Comment fonctionne une banque ? - Quarterly - BNK
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Quarterly PERSPECTIVES ON BANKING Comment fonctionne une banque ? Jean-Noël Tilman évoque le rôle des banques dans le cadre de la croissance Une initiative de BNP Paribas Fortis en collaboration avec Echo Connect
4 La caricature de la banque Quel est le rôle de la banque en 2014 ? Fondamentalement, il édito n’a pas changé : organiser un système permettant aux entre- prises et aux ménages de placer leurs économies et d’obtenir des crédits. Lors de la crise de 2008, les banques se sont re- trouvées dans l’impossibilité de jouer ce rôle essentiel. Leurs autres activités, comme le trading de produits bancaires américains complexes, les avaient mises en difficulté. Ces excès ont coûté cher à l’économie belge. Pourtant, certains produits de trading restent indispensables. Par exemple, pour exporter vers des pays où d’autres monnaies que l’euro ont cours, vous avez besoin de produits de trading, notamment pour amortir les fluctuations des cours de change. Une banque ne peut donc pas se contenter de ses deux tâches principales (collecte de dépôts et octroi de crédits). La Banque nationale de Belgique a fixé cette vision dans un certain nombre de mesures approuvées par le gouvernement. Il ne faut pas scinder les banques en banques d’affaires et en banques de détail, estime la Banque nationale. Il est préférable de limiter leur portefeuille de trading pour qu’elles se concentrent sur leur rôle essentiel. De plus, toutes les banques actives en Belgique, surtout en comparaison avec des pays comme la Grande-Bretagne, sont fondamentalement des banques de détail. Et c’est très bien comme cela. La Banque nationale sera également réformée en profondeur. À partir de novembre 2014, la Banque centrale européenne 14 deviendra l’organe de surveillance d’environ 130 organismes de crédit, qui représentent 85% de l’actif total des banques dans la zone euro. Pour mener cette mission, la BCE collaborera Le rôle avec les organes de surveillance nationaux. Nous sommes en des banques train de soumettre les banques, y compris les banques belges, à un examen approfondi de leur bilan ainsi qu’à un test de ré- sistance. Les différents crédits au bilan de la banque sont-ils valorisés correctement ? Comment la banque réagira-t-elle à un scénario de crise au cours des trois prochaines années ? Dispose-t-elle de fonds propres suffisants ? Toutes ces mesures liées aux fonds propres et aux liquidités vont dans la bonne direction. Nous avons tiré les enseignements 8 de la crise de 2008. Nous sommes plus à l’abri aussi grâce aux règles de Bâle III, alors qu’avant 2008, celles de Bâle II n’étaient pas assez strictes. || Le banquier du futur doit concilier le cœur et la raison Mathias Dewatripont, Directeur de la Banque nationale de Belgique et professeur à l’ULB B NQ B NQ est une plateforme de contenu de cross médias consacrée à la banque socialement responsable et moderne. Au travers de la diffusion d'informations, B NQ entend ouvrir le débat et le dialogue sur la base de récits remarquables, innovants et concrets. Ce magazine a été publié le 13/03/2014 www.lecho.be/bnq
6 La boîte à fusibles 16 de l’économie De l’épargne au crédit 18 Produits et services financiers en vitrine 20 De l’argent auquel on ne touche pas 17 22 L’ABC de la banque 24 Les banques doivent accompagner l’évolution de notre monde Ours Echo Connect offre aux entreprises, organisations et organismes publics l’accès au réseau de L’Echo, pour partager leur vision, CONNECT Une initiative de BNP Paribas Fortis en collaboration avec Echo Connect. Coordination : Veronique Soetaert leurs idées et leurs solutions avec la communauté de L’Echo. Lay-out : Björn De Greef, Christine Dubois Photo : Frank Toussaint E.R. : WalterTorfs, rue des Sols 2, 1000 Bruxelles Les partenaires impliqués sont responsables du contenu.
