Cette concentration
de forces, qui témoigne d’une époque où la supériorité aérienne acquise a écarté la
menace venant des Airs, doit être reconsidérée. La probabilité croissante d’un conflit
majeur, où les rapports de force seront d’une autre nature que ceux connus depuis
trente ans, oblige à refuser les regroupements opérationnels massifs à la portée
des menaces que les nouvelles technologies nous font craindre. Elle nous incite, au
contraire, à favoriser les dispositifs légers et en réseau dont la force reposera sur les
promesses de la connectivité.

Sans cette précaution et la prise en compte des autres risques évoqués ci-dessus, nous
risquons de nous mettre dans la posture d’un Pearl Harbour stratégique.
                                                                              Opérationnels SLDS # 50              11
                                                                             Soutien Logistique Défense Sécurité
Formation pilotes AAE
Ecole de l’aviation de
    chasse de Tours :
  la fin d’une époque
                                   Texte et photos de Frédéric Lert

  Le 2 juillet dernier, une page s’est tournée sur la base aérienne 705 avec une ultime
  cérémonie de macaronage au sein de l’Ecole de l’aviation de chasse 00.314 (EAC).
  La base aérienne perd ses activités aéronautiques, ses Alphajet et son Escadron de
  soutien technique aéronautique, mais son évolution vers un autre chapitre de son
  existence devrait lui permettre de continuer à vivre et à prospérer.

  Le coup d’envoi des cérémonies aurait dû être donné le 14 mai 2020 au cours d’une
  journée de célébration en présence en particulier des ambassadeurs de l’armée
  de l’Air et de l’Espace (AAE), Patrouille de France et Rafale solo display. Le
  Coronavirus a eu finalement raison de ces préparatifs et l’Ecole de l’aviation de
  chasse (EAC) située sur la base aérienne de Tours a ralenti ses activités dans la
  plus grande discrétion, jusqu’à la très symbolique mission du 5 juin dernier : ce
  jour là, un box de quatre Alphajet a été envoyé pour survoler une dernière fois
  quelques communes emblématiques de la région, telles que Saumur et Cinq-Mars-
  la-Pile, ainsi que le château de Villandry. Le 2 juillet suivant, douze pilotes et six
  navigateurs de combat, étaient macaronés en présence du général Lavigne, chef
  d’état major de l’armée de l’Air et de l’Espace.

  Fin d’une époque et quasi fin de l’activité aéronautique militaire sur la BA
  705, l’EAC a transféré depuis le 16 septembre son activité deux cent cinquante
  kilomètres plus au sud, sur la base aérienne 709 de Cognac. Les futurs pilotes de
  chasse y suivent dorénavant, à bord des très modernes Pilatus PC21, la phase III
  de leur formation.

  Plus qu’une page qui se tourne, c’est un livre entier qui se referme : l’EAC s’était
  installée en Touraine en 1961 après sa création en 1943 sur le sol marocain, et
  les Alphajet, chasseurs franco-allemand fabriqués par Dassault-Dornier, y avaient
  peu à peu remplacé, dès 1979, les Lockheed T-33 dont elle était dotée depuis 1951.
  Ce sont ainsi plus de quatre mille huit cent cinquante pilotes de chasse et près de
  trois cent navigateurs officiers système d’armes (NOSA) qui auront été formés sur
  la BA 705.

  Les cinq derniers biplaces encore basés à Tours au début de l’été ont aujourd’hui
  rejoint la base de Cazaux et sa 8ème escadre de chasse, ainsi que la base de Rochefort
  comme matériel d’instruction. Un avion devrait se retrouver en stèle à l’entrée de
  la base afin d’en pérenniser le souvenir.

