CAUSES COMMUNES - GENEVE INTERNATIONALE 49 - PS Ville de Genève
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CAUSES
COMMUNES
BIMESTRIEL DES SOCIALISTES
VILLE DE GENÈVE
’
GENEVE
INTERNATIONALE
DÉCEMBRE 2018 49
2 ÉDITORIAL
ÉDITORIAL
PETITE DANS LA COUR
DES GRAND.E.S
SYLVAIN THÉVOZ,
CO-PRÉSIDENT PS VILLE DE GENÈVE
Genève est une petite ville, La réalité des chiffres, façades des ambassades, et des forfaits
et des chiffres à la réalité fiscaux iniques pour des entreprises multi-
de la taille de Limoges ou nationales usant du chantage au départ. Si
Dunkerque, et pourtant sa En chiffres, la Genève internationale ce Genève est un phare qui rayonne et attire,
il brûle aussi. Avec 500’000 pauvres en
renommée est internationale. sont 37 institutions, organisations, orga-
nismes internationaux et secrétariats à Suisse, des inégalités sociales croissantes,
Genève, 177 États représentés, 257 mis- et des habitant.e.s qui calculent sans cesse
Nous le devons en grande partie à nos pour parvenir à boucler leurs fins de mois
sions, représentations et délégations per-
ancêtres, comme le rappelle Joëlle Kuntz en raison de coûts des loyers et de primes
manentes, 3’300 réunions annuelles avec
dans son ouvrage Genève, histoire d’une d’assurance maladie trop élevés, la Genève
221’000 délégués venant du monde entier
vocation internationale, et à trois grands internationale ressemble parfois à un ilot
et 21’500 membres du personnel des or-
moments historiques!!: la Réforme (1536), déconnecté du reste de la cité, soustrait
ganisations avec accord de siège en Suisse,
où Genève prend le risque de son indépen- à ses lois et coutumes. Les expatrié.e.s
pour un total de 45’000 emplois!!! On pour-
dance spirituelle et politique par rapport attiré.e.s à Genève, jeunes et diplômé.e.s
rait encore aligner de nombreux chiffres
à son environnement. Le moment huma- en pleine ascension professionnelle s’ins-
pour valoriser l’apport bénéfique de la Ge-
nitaire de la fondation de la Croix-Rouge tallent plein d’entrain. Pour soutenir leur
nève internationale. En 2018, les dépenses
(1863) qui place notre ville sur la voie du train de vie, ils usent de nounous, d’une
des organisations et institutions interna-
droit international, la fondation de la So- femme de ménage, de livreurs de repas.
tionales se sont élevées à 6’189 milliards.
ciété des Nations (1920), et enfin le mo- Cela crée une demande forte pour des em-
Toute la région en tire de grands avantages
ment de l’Organisation des Nations Unies plois peu qualifiés avec de multiples risques
économiques. Mais…
(1946) qui donne à Genève un rôle central d’abus et de travail au noir dans une société
dans la gouvernance mondiale. Nous avons à deux vitesses. La promotion extérieure
certes hérité d’une histoire unique, mais Un monde parallèle""?
de la Genève internationale, sans des poli-
aussi d’une grande responsabilité, celle tiques publiques intérieures à la hauteur et
de la faire fructifier et de la développer. Si la Genève internationale est un joyau
pour notre canton, pour l’image et le en phase avec les besoins de la population,
Nous nous trouvons aujourd’hui dans un risque d’alimenter une schizophrénie nui-
quatrième moment, où le multilatéralisme rayonnement de la Suisse, ainsi qu’un
pôle de compétences reconnu en matière sible pour l’ensemble de Genève et les défis
est remis en cause, où les replis natio- que notre ville doit relever pour continuer
naux voulus par Trump, Bolsonaro, Sal- de coopération et un centre de diploma-
tie multilatérale, c’est aussi pour nous, à jouer dans la cour des grand.e.s. Des me-
vini et consorts mettent à mal une vision sures s’imposent pour que la carte de visite
du monde concertée. Parallèlement, nous habitant.e.s, un espace parfois opaque, que
nous regardons avec prudence si ce n’est de Genève demeure ce qu’elle est, mais
assistons à des bouleversements technolo- ne soit pas terne et amère pour ceux qui
giques frénétiques. Tous les voyants écolo- défiance, comme un monde parallèle. La
Genève internationale, c’est un impact vivent l’envers du bristol.
giques et sociaux sont au rouge. Quel rôle
va jouer notre ville, quelle référence sera- violent sur les logements, un aéroport fa-
t-elle pour le monde de demain, avec quelle cilitateur de mobilité internationale mais
capacité d’anticiper et de nous projeter dont les nuisances sont avérées. Ce sont
vers l’avenir!? des conditions de travail précaires pour
un lumpenprolétariat exploité derrière les
CAUSES Coordination rédactionnelle : Sylvain Thévoz.
Comité rédactionnel!!: Olivia Bessat, Jannick Frigenti Empana, Jorge Gajardo, Léa Winter.
COMMUNES Ont collaboré à ce numéro : Umut Akar, Taimoor Aliassi, Grégoire Carasso, Christian Dan-
drès, Dominique Favre, Yves Flückiger, Sami Kanaan, Pascal Holenweg, Ulrich Jotterand,
BIMESTRIEL ÉDITÉ PAR LE PARTI SOCIALISTE DE LA VILLE DE GENÈVE
Sandrine Kott, Caroline Marti, Léonard Micheli, Dalya Mitri, Melik Özden, Jean-Charles
15, rue des Voisins
Rielle, Romain de Sainte Marie, Sandrine Salerno, Carlo Sommaruga, Virginie Stude-
1205 Genève
mann, Nicole Valiquer, Thomas Wenger.
www.ps-geneve.ch
Photographies!!: Demir Sönmez.
lea.winter@ps-geneve.ch Maquette et mise en page : Atelier supercocotte.