La caricature de la banque Roland Gillet : « Ce ne sont pas seulement les banques qui ont fait défaut au premier chef. Les particuliers et les indépendants qui ont trop emprunté sont également à la base de la crise financière. »
I Activités bancaires I Accusées d’être à la source de la crise financière, les banques sont- elles aussi responsables qu’on le prétend ? C’est oublier l’influence des ménages, qui ont été encouragés, par des avantages fiscaux, à surinvestir dans l’immobilier, rappelle Roland Gillet, professeur de finance à la Sorbonne (Paris) et à l’ULB (Solvay). Expert reconnu au niveau international, il nous propose une autre lecture du dossier. A l’heure actuelle, aux yeux de la société, les banques c’est la banqueroute. Or les banques espagnoles sont à la source de bien des maux. Elles ont créé la n’avaient pas reporté le risque sur d’autres crise financière et l’ont amplifiée. Elles ont pris des (contrairement aux banques américaines, qui risques inconsidérés. Et il a fallu les sauver avec de avaient pratiqué la titrisation). Et ce sont de l’argent public, ce qui a coûté cher à tout le monde. Pour em- toutes petites banques, les caisses locales pêcher les banques de renouveler ce mauvais scénario, il (Caixas), qui réalisaient la plupart des petits faudrait donc, d’une part, leur interdire l’activité d’investissement crédits hypothécaires et octroyaient des crédits pour compte propre et, d’autre part, réduire leur taille. En aux PME et aux collectivités locales, sur la base effet, si une petite banque tombe en faillite, elle ne déstabilisera de leurs dépôts, qui ont d’abord fait faillite. pas tout le système et les pouvoirs publics auront la capacité Lorsque le marché s’est grippé en Espagne, les de sauver les petits épargnants. défauts de crédit ont explosé pour les ménages, Cette approche, très répandue dans l’opinion, est cependant mais aussi pour les PME et les collectivités lo- caricaturale. Dans bien des cas ce ne sont pas les activités cales. Celles-ci ont rencontré des difficultés spéculatives des banques qui ont précipité leur chute, mais les économiques, amplifiées par la crise immobilière. innombrables crédits hypothécaires qu’elles avaient consentis Submergées par les trop nombreux défauts, à de bien paisibles ménages... les caisses locales en faillite ont été, pour l’es- L’exemple des Pays-Bas – pas un pays du Sud, donc ! – est ré- sentiel, regroupées dans la structure Bankia, vélateur. Beaucoup de ménages avaient investi dans l’immobilier où elles représentaient un besoin d’aide de au-delà du raisonnable, poussés par de puissants incitants plus de 30 milliards d’euros. Soit un véritable fiscaux. Quand, pour des raisons budgétaires, le gouvernement gouffre en comparaison à la plus grande banque, a réduit ces avantages, nombre d’entre eux n’ont plus pu Santander, qui n’aura sans doute pas besoin honorer leur emprunt. Si la classe moyenne avait surinvesti d’aide, car cette grande banque diversifiée sur dans la brique, c’est parce qu’elle pouvait déduire cet investis- le plan international peut compenser ses pertes sement non pas de ses revenus mais de ses impôts. Étranglés en Espagne par ses activités qui ne sont pas financièrement, trop de vendeurs se sont manifestés en même impactées par l’économie espagnole. temps, ce qui a fortement fait chuter les prix. Le marché im- Voilà pourquoi il est essentiel de rappeler que, mobilier s’est retourné avec une rare violence. La vente, sous pour les banques aussi, la diversification reste la contrainte, de nombreux biens à prix bradés n’a pu éponger la règle en matière de gestion des risques. À tous les crédits encore en cours, ce qui a plombé certains ne pas assimiler à de la spéculation. || bilans bancaires. Par Roland Gillet, professeur de finance à la Sorbonne (Paris) et à l’ULB (Solvay) L’exemple de l’Espagne Ce ne sont donc pas les banques qui ont fait défaut au premier chef, mais les particuliers et les indépendants qui s’étaient en- dettés au-delà de leurs possibilités. En Espagne, on a connu le même phénomène. Certaines banques avaient prêté à très long terme, parfois jusqu’à 35 ans, car le gouvernement espagnol voulait favoriser l’achat IL NE FAUT PAS plutôt que la location. Or, avec un prêt long, la part de capital remboursée les premières années est très faible. Pour peu que ASSIMILER DIVERSIFICATION le marché s’effondre, ce qui est arrivé, la banque qui saisit un bien immobilier revend un actif qui ne couvre pas le crédit de ET SPÉCULATION. départ. Et si un grand nombre d’emprunteurs font défaut, Roland Gillet I5I