                                                                        Opérationnels SLDS # 50              13
                                                                       Soutien Logistique Défense Sécurité
Réallocation de l’ESTA 15.314 Val de Loire
                                                                                                               Pour les trois hangars emplis d’outillages, la solution
                                                    En charge de l’entretien et la mise en oeuvre des avions   a consisté à placer ces derniers à la disposition des
                                                    au profit de l’EAC, l’Escadron de Soutien Technique        autres bases. Les équipements les plus anciens étaient
                                                    Aéronautique (ESTA) 15.314 « Val de Loire » a été          des plieuses datant de l’arrivée à Tours, en 1961.
                                                    bien-sûr concerné au premier chef par la manœuvre
                                                    logistique née du transfert d’activité.                    « Ces outillages étaient utilisés par les
... FORMATION PILOTES DE CHASSE ... REPORTAGE ...

                                                                                                               chaudronniers dont les compétences restent
                                                    « Nous avons eu le temps de nous préparer                  très recherchées » souligne le lieutenant-colonel
                                                    à cette situation » souligne d’entrée de jeu le            G. « Sur les quatre sous-officiers qualifiés que
                                                    lieutenant-colonel G., qui commanda l’escadron             nous avions, l’un est parti à Solenzara, l’autre
                                                    jusqu’à l’été dernier. « En 2018 nous étions encore        à Orléans et deux resteront ici un peu plus
                                                    cent soixante au sein de l’ESTA. Au début de               longtemps pour participer au démantèlement
                                                    l’été 2020, nous n’étions plus que cent vingt              de nos installations. L’atelier CND (contrôle
                                                    pour descendre à une trentaine de personnels en            non destructif) sera envoyé à Orléans et ses
                                                    septembre pour former un échelon liquidateur.              spécialistes se répartiront entre cette base et
                                                    Notre personnel a été réparti au sein de bases             celle de Nancy ».
                                                    qui sont en pleine croissance avec l’arrivée
                                                    d’aéronefs nouveaux, comme Orléans, Cognac                 La base aérienne 120 de Cazaux, qui doit donc
                                                    ou Istres…                                                 héberger le dernier ESTA dédié aux Alphajet (lequel
                                                    De nombreux mécaniciens travailleront à                    entretient à ce titre les appareils de la Patrouille de
                                                    présent sur MQ-9 Reaper, Airbus A400M,                     France pourtant basés à Salon-de-Provence), hérite
                                                    ou A330 Phénix. Quelques-uns gagneront                     quant à elle de nombreux savoir-faire et équipements.
                                                    également Cazaux et poursuivront leur                      « Nous étions par exemple les seuls à disposer
                                                    carrière sur les Alphajet de la 8ème escadre de            de valises de test pour le système de freinage
                                                    chasse. Depuis mon arrivée au Val de Loire en              modistop de l’Alphajet », poursuit notre
                                                    2015, j’ai reçu beaucoup de jeunes mécaniciens             interlocuteur, et cette compétence sera transfèrée à
                                                    et j’ai vu le départ de nombreux anciens, ce qui           Cazaux.