Un journal 100% pensé, conçu et réalisé à Genève ! Impression : Imprimerie Nationale, Genève.
Envie de soutenir le Causes Communes : abonnez-vous ! Tirage : 3000 exemplaires sur papier recyclé.
Envoyez vos coordonnées à psvg@ps-geneve.ch
Finance d’inscription : 20.-/année Les avis et opinions tenu-e-s par les invité-e-s n’engagent pas le comité de rédaction.
CCP : 12-12713-8
3
1919-2019!!: GENÈVE
DEVIENT UNE VILLE
INTERNATIONALE
SANDRINE KOTT, PROFESSEURE D’HISTOIRE
CONTEMPORAINE, UNIVERSITÉ DE GENÈVE
GRÉGOIRE CARASSO, DOCTORANT À
L’UNIVERSITÉ DE GENÈVE,
DÉPUTÉ AU GRAND CONSEIL
Dans cet article publié l’engagement décidé de diverses person- d’une partie de la population au point qu’il
nalités. D’autres villes sont alors en effet leur est parfois difficile de trouver à se
d’abord dans Le Temps le sur les rangs dont Bruxelles qui jouit du loger. La société internationale s’organise
24 juin 2018 et que nous soutien des autorités françaises. Genève ainsi en développant ses propres lieux
a de son côté celui des Anglais et du Pré- de sociabilité. Néanmoins, les autorités
reprenons ici, Sandrine Kott
sident Wilson. La cité de Calvin séduit le suisses et genevoises sont très conscientes
et Grégoire Carasso évoquent président, fils d’un pasteur presbytérien!!; de l’intérêt économique et diplomatique de
l’histoire et la façon dont la réputation de capitale humanitaire la présence des organisations internatio-
acquise grâce à l’engagement du CICR et nales sur leur sol et développent donc des
Genève est devenue une ville des Croix-Rouges durant la guerre est éga- mesures pour pérenniser leur présence.
internationale. A l’heure où lement évoquée, mais ce sont surtout les Grâce à des dons de parcelles, l’OIT peut
arguments diplomatiques qui emportent dès 1926 s’installer dans un immeuble
nous allons fêter les 100 ans
la conviction des membres de la commis- propre, actuel siège de l’OMC, tandis qu’en
de la Genève internationale, sion de la SdN. Ils voient dans la localisation 1937 le Palais des Nations est inauguré en
une bonne occasion de se suisse un gage d’indépendance par rapport grande pompe.
aux grandes puissances européennes et
rappeler que ce rôle doit être une main tendue aux vaincus. Enfin, l’enga- Une maturité rayonnante
défendu et valorisé. gement de William Rappard est décisif. Né
à New York en 1883, il a enseigné à Harvard La Genève internationale connaîtra un for-
en 1912 et rencontré Wilson en 1917. En midable essor avec le développement du
À l’issue de la très destructrice Première 1919, il est professeur de sciences écono- système onusien (OMS, OMM, UIT, etc.)
Guerre mondiale, le président des États- miques à l’Université de Genève et membre et du multilatéralisme (CERN, OMC, ISO,
Unis, Woodrow Wilson, propose la créa- du CICR. Envoyé comme représentant offi- etc.). Elle compte aujourd’hui 34 organi-
tion d’une «!association internationale des cieux de la Suisse à la conférence de la paix sations internationales (OI), plus de 250
nations!» chargée de protéger la paix. En de Paris, il s’y engage résolument en faveur représentations d’États et près de 400
février 1919, le traité de Versailles jette du choix de Genève. Outre les alliés, il doit organisations non gouvernementales. Les
les bases de la Société des Nations (SdN), d’ailleurs convaincre les autorités poli- seules OI ont engagé des dépenses pour
ancêtre de l’ONU, à laquelle s’ajoute, pour tiques et militaires helvètes qui, au nom de 6 milliards de francs en 2016. En sus des
faire droit aux revendications du mouve- la neutralité suisse, hésitent à rejoindre la retombées financières directes, cet éco-
ment ouvrier, une Organisation Interna- SdN, une abstention qui aurait largement système fait aujourd’hui partie de l’ADN de
tionale du Travail (OIT). Dans le courant de compromis le choix de Genève. En partie cette ville et participe fondamentalement
l’année 1920, les deux nouvelles organisa- grâce à Gustave Ador, le Conseil fédéral à son attractivité politique, scientifique,
tions se réunissent pour la première fois propose toutefois l’adhésion de la Suisse à économique et culturelle.
à Genève, élevant la petite cité helvétique la nouvelle organisation le 9 août 1919. Elle
au rang de «!ville internationale!». Selon le est ratifiée, sans enthousiasme d’ailleurs Attention au gâtisme"!
mythe diffusé par Robert de Traz, cette (56%), par un référendum populaire le 16
vocation internationale viendrait naturel- mai 1920. À l’heure où la première puissance mon-
lement consacrer «!l’esprit de Genève!» diale remet radicalement en question la
marqué par une tradition de tolérance et Des premiers pas timides gouvernance de ce bas monde, il serait op-
d’hospitalité. portun que nos autorités municipales, can-
C’est également sans enthousiasme que tonales et fédérales, en lien avec l’ensemble
Un berceau favorable les premiers fonctionnaires internationaux des acteurs publics et privés concernés,
s’installent à Genève, une ville qu’ils jugent saisissent l’occasion du centenaire de cette
Mais les mythes sont trompeurs et Genève peu dynamique, chère et mal équipée pour Genève internationale pour la valoriser.
ne serait jamais devenue «!capitale inter- les recevoir. En retour ils font d’ailleurs
nationale!» sans un contexte favorable et l’objet d’une défiance immédiate de la part
4 SANDRINE SALERNO
L’INTERNATIONAL
AU QUOTIDIEN
ENTRETIEN OLIVIA BESSAT
Olivia Bessat!!: On parle souvent de “LA passant même à 50’000 si l’on considère Michael Møller, directeur de l’Office des
Genève internationale”. Quelle en est ta les emplois indirects et induits (soit plus Nations Unies à Genève. Des événements
définition ? Que regroupe-t-elle!? de 14% des emplois totaux). Cette étude a tels que les Portes ouvertes de l’ONUG per-
également mis en évidence que ces orga- mettent très concrètement de rapprocher
Sandrine Salerno : La Genève internatio- nisations injectaient directement environ les habitant.e.s.
nale est née avec la création de la Croix- 3,3 milliards de francs par an dans l’écono-
Rouge en 1863, puis de la Société des Na- mie genevoise via les salaires, les dépenses Quels efforts sont faits au niveau de la
tions et de l’Organisation internationale du courantes et les investissements. C’est Ville pour l’intégration des étranger.e.s!?
