Protection de la nature : l'aube d'une nouvelle ère - Vogelwarte Sempach
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Barge à queue noire (photo : Karsten Mosebach) AVINEWS AVRIL 2019 Protection de la nature : l’aube d’une nouvelle ère Vœu pieux d’écologistes vision- biologique menace également leur sentatif des habitats des oiseaux et paiements directs pour les surfaces naires pendant des décennies, la existence. montre quels sont les moyens à de promotion de la diversité existe protection de la nature prend au- Ces constatations ne sont pas mettre en œuvre pour que les déjà. Il ne reste qu’à l’appliquer de jourd’hui enfin sa place sur la nouvelles. En 1972 déjà, le Club de abeilles, les autres insectes, les am- manière conséquente. La moitié seu- scène politique. Rome signalait dans son rapport les phibiens et les plantes en tirent éga- lement du budget agricole annuel limites de la croissance. La confé- lement profit. permettrait à la Confédération de fi- Contre toute attente, protection du rence de l’ONU à Rio en 1992 a mar- La Station ornithologique de nancer des « parrainages de fleurs », climat et disparition des insectes qué le début du processus de déve- Sempach a synthétisé les priorités et de transformer dix pourcent de la sont devenus des thèmes de cam- loppement durable et la signature d’action en 11 points. Le plus urgent surface agricole en oasis de nature. pagnes de votation et d’élections. de la Convention sur la diversité bio- est de diminuer l’utilisation d’engrais La rapidité avec laquelle la nature ré- Les grèves d’écoliers et autres ma- logique. Ces messages semblent et de pesticides dans l’agriculture, et agit – positivement – à ce genre de nifestations pour la défense du cli- avoir enfin été entendus, et nous se- d’aménager davantage de surfaces mesures est évidente dans les ac- mat ont atteint la Suisse. Nos voi- rions bien inspirés de profiter des de promotion de la biodiversité. La tions de revalorisation écologique sins bavarois réclament avec force conditions politiques actuelles favo- qualité de l’eau, la fertilité des sols et menées par des agriculteurs avec une protection plus ferme de la na- rables avant que le créneau ne se re- la diversité des espèces s’en ver- l’aide de la Station ornithologique ture ; 18,4 % pourcent des élec- ferme. raient immédiatement améliorées. en Champagne genevoise, dans le teurs ont signé l’initiative populaire Les bases d’une protection plus En Basse-Bavière, un agriculteur in- Klettgau schaffhousois et dans la la plus plébiscitée de l’histoire du efficace de la nature sont mainte- ventif propose pour 50 euros un are plaine lucernoise de Wauwil. Le mo- land. Proportionnellement, cela nant posées, grâce à un travail de de plantes sans pesticides pour les ment est favorable pour renforcer la correspondrait en Suisse à une ini- fond réalisé en amont. Exemple : abeilles et autres insectes : il a été dé- protection de la nature et passer à tiative populaire signée par près l’atlas des oiseaux nicheurs de Suisse, bordé de demandes, tant la popula- une véritable politique agraire écolo- d’un million d’électeurs ! On le voit, qui dresse un inventaire de l’état de tion s’est enthousiasmée pour ce gique en 2022 – saisissons-le ! les humains prennent conscience l’avifaune dans le pays. Le tableau parrainage de fleurs. En Suisse, nous que le recul alarmant de la diversité qu’il dépeint est également repré- disposons déjà du programme de Matthias Kestenholz
AVINEWS AVRIL 2019 : SOUS LA LOUPE Atlas des oiseaux nicheurs : poursuivons le travail ! Comment améliorer la situation ment en ligne pour tout un cha- quels des mesures sont néces- Suisse » à l’atlas des oiseaux ni- de l’avifaune en Suisse ? L’atlas cun, et il tient ses promesses : ja- saires, mais également quelles cheurs 2013-2016, qui synthétise des oiseaux nicheurs 2013-2016 mais auparavant la protection des sont concrètement ces mesures. en 44 pages ses conclusions es- met en évidence les actions re- oiseaux nicheurs de Suisse n’a pu Ces conclusions se basent sur les sentielles. Connaissant les res- quises pour y parvenir. La Sta- s’appuyer sur une base aussi so- connaissances acquises au fil des sources limitées de la protection tion ornithologique s’engage lide. Non seulement le nouvel atlas ans sur les exigences écologiques de la nature et des oiseaux, la Sta- pour élaborer et mettre en montre la situation actuelle de nos des oiseaux, et sur les mesures de tion ornithologique a encore œuvre des mesures concrètes, oiseaux, mais il illustre aussi les conservation qui ont fait leurs condensé ces conclusions dans un en collaboration avec d’autres changements survenus depuis preuves lors de tests. document de quatre pages inti- partenaires. vingt ans dans leur fréquence et tulé « Action ! » – 11 mesures leur répartition. Les oiseaux, dont Du bilan aux actes prioritaires auxquelles nous en- Il y a tout juste sept ans, la Station les exigences par rapport à leur ha- L’atlas des oiseaux nicheurs livre gage l’atlas des oiseaux nicheurs. ornithologique lançait le grand bitat sont parfois très spécifiques, donc des connaissances allant Avec cette trilogie, la Station dis- projet de l’atlas des oiseaux ni- donnent la mesure de l’état des d’une description de l’état de pose maintenant des bases adé- cheurs 2013-2016, après des mois milieux ; de ce fait l’ouvrage dé- l’avifaune aux actions requises quates pour s’engager avec les or- de préparation. Dans son éditorial signe aussi clairement les déficits pour l’améliorer, en passant par ganisations partenaires dans de l’Avinews d’août 2012, Lukas persistant dans la protection de la les raisons de son évolution. Cet l’amélioration de la situation de Jenni décrivait l’objectif poursuivi nature en général. ouvrage constitue par conséquent nos oiseaux nicheurs. par la Station : créer une base pour Les auteurs de l’atlas des oi- une base extrêmement solide les travaux qui suivraient. Et déjà à seaux nicheurs ne s’en tiennent pour la protection de la nature. Il Détermination des actions l’époque, il faisait comprendre que pourtant pas à une description de restait encore à diffuser ces requises cet objectif ne