PHIA MÉNARD SAISON SÈCHE CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE - Compagnie Non Nova - Tandem Arras Douai

 
CONTINUER À LIRE
PHIA MÉNARD SAISON SÈCHE CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE - Compagnie Non Nova - Tandem Arras Douai
GOG IQUE
                   DOS S IER PÉDA

    Douai . Hippodrome . Du 29 janvier au 5 février 2019

       PHIA MÉNARD
            SAISON SÈCHE
CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE
                 Compagnie Non Nova
PHIA MÉNARD SAISON SÈCHE CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE - Compagnie Non Nova - Tandem Arras Douai
PHIA MÉNARD
Compagnie Non Nova

France

TANDEM Scène nationale | Douai . Hippodrome

CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE
Mardi 29 janvier | 20:00
Jeudi 31 janvier | 20:00

Durée : 1 h 30

SAISON SÈCHE
Mardi 5 février | 20:00

Durée : 1 h 30

Autour des spectacles
Navette au départ d’Arras à 19:15 le 31 janvier pour Contes immoraux et le 5 février pour Saison
sèche
Ciné-Rencontre avec Phia Ménard le mercredi 30 janvier à 20:00 au cinéma Paul Desmarets
(Douai) autour des films Tomboy de Céline Sciamma et Les Maîtres fous de Jean Rouch
(Navette au départ d'Arras à 19:15 )

2
PHIA MÉNARD SAISON SÈCHE CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE - Compagnie Non Nova - Tandem Arras Douai
SOMMAIRE

PHIA MÉNARD                                  PAGE 4

PHIA MÉNARD : AUTOPORTRAIT                   PAGE 6

LE PROJET I.C.E.                             PAGE 8

JEAN-LUC BEAUJAULT                           PAGE 10

CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE     PAGE 11

     Distribution et mentions                PAGE 11

     Présentation                            PAGE 12

     À propos du tryptique Contes immoraux   PAGE 13

SAISON SÈCHE                                 PAGE 15

     Distribution et mentions                PAGE 15

     Présentation                            PAGE 16

     Entretien avec Phia Ménard              PAGE 17

     Note d'intention - Extrait              PAGE 20

     Scénographie                            PAGE 21

POUR ALLER PLUS LOIN                         PAGE 22

     Qui est Phia Ménard ?                   PAGE 22

     Les Maîtres fous                        PAGE 23

PISTES PÉDAGOGIQUES                          PAGE 25

     Avant le spectacle                      PAGE 25

     Après le spectacle                      PAGE 28

LIENS UTILES                                 PAGE 31

                                                       3
PHIA MÉNARD SAISON SÈCHE CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE - Compagnie Non Nova - Tandem Arras Douai
PHIA MÉNARD

C’est en découvrant le spectacle Extraballe de
Jérôme Thomas en 1991 que naît chez Phia Mé-
nard le désir de se former aux arts et en particulier
à la jonglerie. Elle suit des formations en danse
contemporaine, en mime et en jeu d’acteur et bien
sûr en jonglerie. Dès 1994, elle étudie auprès du
maître Jérôme Thomas, les techniques de jongle-
rie et de composition, puis intègre la compagnie
comme interprète pour la création Hic Hoc. C’est en
parcourant les continents avec cette équipe qu’elle
nourrit dans les rencontres son désir d’écrire et
aiguise son regard sur les formes contemporaines
de l’art. Artiste, improvisatrice, elle est créatrice
dans plusieurs spectacles de la compagnie jusqu’en
2003 : Le Socle, Le Banquet, Hioc, 4, qu’on en fi-
nisse une bonne fois pour toutes… . Parallèlement en
1997, elle suit les enseignements de « la pratique
du danseur » et interprète deux pièces courtes des
chorégraphes Hervé Diasnas et Valérie Lamielle.

Elle fonde la Compagnie Non Nova en 1998 avec           Elle crée Le Grain la même année. C’est avec le solo
l’envie de porter un regard différent sur l’appré-      Ascenseur, fantasmagorie pour élever les gens et les
hension de la jonglerie, de son traitement scénique     fardeaux, créé en 2001, qu’elle se fera connaître
et dramaturgique. « Non nova, sed nove » (Nous          comme autrice. Soutenue pour sa démarche sin-
n’inventons rien, nous le voyons différemment) en       gulière, elle est invitée comme « artiste associée »
est un précepte fondateur. Elle regroupe autour de      pour trois saisons à la scène nationale Le Carré à
ses projets pluridisciplinaires des artistes, techni-   Château-Gontier. Elle y développe avec son équipe
ciens, penseurs d’horizons et d’expériences divers.     et celle de la scène nationale, un travail scénique
Ce n’est pas un collectif mais une équipe profes-       où l’image spectaculaire de la jonglerie est remise
sionnelle dont la direction artistique est assurée      en cause au bénéfice d’une nouvelle relation avec
par Phia Ménard.                                        le public. Naissent ainsi plusieurs créations et évè-
                                                        nements : Zapptime, rêve éveillé d’un zappeur, la

4
PHIA MÉNARD SAISON SÈCHE CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE - Compagnie Non Nova - Tandem Arras Douai
conférence spectacle Jongleur pas confondre avec         Elle a initié au CIFAS à Bruxelles (Centre Inter-
le sociologue Jean-Michel Guy, Fresque et Sketches       national de Formation en Arts de la Scène), avec
2nd round, et les Hors Pistes : Est-il vraiment sé-      le philosophe Paul B. Preciado : In the Mood, un
rieux de jongler ?, Ursulines Dance Floor, Ursulines     travail sur les questions de Genre et les Humeurs.
Mushroom Power.
                                                         Elle crée en Juin 2015 Belle d’Hier au Festival
En 2005 et 2007, elle développe un travail autour        Montpellier Danse 2015 à l’Opéra Comédie, pre-
de la notion « d’injonglabilité » et crée deux pièces,   mière pièce des Pièces de l’Eau et de la Vapeur.
Zapptime#Remix et Doggy Bag et deux formes
cabaret, Jules For Ever et Touch It avec le sextet       En 2017, elle crée Contes immoraux – Partie 1 :
Frasques.                                                Maison mère à la documenta 14 à Kassel (juillet),
                                                         et Les Os Noirs à l’Espace Malraux, scène nationale
En 2008, son parcours artistique prend une nou-          de Chambéry et de la Savoie (septembre).
velle direction avec le projet I.C.E. pour Injongla-
bilité Complémentaire des Eléments, ayant pour ob-       En 2018, elle met en scène Et in Arcadia Ego à
jet l’étude des imaginaires de la transformation et      l’Opéra-Comique de Paris avec Christophe Rous-
de l’érosion au travers de matériaux naturels. En        set, fondateur de l’ensemble musical baroque Les
janvier 2008, elle crée le spectacle P.P.P. aux Nou-     Talens Lyriques, et l’écrivain Eric Reinhardt pour
velles Subsistances de Lyon, première pièce du cy-       l’écriture du livret. Sa pièce Saison sèche, Pièce de
cle des Pièces de Glace. En octobre de la même an-       l’eau, co-écrite avec Jean-Luc Beaujault est créée
née, création de la performance L’Après-midi d’un        en juillet au Festival d’Avignon.
foehn - Version 1 , première des Pièces du Vent au
Muséum d’Histoire Naturelle de Nantes.