                                                    a fait de l’ESTA une unité avec une moyenne
                                                    d’âge très jeune. Changer d’avion a été pour               « La BA 120 recevra à partir de 2021 l’unité
                                                    tous ces jeunes sous-officiers un vrai défi,               d’instruction spécialisée qui disposait de
                                                    mais les mutations se sont bien passées. La                nombreux équipements didactiques ».
                                                    plupart d’entre eux ont pu rejoindre la base de            Depuis septembre, l’échelon liquidateur resté en place
                                                    leur choix. »                                              démantèle les dernières installations militaires. Il
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assure également le soutien en oxygène des avions de la   pompiers et contrôleurs militaires ainsi que d’une
permanence opérationnelle qui sont encore pendant         partie du soutien logistique retranchera environ cent
quelques mois les derniers aéronefs militaires présents   cinquante personnels supplémentaires.
sur la base. Il est vraisemblable que l’ESTA sera
dissout en juin 2021 à l’issue de cette ultime mission.   « En revanche, de nouvelles unités vont
                                                          venir s’installer sur la BA 705 », poursuit le
     Horizon 705 : Soutien et Ressources                  colonel Bourdeloux. « Le Centre de gestion des
          humaines au programme                           matériels techniques de l’armée de l’Air et
                                                          de l’Espace (CGMTAE), qui s’installera dans
La fin de l’activité aéronautique militaire ne va         l’ancien bâtiment de l’EAC, doit accueillir une
cependant pas être synonyme de la fin de l’activité de    quarantaine de personnes. Dans les mois à
la base, loin s’en faut. Portée par le projet Horizon 705,venir sera par ailleurs créée la Division centre
la base aérienne va désormais connaître une nouvelle      maintenance radar sol (DCMR), tandis que la
histoire : « au 1er juillet 2021, l’affectation des       Division des ressources humaines de l’armée de
installations aéronautiques sera officiellement           l’Air et de l’Espace (DRHAAE), qui regroupait
transférée au ministère des transports », souligne        déjà quatre cents personnes sur le site avant le
l’actuel commandant de la base, le colonel Guillaume      transfert de l’EAC, sera densifiée. On prévoit
Bourdeloux. « Les collectivités prendront alors la        notamment la création d’un centre d’examen
main sur les deux-tiers des trois cents hectares          unique pour l’armée de l’Air et de l’Espace.
de la base et sur onze bâtiments dont la tour de          A l’été 2021 arrivera également depuis Dijon
contrôle et les hangars. Mais paradoxalement,             l’école de formation des officiers RH, soit une
l’arrêt de l’activité aéronautique militaire              dizaine de personnels supplémentaires ».
aura un impact très limité sur le nombre de
militaires présents sur la BA 705 ».                       Et la liste n’est pas close, puisque le chantier
                                                           interministériel prévoyant de déplacer différents
En comptant les unités de soutien et le centre radar services de Paris vers la province intéresse également
de Cinq-Mars-la-Pile qui y est rattaché, la BA 705 Tours. Une densification supplémentaire du site est
accueillait au premier juillet dernier environ deux donc envisageable à horizon 2023, avec finalement
mille deux cents militaires. Le déménagement de à cette date un nombre de personnels sur le site qui
l’ESTA et de l’EAC entraîne le départ de deux cents pourrait être, peu ou prou, équivalent à ce qu’il est
personnels, tandis qu’à l’été 2021, celui des derniers aujourd’hui.
                                                                                           Opérationnels SLDS # 50              15
                                                                                          Soutien Logistique Défense Sécurité
Formation aero
interarmees
Rochefort, creuset
      de la formation des
      sous-officiers aéro
                    Texte et photos de Pascal Podlaziewiez