pourrait s’atteindre l’état de l’avifaune ou des change- connaissances, contenues dans Pour formuler les actions requises, sans soutien : « Nous voulons créer ments qu’elle a connus. Ils en un pavé de plus de 600 pages, la Station s’est appuyée sur sa un ouvrage collectif, possible seu- montrent aussi les causes pour aux organisations partenaires et philosophie – connaître l’avifaune lement grâce à tous les ornitholo- des espèces particulières, pour des autorités les plus diverses. indigène et à la conserver dans gues bénévoles. Attaquons-nous groupes d’oiseaux, et pour les ha- Pour ce faire, la Station orni- toute sa diversité pour les généra- ensemble à cette tâche ! » bitats – causes la plupart du temps thologique en a donné une forme tions à venir. Cette vision n’est ce- Depuis, l’atlas des oiseaux ni- anthropogènes. Ainsi, non seule- condensée : elle a consacré une pendant pas l’apanage de la Sta- cheurs de Suisse 2013-2016 a été ment apparaissent clairement les édition spéciale du rapport an- tion ; elle est partagée par les or- publié, il est disponible gratuite- régions et les habitats dans les- nuel « Etat de l’avifaune en ganisations similaires et leurs La huppe fasciée, ambassadrice officielle de l’atlas, orne la couverture de l’atlas des oiseaux nicheurs de Suisse 2013-2106 (648 p., à gauche), celle de l’édition spéciale du rapport sur la situation de l’avifaune 2018 (44 p., au milieu), et celle du dépliant « Action ! » – 11 mesures prioritaires auxquelles nous engage l’atlas des oiseaux nicheurs (4 p., à droite). 2
AVINEWS AVRIL 2019 : SOUS LA LOUPE sympathisants. La Suisse officielle, seaux nicheurs 2013-2018, dans tuation que pour l’élaboration de de pouvoir tirer un autre bilan – également, a réaffirmé l’exigence l’édito du numéro d’août 2018 de l’atlas : « Si toutes les personnes positif celui-là – du prochain atlas d’accorder une priorité élevée à la l’Avinews – exactement six ans qui ont participé au projet réu- des oiseaux nicheurs ». conservation à long terme de la après Lukas Jenni – vaut tout au- nissent leur force pour ces objec- biodiversité, et par conséquent à tant pour l’amélioration de la si- tifs, alors nous aurons une chance Michael Schaad celle de l’avifaune. Avec le titre in- titulé « Action ! » – 11 mesures prioritaires auxquelles nous en- gage l’atlas des oiseaux nicheurs, la Station ornithologique montre Actions requises qu’elle prend au sérieux la néces- Agriculture sité d’agir. Ce document concré- 1. Diminuer l’intensité de l’exploitation par une réduction marquée de l’apport d‘engrais et de pesticides, et par des tise aussi sa philosophie. Grâce à méthodes culturales ménageant la biodiversité. l’étendue de leurs effets, les ac- 2. Optimiser les surfaces de promotion de la biodiversité (SPB) en augmentant leur qualité et en les connectant entre tions réclamées par l’atlas bénéfi- elles, et en créer de nouvelles, en particulier dans les grandes cultures. cieront non seulement aux oi- 3. Fixer les dates de coupe en fonction des exigences écologiques des nicheurs des prairies, en particulier dans les seaux mais aussi à d’autres ani- centres de gravité de leur aire de répartition. 4. Conserver et promouvoir les structures favorables à la biodiversité dans la zone agricole (haies, arbres isolés, pâ- maux et plantes. turages bien structurés, murs en pierres sèches, talus, gravières, p.ex.). Et la suite ? Forêt Depuis des décennies, la Station 5. Promouvoir les forêts richement structurées ainsi que le bois mort et les vieux arbres, surtout sur le Plateau et dans ornithologique a entretenu des le Jura. contacts réguliers avec les organi- 6. Créer des lisières présentant des zones de transition larges entre forêt et milieu cultivé, et favoriser les peuple- sations partenaires qui occupent ments forestiers clairs et les forêts alluviales. des positions clés concernant la Biotopes humides et milieux aquatiques conservation de la biodiversité 7. Créer et promouvoir un réseau de biotopes humides bénéficiant de suffisamment d’eau et d’un entretien appro- dans les différents habitats et sec- prié, avec des zones tampons. teurs. Les propriétaires et exploi- 8. Favoriser un régime hydrique durable et la revitalisation des milieux aquatiques à large échelle, en y incluant un tants fonciers, leurs organisations, concept de canalisation du public. ainsi que les autorités cantonales et fédérales en font partie. La Sta- Milieu bâti tion peut maintenant s’appuyer 9. Promouvoir les espaces verts proches de l’état naturel et les grands arbres dans les villes et villages, ainsi que les sur le réseau ainsi constitué afin possibilités de nidification sur les bâtiments. d’accélérer le développement et Espèces exigeantes la mise en œuvre des mesures à 10. Conserver des espaces sans dérangements les plus grands possibles, en particulier dans les Alpes, en forêt et dans même d’apporter des solutions. les biotopes humides. Eviter la fragmentation par les infrastructures est notamment nécessaire. Car ce que résumait Peter Knaus, 11. Renforcer les mesures spécifiques et les projets pour les espèces prioritaires pour la conservation. le chef du projet de l’atlas des oi- Les effectifs des nicheurs des biotopes humides et des milieux aquatiques restent faibles. Les quelques milieux humides qui restent hébergent pour la plupart une grande biodiversité. Mais ils sont petits, fragiles et isolés. Les apports de nutriments, la régulation du niveau de l’eau, le drainage et les dérangements les mettent sous pression. Les berges des cours d’eau et des plans d’eau sont très souvent aménagées (photos : Roman Graf und Mathias Kestenholz). 3