Travail en 1919. Aujourd’hui, elle est consti- un apport considérable. En parallèle, la
tuée d’une quarantaine d’organisations Genève internationale nourrit notre ville La Ville de Genève a adopté en 2014 une
internationales, de 250 représentations de sa richesse culturelle, lui apporte son politique municipale qui place le respect de
d’États et de 400 organisations non gou- expertise dans de nombreux domaines et la diversité de l’ensemble des habitant.e.s
vernementales actives dans les domaines lui offre une visibilité mondiale. Grâce à de la Ville de Genève au rang de ses priori-
de la coopération et de la diplomatie mul- elle, Genève est l’une des rares villes où se tés. Sans nier les difficultés et les tensions
tilatérale. Pour moi, aujourd’hui, la Genève pense et se construit le monde de demain. inhérentes au vivre-ensemble, elle se foca-
internationale, ce sont surtout les 45’000 lise justement sur ce qui rassemble les in-
hommes et femmes issu-e-s de plus de 180 On parle souvent des indigènes versus les dividus et non sur ce qui les divise. Pour la
pays qui travaillent dans ces organisations expats - dans ton expérience de magis- période 2016-2020, le Conseil administra-
et qui font de Genève un centre de gou- trate, est-ce difficile d’être la Maire des tif a défini quatre axes stratégiques pour
vernance mondiale, une plateforme incon- deux!? mettre en œuvre cette politique!!: faire de
tournable, s’agissant de l’élaboration et de Genève une ville accueillante (accueil des
la mise en œuvre de solutions globales en Non, pas du tout. Être maire, c’est se placer personnes nouvellement installées sur
matière de paix et de droits humains, de au service de toutes et tous, c’est repré- le territoire, primo-information dans les
changement climatique, d’économie et de senter au mieux chaque habitant.e, quelles quartiers, accompagnement des personnes
développement durable. Et puis, de plus que soient les différences. Cela est d’autant en cours de naturalisation, etc.), accessible
en plus aussi, s’ajoutent à cette définition plus aisé que lorsqu’on discute avec les (traduction des supports de communica-
traditionnelle les nombreuses entreprises Genevois.e.s, on se rend compte que, dans tion, permanences multilingues dans les
multinationales et leurs employé.e.s, qui le fond, les préoccupations, les attentes et quartiers, etc.), non discriminante (cam-
participent clairement au cosmopolitisme les espoirs sont souvent similaires, que l’on pagnes de sensibilisation, soutien aux
de notre Ville. appartienne à la Genève locale ou interna- associations menant des activités de lutte
tionale. Mais les préjugés ont la peau dure, contre les préjugés, etc.), et responsable
Pourquoi les organisations internationales et la méconnaissance les entretient. C’est (formation des membres du personnel aux
sont-elles essentielles au fonctionnement pour cette raison qu’en 2010, j’avais choisi principaux enjeux en matière de diversité,
de la Ville!? de placer ma première année de Mairie etc.). C’est une thématique centrale pour
sous le thème de la «!rencontre!». L’idée l’administration, qui collabore avec de
D’abord, l’impact économique de la Genève était de questionner les préjugés et de nombreux partenaires associatifs et insti-
internationale est immense. En 2012, une mettre en évidence le fait qu’il n’existe pas tutionnels.
étude conduite par l’Université de Genève deux mondes séparés, mais bien une seule
a montré que les organisations internatio- et même Genève, forte de sa diversité et de Le service de la solidarité internationale
nales et les missions permanentes implan- son ouverture. Ces dernières années, les (DGVS) est sous ta responsabilité. C’est
tées dans notre canton représentaient choses bougent d’ailleurs beaucoup, grâce un sujet qui te tient à cœur, tu peux
près de 30’000 emplois directs, un chiffre notamment à l’excellent travail réalisé par nous rappeler pourquoi!?
5
Oui, pour moi, la solidarité internationale En 2018, la Ville de Genève a consacré matière depuis une vingtaine d’années et
est essentielle. Alors que des millions de 0.58% de son budget à la solidarité inter- s’inscrivent pleinement dans la feuille de
personnes sont confrontées à des crises nationale. Elle s’est fixée comme objectif route qu’elle a adoptée pour la législature
sanitaires, à des catastrophes climatiques d’atteindre le seuil des 0.7% d’ici la fin de 2015-2020. Pour la Ville, il s’agit surtout
et à des conflits meurtriers, elle relève la législature en cours, c’est-à-dire d’ici de poursuivre son travail en faveur de la
clairement de notre responsabilité de ville 2020. Où en sommes-nous!? Genève internationale et de la solidarité,
prospère à l’égard des collectivités en lutte de l’égalité entre les sexes et de la diver-
pour leur survie et leur développement. Depuis 2011, année où la gestion de la soli- sité, de la participation citoyenne, d’un
Elle s’inscrit également dans l’héritage sé- darité internationale a rejoint mon dépar- aménagement territorial responsable, de
culaire et l’identité même de notre ville, à tement, l’augmentation du budget dans la biodiversité locale, d’une politique éner-
la fois siège de nombreuses organisations ce domaine a été significative: il est passé gétique durable, d’espaces verts sans pro-
internationales et non gouvernementales, de 4,5 millions de francs en 2011 à 5.5 mil- duits chimiques, de l’innovation sociétale,
mais également cité ouverte et multicultu- lions en 2016, soit 0.61% du budget muni- de l’alimentation durable ou encore de la
relle qui accueille de très nombreuses com- cipal. Malheureusement, en 2018, et alors consommation responsable. Avec un objec-
munautés étrangères, qui cultivent toutes même que le Conseil administratif propo- tif clair!!: faire de Genève une ville accueil-
à leur manière des liens avec leur pays sait une augmentation de 250’000 francs, lante, innovante, engagée et écologique.