                                                                                                            5
PHIA MÉNARD SAISON SÈCHE CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE - Compagnie Non Nova - Tandem Arras Douai
PHIA MÉNARD : AUTOPORTRAIT

                        Je n’ai pas choisi de naître ! J’ai fait le choix de
                        continuer à vivre. J’essaie d’être sincère pour au-
                        tant que je le puisse. J’ai prouvé l’incompatibilité
                        entre mon sexe biologique et mon identité. Je suis
                        une femme en devenir que l’on a éduquée pour
                        devenir un homme. Je tente le plus possible de
                        questionner mes certitudes sur ce que l’on nomme
                        « être humain » et si possible d’en témoigner au
                        travers de l’art. Je vis dans un monde qu’il me faut
                        rendre chaque jour plus humain pour avoir envie
                        de le fréquenter…

                        Mon point de départ de réflexion fut la chance de
                        naître avec la sensation d’être étrangère à un corps.
                        Je sais que cela peut paraître « anormal » pour cer-
                        tains, lorsque ce n’est que singulier.

                        C’est de cette situation que s’est nouée mon en-
                        vie de m’extraire de la réalité. Le premier chemin
                        utopique fut donc celui d’échapper à la réalité d’un
                        corps. Se réapproprier ce dont on ne peut se défaire
                        est le paradoxe de cette situation qui m’a amenée
                        à questionner les failles et trouver les transforma-
                        tions, fussent-elles minuscules.

                        La rencontre avec la jonglerie fut déterminante
                        pour moi par la possibilité qu’offre cet art de l’esca-
                        motage et la vélocité. Pour l’abstraction au monde,
                        jongler est la drogue parfaite, j’en fus accro… Le
                        pouvoir d’attraction d’une telle pratique m’a per-
                        mis de cheminer vers la question scénique avec la
                        rencontre de Jérôme Thomas et d’Hervé Diasnas.
                        Le corps, l’espace, le rythme, l’écriture, l’analyse
                        et la maîtrise du geste, la mémoire, la musicalité,

6
PHIA MÉNARD SAISON SÈCHE CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE - Compagnie Non Nova - Tandem Arras Douai
la dramaturgie, toutes ces notions indispensables        tales du corps. Lorsque je suis sur scène, je prête
m’ont été transmises par ces deux maîtres. Grâce         mon corps aux spectateurs pour essayer de lui
à eux je me suis confrontée à l’apprentissage d’une      faire vivre une expérience qu’il ne ferait pas de lui-
vie où les frontières physiques et temporelles n’ap-     même. J’aimerais que le spectateur vienne voir nos
partiennent qu’aux artistes. De cette décennie           formes par l’envie d’être troublé.
d’enseignement sur les routes du globe je me suis
imprégnée du désir d’écrire ce que je voyais de          C’est dans ce champ d’investigation artistique,
l’être humain en prise avec le chaos.                    que je m’évertue à rendre nécessaire ma relation
                                                         au spectateur, afin d’évacuer toutes formes de
Ecrire m’est devenu nécessaire. J’ai fondé une           complaisance et de didactisme avec lui. J’essaie de
compagnie : Non Nova. Je persiste à dire ce que          faire de chaque rendez-vous non une monstration
ces mots suggèrent : « Rien de nouveau », mais           artistique mais une rencontre singulière avec nos
juste une volonté d’amener un regard différent            sensations d’être au monde.
sur la forme pour interroger le rapport entre art
et public. Sommes-nous du cirque, de la danse, du        Je ne sais pas combien de pièces font partie du
théâtre gestuel ? Encore une fois, c’est une ques-       puzzle de mon imaginaire. Je vois celles qui me
tion d’identité, celle de savoir si nous avons besoin    sont nécessaires en me demandant si elles doivent
d’appartenir à ce qui est répertorié pour exister.       être partagées.
Juste une histoire de communication.
                                                                                                 Phia Ménard
J’ai fait le choix d’être en relation avec l’art d’une
façon vitale, cela implique donc que les limites de
mes actes ne sont définies que par les limites vi-

                                                                                                             7
PHIA MÉNARD SAISON SÈCHE CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE - Compagnie Non Nova - Tandem Arras Douai
LE PROJET I.C.E.

Les deux pièces, Saison sèche et Contes immoraux      Afin de développer cette relation et d'extraire les
– Partie 1- Maison mère s’inscrivent dans le projet   spectateurs de la contemplation, ma recherche ar-
plus global intitulé I.C.E. que mènent Phia Ménard    tistique s’articule autour du lien commun à l’être
et sa compagnie Non Nova depuis 2008.                 humain que sont les composantes de la vie tels que
                                                      l’eau, l’air, la lumière... etc.
I.C.E. est un processus artistique non exclusif. La
base fondamentale est de tenter d’amener à res-       En nommant « Injonglabilité », se pose comme
sentir et vivre un imaginaire en interrogeant les     concept le développement « Complémentaire » à
notions générales de transformations, d’érosions,     notre imaginaire de l'utopie de l'homme tentant de
d’équilibres vitaux, qu’elles soient corporelles ou   dompter ces « Eléments » naturels.
mentales au travers d’un répertoire de formes, per-
formances, installations, films, écrits.