AVINEWS AVRIL 2019 : LA PROTECTION DES OISEAUX EXPLIQUÉE Les corneilles – insolentes ou mal comprises ? Rares sont les oiseaux qui ont Impacts sur les petits affaire à autant de préjugés que passereaux la famille des Corvidés. Une On entend souvent dire que les meilleure compréhension des in- Corvidés décimeraient voire fe- teractions écologiques et du raient disparaître les populations comportement de ces oiseaux de petits passereaux des agglo- peut infirmer les idées fausses à mérations. Certes, les petits oi- leur sujet et désamorcer les seaux, leurs œufs et leurs oisillons, conflits. même s’ils ne jouent qu’un rôle mineur dans l’alimentation des En Suisse, les effectifs de la majo- adultes, sont importants dans rité des espèces de Corvidés sont celles des jeunes. En donnant à en nette augmentation. La pie leurs rejetons une nourriture riche bavarde, la corneille noire et le en protéines, les Corvidés leur corbeau freux, en particulier, offrent un bon départ dans la vie. sont désormais des nicheurs fré- Exactement comme un aigle royal La pie bavarde trouve en zone urbaine tout ce dont elle a besoin : nourriture, quents dans les villes et villages. qui ravitaille sa descendance avec dortoir et site de nidification (photo : Beat Rüegger). Ces oiseaux, qui montrent une des marmottes. A l’échelle de la grande capacité d’adaptation, Suisse, les Corvidés n’ont pas d’in- profitent des bonnes conditions fluence sur l’évolution démogra- Mais il n’empêche qu’observer Les rapaces ne sont pourtant pas trophiques et de l’absence de phique des autres oiseaux. La plu- le pillage d’un nid par un Corvidé chassés sans raison : les Corvidés prédateurs des zones urbaines. part des petits oiseaux conduisent est un crève-cœur. Pour aider les expulsent ainsi un prédateur po- Les oiseaux y sont par définition plusieurs nichées par an et petits oiseaux, on peut planter des tentiel hors de leur territoire pour à proximité immédiate des hu- peuvent ainsi compenser les arbustes épineux denses et des li- se protéger et défendre leurs mains, ce qui provoque des pertes. Les recensements annuels gneux indigènes offrant un bon jeunes. Ils sont en effet des pa- conflits à répétition : le bruyant du « monitoring des oiseaux ni- couvert – épine noire, aubépine et rents dévoués qui portent un soin remue-ménage des corbeaux cheurs répandus » de la Station sureau noir, par exemple. Ces es- très attentif à leurs petits. Un com- freux et leurs déjections jonchant ornithologique montrent que les sences leur offrent des sites de ni- portement qui serait vu comme de le sol des colonies ne sont pas populations du merle noir, du dification relativement sûrs. l’amour parental chez d’autres ani- forcément du goût des habi- rougegorge, de la mésange char- maux passe pour de la malveil- tants ; de même ceux-ci peuvent bonnière et de nombreuses autres Impacts sur les rapaces lance lorsqu’il s’agit des Corvidés. déplorer que la nichée d’un petit espèces ont nettement augmenté Qu’un Corvidé prenne un rapace Pourtant, leurs attaques sur les ra- passereau qui a élu domicile dans ces dernières années, bien que en chasse, et les sympathies se ré- paces sont au pire pénibles pour leur jardin soit pillée par une cor- leurs nids puissent être pillés par vèlent sans équivoque : le Méchant ces derniers, mais n’ont aucun im- neille ou une pie. les Corvidés. Corvidé poursuit le Gentil Rapace. pact sur les populations : les effec- Les corbeaux freux nichent volontiers dans les villes et les villages, où ils profitent de l’absence de persécution et d’une faible prédation de la part de l’autour et du faucon pèlerin (photo : Ralph Martin). 4
AVINEWS AVRIL 2019 : LA PROTECTION DES OISEAUX EXPLIQUÉE Rabenkrähe 160 Les Corvidés et l’agriculture Le casse-tête de la chasse Les Corvidés trouvent leur nourri- Contrairement à une opinion ré- 140 ture non seulement en ville, mais pandue, les pies et les corneilles ne 120 également dans les zones agri- sont pas protégées et peuvent Bestandsindex coles ouvertes. A certaines saisons, donc être chassées, en dehors de Indice 100 les plantes cultivées peuvent la période de protection. Depuis constituer une part importante de 2012, le corbeau freux est lui aussi 80 leur alimentation. Bien que cer- chassable, mais il bénéficie d’une taines exploitations puissent être période de protection du 16 février 60 fortement touchées, les études au 31 juillet. Entre 2010 et 2017, 40 ont évalué comme faible le dom- 9762 corneilles et 1386 pies ont mage à l’échelle de la branche. Les été tirées par année, en moyenne, 1990 1995 2000 2005 2010 2015 Corvidés sont cependant, en paral- selon la statistique fédérale de Année lèle, appréciés des agriculteurs car chasse. Le nombre de corbeaux ils consomment notamment des freux tués a littéralement explosé charognes, des mollusques et des ces dernières années : 4 individus Rougegorge familier Jahr Mésange charbonnière micromammifères. Les dégâts tirés en 2013, contre 200 en Merle noir 160 dans les cultures sont avant tout le 2017 ! Difficile dans ces conditions fait d’oiseaux non nicheurs qui se de parler de protection. Toutefois, 140 rassemblent en grands groupes. il n’est guère réalisable de réduire Les nicheurs, quant à eux, ne durablement les effectifs par la 120 causent quasiment pas de dégâts. chasse intensive, et ce pour plu- Indice Par ailleurs, les nids de corneille et sieurs raisons : d’une part, la 100 de pie sont utilisés par le hibou chasse est très laborieuse parce 80 moyen-duc et le faucon crécerelle. qu’après peu de temps, les oiseaux La meilleure méthode pour te- reconnaissent individuellement les 60 nir les Corvidés éloignés des chasseurs et leur véhicule, grâce à cultures est la prévention. Planter leur grande intelligence, et ils 40 des haies et des bosquets offre un prennent le large à temps. D’autre 1990 1995 2000 2005 2010 2015 couvert à leurs prédateurs. Lorsque part, pour des raisons de sécurité Année les Corvidés ne se sentent pas en la chasse n’est pas praticable en sécurité, ils réduisent la durée de zone construite. Les résultats de nos suivis montrent une tendance positive sur le long terme pour la corneille noire. C’est également le cas d’autres passereaux fréquents leur séjour dans les champs. Le En outre, la chasse annule plu- dans les agglomérations comme p. ex. le rougegorge, le merle ou la mésange choix du moment des semailles sieurs mécanismes de régulation charbonnière. peut aussi prévenir les dommages. naturels qui empêchent la crois- Si on doit malgré tout chasser les sance illimitée des effectifs. Corvidés, il faut faire preuve d’ima- Lorsque la densité de population tifs de la plupart des rapaces aug- tions constituent un autre enjeu gination et