Le banquier du futur doit concilier le cœur et la raison Plus que jamais, les banques doivent s’adapter à un monde en évolution rapide. En quoi cette évolution influe-t-elle sur leur fonctionnement ? À quoi ressemblera la banque du futur ? Cinq spécialistes confrontent leur vision. I8I
Pierre Berger (Baker & McKenzie), Marc De Ceuster (UA), Karel Lannoo (Centre for European Policy Studies), Max Jadot (BNP Paribas Fortis), Michel Vermaerke (Febelfin). L e monde bancaire connaît une évolution extrêmement transformer en crédits. Toutefois, les banques rapide. Les besoins des clients changent, la technologie proposent également un éventail équilibré de ouvre de nouvelles opportunités et la réglementation produits d’épargne et d’investissement, et sont subit de profonds bouleversements. L’impact cumulé impliquées dans l’infrastructure qui permet de ces facteurs est immense. Les clients veulent pouvoir choisir l’acheminement des paiements. C’est d’ailleurs la manière dont ils entretiennent leurs relations avec leur l’une de ces tâches essentielles qui subit un banquier. Ils ont tantôt besoin d’une discussion approfondie bouleversement : la technologie évolue très vite dans une agence, tantôt de pouvoir exécuter leurs opérations et les attentes des clients changent. Il faut éga- bancaires via leur ordinateur portable, leur tablette ou même lement nous interroger sur l’implication sociale leur smartphone. Ces nouveaux schémas mettent les banques du secteur. Les événements qui ont émaillé ces face à un énorme défi, tout en offrant l’opportunité de combiner vingt dernières années ont creusé un gouffre un meilleur service et des économies de coût. entre le secteur bancaire et la société. Il ne sera C’est l’un des constats tirés par les cinq experts que nous avons possible de le combler qu’en étant davantage à invités à confronter leur vision : Pierre Berger (partner, spécialiste l’écoute du client et en apportant une réponse banques chez Baker & McKenzie), Marc De Ceuster (professeur à ses nombreux besoins en matière de commu- à l’Université d’Anvers), Karel Lannoo (CEO du Centre for nication. Ainsi le secteur bancaire belge – et il European Policy Studies), Michel Vermaerke (administrateur est le seul en Europe dans ce cas – s’est-il délégué de la fédération des banques Febelfin) et Max Jadot engagé à ne plus diffuser de produits financiers (CEO BNP Paribas Fortis). trop complexes. Plusieurs actions de sensibilisation ont également été mises en œuvre concernant Quel est le rôle social du secteur bancaire ? Et quels défis la sécurité des opérations sur Internet. » devra-t-il relever pour arriver à le jouer pleinement ? Vermaerke : « Les banques remplissent une fonction extrêmement Jadot : « Nous sommes confrontés à trois défis importante dans le tissu économique. Une de leurs tâches es- majeurs. Tout d’abord, nous devons trouver un sentielles consiste à attirer les dépôts d’épargne et à les juste équilibre entre des banques très sûres, > I9I
Max Jadot > mais aussi pleinement capables de convertir phénomène est en plein essor dans d’autres pays. Les organismes les dépôts d’épargne en crédits. Vu la profusion financiers peuvent également profiter de ces évolutions pour de nouvelles lois et réglementations, cela n’est rapprocher le monde bancaire de l’univers des plus jeunes. » pas évident. En outre, les banques doivent ap- porter une réponse à l’évolution des besoins Jadot : « Les banques évoluent vers un modèle où le client des clients. S’ajoute à cela un défi de nature pourra communiquer avec sa banque par différents canaux. plus temporaire : les taux d’intérêt bas, qui af- Les clients sont plus que jamais au centre du processus : ils fecteront la rentabilité d’une fonction essentielle