8
PHIA MÉNARD SAISON SÈCHE CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE - Compagnie Non Nova - Tandem Arras Douai
Dans une société où le virtuel tend à s’imposer dans     Comment en voyant un corps allongé sur un tapis
l'imaginaire, la performance physique avec des ma-       de glace, ne pas y projeter son propre corps ? Com-
tériaux naturels communs à tous et à toutes, de          ment dans le labeur de BLACK MONODIE ne pas
surcroît indomptables est un moyen d’interpeller         y projeter le sien ?
nos sens.
                                                         L’ensemble du projet I.C.E. est une épopée pour un
L’expérimentation empirique est notre modus              théâtre à vivre autant qu’à voir.
operandi afin d’évacuer une sophistication inac-
cessible d’un point de vue technique, financier et        A ce jour, trois cycles ont été initiés :
surtout humain. Le rapport à la science est essen-
tiel dans le questionnement mais il est limité à l’ap-   Les Pièces de Glace :
prentissage et la compréhension des phénomènes           2008 : P.P.P. : solo pour une interprète en milieu
pour éviter qu’il ne devienne une mise en applica-       hostile.
tion d’un savoir ou sa vulgarisation.                    2009 : ICE MAN : projet co-réalisé avec le Collec-
                                                         tif La Valise, pour leur film Coyote Pizza.
Ces Pièces de Glace, Pièces du Vent, Pièces de l’Eau     2010 : BLACK MONODIE : commande de la
et de la Vapeur, … sont des chemins d’explorations       SACD et du Festival d’Avignon pour le Sujet à Vif.
structurées, avec une dramaturgie et autour d’une        Ecriture de Phia Ménard et Anne-James Chaton.
narration non didactique, avec le désir d’exprimer
l’intime et le commun de nos transformations.            Les Pièces du Vent :
                                                         2008 : L’après-midi d’un foehn Version 1
Les comparaisons entre la transformation des             2011 : L’après-midi d’un foehn et VORTEX
éléments vitaux avec celles de nos corps, de nos         2017 : Les Os Noirs
gestes, nos pensées, sont les références pour gé-
nérer un imaginaire sans frontières. Chaque forme        Les Pièces de l’Eau et de la Vapeur :
se doit d’avoir un impact sur le spectateur : au-de-     2015 : Belle d’Hier
là de son intellect, c’est dans sa chair, son derme,     2017 : Contes Immoraux - Partie 1 - Maison Mère
sa fondation que ces formes doivent interpeller.         2018 : Saison Sèche

                                                                                                           9
PHIA MÉNARD SAISON SÈCHE CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE - Compagnie Non Nova - Tandem Arras Douai
JEAN-LUC BEAUJAULT
Biographie

Autodidacte et lecteur obstiné, il a forgé son re-     (P.P.P. - 2008, BLACK MONODIE - 2010, VOR-
gard et son outil théâtral au gré de lectures et de    TEX - 2011, Belle d'Hier -2015, Les Os Noirs, Contes
rencontres déterminantes. Le travail du corps s'est    immoraux – Partie 1 - Maison Mère - 2017, Saison
imposé rapidement comme une base nécessaire,           Sèche - 2018), Guillaume Gatteau et la Compagnie
source primitive de la création. Comédien pendant      La Fidèle Idée (Le Palais des fêtes - 2008, Hop là,
une dizaine d’années, il travaille ensuite en tant     nous vivons ! – 2009, Tarzan Boy - 2013, La Grande
que metteur en scène.                                  Transition - 2014, L’Abattage rituel de Gorge Mas-
                                                       tromas - 2016) et Cécile Briand et la Compagnie
Il a été le fondateur, en 1989, avec Jean-Louis        Tenir Debout (Le Fil - 2014, Disparaitre - 2015).
Ouvrard, du Théâtre Zou, compagnie de théâtre
visuel qui traitait l'image comme une langue, avec     Il aime l'engagement que demande la recherche de
une écriture corporelle et visuelle d'une grande       nouvelles formes, qu’elles se situent dans le cirque,
précision.                                             la performance, ou dans le travail de texte.

Son parcours se concentre depuis les années 2000       À Phia Ménard dont le corps et la jongle initient
sur la photographie, la scénographie et des collabo-   le travail, il propose une écriture dramaturgique et
rations artistiques étroites en tant que dramaturge    une scénographie qui donnent à voir le question-
avec Phia Ménard et la Compagnie Non Nova              nement sur l’identité et le transgenre.

10
CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE
Distribution et mentions

Écriture et dramaturgie Phia Ménard, Jean-Luc Beaujault
Scénographie et interprétation Phia Ménard
Composition sonore et régie son Ivan Roussel
Régie plateau Pierre Blanchet, Rodolphe Thibaud
Costumes et accessoires Fabrice Ilia Leroy
Photographies Jean-Luc Beaujault
Co-directrice, administratrice et chargée de diffusion Claire Massonnet
Régisseur général Olivier Gicquiaud
Chargée de production Clarisse Mérot
Chargé de communication Adrien Poulard
Attachée à la diffusion Anaïs Robert

Production Compagnie Non Nova
Coproduction documenta 14 – Kassel, Le Carré, Scène nationale et Centre d’Art contemporain
de Château-Gontier
La présentation de la performance dans le cadre de la documenta 14 en juillet 2017 a été
possible grâce au soutien de l’Institut Français et de la Ville de Nantes. La Compagnie Non
Nova est conventionnée et soutenue par l’État, Direction régionale des affaires culturelles
(DRAC) des Pays de la Loire, la Ville de Nantes, le Conseil Régional des Pays de la Loire et le
Conseil Départemental de Loire-Atlantique. Elle reçoit le soutien de l’Institut Français et de
la Fondation BNP Paribas.
La Compagnie Non Nova est artiste associée à l’Espace Malraux Scène nationale de Cham-
béry et de la Savoie, au Théâtre Nouvelle Génération - Centre Dramatique National de Lyon,
au TNB, Centre Européen Théâtral et Chorégraphique de Rennes et artiste-compagnon au
centre chorégraphique national de Caen en Normandie.

                                                                                             11
CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE
Présentation

À la fois déesse et maçon, Phia Ménard trace et
découpe, plie et scotche d’immenses plaques de
carton ondulé. Avec une résolution de guerrière,
elle trouve le bon point d’appui pour soulever
les cent-cinquante kilos de murs et de toit de
cette Maison mère. Mais au-dessus d'elle, l’orage
gronde, et un nuage approche...

Premier des trois volets de ses Contes immoraux,
Maison Mère est avant tout affaire de construc-
tion, de destruction et d’éternel recommencement.
À l’origine de ce spectacle, il y a une commande de
la Documenta 14, exposition quinquennale d’art
contemporain. S'inspirant du célèbre plan Marshall
(plan de reconstruction des villes européennes
bombardées lors de la seconde guerre mondiale),
Phia Ménard n’entreprend rien de moins que de
construire sous nos yeux un « village Marshall »,
un Parthénon de carton, pour sauver une nouvelle
fois l’Europe. Fidèle à son processus créatif, en
prise avec les corps et la matière, la performeuse
nantaise bâtit sous nos yeux cette maison de
6x9x3 mètres. Après avoir bataillé pour construire
l’édifice, Phia Ménard se voit rattrapée par une ré-
alité pluvieuse ; une goutte, quelques gouttes, un
déluge et se retrouve ensevelie sous son ouvrage.
Écho à sa propre histoire familiale, Phia Ménard ne
se laisse pas pour autant enterrer vivante, ni pétri-
fier par la beauté des ruines.