alterner les moyens car est élevée, la proportion des indivi- mentent depuis les années 1990. de conflit, a fortiori lorsque des ces oiseaux intelligents apprennent dus non nicheurs augmente, ce places de parc, des bancs, des vite, et quelques jours suffisent qui occasionne des dérangements Conflits de voisinage places de jeux ou des arrêts de pour qu’ils ne réagissent plus aux dans l’élevage des jeunes, et réduit Au contraire de la corneille noire bus se trouvent sous les nids. mesures répulsives. Les rubans le succès de reproduction. De plus, qui niche en couple, le corbeau De nombreuses méthodes ont plastique de couleur, les girouettes les agressions entre nicheurs voi- freux niche en colonies. Une majo- déjà été testées pour empêcher et les appareils à effet répulsif sins augmentent avec la densité. rité des 5800 à 7300 couples de que les corbeaux freux ne s’éta- acoustique et/ou visuel dispensent La réduction temporaire des effec- Suisse se trouve en ville. C’est sur- blissent en ville. Coupes d’arbres une certaine protection – les bal- tifs par la chasse annule les méca- tout dès le mois de mai, lorsque les plus fréquentes, pièges, effarou- lons gonflés à l’hélium étant parti- nismes de régulation naturels qui deux parents nourrissent leur des- chement optique, rayons laser, culièrement efficaces. Les détails se mettent en place quand la den- cendance, que les colonies peuvent notamment, ont été employés sur garantissant une utilisation cor- sité est élevée. Par conséquent, les devenir bruyantes, ce qui peut pro- différents sites avec un succès va- recte de ces dispositifs sont pré- effectifs retrouvent très vite leur voquer les plaintes des habitants. rié. La plupart du temps, ces es- sentés dans la fiche « Les corvidés taille précédente. La communication acoustique joue sais ont eu pour conséquence la et l’agriculture ». L’intensification cependant un rôle extrêmement création de nouvelles colonies de la chasse ne constitue pas Livio Rey important chez cette espèce so- dans les environs. Le problème quant à elle une solution durable à ciale. Les mesures de volume so- s’est vu déplacé, mais pas résolu. ces conflits. nore ont de plus montré que les Du point de vue de la Station or- cris des corbeaux freux sont signifi- nithologique, les mesures doivent cativement moins bruyants que le cesser au début de la période de trafic. Le fait que ces cris soient protection, à mi-février. Il est in- Vous trouvez de plus amples informations sur les Corvidés dans Le monde malgré tout décrits comme plus dispensable de documenter les des oiseaux 2019 «Noir, gai et rusé comme un corvidé» et les fiches info « Pies dérangeants montre à quel point actions menées et leurs impacts bavardes et corneilles noires dans les zones d’habitation », « Corbeaux freux » ces oiseaux ne sont pas dans les pour en tirer les enseignements et « Les corvidés dans l’agriculture » sur : petits papiers des humains. Les sa- permettant, le cas échéant d’opti- www.vogelwarte.ch/fr/oiseaux/conseils/problemes-avec-les-oiseaux/ lissures occasionnées par les déjec- miser les actions ultérieures. 5
AV I N E W S AV R I L 2 0 1 9 : C O N S E R VAT I O N D E S O I S E A U X Comme elle niche au sol, l’alouette des champs dépend totalement d’une utilisation du sol respectueuse (photo : Mike Powles/FLPA). L’alouette des champs – une nicheuse au sol à terre La chute libre de l’alouette des record, et pourtant, la reproduction plus de 20 ans de paiements directs, tensive et suscitent par conséquent champs se poursuit, comme le échoue très souvent. Cette espèce des critiques se font entendre selon des réticences. Elles sont toutefois montre l’Atlas des oiseaux ni- caractéristique, autrefois omnipré- lesquelles les surfaces de promotion incontournables pour une agricul- cheurs 2013-2016. Pour que cette sente et extrêmement fréquente, fi- de la biodiversité seraient ineffi- ture suisse durable – et d’une impor- espèce emblématique des milieux gure maintenant sur la Liste Rouge caces. C’est faux ; le problème tient tance vitale pour l’alouette. cultivés ne perde pas davantage comme potentiellement menacée, au fait qu’il y en a beaucoup trop de terrain, une conservation à et fait partie des 50 espèces priori- peu dans les régions de grandes Du diagnostic à l’action grande échelle est nécessaire, pas- taires du programme de conserva- cultures – c’est-à-dire précisément Pour l’alouette des champs, le lièvre sant par un plus grand nombre de tion des oiseaux en Suisse. l’habitat de l’alouette des champs. brun et les autres, il est capital surfaces de promotion de la biodi- Elles ne représentent aujourd’hui d’augmenter massivement la sur- versité de grande valeur, et par On connaît les recettes que 1,6 % de la surface agricole face de végétation basse et clairse- des méthodes de culture respec- Conserver l’alouette des champs est utile en moyenne, alors qu’il en fau- mée pendant la période de repro- tueuses. de plus en plus urgent. Cela fait drait quelques pourcents de plus. duction. Combiner les mesures sur longtemps que la Station ornitholo- Les SPB se trouvent très souvent en Feldlerche les surfaces de production avec une L’alouette des champs est l’une des gique a développé et testé des re- concurrence avec la production in- augmentation du nombre de SPB de grandes perdantes de l’avifaune en cettes pour comprendre comment Suisse. Là où, il y a encore quelques soutenir la population d’alouettes. 140 décennies, 20 à 40 alouettes chan- Une mosaïque de jachères florales taient sur un kilomètre carré de pay- et tournantes, ourlets herbeux et sage cultivé ouvert, il n’est pas rare bandes herbeuses ou fleuries en 120 que l’espèce ait aujourd’hui disparu. bord de culture, lui offre des sites de Bestandsindex Les pratiques agricoles mènent la vie nidification, des graines pour se Indice 100 dure à cette nicheuse au sol. Dans nourrir et des insectes pour nourrir les herbages, les prairies intensives ses jeunes. Ces structures du pay- sont fauchées trop souvent, les sage cultivé, appelées surfaces de 80 grandes cultures étant quant à elles promotion de la biodiversité (SPB), de moins en moins favorables à la se sont révélées très efficaces. Là où nidification de l’alouette. Pour me- les paysans ont créé des conditions 60 ner à bien sa nichée, l’alouette des de ce type, en collaboration avec la 1990 1995 2000 2005 2010 2015 champs a besoin d’à peine six se- Station ornithologique, l’alouette a Année maines. La construction du nid (3-4 pu survivre, à l’image du Klettgau jours), la ponte (4-5 j.), la couvaison schaffhousois, de la plaine lucer- L’alouette des champs est en chute libre depuis des années. Sa densité sur le (11-12 j.) et l’élevage des jeunes noise du Wauwil ou de la Cham- Plateau est dix fois moindre que celle de 1990. Jahr Cependant, les effectifs sont (18-20 j.) sont achevés en un temps pagne genevoise. Et pourtant, après désormais aussi en déclin en altitude. 6