tiennent à choisir le canal par lequel ils communiquent avec des banques, à savoir la transformation de leur banquier au gré de leurs besoins à un moment spécifique. l’épargne en crédits, au cours des prochaines Ces cinq dernières années, les activités au guichet ont diminué années. Ces défis auront un impact énorme de 50 à 80%. En revanche, le self-banking, le contact par call- sur le secteur. Nous devons dès lors tâcher de center et, bien entendu, le PC banking ont énormément gagné légiférer de manière équilibrée et d’instaurer en importance. Le PC banking existe depuis douze ans et son un climat de sécurité dans lequel le client re- utilisation ne cesse de prendre de l’ampleur. Des applications viendrait au centre de nos préoccupations. » permettent même d’exécuter les opérations bancaires par smartphone ou sur tablette. En outre, nous sommes confrontés Quelle influence la révolution technologique à des entreprises du secteur technologique qui déploient des a-t-elle sur les banques et la manière dont activités bancaires – comme Google et Apple – ou au déve- nous effectuons nos opérations bancaires ? loppement de nouveaux moyens de paiement électronique Berger : « Pour ce qui est des banques en comme le bitcoin. Les banques sont moins familiarisées avec ligne, la Belgique a pris un peu de retard par cet univers, mais elles peuvent y trouver leur place. Et, à rapport à ses voisins. Aux Pays-Bas, par exemple, l’inverse, ces entreprises devront parvenir à s’adapter aux diffé- les parts de marché des banques en ligne sont rentes réglementations, ce qui ne sera pas évident non plus. » beaucoup plus élevées. Par ailleurs, les plate- formes mobiles sont également appelées à ga- Quel sera le rôle des agences dans un monde où la tech- gner en importance. Dans ce domaine, la Bel- nologie ne cesser de gagner en importance ? gique peut même jouer un rôle de pionnier : Vermaerke : « Les opérations courantes passeront de plus en dans l’industrie du paiement, certains déve- plus par des plateformes numériques accessibles en permanence. loppements récents sont assez innovants dans L’agence aura toujours sa place, mais il s’agira alors d’une le contexte européen. L’interaction avec les ré- place de valeur ajoutée et de services. » seaux sociaux est également destinée à s’in- tensifier. Nous n’en percevons pas encore réel- Jadot : « L’agence continuera à jouer un rôle important, mais lement les conséquences en Belgique, mais ce parallèle à tous les autres canaux nécessaires au client, ce qui suppose de nombreuses possibilités. À court terme, un colla- borateur d’agence pourra appeler un spécialiste sur sa tablette pour discuter par vidéoconférence d’un prêt hypothécaire ou d’investissements avec le client. Et, le soir, ce même client pourra continuer cette discussion avec son conseiller sur son I 10 I
I Activités bancaires I IL FAUT ÊTRE CONSCIENT QUE L’ÉLIMINATION DES RISQUES A UN PRIX. Marc De Ceuster Marc De Ceuster, Université d’Anvers ordinateur ou sa tablette. Voilà comment la technologie alliera financements qui ne passent pas par les banques, amélioration du service et réduction des coûts. » dans le but de protéger les investisseurs. En outre, il est encore plus difficile, dorénavant, Vermaerke : « Cette évolution exigera un sérieux effort en de financer des entreprises. Pour moi, cela matière de formation du personnel. Celui-ci doit être préparé reste l’un des grands défis à venir. » à cette évolution numérique et être capable d’entretenir au- trement le contact avec les clients. Le secteur investit déjà Le financement bancaire traditionnel reste plus de 3% de sa masse salariale en formations. Il compte important. N’évoluons-nous pas vers un modèle parmi les leaders européens dans ce domaine. Et il sera où les formes alternatives de financement nécessaire de poursuivre ces efforts à l’avenir. » gagnent du terrain ? De Ceuster : « Je ne peux pas imaginer la dispa- Les banques sont aussi confrontées à une foule de nouvelles rition des banques. Un intermédiaire sera toujours lois et règles. Quelles en sont les conséquences ? nécessaire entre ceux qui ont besoin d’argent et De Ceuster : « En matière de réglementation, on observe deux ceux qui peuvent le mettre à leur disposition. tendances très contradictoires. L’Europe nous a encouragés à Bien sûr, il est possible de les mettre en contact exploiter la libre circulation des biens et des services, mais direct sur les marchés financiers, mais uniquement depuis le déclenchement de la crise, des tendances protec- si le bailleur de fonds est capable de faire une tionnistes se manifestent plus ouvertement. Les banques estimation précise des risques. Or c’est cette doivent céder leurs activités étrangères et se replier sur leur capacité qui fait l’originalité des banques et marché national tout en ayant l’obligation de renforcer leurs c’est aussi pourquoi elles jouent un rôle fonda- réserves de capitaux. C’est une exigence parfaitement légitime, mental. » mais tout le monde ne réalise pas qu’elle s’accompagne de restrictions : un renforcement des fonds propres pèsera né- Berger : « Les banques assureront encore une cessairement sur les octrois de crédits et la rentabilité. C’est grande partie des besoins de financement, mais un principe économique incontestable. C’est précisément la je ne crois pas qu’elles continueront à tout raison pour laquelle il est important de trouver le juste équilibre. prendre à leur charge comme auparavant. La Il faut être conscient que l’élimination des risques a un prix. » réglementation contraindra les banques à alléger leurs dettes et à renforcer leurs fonds propres. Lannoo : « Les régulateurs ont une attitude contradictoire : ils Cela aura sans doute un impact sur les finance- imposent de plus en plus de règles, mais, simultanément, at- ments qui pourront être accordés et accroîtra le tendent des banques qu’elles fournissent davantage de capitaux. besoin d’alternatives. Dans ce domaine, les autres C’est naturellement impossible. Au niveau européen, le durcis- acteurs, comme les fournisseurs de capital- sement des règles a réduit les octrois de crédits, or la majeure risque, les assureurs, les fonds de pension ou les partie du financement des entreprises passe par les banques. fonds à effet de levier auront un rôle à jouer. » > Aux États-Unis, les entreprises font davantage appel aux marchés des capitaux, et c’est également une des raisons pour lesquelles les États-Unis sont sortis si rapidement de la crise. De plus, l’Europe impose des règles plus strictes aux I 11 I
> Quel est le rôle des pouvoirs publics dans le secteur bancaire ? Comment le voyez-vous évoluer ? Jadot : « L’État doit créer un climat de confiance, garantir la sécurité juridique et veiller à ce que l’ensemble des banques soient soumises aux mêmes règles. Si l’État joue bien ces différents rôles, il aura une énorme valeur pour le secteur financier. Le passé l’a démontré : en pleine crise, l’État a tout mis en œuvre pour préserver la confiance dans le secteur bancaire. Nous devons lui en être reconnaissants. Ceci dit, avec les nouvelles réglementations, nous traversons actuellement une phase de turbulences qui s’accompagne d’incertitudes. » Berger : « Un petit pays comme la Belgique doit surtout suivre la politique européenne et transposer dans les délais les mesures imposées, si possible sans ajouter trop de règles propres. La Pierre Berger Belgique a souvent beaucoup de retard dans la transposition de la réglementation européenne, mais en matière bancaire, nous sommes en avance sur le reste de l’Europe pour l’instant. Pourtant, nous avons tout intérêt à appliquer les mêmes règles que sur le reste du continent. L’État devrait également stimuler certaines activités au lieu de se contenter d’imposer des restrictions au secteur bancaire. Je crois plus au modèle luxem- bourgeois où l’État crée un climat propice au fonctionnement efficace des banques. » Lannoo : « C’est tout de même une évolution marquante : dans le contexte européen, notre pays joue de plus en plus souvent cavalier seul. Les autorités européennes sont intervenues mas- sivement et l’opération a coûté 14,5% du PNB européen. Nous devons revenir en arrière. De ce fait, les autorités européennes exerceront une surveillance beaucoup plus distanciée que les superviseurs