d’origine. Elle traduit enfin une certaine le Conseil municipal a décidé de transférer
relation avec le reste du monde; elle est une somme de CHF 340’000.- de la ligne
l’expression de notre conscience de l’unité budgétaire de la DGVS vers le Service d’aide
de l’humanité. au retour de la Croix-Rouge genevoise. Une
décision finalement invalidée par la popu-
En 2018, la Ville de Genève a soutenu un lation lors des votations du 4 mars 2018.
total de 147 actions menées par 108 asso- Ceci étant, cet épisode montre qu’il s’agit
ciations. Y a-t-il des projets de collabora- toujours de lutter pour obtenir les fonds
tion entre villes aussi (Nord-Sud)!? publics nécessaires à la mise en œuvre
d’une politique de solidarité internatio-
Oui, la coopération décentralisée fait nale digne de ce nom. Dans un contexte
partie des priorités de la DGVS. Je conjoncturel incertain, notamment mar-
pourrais citer comme exemple les qué par des réformes de la fiscalité et une
excellents programmes de floristique baisse prévisible des recettes publiques,
appliquée au développement durable nous devrons redoubler d’énergie à l’avenir
mis en œuvre par les Conservatoires et pour convaincre de la nécessité d’intensi-
Jardins botaniques dans différents pays fier nos efforts en la matière.
(Paraguay, Bolivie, Brésil, Sénégal, Côte
d’Ivoire et Burkina Faso). Ces projets Depuis 2016, l’Agenda 2030 encadre les
visent une meilleure prise de conscience efforts qui sont déployés conjointement
de la valeur patrimoniale des végétaux au niveau national et international pour
par une valorisation des connaissances relever les grands défis de la planète. Com-
traditionnelles liées à leur utilisation. ment la Ville se les est-elle appropriés?
Avec comme objectifs notamment une
utilisation raisonnée des ressources La Ville a salué l’adoption de ces 17 Objec-
naturelles, la lutte contre la pauvreté et la tifs de développement durable (ODD), qui
conservation de l’environnement. font écho à ses propres engagements en la
6 SAMI KANAAN
LA CULTURE
DU COMMUN
ENTRETIEN JANNICK FRIGENTI EMPANA
Jannick Frigenti Empana!!: Que représente du Conseil d’État, qui semble ouvert à un Non, les situations et les statuts sont ex-
pour toi la Genève internationale!? soutien conjoint avec la Ville. De la même trêmement divers, suivant les disciplines
manière, le Grand Théâtre doit bénéficier artistiques. Il n’existe pas, en Suisse, de
Sami Kanaan : Pour moi, Genève est un de l’appui rassemblé des collectivités pu- statut d’intermittent.e du spectacle, qui
creuset, une terre de rencontre et de bliques et des partenaires privés de la ré- apporterait un élément de solution. La ré-
métissage, bien avant que ne s’impose le gion. Enfin, troisième projet phare pour la ponse ne peut que provenir du niveau fédé-
terme de «!Genève internationale!». Elle est culture, même si son budget est d’un autre ral. J’ai donc activement proposé au niveau
donc l’identité même de Genève, sa capa- ordre de grandeur, le Pavillon de la danse. suisse une réflexion sur les carrières des
cité à s’ouvrir, à dialoguer et à offrir des La scène genevoise de la danse contempo- artistes, la prise en charge LPP, la nécessi-
espaces d’échange et de négociation. Je raine, largement reconnue au niveau inter- té de penser et soutenir les reconversions
ne nie pas certains aspects plus difficiles national, ne bénéficiait toujours pas d’un professionnelle, et d’instituer un statut
qui peuvent l’accompagner, par exemple lieu adéquat à Genève, après l’échec de la spécifique aux artistes. C’est un long com-
l’impact sur le prix des logements, ou des Maison de la danse à Lancy. D’une manière bat, il n’est pas encore gagné.
incompréhensions parfois avec des per- générale, il faut se rendre compte que Ge-
sonnes qui ne parlent pas forcément le nève rayonne par sa capacité à mobiliser sa De longs travaux sont nécessaires pour
français. Mais ces tensions doivent être diversité. Nos théâtres travaillent déjà avec voir sortir de terre les bâtiments qui
des incitations à créer du lien et à chercher des cinémas, nos musées avec des artistes!!: accueilleront la culture. Pour le bien global
des solutions ensemble. photographes, danseurs, danseuses, plas- de Genève ?
ticien.ne.s, ou simplement ensemble (Nuit
Genève, ville de culture au niveau des musées ou Journées des métiers d’art Oui, on ne construit pas une institution
international!!? par exemple)!!; et nos festivals de cinémas culturelle complexe du jour au lendemain.
(le GIFF, le FIFDH) sont largement recon- Mais je suis persuadé de la plus-value au
Oui, mais sans la valoriser suffisamment. nus au niveau international. C’est cette final. Regarde le nouveau Musée d’eth-
Genève a pu bénéficier d’une très riche et dynamique de travail en commun, de par- nographie, qui a pris 15 ans à voir le jour,
ancienne tradition culturelle, qui a privilé- tenariat, que j’encourage depuis mon arri- entre le refus populaire du projet initial et
gié la diversité. Nos musées et nos scènes vée à la tête du département de la culture son ouverture. Il a véritablement créé une
classique et lyrique ont pu compter sur un et du sport de la Ville, et qu’il faut impéra- nouvelle dynamique au niveau du quartier,
public international propre à notre ville, tivement renforcer. entre l’école et les galeries du quartier des
sans forcément chercher à aller plus loin. Bains, mais aussi au niveau international.