Pour sauver l’alouette des champs, il faut beaucoup plus de surfaces de promotion de la biodiversité dans les grandes cultures, des techniques culturales respectueuses, et des dates de fauche plus tardives (photos : Markus Jenny). grande valeur, sans se limiter à cette action protectrice des ressources et dernière, nous apparaît par consé- du sol. Les paysans ont un intérêt à quent comme une voie possible adopter ces pratiques de culture, car Le Schamserberg, aux Grisons, situé entre 1900 et 2100 m, détient probable- dans les grandes cultures. Il s’agit de la santé du sol est indispensable ment le record suisse de densité d’alouettes des champs pour les sites d’altitude : on y compte 200 territoires sur 8,3 km2. Les raisons en sont notamment la topo- cultiver les surfaces de telle sorte pour assurer la production de den- graphie favorable et la mosaïque d’habitats constituée de prairies grasses légè- qu’un bon rendement soit au ren- rées alimentaires à long terme. Rai- rement amendées et de pelouses maigres. Des contrats de fauche tardive sur dez-vous, et qu’en même temps les son pour laquelle les cercles agri- trois quarts des prairies garantissent une exploitation respectueuse des alouettes. conditions pour les nicheurs au sol coles s’intéressent à nouveau aux Une amélioration foncière menace désormais cette région précieuse. Nous de- s’améliorent. On y parvient notam- techniques préservant le sol. En plus mandons que les contrats de fauche tardive soient maintenus. En contrepartie, ment avec les céréales d’été, l’aban- de donner une chance à l’alouette les paysans peuvent exploiter le reste de la surface de manière plus flexible. don des pesticides dans la culture des champs, elles recèlent aussi un des céréales, le sous-semis dans celle vaste potentiel pour la flore et la du maïs, ainsi qu’un semis lâche faune typiques des milieux cultivés dans les céréales. Dans plusieurs ouverts. Nous sommes en train d’en cantons, le semis lâche est déjà pro- tester la mise en pratique sur un posé comme mesure dans le cadre grand domaine de l’Etat dans le de projets de mise en réseau. Seeland bernois. Un travail du sol lé- C’est dans les paysages ouverts, ger, combiné à la culture de maïs c’est-à-dire encore épargnés par les avec sous-semis, non seulement constructions et le mitage, et où les préserve à long terme la santé du caractéristiques du sol sont favo- sol, mais redonne des possibilités de rables, que la promotion de nicher à l’alouette des champs, l’alouette des champs prend le plus grâce à une proportion plus grande de sens. La Station ornithologique a de végétation basse et clairsemée. défini ces régions dans une carte de Des organisations de produc- potentiel pour l’alouette des champs teurs telles qu’IP-Suisse initient de (voir Avinews décembre 2017). plus en plus de programmes qui De nombreuses régions prévoient une rémunération plus connaissent des projets de mise en élevée pour les paysans s’ils Alouette des champs (photo : Mathias Schäf) réseau qui peuvent intégrer et ac- conduisent leurs cultures sans herbi- compagner des concepts de cides ou renoncent au glyphosate. conservation régionaux. Lorsque Ces tendances ouvrent de nouveaux pratiques culturales extensives favo- flet d’une agriculture respectant la des régions à alouettes des champs champs, au propre et au figuré, risent la diversité des plantes et des nature. Les systèmes de production se trouvent en-dehors des péri- pour la conservation de l’alouette, insectes. Parmi ceux-ci : les indispen- extensifs et ménageant les res- mètres de mise en réseau, les fonds du lièvre brun et Cie. Ces procédés sables pollinisateurs des plantes sources permettent à l’alouette des de mise en réseau ne sont pas ac- peuvent cependant comporter cultivées, et les prédateurs d’autres champs et Cie de se reproduire à cessibles et il faut trouver d’autres quelques problèmes. La lutte contre insectes, qui par conséquent atté- nouveau avec succès sur les surfaces financements. Dans tous les cas, un les mauvaises herbes se fait souvent nuent les dégâts aux cultures. Ces productives. Et last but not least, les conseil spécialisé est capital pour de manière mécanique, en hersant services écosystémiques sont essen- paysages agricoles fleuris et vivants motiver et accompagner les agri- et binant les cultures. Si ce traite- tiels pour une production alimen- – résonnant des trilles des alouettes culteurs. ment est trop fréquent, les nicheurs taire durable respectueuse de l’envi- des champs – sont également ré- au sol en souffrent. On ne peut uti- ronnement. jouissants pour nos concitoyens. Queis bénéfices pour liser les synergies ici que s’il existe Comme espèce caractéristique l’agriculture ? une certaine tolérance aux mau- des paysages cultivés ouverts, Judith Zellweger-Fischer & Les mesures favorisant l’alouette vaises herbes, et uniquement s’il l’alouette des champs ne doit plus Reto Spaar des champs ont souvent aussi une s’agit de cultures extensives. Des perdre du terrain, car elle est le re- 7