nationaux. Je m'attends dès lors à des regains de tension entre la BCE et les organes de surveillances nationaux. Car ce sont finalement les autorités nationales qui devront im- plémenter les règles. » Comment voyez-vous l’avenir des banques ? Karel Lannoo De Ceuster : « Le client doit revenir au centre de leurs préoccu- pations. Je pense que les banquiers ont un peu perdu de vue ce principe. Un conseil de qualité sera toujours apprécié. Peut-être pas pour les opérations quotidiennes, mais dans les phases cru- ciales de la vie : mariage, achat d’une maison ou ouverture d’un plan de retraite. Là, les banques ont un rôle important à jouer. Le contact humain ne disparaîtra pas, mais les banques devront mieux communiquer leurs connaissances. » Berger : « Il y aura beaucoup moins d’agences, mais elles offriront plus de qualité. Je présume que la banque du futur opérera dans une société sans cash et qu’elle se concentrera plus encore sur les canaux en ligne et mobiles. Dans cet envi- ronnement, les banques devront également évoluer vers un service plus simple, plus rapide et plus transparent. » Vermaerke : « Je ne pense pas qu’il n’y a qu’un seul modèle de banque du futur, mais plusieurs. Et quel sera le modèle de banquier du futur ? Finalement, tout tourne autour de l’argent et des personnes. L’argent est un sujet sérieux, qui exige de la raison, mais également de la sensibilité. J’espère que le banquier Michel Vermaerke du futur saura concilier le cœur et la raison. » || I 12 I
I Activités bancaires I L’État doit contribuer à la confiance dans le système financier Les pouvoirs publics ont leur mot à dire dans le débat sur le rôle des banques. Explications par le ministre des Finances, Koen Geens. Koen Geens Quel rôle économique et social les banques doivent-elles européen devra également se montrer strict, mais jouer, selon vous ? Comment peuvent-elles l’améliorer ? juste, sous la direction de Danièle Nouy (la nouvelle Geens : « Les banques doivent accorder des crédits à l’économie présidente de la BCE – NDLR). J’ai bon espoir. » réelle. Pour ce faire, un cadre législatif et prudentiel adéquat est nécessaire. Un cadre qui donne confiance aux épargnants et aux Comment voyez-vous évoluer les banques ? investisseurs pour permettre aux banques de continuer à prêter de Auront-elles un autre rôle ou d’autres tâches l’argent. Pour s'adapter aux réglementations européennes actuelles d’ici dix à quinze ans ? et à venir, les banques doivent opérer une profonde réforme orga- Geens : « Je me garderai de faire des pronostics. nisationnelle. J’en suis conscient. Cela dit, si elles se conforment à la Il n’y a pas si longtemps, nous rêvions de la Big lettre et à l’esprit de la loi relative à la maîtrise des risques, elles Belgian Bank. Aujourd’hui, nous sommes plus auront accompli un grand pas dans la bonne direction. » modestes. De nombreuses banques se sont retirées dans leurs frontières nationales. Je ne Quel regard portez-vous sur le rôle des pouvoirs publics dans pense pas que cela soit une fatalité. Avec le le secteur bancaire ? nouvel arsenal européen de surveillance et de Geens : « Par la réglementation, les pouvoirs publics contribuent à résolutions, avec la création de l’union bancaire, augmenter la confiance dans le système financier. J’ai bien dit le terrain de jeu réglementaire sera beaucoup « contribuent ». La confiance revient, c’est de plus en plus visible. plus robuste. Le marché interne des services fi- Le chemin que nous avons parcouru n’est pas à sous-estimer. nanciers me semble bien né. Il manque encore Pensez à l’union bancaire : à partir de novembre 2014, la BCE de visibilité, mais cela viendra. Je suis convaincu exercera directement la surveillance sur les plus grandes banques que, parallèlement aux banques d’épargne tradi- européennes. Pensez également aux nouvelles normes de capitaux tionnelles, il y a un marché pour les banques uni- imposées par Bâle III, introduites en Belgique avec la nouvelle loi verselles transnationales tant que nous n’aurons sur les banques. Ces quelques étapes dans un long processus de pas perdu de vue l’importance d’une bonne maî- régulation commencent à porter leurs fruits. La confiance dans le trise des risques. » || système financier européen augmente sensiblement. Il se peut que nous n’ayons pas été assez loin. Regardons du côté des États- Unis : le gouvernement américain est intervenu très rapidement quand la crise bancaire a éclaté. Je mets mes espoirs dans l’analyse des bilans des banques, entamée par la BCE, et les tests de UN CADRE LÉGISLATIF résistance qui seront effectués. Le nouvel organe de surveillance ADÉQUAT EST NÉCESSAIRE. I 13 I