Les choses ont un peu changé aujourd’hui, La culture, les spectacles, ce sont Les deux ne doivent pas être opposés.
et il est plus que jamais nécessaire que les beaucoup d’artistes, du personnel qui
principales institutions s’appuient sur une travaillent au service de la population!? Beaucoup de villes au statut international
reconnaissance internationale, car cela (Londres, Paris, New York) recherchent
participe clairement au rayonnement de Exactement. Et c’est souvent méconnu. des financement pour la culture. Partena-
notre ville et donc à son attractivité touris- C’est d’ailleurs pour ça que j’ai tenu à créer riats public-privé, mécénat. Penses-tu que
tique. à Genève les Journées des métiers d’arts, ce soit un modèle à suivre ?
qui existent maintenant au niveau suisse.
Conseiller administratif en charge de la Une manière de montrer qu’il faut des Il y a tout lieu de travailler ensemble, de ne
culture et du sport, quelles ont été tes professionnel.le.s pour produire la «!magie!» pas exclure de possibles partenaires. Les
actions pour faire rayonner Genève!? d’un spectacle ou d’une exposition. Et donc, partenariats publics-privés ne sont néan-
également, des moyens publics. moins pas la solution à tout. Ils nécessitent
Genève a besoin d’un partenariat public d’être clairs, cadrés et transparents. Mon
fort pour soutenir ses principales institu- Le revers de la médaille, c’est du person- département a établi un code de déontolo-
tions. L’éclosion de la nouvelle Comédie a nel travaillant sur appel, des artistes sous gie en la matière. Il pourrait d’ailleurs s’ap-
été un travail de très longue haleine et je contrat temporaire. Que peux-tu nous pliquer ensuite pour toute la municipalité.
me réjouis de son ouverture, qui portera dire sur le statut des artistes et du person- Il est disponible sur le site de la Ville.
cette ambition et devrait soutenir l’en- nel en termes de logement, de santé, d’as-
semble de la scène théâtrale genevoise. surances sociales. Sont-ils et elles toutes
Les signes sont encourageants du côté et tous logé.e.s à la même enseigne!?
CARLO SOMMARUGA
7
LA GENÈVE
INTERNATIONALE
VUE DE BERNE
ENTRETIEN SYLVAIN THÉVOZ
Élu au Conseil national depuis en faveur des locataires. Enfin, je m’inves- à Berne pour que l’on ne brade pas la tra-
tis pour la solidarité internationale qui m’a dition d’ouverture de la Suisse, aujourd’hui
2003, siégeant dans les com- toujours tenu à cœur. fortement remise en cause. La Genève
missions de politique exté- internationale est un instrument essentiel
pour la coexistence pacifique des peuples.
rieure et de la politique de Que signifie pour toi la Genève
Pour cela, il faut un engagement fort de
internationale!?
sécurité, ayant présidé la com- la Confédération, mais également du Can-
mission de politique extérieure Les nombreux sièges et secrétariats
ton et de la Ville de Genève, ainsi que des
élu.e.s.
en 2014 et 2015, co-présidant d’institutions et d’organisations interna-
tionales, gouvernementales ou non gou-
les groupes interparlemen- vernementales et leurs 45’000 employés Quels sont les principaux atouts que
taires Solidarité internatio- internationaux font de Genève le haut Genève peut mettre en avant!?
nale et Genève internationale, lieu de la gouvernance mondiale. Genève
peut être considérée comme une petite La continuité historique, la stabilité, les
Carlo Sommaruga est notre ville à l’échelle globale, mais elle est un conditions naturelles et urbaines excep-
incontournable atout à Berne lieu unique de diplomatie, de négociation tionnelles qui font de Genève une réfé-
et d’émergence d’idées nouvelles. Grâce à rence mondiale. Mais cela nécessite un de-
pour la Genève internationale. cela, elle dispose d’une renommée extraor- voir d’exemplarité. On ne peut pas, à la fois,
Il a été plébiscité comme can- dinaire. Fenêtre internationale de la Suisse, être le pays des droits humains, de la coor-
didat au Conseil aux États le elle apporte diversité et richesse à notre dination migratoire, et avoir une politique
canton. extérieure qui louvoie avec ces valeurs. Il y
21 novembre par notre parti. Il a un devoir particulier d’exemplarité pour
nous éclaire dans cet entretien Est-ce que la chance de Genève d’abriter la Suisse et pour notre canton.
sur l’importance de la Genève cette diversité internationale est acquise
ou en péril du fait, par exemple, de la Quel est ton rôle, à Berne, pour défendre
internationale. concurrence à laquelle se livrent diverses cette Genève internationale!?
villes entre elles!?
Sylvain Thévoz : Comment te présenter, C’est à Berne que se décident les orienta-
Carlo!? Il n’y a rien d’acquis. La Genève interna- tions financières et l’attribution des cré-
tionale, dans sa diversité actuelle et sa dits. C’est à Berne que se construisent et
Carlo Sommaruga : Aujourd’hui j’ai trois profondeur de champ, est un espace qu’il se défont les axes de la politique étrangère.