AVINEWS AVRIL 2019 : LA PROTECTION DES OISEAUX EXPLIQUÉE Prés luxuriants – trop d’engrais nuit aux oiseaux La Suisse est un pays très ver- de 22 à 30 % et que des progrès doyant, où champs et prairies sont encore prévisibles, son surplus sont abondamment fertilisés. Fo- est encore énorme en Suisse. rêts et marais sont ainsi plus que nécessaire alimentés en subs- Plaines surfertilisées tances nutritives, ce qui altère les Les concentrations en azote va- habitats de nombreux oiseaux rient beaucoup d’une région à recherchant une végétation l’autre du pays : elles sont les plus basse et clairsemée pour se nour- fortes sur le Plateau oriental et les rir ou installer leur nid. collines des Préalpes, tout en étant élevées ailleurs dans les régions de Les fertilisants sont utilisés pour ac- basse altitude. croître les rendements agricoles, La charge maximale en azote mais tous ne sont pas absorbés par varie de milieu en milieu, mais elle les plantes. Ainsi, une partie consi- est presque partout dépassée en dérable de l’azote est rejetée dans Suisse : 100 % des hauts-marais, l’atmosphère : en 2005, 65 % de 90 % des forêts, 84 % des bas-ma- ces émissions provenaient de l’agri- rais et 42 % des prairies sèches ab- culture, 22 % des transports, 10 % sorbent plus d’azote qu’ils ne de l’industrie et 3 % des ménages. peuvent le tolérer. Pour l’essentiel, elles retournent au Pouillot siffleur (photo : Mathias Schäf) sol et fertilisent par la même occa- Lourdes répercussions sur les sion des surfaces qui ne devraient oiseaux pas l’être. À l’heure actuelle, elles Les excès d’azote rejetés dans l’en- tapis clairsemé, le sous-bois des fo- Là où les dépôts d’azote at- dépassent souvent largement vironnement sont considérés rêts « surfertilisées » est dominé mosphérique sont importants, la 5-25 kg par ha et par an, une comme l’une des principales par des espèces nitrophiles, comme diversité végétale se réduit par charge considérée comme encore causes du déclin de la biodiversité les ronces ou les orties, que le rapport à celles des zones témoins, supportable pour la plupart des en Europe centrale, en raison de pouillot siffleur évite lorsqu’il éta- car de plus en plus d’espèces très écosystèmes (« Critical Loads »). leurs graves conséquences sur la blit son territoire. De même, on concurrentielles s’y développent Cet excès annuel d’azote était éva- composition spécifique et la struc- suppose que l’augmentation des et évincent les plus menues, adap- lué à 190 000 t en 1994 et, à cette ture de la végétation, et indirecte- nutriments a une incidence néga- tées aux sols maigres. Les insectes allure, on estime qu’il s’élèvera en- ment aussi sur les oiseaux. tive sur le pouillot de Bonelli, qui sont par ailleurs moins abondants core à 145 000 t en 2020. Si l’effi- Là où autrefois l’aspérule odo- privilégie les associations fores- dans les prairies grasses et pauvres cience de l’azote aura ainsi passé rante ou les luzules formaient un tières en terrains maigres. en espèces, ce qui se reporte né- gativement sur nombre d’oiseaux des milieux agricoles, tandis Nombre d’espèces/km2 qu’une végétation luxuriante en- trave l’accès aux insectes pour celles se nourrissant au sol. Plu- sieurs espèces en déclin, comme le torcol fourmilier, les alouettes des champs et lulu, la pie-grièche écorcheur et le rougequeue à front blanc, ont besoin d’une vé- gétation éparse et plutôt basse pour s’alimenter. Au niveau des paysages, la sur- fertilisation entraîne une uniformi- sation et une banalisation de la flore. Des analyses basées sur les données de l’atlas montrent que c’est aussi le cas pour l’avifaune : après sélection des carrés atlas (10 × 10 km) du Plateau et du Jura situés en dessous de 600 m, et comparaison des dépôts moyens d’azote atmosphérique par ha avec le nombre d’espèces rencon- trées, on a pu montrer que les car- rés surfertilisés hébergeaient moins d’oiseaux nicheurs, selon Évolution, depuis 1993-1996, de la distribution des cinq espèces ayant besoin végétation herbacée clairsemée pour un gradient de diminution d’envi- rechercher leur nourriture (torcol fourmilier, alouette des champs, alouette lulu, pie-grièche écorcheur et rougequeue à front blanc). La carte d’évolution résulte de la combinaison de celles des cinq espèces. ron 11 espèces pour 10 kg d’azote/ ha. 8
AVINEWS AVRIL 2019 : LA PROTECTION DES OISEAUX EXPLIQUÉE L’impact positif de la réduc- tion des fertilisants sur les lacs L’évolution des eaux se révèle tout autre que celle des prairies et forêts, puisque le nutriment pro- blématique n’est pas l’azote, mais le phosphore. Alors qu’il y a quelques années, de nombreux lacs suisses étaient encore si pol- lués par le phosphore issu des eaux usées urbaines et de l’agri- culture que leurs écosystèmes s’étaient presque effondrés, la si- tuation s’est nettement amélio- rée depuis, grâce au développe- ment des stations d’épuration, à l’interdiction des phosphates dans les lessives et à l’aménage- ment de zones-tampons. Les ro- selières, mais aussi et surtout les herbiers immergés de potamots et de characées, ont ainsi pu se rétablir, au plus grand profit des oiseaux palustres, ainsi que des nettes rousses, très portées sur Le pouillot siffleur privilégie les forêts à couverture du sol modérée à moyenne, de type herbeuse. L’espèce évite les sous- les characées. Leurs effectifs hi- bois dominés par des végétaux nitrophiles, comme les ronces. vernaux ont ainsi fortement pro- gressé ces dernières années, comme d’ailleurs les nicheurs, qui sommes par contre encore très lisé, à végétation plus basse et l’Atlas des oiseaux nicheurs de ont quintuplé entre 1993-1996 et loin d’une solution durable clairsemée, il importe alors d’agir Suisse 2013-2016. 2013-2016. concernant les rejets azotés dans avec rapidité et détermination. Des mesures ciblées ont donc les sols. Si notre objectif reste de Roman Graf permis d’améliorer nettement la sauvegarder des espèces inféo- Texte tiré des pages Focus « Trop situation des eaux suisses. Nous dées à un paysage moins surferti- d’engrais nuit aux oiseaux » de Les insectes sont moins abondants dans les prairies grasses, et une végétation luxuriante entrave l’accès aux insectes pour les espèces se nourrissant au sol, comme le rougequeue à front blanc (photo : Markus Varesvuo). 9