Créée au début des années 1970, la base aérienne 721 de Rochefort est la seule base construite de toutes
pièces sur le territoire français, les autres bases étant issues d’installation déjà existantes et modernisées
au fil des ans. La 721 a ainsi la particularité d’avoir été conçue au départ comme un campus universitaire
disposant dans chaque bâtiment de salles de cours, de bureaux, de lieux d’études et de chambres d’élèves.
Aujourd’hui encore ce principe fait foi et tout est fait pour l’instruction et l’acquisition des savoirs.

Creuset de la formation des sous-officiers de l’armée de l’Air et de l’Espace (AAE), la mission première de
l’école de formation des sous-officiers de l’armée de l’Air (EFSOAA) est de former tous les futurs sous-
officiers de l’AAE à leur nouveau statut de militaire. On y forme d’abord des militaires avant de former
des techniciens.

En 2020, mille cinq cents élèves sous-officiers (ESO) y séjourneront, soit deux fois plus qu’il y a seulement
quatre ans . Au total à ce jour, l’EFSOAA délivre annuellement plus de sept mille actions de formation,
au bénéfice de plus de six mille élèves ou stagiaires. Plus de deux mille élèves ou stagiaires suivent ainsi
quotidiennement des cours au sein de la base école de Rochefort.

                            L’EFSOAA, maison mère des sous-officiers
                                   et épine dorsale de l’AAE
Le cursus débute donc par une formation militaire initiale (FMI) d’environ quatre mois, au cours de
laquelle le jeune engagé apprend les rudiments du métier des armes. A l’issue de la FMI, les élèves vont
poursuivre une formation générale de spécialité dont la durée varie en fonction de la technicité du métier
enseigné (de trois mois à un an ou plus selon le cas). Puis, en fonction des résultats obtenus (le choix se
faisant par mérite dans l’ordre du classement), les jeunes sergents choisissent leurs affectations lors d’un
amphi de garnison et sont affectés dans une unité opérationnelle avec un « certificat élémentaire ».

Durant toute sa carrière, le sous-officier revient en formation à l’EFSOAA à chaque phase de son évolution
professionnelle pour obtention d’un certificat de spécialiste (chef d’équipe), puis pour attribution d’un
certificat de cadre de maîtrise (chef de service), ou encore pour certains stages plus spécifiques.

Sur la trentaine de spécialités ouvertes aux sous-officiers dans l’AAE, l’EFSOAA assure la formation
d’une dizaine d’entre elles. Ces spécialités concernent les métiers à dominante technique comme ceux de
la maintenance des aéronefs (vecteur-moteur, avionique, structure aéronefs, armement bord), ceux liés à
son environnement (infrastructure opérationnelle, logistique…), ou encore ceux permettant d’opérer les
systèmes d’information, de communication ou de détection. Le volume de personnels formés à l’EFSOAA
représente ainsi plus de soixante pour cent de ceux formés dans l’ensemble des écoles de spécialité issues
de l’AAE (commandos de l’air, contrôleurs aériens …), d’autres armées (matériels d’environnement ou de
transmission de l’information …), ou interarmées (spécialité ressources humaines notamment).

                                                                                         Opérationnels SLDS # 50              17
                                                                                        Soutien Logistique Défense Sécurité
soutenue par le campus numérique Rochefort (CNR).
                                                                                                               Grâce à un réseau d’ordinateurs et de serveurs
                                                                                                               auxquels ont accès les instructeurs et les élèves (depuis
                                                                                                               leurs smartphone ou tablettes numériques), un vaste
                                                                                                               fonds documentaire didactique a ainsi été développé
                                                                                                               et mis à disposition de tous. Il comporte des cours
                                                                                                               numérisés, des vidéos, des animations 2D ou 3D, de
                                                                                                               la réalité virtuelle voire augmentée, des tests pour
                                                                                                               mesurer ses connaissances et de l’information sur la
                                                                                                               vie de la promotion, etc… Cette base de donnée est
                                                                                                               améliorée, complétée et évolue tous les jours grâce
                                                                                                               notamment à l’implication des instructeurs.

                                                                                                               Des instructeurs, qui, il est important de le souligner,
                                                                                                               sont tous volontaires pour servir et partager leur
                                                                                                               savoir technique, opérationnel et militaire. Ils sont
                                                                                                               tous au moins BS « breveté supérieur ». Après un acte
                                                                                                               de volontariat, le futur instructeur voit son dossier
                                                                                                               étudié ; il est ensuite audité par ses pairs avant d’être
                                                                                                               affecté pour six ans sur la base, période qui pourra être
                                                                                                               prolongée sur demande de l’intéressé. Mais affecté ne
                                                     Outre les sous-officiers de l’AAE, l’école accueille et   veut pas dire « être immédiatement devant les élèves
                                                     forme également des sous-officiers des autres armées      ». Avant d’être « lâché » seul devant une classe, il va
                                                     et de la gendarmerie. En effet l’EFSOAA est le pôle       suivre les cours, se remettre à niveau, acquérir les
                                                     d’excellence reconnu par la Direction de la Sécurité      compétences pédagogiques, assurer un cours en duo,
                                                     des Aéronefs d’Etat (DSAE) – l’équivalent de l’EASA       avant de dispenser seul son premier cours sous l’égide
                                                     (« European Union Aviation Safety Agency »                d’un maître-instructeur.
                                                     ou Agence européenne de la sécurité aérienne)
                                                     pour les aéronefs mis en œuvre par l’Etat – comme         Ces instructeurs sont aussi en charge de rédiger les
                                                     centre unique de la formation de base de tous les         contenus des cours et de les faire évoluer en fonction
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                                                     maintenanciers aéronautiques de l’armée de Terre,         des besoins des « opérationnels » et des nouveaux
                                                     de la Marine nationale et de l’AAE, ainsi que de la       équipements. Plus de mille cinq cents cours sont ainsi
                                                     gendarmerie nationale.                                    à disposition des instructeurs et des élèves.