engagements principaux!!: je suis un élu ge- faut s’engager à défendre et à dévelop- Il est donc vital d’avoir des parlementaires
nevois au Conseil national, je suis président per. D’autres pays et villes dans le monde fédéraux de tous cantons mobilisé.e.s pour
de Solidar Suisse, organisation d’entraide (Vienne, Nairobi, Paris, etc. ) mettent à la Genève internationale. Je me suis enga-
crée par les syndicats et le Parti socialiste disposition des moyens énormes pour atti- gé dans cette mobilisation. Je suis à l’ori-
et je préside également l’ASLOCA Suisse, rer les organisations internationales. Mais gine du crédit pluriannuel pour la Genève
qui compte 200’000 membres et 21 sec- plus encore que les infrastructures, j’ai une internationale ayant convaincu la majorité
tions cantonales. Ces trois engagements grande inquiétude sur l’érosion du multila- de mes collègues des deux Chambres de
importants expriment bien qui je suis. Je téralisme dont la Genève internationale est le voter. Dans le même esprit, j’ai fondé
m’engage pour la communauté où je vis, l’expression. Ce multilatéralisme doit être l’intergroupe interparlementaire «!Genève
au niveau politique. Je défends les classes défendu non seulement globalement, mais internationale!» que je co-préside avec
populaires et moyennes par mon travail aussi chez nous. Je me bats dans ce sens Karine Keller Sutter (PLR), Andreas Aebi
8
(UDC) et Elisabeth Schneider-Schneiter Comment évalues-tu le travail du Conseil ma motion sur l’interdiction des armes
(PDC). Il y a toujours des attaques, des éga- d’État genevois pour la valorisation de la nucléaires est pour moi emblématique. Je
rements, des dénis!!: il faut rester mobilisé Genève internationale à Berne!? suis capable de trouver des alliances poli-
pour les contrer. tiques dans tous les partis sur des sujets
Pendant longtemps, au sein du Conseil qui me tiennent à cœur. J’échange des
Comment perçois-tu l’opinion des d’État, il n’y a pas eu de vraie conscience du idées et je construis mes interventions en
Genevois.e.s concernant la Genève rôle du canton pour la Genève internatio- dialogue avec des collaborateurs et colla-
internationale!? nale. Il ne comprenait pas que les enjeux de boratrices de l’administration fédérale et
Genève passaient par une action à Berne. les acteurs et actrices concerné.e.s de la
Tant pour la Genève internationale que société civile. Je ferai de même au Conseil
Quand j’étais député au Grand Conseil ge-
pour d’autres sujets comme les transports des États pour l’ensemble des sujets. Pour
nevois, je me suis rendu compte du fossé
ferroviaires, la mobilité locale ou la péré- réussir, force de conviction, anticipation,
qu’il y avait entre la Genève internationale
quation financière, il faut être présent.e stratégie, dialogue et capacité de com-
et les citoyen.ne.s. J’ai toujours pensé qu’il
et intervenir à Berne. C’est là qu’il faut promis sont nécessaires. À Berne, je suis
fallait renforcer les liens entre les respon-
convaincre et créer des majorités. Quand quelqu’un de respecté, aussi parce que je
sables de la Genève internationale et les
j’avais déposé ma motion de soutien finan- respecte chaque adversaire politique. Je
décideur.e.s locaux politiques et écono-
cier pluriannuel à la Genève internationale fais toujours la différence entre l’idée poli-
miques, afin qu’ils et elles puissent servir
au Conseil national, le Conseil d’État avait tique et la personne qui la porte. D’ailleurs,
de relais vis-à-vis de la population. La Fon-
souri. Au final, j’ai obtenu une large majo- ma nomination à la candidature au Conseil
dation pour Genève, avec qui j’entretiens
rité et le Conseil fédéral a suivi. Engranger aux États m’a valu des encouragements de
d’excellents contacts, a fait un énorme tra-
des succès pour Genève, implique un tra- tous bords politiques. Je pense que l’on re-
vail. Les entités internationales ont aussi
vail d’anticipation à Berne et une bonne connaît en moi une voix forte et fiable pour
à expliquer leurs objectifs et à démontrer
coordination entre les élu.e.s fédéraux/ représenter le canton tout entier à Berne.
comment elles œuvrent pour le bien-être
ales et le Canton. C’est aussi dans cet es-
collectif dans le monde mais aussi à Ge-
prit de collaboration avec le Conseil d’État Quels sont les risques pour Genève de
nève. Les actions «!portes ouvertes!», le
que j’inscris ma candidature au Conseil des la politique actuelle menées par Ignazio
travail de réflexion mené par I’IHEID, l’im-
États. Cassis!? On a entendu ses déclarations
portante interface qu’offre l’Université de
contradictoires sur le Pacte pour la
Genève avec la Cité: toutes ces initiatives
migration. Ces violentes remises en
sont à encourager et à développer pour que Certaines affaires médiatiques récentes
question ont-elles un impact sur la Genève
les Genevois.e.s découvrent ces lieux et s’y ont défrayé la chronique. Ne crains-tu pas
internationale!?
familiarisent. que cela mette à mal l’image de Genève, en
Suisse et à l’international!?
Chaque conseiller fédéral et conseillère
Le regard des Genevois.es est très critique fédérale qui accède aux affaires étrangères
Les élu.e.s genevois.es, tant au niveau de la
sur certains privilèges des travailleurs et marque son passage. Ce fut le cas de Jo-
Ville que du Canton, ont un rôle important
travailleuses de la Genève internationale. seph Deiss, Micheline Calmy-Rey et Didier
à jouer dans le rayonnement de Genève à
Est-ce légitime!? Burkhalter. Avec des nuances, tous se sont
Berne et à l’international. La Genève inter-
néanmoins inscrits dans une continuité.
nationale dépasse l’affairisme et l’auto-
Il faut prendre garde aux clichés. Nombre Aujourd’hui, le conseiller fédéral Ignazio
promotion d’élu.e.s à l’étranger. Un pour-
d’employé.e.s internationaux/ales sont Cassis questionne les engagements de la
rissement lent des dysfonctionnements
même dans des situations précaires Suisse. Cela génère des tensions inutiles.