AVINEWS AVRIL 2019 : NOUVELLES DE LA RECHERCHE Timing de migration différents pour mâles et femelles Chez de nombreux migrateurs, les gration de passereaux européens Briedis M et al. 2019 A full annual Différences de timing de migration mâles arrivent sur les sites de re- équipés de géolocalisateurs. perspective on sex-biased migra- entre males (bleu) et femelles (orange) production quelques jours avant Les résultats de l’étude tion timing in long-distance migra- de passereaux européens migrateurs à longue distance. Valeurs sous 0 : migra- les femelles, pour occuper les montrent que les mâles migrent en tory birds. Proc. R. Soc. B 20182821. tion précoce (jours) ; A : départ du site meilleurs territoires avant les ri- général quelques jours plus tôt que http://dx.doi.org/10.1098/ de nidification ; B : arrivée sur le site vaux. Une fois de retour, les fe- les femelles, à une exception près - rspb.2018.2821. d’hivernage ; C : départ du site d’hiver- melles choisissent leur parte- les dates d’arrivée sur les sites d’hi- nage ; D : arrivée sur le site de nidifi- naire en se basant sur des carac- vernage en Afrique sont identiques cation téristiques individuelles ainsi que pour les deux sexes. Ainsi, mâles et sur la qualité de son territoire. femelles semblent vivre toute l’an- née selon des horaires de migra- Jusqu’à présent, on ne savait pas tion légèrement différents. Par encore exactement comment les conséquent, l’arrivée plus précoce mâles prenaient cette avance. Hi- de mâles en Europe est en grande vernent-ils plus près des sites de partie imputable à leur départ plus reproduction, migrent-ils plus rapi- précoce des sites africains. dement ou commencent-ils leur Le départ et l’arrivée des mi- migration plus tôt que les fe- grateurs en automne et au prin- melles ? On ignorait également si temps sont aussi fortement le timing de migration était aussi connectés. Lorsqu’un oiseau com- biaisé entre les deux sexes à mence sa migration tôt, il est plus d’autres moments du cycle annuel. susceptible d’arriver tôt à destina- Pour tester cela, une équipe de tion. Il en va de même pour la mi- biologistes de Sempach et leurs gration automnale – plus tôt un collègues de plusieurs universités oiseau commence sa migration, européennes ont analysé une plus tôt il arrive dans sa zone d’hi- grande masse de données de mi- vernage. Faucon pèlerin en Suisse : tendances de populations 2005-2016 Après l’effondrement des popu- ces dernières années : dans le sud- parapentistes, randonneurs, géo- Kéry, M., Banderet, G., Neuhaus, lations de faucon pèlerin provo- ouest du pays, la population de cacheurs, etc.) et les décès dus à M., Weggler, M., Schmid, H., Satt- qué par les pesticides entre les pèlerin a diminué de 51 à 33 des collisions avec des structures ler, T. & Parish, D. 2019. Popula- années 1950 et 1970, la popula- couples entre 2008 et 2015 artificielles (lignes électriques, tion trends of the Peregrine Falcon tion suisse de ce rapace s’est lar- (–35 %), de 43 % (70 à 40 vitres, éoliennes, etc.) sont égale- in Switzerland with special refe- gement rétablie jusqu’au tour- couples) entre 2009 et 2015 dans ment soupçonnés de contribuer rence to the period 2005-2016. – nant du millénaire, conformé- le Jura septentrional, et à Zurich, au déclin du faucon pèlerin en Ornis Hungarica 26(2): 91-103. ment aux tendances observées des 6-7 couples en 2010 ne sub- Suisse. DOI: 10.1515/orhu-2018-0017. dans de nombreux autres pays sistaient que 2-4 en 2015, soit d’Europe et d’Amérique du Nord. une diminution de 50 % ! Durant cette même période, A l’aide de modèles d’occupation le taux d’extinction locale dans les dynamiques, la Station ornitholo- trois zones d’étude a au moins gique a estimé les tendances des doublé, passant de 0,05-0,1 à 0,2, populations suisses du pèlerin, en tandis que le taux de colonisation particulier son développement est tombé de 0,3 à 0,1 dans le depuis 2005. Les données utili- Jura septentrional, et qu’aucun sées proviennent de trois zones, changement n’était détectable suivies en détails par des groupes dans les deux autres zones. de spécialistes de l’espèce ro- Les auteurs discutent deux fac- mands et zurichois : le sud-ouest teurs vraisemblablement respon- du pays (1960-2015), les mon- sables de ces forts et récents dé- tagnes du Jura septentrional clins : la prédation par le grand- (2005-2015) et le canton de Zu- duc et la persécution directe et rich (2002-2015). illégale. De surcroît, la perturba- Malheureusement, l’étude dé- tion humaine croissante (p. ex. cèle des baisses significatives pour par les grimpeurs, photographes, Faucon pèlerin (photo : Ralph Martin) 10
AVINEWS AVRIL 2019 : A LA RENCONTRE DE ... … Stefanie Pfefferli Ornithologue expérimentée, col- Soleure, et participera plus tard à laboratrice du SI et naturaliste des cours de botanique et de touche-à-tout, Stefanie Pfefferli conduite d’excursions. est aujourd’hui à la tête de la ré- Pendant sa formation de fleu- serve naturelle pédagogique de riste, Stefanie se fait quelques sous Buchwald à Ettiswil. en menant des excursions ornitho- logiques le week-end. Elle démé- Quand on lui demande ce qui a dé- nage ensuite du côté de la mer des clenché son intérêt pour la nature Wadden, au nord de l’Allemagne, et l’avifaune, cette ornithologue de où elle passe deux ans comme sur- terrain chevronnée doit replonger veillante des oiseaux sur les toutes dans de lointains souvenirs d’en- petites îles de Scharhörn et fance, à Wangen bei Olten. La bé- Neuwerk. Sur Scharhörn, île de casse des bois surgie d’un livre dunes, elle cartographie les oiseaux d’enfant sur la forêt la fascine, et nicheurs et effectue des comptages elle est à peine à l’école primaire d’oiseaux d’eau et de déchets (!) … Stefanie Pfefferli (photo : Dennis Röseler). qu’elle explique à sa maman inter- Elle est la seule habitante de l’île et loquée que le scarabée qu’elle tient vit sans eau courante ! A cette dans sa main est un lucane cerf-vo- époque, il devient clair pour elle nement, une autre île de la mer du tions de bagage en Suisse, comme lant, et que c’est exceptionnel ! qu’elle aimerait travailler dans le Nord appelle Stefanie : celle d’Heli- au col de Bretolet et à la station Mo- Stefanie rejoint très tôt l’association domaine de l’environnement et de goland, où elle va travailler deux Dem de la plaine de Wauwil. de protection de la nature de son la protection de la nature. Le hibou ans au total