                                                     Des partenariats avec l’étranger sont par ailleurs en     Ce réseau « d’aide à la formation » s’est ainsi avéré
                                                     place avec en particulier la mise en place de sous-       particulièrement précieux au plus fort de la crise
                                                     officiers instructeurs d’échange entre l’EFSOAA et        COVID, puisqu’il a permis d’assurer une continuité
                                                     l’Ecole des sous-officiers d’Appen en Allemagne, ou       de formation au profit des élèves grâce à un
                                                     encore des échanges avec les forces armées espagnoles.    enseignement à distance. Durant les mois de mars et
                                                     L’école vient de se voir agréée « Organisme de            avril 2020, environ dix mille connexions par semaine
                                                     formation certifié EMAR 147 » (label européen de          au CNR ont été enregistrées au profit de plus de
                                                     navigabilité dans le domaine de la formation) lui         mille cents cadres et élèves. Cette numérisation
                                                     permettant de s’ouvrir encore davantage à terme à la      de l’enseignement très prometteuse est une petite
                                                     formation d’élèves étrangers.                             révolution en marche.

                                                                  La « smart school »                                        Un taux d’échec faible
                                                                   validée par la Covid
                                                                                                               Lors de la signature de son contrat d’engagement
                                                     Armée hautement technologique, l’AAE a développé          dans un des Centres d’information et de recrutement
                                                     un ambitieux projet dit « smart school » piloté par       des forces armées (CIRFA), le jeune volontaire
                                                     la DRHAA (direction des ressources humaines de            choisit la spécialité dont il a envie. Il arrive que
                                                     l’armée de l’Air) et pour lequel l’EFSOAA a pris une      certains se trouvent en difficulté dans la spécialité
                                                     part extrêmement importante. Cela consiste, sans          initialement choisie ou réalisent que leur choix ne
                                                     renier le modèle fondé sur les instructeurs issus des     correspond pas du tout à leur vision du métier. S’ils
                                                     forces et l’irremplaçable face à face pédagogique, en     s’intéressent à d’autres métiers pendant leur phase de
                                                     une démultiplication de la capacité d’enseignement        formation et s’il s’avère qu’ils peuvent être aptes à le
                                                     grâce aux bénéfices de la numérisation des formations,    pratiquer, des réorientations vers une autre spécialité
sont alors possibles, mais elles sont relativement
rares et doivent correspondre aussi aux besoins
de l’institution.
Associé à l’exemple donné par les instructeurs,
le contact avec les unités opérationnelles, lors
des stages dits « d’acculturation » réalisés durant
la formation initiale ou lors d’exercices réalisés
à Rochefort par des unités opérationnelles, est
essentiel pour la juste orientation des élèves et
l’affermissement de leur choix.

Le niveau d’étude demandé pour tous les sous-
officiers est le baccalauréat, filière générale,
technologique ou professionnelle. Il n’y a pas de
prérequis en termes de compétences initiales.
S’agissant de la maintenance aéronautique,
un bac général avec des options scientifiques,
technologique STI2D ou professionnel filière
aéronautique est évidemment bien adapté.