I Activités bancaires I I 14 I
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I Activités bancaires I De l’épargne au crédit Les banques sont le lubrifiant de l’économie, dit-on parfois, parce qu’avec l’épargne de leurs clients, elles accordent des crédits à la fois aux ménages et aux entreprises. Comment procèdent-elles ? S ouvent, les acteurs économiques ont besoin de capitaux bancaires internationales de plus de plus en pour certains investissements. Pensez aux ménages plus strictes (voir encadré). Le risque de liquidité qui souhaitent acheter une maison ou aux entreprises n’est pas le seul défi auquel est confrontée une qui investissent dans un nouveau parc de machines. banque qui accorde des prêts. L’emprunteur S’ils ne disposent pas de réserves suffisantes, ils peuvent peut faire faillite ou être dans l’incapacité d’ho- solliciter leur banque pour un emprunt. Dans un sens, celle-ci norer son crédit, auquel cas la banque ne sera fait office d’intermédiaire entre ceux qui ont besoin de capitaux pas en mesure de récupérer la totalité du mon- et ceux qui disposent de ressources financières excédentaires. tant prêté. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle Les opérateurs qui peuvent se passer d’une partie de leur pa- les banques accordent tant d’attention à l’exa- trimoine dans l’immédiat peuvent la confier à la banque – sur men d’un dossier de crédit : elles veulent être un compte à vue, un compte d’épargne, un compte à terme ou sûres de ne pas accorder de prêt à des ménages sous la forme d’un bon de caisse. En fait, les épargnants ou à des entreprises qui présentent un risque prêtent une partie de leur patrimoine à leur banque, en de défaut de paiement trop élevé. échange d’intérêts. La banque ne pouvant pas faire grand- En outre, la banque doit tenter de garder une chose de l’épargne d’un seul épargnant, elle regroupe tous les marge d’intérêt positive. Cette marge correspond dépôts afin d’accorder des crédits plus importants, avec à la différence entre les revenus qu’elle perçoit (in- lesquels elle génère à son tour des revenus d’intérêt. térêts prélevés sur les crédits) et les coûts qu’elle Cela a l’air très simple, mais cette activité confronte les orga- engage (intérêts accordés sur les dépôts). Le sous- nismes financiers à un énorme défi. Les dépôts d’épargne sont cripteur d’un crédit peut opter pour un taux fixe, exigibles à relativement court terme : les épargnants peuvent pour rembourser la même somme pendant toute retirer leur épargne à tout moment et rares sont ceux qui pré- la durée du crédit. Et la banque ne pourra pas ré- fèrent des dépôts à terme à plus de dix ans. En revanche, les percuter sur son emprunteur à taux fixe une éven- prêts sont souvent assortis d’échéances beaucoup plus longues. tuelle variation des taux sur les dépôts. Sa marge Autrement dit, la banque finance des crédits à long ou moyen d’intérêt peut même devenir négative, ce qui l’obli- terme avec des dépôts à court terme. Pour compenser le gera à essuyer une perte. risque de liquidité, les banques doivent disposer de réserves Les banques limitent autant que possible les suffisamment importantes, de manière à ce que les crédits oc- risques, par exemple en veillant à disposer de troyés ne soient pas compromis par les retraits des épargnants. fonds propres suffisants et d’une marge de liquidité Elles y sont également contraintes par des réglementations assez élevée. Elles peuvent se couvrir contre ces risques à l’aide de produits financiers complexes, comme un swap de taux d’intérêt, qui leur permet de transformer, moyennant des frais définis, un taux fixe en un taux variable, et d’éliminer ainsi le risque de taux. || I 16 I