12
CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MÈRE
Phia Ménard à propos du tryptique Contes immoraux

                                                         Corps » s’entrechoquent avec les réflexions sur
                                                         l’identité, le corps, la matière qui sont mes bases
                                                         de recherche. Imaginer une forme pour ces deux
                                                         points de chute que sont Kassel et Athènes, est un
                                                         exercice de grand écart. Ce n’est pas par l’immer-
                                                         sion dans ces cités que je vais nourrir ma base de
                                                         travail, celle-ci demanderait un temps en amont
                                                         bien plus long que celui dont je dispose. La lecture,
                                                         la recherche, le dialogue, la plongée dans les ma-
                                                         tières, de manière empirique sont mon processus
                                                         de création. Mon prisme est une série d’éléments
                                                         qui oscillent entre gestes politiques, affirmation
                                                         d’un corps, contradiction des éléments. En voici
                                                         quelques informations et esquisses…

                                                         Premier Conte : Maison mère – création 2017.
                                                         Afin que les troupes Alliées contre l’Axe puissent
                                                         engager leurs troupes sur le sol européen, la stra-
                                                         tégie du tapis de bombes fut pour toute l’Europe
                                                         occidentale un drame humain sans précédent.
                                                         Des villes entières furent détruites ensevelissant
                                                         leurs habitants. Mon grand-père maternel fut de
                                                         ces victimes lors des bombardements de la ville
                                                         de Nantes en septembre 1943. Dans mon enfance,
                                                         l’image d’une bombe n’avait pas de réalité drama-
                                                         tique mais comme pour tout enfant, une certaine
Le projet initial comporte trois performances, dont      forme de fantasme. Ce n’est qu’en réalisant bien
Maison Mère est la première. Les deux suivantes,         plus tard que nous n’allions pas honorer une tombe
dont la finalisation est projetée à l’horizon 2019,       pour mon grand-père mais une fosse commune que
auront pour titre Temple Père et La Rencontre In-        je réalisai l’infamie de la bombe. Peut-être est-ce à
terdite. Bien que le titre provisoire du projet global   ce moment-là que mon esprit percuta sur le nom
soit Les Contes immoraux, il n’y aura pas de mo-         du « plan Marshall » de reconstruction de l’Europe.
rale, encore moins de didactisme. Les questions          Organiser une destruction et gérer la reconstruc-
que soulève la proposition de la documenta 14 :          tion suivant un modèle de maison pré-fabriquée et
« Apprendre d’Athènes », « Pour un parlement des         d’une réécriture de l’aménagement urbain.

                                                                                                           13
Bâtir un village « Marshall » en carton sur mesure,       une artiste grecque, sûr que je n’aurais rêvé que de
comme on monte une série de tentes pour des réfu-         lui proposer un spectacle des plus dramatiques en
giés. Ici, juste au-dessous d’un nuage qui ne semble      dynamitant l’Acropole !
pas si menaçant. Simple geste répété comme un
robot. Etaler, tracer, couper, assembler, poser, puis     La performance s’articulera autour d’un disposi-
recommencer encore. Tout semble parfait si ce             tif mettant en scène un temple réplique en stuc
n’est ce nuage qui semble s’épaissir et s’assombrir.      et plâtre fragilisé par une tempête provoquée par
Peut-être, un éclair, une légère brise puis enfin une      des ventilateurs. Ce temple en pleine érosion sous
série de grosses gouttes puis une pluie, voire peut-      les bourrasques est l’abri d’un homme. Son entête-
être même des trombes d’eau ! Le village Marshall         ment : l’empêcher de s’effondrer…
s’effondre malgré l’énergie déployée pour le sauver.
C’est une bouillie, mélasse dans laquelle les corps       Technique : fabrication en stuc et plâtre / système
sont noyés…                                               de fabrication de vent / Enveloppe de protection
                                                          pour le public / peau en silicone de cross-dres-
Technique : Construction de carton / installation         ser.
d’un dispositif sommital de tuyaux d’eau perforés /
création d’une masse nuageuse.                            Troisième Conte : La Rencontre Interdite – créa-
                                                          tion 2019. Il est un espace où personne n’avait le
Second conte : Le Temple Père – création 2019.            droit de pénétrer : le cœur du Parthénon, l’antre
C’est suite à la visite des ruines de l’Acropole et       de la déesse Athéna. C’est la relation à la person-
surtout à la rocambolesque histoire de la pro-            nalisation du mythe qui m’inspire. Réveiller une
grammation avortée de Jan Fabre pour le Festival          sensation de la rencontre interdite dans un es-
d’Athènes et d’Epidaure, et de la réaction des ar-        pace où l’on sent une présence que l’on ne peut pas
tistes grecs que m’est apparue l’idée de ce conte… À      voir. Être dans un espace dont on ne peut définir
la lecture d’un quotidien, une photo nous montrait        les limites. C’est l’envie de personnaliser la déesse
l’artiste flamand avec en fond le Parthénon, tenant        Athéna sous les formes d’un corps vêtu d’une ar-
le discours d’un artiste qui allait apprendre aux ar-     mure de glace dont on entend les pas et les mor-
tistes locaux ce qu’est l’Art dramatique. De ma po-       ceaux de plaques de glace s’entrechoquer. Est-ce
sition d’artiste, j’ai ressenti aussitôt une fraternité   de ce corps qu’émane cette brume ? Et si s’en ap-
avec les artistes grecs à qui l’on renvoyait une nou-     procher provoquait une réaction orageuse ?
velle forme de Troïka. J’imaginai alors l’éminent
Fabre en commissaire européen du théâtre dé-              Technique : système de brouillard / fabrique de
clamant que les créateurs grecs n’étaient « bons »        glace pour costume en glace / dispositif lumineux
qu’à développer la valeur touristique des ruines et       pour créer un orage.
qu’ils ne savaient pas faire du théâtre !!! Si j’étais