A ce titre, l’école d’enseignement technique de
Saintes - EETAA où résident les fameux Arpètes
et qui présente un taux record de réussite au
bac -, fournit près de vingt pour cent des élèves
sous-officiers avec une quasi-certitude d’aller
au bout de leur formation à Rochefort. C’est
une excellente voie pour devenir sous-officier
dans la maintenance aéronautique. Un nombre
important d’élèves titulaires de diplômes d’études
supérieures franchissent également la grille de la
BA 721 par intérêt pour le métier des armes.

Peu d’échecs sont constatés, et quand il y en a, ils
relèvent le plus souvent de la formation initiale
et rarement de la formation de spécialité. Après
avoir suivi les quatre mois de formation initiale,
le jeune engagé peut rejoindre un des deux
escadrons de formations spécialisées en fonction
de sa future spécialité, à savoir l’escadron de
formation aérienne des spécialités sol (EFASS)
ou l’escadron de formation à la maintenance
aéronautique de défense (EFMAD).

Après la formation, le sous-officier est affecté
sur une base opérationnelle, mais n’est pas pour
autant un spécialiste qui sera lâché seul au milieu
des aéronefs. L’armée de l’Air et de l’Espace a
mis en place dans les unités opérationnelles des
phases de parrainage qui visent à consolider
l’enseignement initial délivré à Rochefort, en le
complétant par des formations - dites de « type
» - adaptées au matériel mis en œuvre par l’unité
d’affectation et par des formations permettant
de connaître les spécificités de l’environnement
opérationnel où va évoluer le jeune sous-officier.

Ce sous-officier nouvellement affecté effectue
... FORMATION SOUS OFFICIERS AERO... REPORTAGE ...   ainsi plusieurs stages au sein de son unité opérationnelle      Les besoins de l’AAE, laquelle a beaucoup contribué
                                                     ou dans des unités spécialisées, pour une durée de              aux déflations d’effectifs lors de périodes précédentes,
                                                     six mois à un an, en fonction de la complexité de la            sont par ailleurs importants pour revenir au modèle
                                                     spécialité et/ou du matériel en service. Ces stages se          d’armée que la Loi de programmation militaire
                                                     déroulent sous la responsabilité d’un parrain aguerri,          prévoit d’atteindre en 2025. Elle a dû en effet, ceci
                                                     formé d’ailleurs lui aussi à Rochefort pour être apte à         avant la crise COVID, faire face à des départs
                                                     cet encadrement et qui l’accompagnera tout au long              en quantité non négligeable du fait d’un secteur
                                                     de cette phase avant de pouvoir le déclarer pleinement          industriel aéronautique concurrentiel. Il lui faut donc
                                                     opérationnel. Cet échelon est alors sanctionné par              à présent recruter trois mille cinq cents aviateurs par
                                                     l’attribution du BE « brevet élémentaire ».                     an tout statut et spécialité confondus, dont environ
                                                                                                                     mille quatre cents sous-officiers spécialisés à hauteur
                                                     Un tel encadrement est crucial, car une fois dans le            de soixante-dix pour cent dans les filières techniques
                                                     bain de l’opérationnel, tout va très vite et la réussite de     (cyber, informatique, réseaux et télécommunications,
                                                     la mission, la sécurité aérienne et la vie des équipages        mécanique aéronautique et avionique).
                                                     dépendent des techniciens qui, au sol, préparent et
                                                     réparent ces aéronefs, monstres de puissance et de              Aujourd’hui le déficit en personnel qualifié de
                                                     technologie et fleurons de nos armées. A titre indicatif,       certaines spécialités doit être comblé afin de permettre
                                                     sur une plateforme armée par soixante aéronefs (de              un fonctionnement optimal. L’EFSOAA dispose
                                                     type Rafale), mille deux cents personnes œuvrent «              des capacités d’accueil d’élèves supplémentaires, à
                                                     24h/24, 7 jours sur 7 » à son bon fonctionnement. Ces           condition d’accompagner cette montée en puissance
                                                     sous-officiers représentent près de soixante pour cent          par des formateurs en nombre suffisant et le maintien
                                                     de l’armée de l’Air et de l’Espace, dont ils constituent        de la qualité aujourd’hui reconnue d’une formation
                                                     en quelque sorte l’épine dorsale.                               de haut niveau.