constatés en Ville de Genève et au gouver-
inacceptables. La critique des privilèges Il déstabilise non seulement ses proches
nement cantonal porterait certainement
s’adresse à quelques diplomates qui ne collaborateurs et collaboratrices, nos
atteinte à l’image de Genève. Il faut donc
respectent pas les règles et usages. Là, les diplomates, mais aussi l’image de notre
les régler rapidement et définir clairement
autorités doivent être fermes. Par ailleurs, pays. Nombre de communautés et de pays
le cadre de bonne gouvernance et de trans-
il y a la puissance financière des cadres comptent sur la Suisse, ses engagements
parence. Genève doit être exemplaire.
de multinationales. Elle exerce une pres- de longue date, sa fiabilité, sa vision mul-
sion importante sur les prix du logement, tilatérale progressiste. Or on entend tou-
un des problèmes majeurs des Genevois. Tu es perçu comme un militant très jours plus qu’Ignazio Cassis incarne une
es. Elle entraine aussi la saturation de la engagé. Tu l’as été dans la lutte contre neutralité passive, un repli de la politique
mobilité. La promotion de la Genève inter- l’apartheid, en faveur du monde du travail, étrangère Suisse avec à la clé un risque de
nationale impose de repenser le logement et enfin pour le droit au logement. Le réduction d’implication au niveau interna-
et les infrastructures, notamment de la travail parlementaire que tu décris est un tional. J’espère que c’est l’expression de
mobilité locale et internationale. La Genève travail de consensus. Comment concilies- tâtonnements initiaux et qu’il va se reposi-
internationale doit disposer de ces moyens tu lutte et consensus!? tionner. La Genève internationale souffri-
mais pas au détriment des besoins de la rait énormément d’une politique étrangère
population locale. Les avantages financiers, Je me sens porteur de l’esprit de Genève suisse trumpienne où la primauté de la dé-
directs ou indirects, doivent disparaître. qui mêle engagement pour les valeurs fon- fense d’un pré carré national l’emporte sur
Bientôt les avantages fiscaux des multi- damentales que sont les droits humains, le la coopération internationale.
nationales vont être réduits, de peu, mais droit humanitaire, le droit d’asile, la solida-
c’est un progrès. rité, le dialogue et création de consensus. Le
succès que j’ai eu au Conseil national avec
9
Quels sont aujourd’hui les défis de la Pas de découragement!? Le parti t’a désigné comme son candidat
Genève internationale, les risques et au Conseil des États le 21 novembre.
opportunités liés!? Bien au contraire. Je me suis engagé au Comment assumes-tu cette responsabi-
plan fédéral, car je suis convaincu de l’im- lité!?
Notre grand défi!!: comment capitaliser les portance des décisions qui se prennent à
nombreuses ressources et éléments d’ex- Berne pour les populations de Genève, de Je suis pleinement le candidat de Genève,
pertise et d’intelligence pour les mettre au Suisse, mais aussi d’ailleurs. Aujourd’hui, à par mon engagement initial dans les
service des défis futurs, qu’ils soient envi- Berne, la politique est devenue nettement syndicats (SIT), puis au sein de l’ASLOCA,
ronnementaux, sociaux, digitaux ou paci- plus réactionnaire qu’il y a quinze ans. par les contacts tissés à Genève au sein
fiques. Valoriser correctement ces savoirs, L’agression sociale est permanente, sans de la société civile et dans divers secteurs,
et les articuler. Notre université, de très tabou. Par exemple, le démantèlement des même économiques. Je suis un candidat
haut niveau, est un atout fort. Les marques prestations sociales des plus jeunes aux en phase avec la population genevoise. Mes
pour la Geneva 4.0 sont encore à dévelop- plus âgé.e.s, la hausse de l’âge de la retraite votes au Parlement fédéral recoupent ceux
per et il faudra non seulement agir très fi- et le refus de l’égalité de salaire entre des citoyen.ne.s du canton. Je suis aussi
nement sur la gouvernance internationale, femmes et hommes, la déconstruction à le candidat qui, aujourd’hui à Berne, porte
mais aussi s’accorder sur une politique in- petits pas de la politique de la santé par la le dossier de la Genève internationale.
térieure digitale forte. Tout peut très vite majorité de droite, l’autorisation de la dé- Je crois pouvoir représenter les intérêts
basculer dans le monde comme dans notre tention administrative d’enfants migrants, de Genève et des Genevois.es, par mon
pays. Mais nous avons tous les atouts en le non-respect de l’accord de Paris sur le expérience parlementaire et mon grand
main pour maintenir et développer une climat. Sans parler du frein à l’endette- réseau auprès de tous les acteurs de la
Genève qui soit l’espace de l’innovation in- ment et des investissements insuffisants Berne fédérale. Je m’inscris pleinement
tellectuelle dans la gouvernance mondiale. pour les infrastructures alors que la Confé- dans la voie tracée par Christiane Brunner
Cela doit être notre objectif visionnaire et dération annonce année après année un et Liliane Maury Pasquier.
je m’y engage. excédent financier. Ce contexte politique
me motive encore plus à défendre le siège Les défis de cette campagne à venir ?
Quel est le moteur de ton engagement!? socialiste genevois au Conseil des États.
Au niveau genevois!!: maintenir au Conseil
Je le dois d’une part à mes parents, à leurs Des figures d’inspiration, voire des des États une députation qui réponde aux
profondes convictions humanistes. Et exemples, pour mener ce combat!? attentes sociales et environnementales
d’autre part, à un long périple en Amérique des Genevois.es, comme c’est le cas avec
latine avant mes études universitaires. Oui. Des personnalités comme Ruth Drei- Liliane Maury Pasquier et Robert Cramer.