14
SAISON SÈCHE
Distribution et mentions

Dramaturgie et mise en scène Phia Ménard, Jean-Luc Beaujault
Scénographie Phia Ménard
Création et interprétation Marion Blondeau, Anna Gaïotti, Elise Legros, Phia Ménard, Marion
Parpirolles, Marlène Rostaing, Jeanne Vallauri, Amandine Vandroth
Composition sonore et régie son Ivan Roussel
Création lumière Laïs Foulc
Régie lumière Olivier Tessier
Régie plateau Benoît Desnos, Mateo Provost, Rodolphe Thibaud
Costumes et accessoires Fabrice Ilia Leroy
Construction décor et accessoires Philippe Ragot
Photographies Jean-Luc Beaujault
Co-directrice, administratrice et chargée de diffusion Claire Massonnet
Régisseur général Olivier Gicquiaud
Chargée de production Clarisse Mérot
Chargé de communication Adrien Poulard
Attachée à la diffusion Anaïs Robert
Production Compagnie Non Nova
Résidence et coproduction Espace Malraux, Scène Nationale de Chambéry et de la Savoie,
TNB, Centre Européen Théâtral et Chorégraphique de Rennes
Coproduction Festival d’Avignon, La Criée - Théâtre national de Marseille, Théâtre des Quatre
Saisons, Scène conventionnée Musique(s) – Gradignan (33)
Saison Sèche a bénéficié d’une aide à la création de la Fondation BNP Paribas.
Soutien MC93, maison de la culture de Seine-Saint-Denis, Bobigny et le Théâtre de la Ville -
Paris, Bonlieu, Scène nationale d’Annecy, la Filature, Scène nationale de Mulhouse, le Grand
T, Théâtre de Loire-Atlantique à Nantes, la Comédie de Valence, Centre Dramatique National
de Drôme-Ardèche
La Compagnie Non Nova est conventionnée et soutenue par l’État, Direction régionale des
affaires culturelles (DRAC) des Pays de la Loire, la Ville de Nantes, le Conseil Régional des
Pays de la Loire et le Conseil Départemental de Loire-Atlantique. Elle reçoit le soutien de
l’Institut Français et de la Fondation BNP Paribas.
La Compagnie Non Nova est artiste associée à l’Espace Malraux Scène nationale de Cham-
béry et de la Savoie, au Théâtre Nouvelle Génération - Centre Dramatique National de Lyon,
au TNB, Centre Européen Théâtral et Chorégraphique de Rennes et artiste-compagnon au
centre chorégraphique national de Caen en Normandie

                                                                                           15
SAISON SÈCHE
Présentation

Des murs immaculés, un plafond, un espace confi-
né dans lequel sept femmes tentent d’évoluer.
Leur gestuelle est puissante, précise, autant que
leur objectif : mettre à bas le patriarcat. Comme
souvent chez Phia Ménard, la scène est le lieu de
tous les possibles, et le théâtre semblable à un
sport de combat.

La matière, les couleurs et les corps sont les ou-
tils de cette fronde contre le pouvoir exercé par
les hommes. Saison sèche est une proposition pro-
téiforme, au croisement de la danse, de la poésie,
des arts plastiques et du cinéma anthropologique.
La pièce s’inspire très directement du documen-
taire Les Maîtres fous de Jean Rouch. Ce film nous
donne à voir le rituel de possession des Haoukas
(secte apparue au Niger en 1927). Ce rituel permet
à ces personnes de sortir d’un état de soumission
et de se sentir, un temps, les seuls maîtres de leurs
vies. Dans Saison sèche, les protagonistes, le visage
peint, entament également un étrange rituel : ils
traquent au plus profond de leur chair les traces de
l’assignation des genres, pour mieux s’en défaire.
Leurs gestes éruptifs ont un effet sur les murs qui
les entourent ; l’édifice suinte, vibre, se ramollit…
Celle qui fut garçon et jongleur avant de devenir
performeuse, chorégraphe et plasticienne, pour-
suit sa réflexion sur l’identité et son combat contre
les normes. Un voyage inédit, puissant, à l’issue du-
quel chacun se sent libre d’être soi.

16
SAISON SÈCHE
Entretien avec Phia Ménard

Saison Sèche commence là où Belle d’Hier se ter-       Dans le deuxième temps, celui du conte, ces cap-
mine ; comment s’est opérée la transition à l’inté-    tives, sept femmes, vont tenter de détruire l’édi-
rieur du Cycle de l’Eau et de la Vapeur ?              fice. Les proies deviennent alors des prédatrices
                                                       dans une bataille pour retrouver leur liberté.
Phia Ménard : Lorsque j’ai écrit Belle d’Hier, j’ai    Elles se transforment, revêtent leurs peintures et
demandé à cinq femmes de « ranger l’humanité »         entrent dans la transe. En invoquant les éléments,
et les attributs du pouvoir patriarcal, ce qui ou-     dans une danse rituelle, elles vont pouvoir tromper
vrait tous les champs des possibles pour une re-       l’ennemi qui, fasciné, va en oublier d’entretenir ses
distribution des rôles. Saison Sèche est arrivé très   murs. La moisissure va s’insinuer et de ces murs
vite après. Une fois qu’on a fait tomber le prince     aseptisés, d’une blancheur symbole de virginité
charmant, on s’aperçoit que le château fort n’est      et de paix, vont suinter des images d’esprits, des
pas tombé pour autant. Au début du spectacle, les      énergies terrestres, des souvenirs. La maison ron-
interprètes sont entourées de murs aux fenêtres        gée par le salpêtre va s’affaisser. Après la glace, le
trop hautes, sortes de meurtrières d’où, en un seul    vent, l’eau et la vapeur, c’est le tellurisme qui m’ins-
endroit, on peut voir les prisonnières sans être vu.   pire ici, l’évocation des tremblements de terre, des
Dès que les captives, calmées, ne sont plus consi-     fissures, de la boue et des liquides qui emportent
dérées hystériques, le plafond remonte, mais dès       tout sur leur passage. Cette métaphore incarne
que l’une d’elles a un geste déplacé, le plafond re-   l’idée que seules l’intelligence des femmes, leur ré-
descend. Cette cage, matérialisée par le rétrécisse-   union et leur sensibilité pourront changer la réalité
ment de l’espace, symbolise le pouvoir, la maison      sociale de domination.
patriarcale.