                                                                                                             L’EFASS

                                                        Sont formés, au sein de cet escadron de formation aérienne des spécialités sol, les futurs mécaniciens radio et
                                                        radar, les techniciens des systèmes et des supports de télécommunications, les techniciens réseaux informatiques
                                                        et de sécurité des systèmes d’information et de télécommunication, ainsi que les logisticiens et les mécaniciens
                                                        environnement aéronautique (électrotechniciens, électriciens, etc.).

                                                        Il a paru utile de faire un point sur deux spécialités le mécanicien radio-radar et le mécanicien environnement
                                                        aéronautique. Ces deux spécialités sont sen effet ouvent méconnues du grand public, ainsi que des personnels les
                                                        côtoyant de près ou de loin, lesquels n’imaginent l’étendue des domaines de compétences concernés et surtout
                                                        leur implication sur la vie d’une base.
                                                        - Le mécanicien radio-radar est chargé de la mise en œuvre des radars et des radios d’une base aérienne, que
                                                        celle-ci soit d’infrastructure ou projetée. La plateforme aéronautique regroupe un certain nombre de radars et
                                                        de liaisons radio indispensables à la sécurité et à l’accomplissement de la mission. Il s’agit pour ces techniciens
                                                        d’installer les radars - qu’ils soient d’approche, d’acquisition, de suivi, de la défense sol-air ou des drones – et
                                                        d’en assurer la mise en œuvre. Ils ne font pas d’analyse des « spots » et ne sont pas derrière les écrans, ce
                                                        rôle relevant des contrôleurs aériens et des analystes. Une fois les systèmes fonctionnels, ils en assurent la
                                                        maintenance préventive et curative et interviennent dans l’immédiateté sur un dysfonctionnement. Sur le plan
                                                        radio, ils assurent la mise en place et la maintenance des liaisons « opérationnelles » sol-sol et sol-air. Les
                                                        radars et les radios des aéronefs ne sont pas dans leurs attributions. Ce sont les mécaniciens avioniques qui
                                                        gèrent ces équipements. La formation de ces « radaristes » dure sept mois durant lesquels ils vont acquérir
                                                        des connaissances en électronique, en radio, sur le principe de fonctionnement des radars et en informatique
                                                        (traitement de l’information). Les cours comme dans toutes les spécialités sont dispensés en français, mais aussi
                                                        en langue anglaise.
                                                        - Le mécanicien environnement aéronautique, lui, va gérer les moyens nécessaires au fonctionnement de la
                                                        plateforme, c’est à dire les tracteurs aéro (véhicules permettant de déplacer les avions sur le tarmac), les groupes
                                                        électrogènes, les monte charges (escalier passager, plateaux élévateurs de bagages et de colis), les portes des abris
                                                        avions (partie motorisation de portes très lourdes), les abris enterrés (groupes, sas d’entrée…) et les véhicules de
                                                        servitude (camions des pompiers, camions logistiques et divers véhicules). Pour ce faire il suit une première partie
                                                        de sa formation en électricité et en électrotechnique et électromécanique, mais également dans des compétences
                                                        élargies comme l’accueil d’un aéronef sur un tarmac ou encore la sécurité en zone aéroportuaire. A l’issue de
                                                        cette étape, il part aux écoles militaires de Bourges (EMB), où il va suivre une formation sur la mécanique.
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