Cela a fondé mon engagement pour la fuss, pour son engagement social et pour C’est aussi la conquête par les Socialistes
communauté et pour la solidarité. Je un système d’assurance juste, Micheline ou la gauche du siège supplémentaire dont
suis toujours touché par l’injustice que Calmy-Rey, pour son courage politique et bénéficie le Canton de Genève au Conseil
je croise ou perçois. Dans le tram, je me sa lutte pour les droits humains et Jean national. De manière plus générale, c’est
dis!!: dans quelle condition financière vit Ziegler, pour sa capacité à dénoncer les faire barrage à toutes celles et ceux qui,
cette personne en face de moi!? A-t-elle mécanismes d’exploitation. J’ajouterais sans égard aux difficultés des classes po-
les ressources pour son loyer, ses primes, Gilles Petitpierre, mon ancien professeur, pulaires et moyennes, et au détriment du
pour offrir une alimentation saine à ses qui comme élu fédéral radical alliait à ses bien commun, font le jeu du repli identi-
enfants!? Une indignation qui renouvelle convictions la défense des institutions et taire, des puissances de l’argent et des in-
sans cesse mon énergie. la responsabilité écologique. Un profil qui térêts sectoriels.
n’existe pratiquement plus dans les rangs
bourgeois.
10 YVES FLÜCKIGER
VITRINE OU VECTEUR!?
ENTRETIEN GRÉGOIRE CARASSO
Yves Flückiger est titulaire de notre cité l’une des capitales mondiales système de la Genève internationale, avec
du multilatéralisme. Il s’est ainsi créé un les OI, les ONG mais aussi les multinatio-
d’une licence en économie écosystème d’une densité exceptionnelle nales présentes à Genève offre enfin à nos
et en sociologie ainsi que auquel les chercheuses et chercheurs de diplômé.e.s de nombreuses opportunités
l’Université de Genève participent plei- de travail tant sur le plan local que dans le
d’un doctorat en économie
nement, et ce dans tous les domaines. cadre d’une carrière internationale.
politique. Il a notamment En effet, la Genève internationale a ceci
été chercheur à Harvard et de particulier que ses acteurs traitent de Est-ce que cet environnement participe au
tous les défis posés par la mondialisation, fait que l’Université est considérée comme
Oxford avant d’être nommé la révolution numérique, les changements l’une des plus internationales au monde!?
professeur à l’Université climatiques et le développement durable,
et qui ont un impact réel sur la vie des Certainement, mais ce n’est pas le seul
de Genève où il a enseigné
populations. Ce cadre par essence multi- facteur explicatif. L’Université de Genève
l’économie du travail, disciplinaire et international, les contacts fait partie de réseaux internationaux pres-
l’organisation industrielle et le partage de compétences qu’il permet, tigieux, comme la LERU (League of Euro-
sont un incroyable atout pour notre insti- pean Research Universities) qui regroupe
et les finances publiques. tution, certainement l’un des éléments qui les 23 meilleures universités de recherche
Il y a dirigé de nombreux expliquent sa présence constante dans le du continent. Elle pilote des projets euro-
top 100 des universités mondial. En retour, péens ambitieux, comme AVENUE dans
projets pour le Fonds
nous mettons à disposition de la Genève le domaine des véhicules autonomes. Ses
national suisse (FNS) sur le internationale toute notre compétence projets de recherche sont intégrés dans
thème des migrations, des académique pour l’élaboration et la diffu- les projets phares de la Commission euro-
sion des savoirs. Par le biais notamment péenne, à l’image du Quantum Flagship qui
discriminations salariales, de du «!Geneva Science Policy Interface!» qui prévoit d’investir 1 milliard d’euros dans la
la ségrégation sexuelle, des a précisément pour vocation de permettre recherche en physique quantique. Elle est
la rencontre entre le monde académique et en outre un centre d’excellence reconnu
nouvelles formes d’emploi et
celui des OI, pour comprendre les enjeux sur la scène internationale dans des do-
de la pauvreté des enfants. Il a auxquels elles sont confrontées et appor- maines tels que la santé personnalisée, la
été membre de la Commission ter des solutions innovantes pour résoudre recherche d’exoplanètes ou les sciences du
ces défis. Cette stratégie s’inscrit parfai- vivant pour n’en citer que quelques-uns.
de la Concurrence, conseiller tement dans la volonté du rectorat d’être Tout cela crée un environnement extrême-
scientifique auprès du FNS et en interaction avec le monde qui entoure ment attractif qui explique pourquoi 40%
notre université et la collectivité qui la sou- de nos professeur.e.s et de nos étudiant.e.s
vice-recteur de l’Université
tient. sont étranger.e.s.
de Genève dès 2007. Recteur
de l’Université de Genève Comment concrètement cet Affirmer qu’ouverture égale excellence,
enrichissement mutuel bénéficie-t-il aux est-ce un raccourci!?
depuis 2015, il a vu son étudiant.e.s!?
mandat renouvelé à la tête de La recherche de pointe se fait sur la base
l’institution jusqu’en 2023. La qualité de l’enseignement dispensé est de fonds compétitifs qui retiennent les
un premier bénéfice très direct de l’inté- meilleur.e.s sur un bassin très large. Nous
Grégoire Carasso!!: Monsieur le Recteur, gration entre l’Université et la Genève avons vu entre 2014 et 2016 l’impact né-
que signifie pour l’Université de Genève le internationale. Nos liens nous permettent faste sur l’accès à ces fonds que peut avoir
fait de déployer ses missions aux côtés de aussi d’offrir des places de stage dans les un vote de rupture avec l’Europe ou avec
la Genève internationale!? OI, les ONG et les missions permanentes la communauté internationale. Il s’est chif-
à nos étudiantes et étudiants. Nous avons fré par une perte brute de 1,4 milliard de
également créé un statut d‘Academic Fel- francs pour la recherche suisse qui a été
Prof. Yves Flückiger!!!!:!!!La présence de
low qui permet d’associer à nos formations privée de la capacité de coordonner des
très nombreuses organisations interna-
continues notamment, mais aussi aux for- projets dans le cadre du programme Hori-
tionales, intergouvernementales et non
mations de base, les compétences et les zon 2020. Au-delà de la question financière,
gouvernementales (OI/ONG) à Genève fait
expertises présentes dans les OI. L’éco- l’ouverture est aussi garante de l’attrait deVous pouvez aussi lire