                                                                                                            17
Qui sont ces interprètes d’un nouveau genre, in-          Comment se projette-t-on dans l’autre si l’autre est
quiétantes et fascinantes, et comment s’est dérou-        la différence ? Peut-on se projeter dans un autre
lée l’approche créative autour de ce rituel ?             corps, un autre genre que le sien ? Et quelles sont
                                                          les formes pour arriver à cette projection ? Ce sont
La performance convoque non pas des esprits               des questionnements essentiels à l’œuvre. Pour y
mais des avatars, des sortes de drag kings, des êtres     parvenir, je convoque les expériences personnelles
transgenres qui vont se mettre en mouvement. Les          qu’a le spectateur face aux éléments pour le faire
interprètes sont, dans un premier temps, vêtues           entrer dans l’imaginaire du spectacle. J’instaure
d’un costume de taille unique qui ne va véritable-        une empathie.
ment à aucune.

Vient ensuite l’heure de la transformation. Ce ne
seront plus des femmes mais des combattantes qui
se colorent le corps, qui se préparent au combat.
Elles nous déroutent car prendre l’édifice au dé-
pourvu est le seul moyen de le faire s’effondrer.

Pour Saison Sèche, j’avais en toile de fond le sujet
de la violence, qui est la forme visible du patriar-
cat. Toutes ces femmes que je rencontre et avec
qui je peux avoir un dialogue vont me faire part
de ce vécu de violence. Il y a une sorte de soro-
rité évidente qui se met en place entre nous. J’ai
choisi sept femmes, parmi celles qui sont venues
vers moi, dans un processus de cooptation. Nous
discutons beaucoup, puis je leur laisse un temps
de réflexion. Dans les pièces comme celle-ci où le
corps est mis à l’épreuve, où elles se mettent à nu, il
est important pour les interprètes de savoir pour-
quoi elles s’exposent et de fixer ses limites. Elles
doivent différencier qui elles sont sur scène et qui
elles sont dans la vie.

Toutes mes pièces sont des messages, mais sont
avant tout des métaphores. Je veux laisser au spec-
tateur la liberté de trouver la lisière entre la repré-
sentation et le réel.

Comment abordez-vous la relation au public ?

Les sept femmes de Saison Sèche pourraient être
Les Sept Samouraïs de Kurosawa. Le choix du
nombre impair sert à ce que l’équilibre ne puisse
être établi que par l’œil du spectateur. L’enjeu le
plus difficile, c’est de faire que la huitième com-
battante soit un huitième combattant, pour que le
spectateur, homme ou femme, puisse être touché.

18
La scénographie doit être fascinante, pour que le          histoire très personnelle mais un signe politique :
spectateur soit, dès le départ, prêt à vivre une ex-       ce sont des corps féminins dans une société pa-
périence immersive. J’anesthésie sa résistance pour        triarcale. D’avoir eu ce parcours du corps, d’avoir
mettre à l’écart le jugement. Je lui propose ensuite       dans la société appartenu au pouvoir dans le corps
une épreuve physique et sensible. Lorsque je crée,         d’un homme et d’être maintenant dans le corps
il y a une relation au capillaire, à la chair, une rela-   d’une femme me montre que, dans ma nouvelle
tion à fleur de peau. Par mes mises en scène, j’in-        condition, j’ai perdu le pouvoir. Dans cette peau
vente des métamorphoses. Le théâtre comme les              d’homme j’étais très en empathie avec ces possibi-
éléments ne sont pas figés, ils vivent, se transfor-       lités d’un féminisme par solidarité, mais c’était un
ment, évoluent. Ils sont les meilleurs partenaires         loisir politique.
pour pouvoir exprimer la situation de manière
épidermique, pour montrer que nous sommes tous             Je suis aujourd’hui dans la permanence du corps et
des êtres en transition, en mutation. J’ai été très in-    suis devenue une féministe guerrière. Face aux si-
fluencée par Les Maîtres fous de Jean Rouch. Il y a        tuations désespérantes et catastrophiques de nos
dans ce documentaire ethnographique la question            sociétés, nous, en tant que créateurs, sommes en
de la monstruosité qui nous touche et en même              devoir de proposer des actes artistiques de valeur
temps nous révulse. Mes pièces sont toujours sur           et de sens. C’est peut-être utopique mais je me dis
le fil entre l’attirance et le dégoût pour faire réagir    en rêvant : si Saison Sèche pouvait faire s’effondrer
le spectateur. Quelle est notre frontière vis-à-vis        le patriarcat ! Et je me donne pour mission d’y arri-
de l’autre, nos limites dans notre capacité à ne pas       ver, c’est en chemin.
juger, à s’assumer, à être soi-même ?

Vos pièces sont très intenses, voyez-vous la créa-                           Entretien mené par Malika Baaziz
tion comme une forme d’engagement ?                                                   pour le festival d’Avignon

Mes pièces de groupe sont des actes politiques.
La base de mon travail est le corps comme objet
politique dans la société. Dans chaque pièce que
j’écris, le corps n’est pas une individualité avec une

                                                                                                             19
SAISON SÈCHE
Note d'intention - Extrait

Je ne suis pas née dans le corps d’une femme. J’ai        quelles que soient les rues, les horaires, les lieux.
construit mon identité par l’impossibilité d’être         Je jouissais de l’innocence, permettez l’image, d’un
un homme. Dans notre société, vous êtes soit un           dominant (pas très convaincant) parmi d’autres.
homme, soit une femme. Le corps d’une personne            J’étais un prédateur inconscient de son pouvoir.
transgenre n’existe donc pas ici. Peut-être pense-
rez-vous que c’est réducteur mais tel est le droit        À présent je suis cette femme, un corps différent
français, c’est la binarité. Vous m’entendrez alors       sur lequel se portent des regards. Un corps scruté,
crier encore longtemps : on ne choisit ni de naître,      quasi tout de suite sexualisé, dont les tenues, les
ni sa couleur, ni son sexe, ni son genre, ni d’être hé-   mouvements, les actes sont soumis à une sorte de
téro, homo, lesbienne ou trans, on ne choisit rien !      loi de la jungle. La ville d’hier, celle où je déambu-
Alors rendez-nous la liberté de vivre.[…]                 lais est devenue une jungle de regards et de maux.
                                                          Je suis belle, je suis seule, je cherche de la compa-
J’ai aujourd’hui le corps d’une femme et les gestes       gnie, je m’ennuie, je devrais avoir un amoureux, je
mélangés d’habitudes empruntées aux deux iden-            suis sexy, je suis prête à écarter les cuisses, je sais
tités, je suis une femme en devenir comme le défi-        sucer, j’aime le sexe, je suis une salope… Là voyez-
nit Simone de Beauvoir (« On ne naît pas femme, on        vous, c’est sûr, pas besoin de papier pour justifier
le devient »). Je serais tentée d’y ajouter que l’on      mon identité, je suis bel et bien une femme. Je suis
devient femme certes, mais à quel prix et au bout         sortie de la majorité au pouvoir pour une majori-
de combien de combats et de renoncements… Re-             té soumise ! Une personne à qui l’on rappelle sans
gardez ! Me voici dans la « norme », et au cœur du        cesse les limites de sa liberté.
sujet. Mon corps a changé de place dans la société
et m’a projetée au milieu du conflit.                     JE SUIS DEVENUE UNE PROIE.