à la station ornitholo- Aujourd’hui, Stefanie dirige la village, et à 12 ans participe déjà à des marais qui lui rend visite régu- gique de l’archipel et à la section lo- réserve naturelle pédagogique de des camps nature et à d’autres ac- lièrement le matin, se posant sur la cale de l’organisation environne- Buchwald à Ettiswil, où ses solides tivités du groupe des jeunes d’Eger- balustrade de sa hutte, est resté mentale Jordsand. La station orni- connaissances ornithologiques, kingen. Elle se plonge alors plus sé- son oiseau préféré ! thologique lui offre l’occasion de son savoir très vaste dans d’autres rieusement dans l’observation des Après un stage au centre BirdLife baguer un grand nombre d’oiseaux domaines des sciences naturelles et oiseaux. A 15 ans, elle suit le cours de Neeracherried et une formation migrateurs. Stefanie apporte égale- son talent pédagogique font mer- d’ornithologie de terrain de BirdLife de spécialiste en nature et environ- ment son concours à plusieurs sta- veille ! AVINEWS AVRIL 2019 : PERSONNEL Nouveautés du côté du personnel Deux nouvelles thèses démarrent son côté, Julia Hatzl commence à l’analyse et à la visualisation de la rin Feller et au Alexander Gren- en même temps au sein du dépar- son travail de doctorat, avec pour migration nocturne au-dessus de delmeier, ils vont occuper de nou- tement « Recherche écologique ». sujet l’écologie de répartition des l’Europe, sur la base de données veaux postes fixes au sein de la Sta- Après avoir terminé son travail de aigles royaux des Alpes. Le thème récoltées par plus de 100 stations tion : tous deux assumeront la master dans le projet Milan royal, et la zone d’étude lui sont déjà fa- de radar météorologique dans responsabilité d’un domaine au puis nous avoir soutenus en qua- miliers puisqu’elle participe au pro- toute l’Europe. sein du groupe « Forêts » nouvelle- lité d’assistante de terrain, Bene- jet depuis un certain temps. A la station de soins, c’est une ment créé. detta Catitti entame à présent, Dans le département « Re- nouvelle collaboratrice motivée Nous souhaitons la bienvenue toujours pour ce projet, une thèse cherche sur les migrations », Ra- que nous avons trouvée en Virginie aux nouveaux collaborateurs ! sur les effets de la période au nid phaël Nussbaumer commence un Utzinger pour soutenir l’équipe, sur les étapes de vie ultérieures. De post-doc d’un an. Il va se consacrer avec un poste à 20 %. Quant à Ka- De gauche à droite : Benedetta Catitti, Julia Hatzl, Raphaël Nussbaumer, Karin Feller et Alexander Grendelmeier. 11
AVINEWS AVRIL 2019 : EN BREF Choix de lecture : Le comporte- Du nouveau à la commission ment des oiseaux d’Europe scientifique Paru récemment, « Le comporte- Chaque fiche d’espèce com- ment des oiseaux d’Europe » est prend un texte d’introduction qui un livre qui mérite sa place dans donne des généralités sur la biolo- une bibliothèque ornithologique ! gie et les comportements de Edité et traduit de l’italien par La 427 espèces européennes. Tech- Salamandre, en partenariat avec la niques de chasse, parades nup- Station ornithologique, cet ou- tiales, vol ou nage, élevage des vrage unique et complet de jeunes, défense territoriale, façons 576 pages devrait ravir tous les de se nourrir et divers autres com- passionnés d’oiseaux. portements sont ainsi illustrés de Magnifiquement illustré avec façon précise et pédagogique. plus de 1800 dessins au crayon ou De plus amples informations se à l’aquarelle, ce livre est un ex- trouvent sur le site de notre parte- Franziska von Lerber et Dominik Thiel (photo à gauche : Tobias Dussex). cellent complément aux guides de naire La Salamandre www.bou- détermination. Il permet de com- tique.salamandre.net, où le livre prendre et de contextualiser les peut être commandé au prix de La commission scientifique de la Lerber est responsable des ré- différents comportements, expli- CHF 65.–. Station ornithologique est chargée serves naturelles et des projets de qués en détails dans chaque cha- de définir les priorités de l’activité promotion des espèces et des mi- pitre par espèce ou par groupe scientifique et d’assurer la qualité lieux, au sein du service de l’Office d’espèces proches. des projets scientifiques de la Sta- de l’agriculture et de la nature du tion. Elle est composée de Canton de Berne. Le Dr Dominik membres du conseil de fondation Thiel est directeur de l’Office de la (indiqués par un *) et de spécia- nature, de la chasse et de la pêche listes bénéficiant d’une connais- du Canton de St-Gall. sance approfondie du travail scien- Les autres membres de la com- tifique dans son aspect de re- mission sont le Prof. Dr Lukas F. Kel- cherche fondamentale et/ou d’une ler* (président), le Prof. Dr Bruno vaste expérience de la pratique. Baur, le Dr Kurt Bollmann*, le Dr Avec le départ de Sarah Pearson Urs Leugger*, le Prof. Dr Alexandre l’année dernière, la commission a Roulin* et Corina Schiess. perdu une membre de longue Nous remercions chaleureuse- date. ment Sarah Pearson pour son in- Deux nouveaux membres vestissement et nous nous réjouis- prennent sa place, issus tous les sons de travailler avec Franziska deux de la pratique. Franziska von von Lerber et Dominik Thiel. IMPRESSUM Rédaction : Sophie Jaquier Traduction : Filoplume AGENDA Collaboration : Simon Birrer, Marcel Burkhardt, Roman Graf, Isabelle Kaiser, Matthias Kestenholz, Livio Rey, Michael Schaad, Arno Schneider, Reto Spaar, Irene Schumacher, Judith Zellweger-Fischer. Tirage : 4000 ex. 1.5.-31.5.19 Concours photo de la Station ornithologique Edition : avril, août, décembre https://photo.vogelwarte.ch/fr/ ISSN : 1664-9478 (Ressource électronique : 1664-9486) 23.5.-26.5.19 Fête de la Nature Papier : imprimé sur 100 % papier recyclé 26.5.19 Moostag, Wauwiler Ebene 7.6.19 Journée mondiale des martinets 22.6.19 Colloque sur les martinets, Langenthal BE Schweizerische Vogelwarte Tel. 041 462 97 00 Station ornithologique suisse Fax 041 462 97 10 Stazione ornitologica svizzera info@vogelwarte.ch Postkonto 60-2316-1 Staziun ornitologica svizra CH-6204 Sempach www.vogelwarte.ch IBAN CH47 0900 0000 6000 2316 1 12
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