Faisons simple, je plante la scène : avant, dans le
corps masculinisé, j’étais identifié comme un mâle,       Retrouvez la note d’intention complète sur le site de
j’avais une liberté quasi absolue de mes mouve-           la compagnie :
ments, mes actes, mes tenues vestimentaires,              http://www.cienonnova.com/i/portfolio/saison-seche/
j’avais un droit à l’invisibilité, à l’indifférence

20
SAISON SÈCHE
Scénographie

Une scénographie mouvante et des corps sous              sur scène un tel spectacle mais l’envie de susciter
pression.                                                la tension de l’aqente et de la peur qu’éveillent ces
                                                         phénomènes invisibles.
Je cherche la matière, l’indomptable… Pour Saison
Sèche, c’est l’envie de travailler sur l’ondulation et   La scène est une boîte faite de trois murs et d’un
la sueur qui m’est apparue comme un phénomène            plafond et un sol en pente, le tout d’un blanc im-
lié au rituel. Je travaille autour des phénomènes de     maculé. Cette boîte est une machine dont la hau-
tremblement des sols, parois, plafonds, des oscilla-     teur du plafond varie suivant les scènes. Les murs
tions lumineuses et sonores, et de transformation        solides sont en carton alvéolaire épais et résistant.
du solide en mou comme une croûte terrestre lais-        Ils se déforment et se fissurent au fur et à mesure
sant sortir des flux de boues. C’est au cours de nos      du rituel, sous l’effet de tremblements mécaniques
tournées dans des régions volcaniques, notamment         et d’injection d’eau. Le carton, très résistant lors-
à l’Ile de La Réunion ou en Indonésie, que j’ai porté    qu’il est sec, devient mou dès qu’il est humidifié,
un regard fasciné et d’effroi à la matière minérale       et laisse apparaître des liquides visqueux noirs.
en mouvement des volcans et des tremblements de          Plus le rituel prend forme et plus les murs saignent
terre. Bien sûr, loin de moi la possibilité de créer     jusqu'à rompre de toutes parts.

                                                                                                           21
POUR ALLER PLUS LOIN
Qui est Phia Ménard ?

Je suis un être de la traduction

Essai écrit par Phia Ménard, paru dans AND#13,             Phia Ménard fut l’invitée de l’émission La Grande
le journal du TANDEM Scène nationale                       table d'été de France Culture consacré à la théma-
                                                           tique : « Faire Genre », elle y évoque notamment
Du corps de l’homme hier à celui de la femme d’au-         le spectacle Saison sèche et donne de nombreuses
jourd’hui, je me questionne de ce qui nous assigne         clefs de lecture de son univers :
toutes et tous au patriarcat. J’ai éprouvé le corps
masculin et à présent celui du féminin au point de         https://www.franceculture.fr/emissions/la-grande-
me sentir à l’endroit de la traduction. Mon expé-          table-dete/emission-du-mardi-17-juillet-2018
rience de vie et celle de l’art sont un même fleuve
d’inspiration.

[…]

Je lutte pour créer des actes sans complaisance
mais questionnant les symboles, les codes et nos
silences. La normalité et la monstruosité sont de
mes sujets récurrents, la puissance des corps et
l’incontrôlable des matières les bases de l’écriture.
Je me fiche de savoir si je fais du cirque, de la danse,
du théâtre ou de la performance ! J’engage un rap-
port de liberté de la forme par nécessité de nourrir
l’imaginaire du regardant.

Retrouvez l'intégralité de l'essai dans le dernier nu-
méro du journal du TANDEM, AND#13, consacré
à la place des femmes dans la création artistique
(disponible en version papier au théâtre d’Arras et à
l’Hippodrome de Douai et en version numérique dans
l’espace téléchargement de notre site internet http://
www.tandem-arrasdouai.eu/fr/telechargements )

22
POUR ALLER PLUS LOIN
Les Maîtres fous

Les Maîtres fous est un documentaire ethnogra-             Phia Ménard à propos de l’influence des Maîtres
phique français réalisé par Jean Rouch, sorti en           fous sur son spectacle :
1955. Il fait partie des sources d’inspiration pour la
création du spectacle Saison sèche.                        « Dans ce film nous suivons la pratique rituelle d’une
                                                           secte religieuse, les Hauka. Comme tout rituel, ce-
Le documentaire illustre les pratiques rituelles de        lui-ci est extrêmement codé, les rôles sont distribués et
la secte religieuse des Haukas, une secte originaire       l’ensemble des participants convoque des Esprits dont
du Niger - telles que pratiquées par des immigrés          la possession est à la fois belle et terrifiante. D’une
pauvres d'Accra (Ghana). Ces rites consistent en           force visuelle incroyable, ce film me hante. Là où
l'incarnation par la transe des figures de la colo-        nous, nous regardons un film, admirons le spectacle,
nisation (le gouverneur, la femme du capitaine, le         eux convoquent réellement les esprits des colonisa-
conducteur de locomotive, etc.) et s'organise au-          teurs et semblent certains de pouvoir les influencer. Y
tour d'une confession publique, de chorégraphies           sont-ils parvenu ? Peut-être…»
frénétiques et de sacrifices d'animaux (poules,
chien). Jean Rouch expliquera que « ce jeu violent         « La forme de ma proposition artistique a été pensée
n'est que le reflet de notre civilisation. » Le film fut   comme une réponse au problème posé par l’idéologie
interdit par l'administration française dans le ter-       régnante incarcérant chacun(e) dans des rôles. J’ai
ritoire du Niger, puis également, par l'administra-        revu Les Maîtres fous de Jean Rouch, où l’on voit la
tion britannique, au Ghana et dans d'autres colo-          société des Haukas convoquer dans des rituels gro-
nies britanniques.                                         tesques, sanguinolents et même sauvages, l’esprit des

                                                                                                                23
colons, afin de mettre à bas le colonialisme. Alors je
me suis prise à rêver… Si je recréais des rituels où les
interprètes iraient chercher au fond d’elles-mêmes
tout ce qu’elles découvrent de leur soumission au pou-
voir, les choses s’élucideraient. Le pouvoir est basé sur
des apparences. On accorde le pouvoir aux hommes
dès leur naissance, ainsi soit-il. Dans la construction
de l’identité se pose la question de la construction des
gestes de la relation à la fraternité, à la sororité (ab-
sente du frontispice), ce qui va amener les interprètes
à se transformer en apprenant les gestes des hommes.
Les gestes masculins sont à considérer comme les
traits du pouvoir mais ils résultent d’une construction
sociale du rôle et n’ont rien d’inné, de « naturel ». Plus
les interprètes vont jouer à se transformer, plus elles
vont se créer des avatars, des super héros masculins
qui auraient été leur(re)s si elles avaient hérité de ce
sexe. Elles se construisent des avatars masculins com-
patibles.
                                                             Jean Rouch
Là le patriarcat relâche sa garde… Le ver est désor-
mais dans le fruit… Dans cet espace blanc où étaient
enfermées les interprètes, les murs commencent à
moisir, le salpêtre apparaît, et l’espace dur intraver-
sable va se ramollir sous l’effet du rituel de transfor-
mations. Les murs vont devenir mous, suinter, pour
n’être plus que du papier fragile. L’empereur est nu et
tout l’édifice s’écroule. »
Retrouvez une Interview de Jean Rouch datant de
1957, après que son film fut récompensé à la Bien-
nale internationale du cinéma de Venise :
https://www.franceculture.fr/emissions/les-
nuits-de-france-culture/extrait-interview-de-
jean-rouch-propos-de-son-film-les-maitres

Venez découvrir le film Les Maîtres fous de Jean
Rouch lors d’un ciné –rencontre avec Phia Mé-
nard le mercredi 30 janvier à 20:00 au cinéma
Paul Desmarets à Douai (Navette au départ d'Ar-
ras à 19:15)

24
PISTES PÉDAGOGIQUES
Avant le spectacle

« Je n’ai pas choisi de naître ! J’ai fait le choix de conti-   Pour aider à comprendre les enjeux des spectacles,
nuer à vivre. J’essaie d’être sincère pour autant que           les élèves doivent connaître les notions de trans-
je le puisse. J’ai prouvé l’incompatibilité entre mon           sexualité, transgenre, transidentité, queer en fai-
sexe biologique et mon identité. Je suis une femme en           sant des recherches sur internet et en les confron-
devenir que l’on a éduquée pour devenir un homme.               tant tout en portant attention aux sites sur lesquels
[…] Mon point de départ de réflexion fut la chance de            ces définitions apparaissent car celles-ci peuvent,
naître avec la sensation d’être étrangère à un corps. Je        de ce fait, être orientées. Invitez les élèves à dé-
sais que cela peut paraître « anormal » pour certains,          couvrir le blog « La vie en queer » et son article qui
lorsque ce n’est que singulier. C’est de cette situation        nous aide à mieux comprendre le lexique autour de
que s’est nouée mon envie de m’extraire de la réalité.          la trans idendité :
Le premier chemin utopique fut donc celui d’échap-
per à la réalité d’un corps. Se réapproprier ce dont on         https://lavieenqueer.wordpress.com/2018/06/02/les-expres-
ne peut se défaire est le paradoxe de cette situation           sions-a-eviter-a-propos-de-la-transidentite/
qui m’a amenée à questionner les failles et trouver les
transformations, fussent-elles minuscules. »                    Sur un plan plus littéraire et artistique, revenir sur
                                                                les définitions de métamorphose et de métaphore :
                                             Phia Ménard        les élèves peuvent en proposer à partir de mots
                                                                ou d’images. Les élèves devront être attentifs à
Le questionnement sur le genre ainsi que le chan-               ces métamorphoses ou métaphores qu’ils pensent
gement de sexe de Phia Ménard est au cœur de sa                 pouvoir identifier durant le spectacle.
démarche artistique. En prenant en compte la ri-
chesse des témoignages des reportages enregistrés
sur France Culture, mettre les élèves en groupes et
leur demander de présenter des aspects différents
de la question de la trans-identité ou des difficultés
à identifier son orientation voire sa personne sur le
plan sexuel. Vous pouvez aider les élèves à prendre
conscience que les personnes transgenres nous
amènent à réfléchir autrement sur notre monde,
renvoient nécessairement à notre identité, à notre
rapport aux autres dans toute sa diversité.
https://www.franceculture.fr/emissions/la-grande-table-
2eme-partie/le-temps-ou-la-famille

https://www.franceculture.fr/emissions/les-pieds-sur-terre/
jetais-un-homme-parfait-0

                                                                                                                      25
CONTES IMMORAUX - PARTIE 1 - MAISON MERE            Les élèves effectueront aussi des recherches sur le
                                                    Parthénon, les particularités de son architecture et
La Grèce Antique                                    sa fonction dans l’antiquité. La création de ce se-
                                                    cond « Parthénon » est centrale dans le spectacle.
Demander aux élèves de rédiger quelques courts      Cet exercice pourra aussi permettre d’aborder
exposés sur les personnages de l’antiquité sui-     l’aspect monumental et titanesque du travail de
vants : Athéna et Sisyphe. La présence de ces fi-   la performeuse sur scène qui construit cet édifice
gures dans le spectacle pourra être mis en débat    destiné à la protection.
après la représentation.

26
Europe et migration

Ils pourront également travailler sur la thématique
de l’Europe, son histoire depuis le mythe d’Europe
en passant par le Plan Marshall après-guerre la
construction progressive de l’Union Européenne
et les tensions présentes en son sein aujourd’hui,
ainsi que la situation économique actuelle de la
Grèce. L’Europe hier et aujourd’hui, son identité
et les mouvements migratoires qui la traversent
constitue un thème de réflexion pour l’artiste. Les
élèves y trouveront un écho aux préoccupations
actuelles Par ailleurs, l’accueil des migrants en
Grèce, bien que le pays soit en difficulté fait partie
des sources d’inspiration de Phia Ménard.

Etudier diverses affiches d’Amnesty International
afin de définir l’angle d’attaque de l’ONG : Deman-
der aux élèves d’imaginer le trajet d’un migrant
et d’expliquer le choix de ce dernier. Quelle est la
distance minimale parcourue par un migrant selon
eux ?

Inviter les élèves à participer à l’activité d’écriture
suivante : Au sein d’un texte structuré, détaillez
le trajet le plus long que vous ayez parcouru. Vous
expliquerez les moyens de locomotion empruntés,
les heures de départ et d’arrivée, le point de départ
et d’arrivée, les motivations de votre voyage et les
émotions ressenties au cours de ce périple.

                                                          27
Vous pouvez aussi lire