ALTERNATIVES AU FINANCEMENT BANCAIRE Les banques ne sont pas la seule source de financement pour les entreprises. Si ses besoins de capitaux ne sont pas trop importants, le chef d’entre- prise peut d’abord solliciter son environnement proche. Des business angels peuvent égale- ment lui fournir des fonds. Ceux- ci sont généralement des Les ménages et les entre- gérants ou anciens gérants prises financent leurs activi- d’entreprises, qui investissent tés avec l’épargne déposée dans des sociétés prometteuses dans les banques. © Hollandse Hoogte © Thomas De Boever qui démarrent leur activité ou affichent une croissance sensi- ble. Les investisseurs privés peuvent également fournir aux 4 règles pour un entreprises les capitaux dont elles ont besoin. Il peut s’agir de fonds de capital-risque ou de hedge funds qui, en tant qu’ac- tionnaires, s’introduisent égale- système bancaire stable ment dans le cockpit de l’entre- prise. Pour les grandes entre- prises, la Bourse est aussi une source de capitaux envisagea- ble. Enfin, le crowd funding En réaction à la crise bancaire de 2008, le limité. Par le passé, la taille des banques n’était consiste à proposer directement Comité de Bâle a élaboré de nouvelles directives soumise à aucune restriction. Avec les nouvelles un projet à des investisseurs pour le secteur bancaire. Depuis sa création, règles, ce n’est plus le cas. C’est la raison pour particuliers par le biais des c’est la troisième fois que la fédération des or- laquelle de nombreuses banques cèdent des médias sociaux ou d’autres pla- ganes de supervision du secteur bancaire activités qui ne relèvent pas de leur cœur de teformes Internet. Cette nouvelle élabore une nouvelle série de règles, connues métier. source de financement n’est pas sous le nom de Bâle III. Bien que ces directives encore très répandue dans 3 doivent encore être transposées dans la légis- Bâle III obligera les banques à constituer notre pays. lation européenne, les principes sont d’ores et des réserves de liquidités suffisamment déjà fixés. La réglementation devrait être in- élevées. Elles devront notamment détenir assez Vous trouverez de plus amples troduite en plusieurs étapes jusqu’en 2019. d’actifs liquides (cash ou actifs négociables sur informations sur les crédits aux le marché) pour résister pendant trente jours à entreprises sur bnq.lecho.be. 1 Sous Bâle III, le ratio de capital doit at- une crise qui affecterait leur cash-flow. L’objectif teindre au moins 9%, voire plus pour les de cette règle est d’éviter qu’elles soient mises « banques systémiques », c’est-à-dire les banques en difficulté si elles sont privées de l’accès aux dont la faillite pourrait gravement perturber l’en- liquidités sur le marché interbancaire. semble du système financier et l’économie réelle. Le ratio de capital représente le rapport entre 4 les fonds propres d’une banque et ses actifs, En 2018, le comité de Bâle imposera aux pondérés en fonction des risques. Un ratio de banques un net stable funding ratio. Ce- capital plus élevé obligera les banques à constituer lui-ci détermine la mesure dans laquelle les ac- des réserves de capitaux plus importantes pour tivités bancaires doivent être couvertes par des limiter les risques. financements disponibles et stables. L’objectif est de limiter le risque qu’engendre l’utilisation 2 Le rapport entre le capital d’une banque de dépôts à court terme pour fournir des crédits et la taille de son bilan (le leverage) sera à moyen ou long terme. I 17 I
I Activités bancaires I De l’argent auquel on ne touche pas 23 décembre 2013, 16 heures. Le shopping de Noël bat son plein. C’est précisément à ce moment-là que les terminaux de paiement Bancontact tombent en panne pendant deux heures. Plus de deux millions de transactions ne peuvent être effectuées et les commerçants voient filer plus de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires. T elle est la face obscure du traitement électronique qu’intermédiaire, la banque veille à ce que les des paiements. Contrairement à une transaction tra- capitaux excédentaires des uns soient dirigés ditionnelle en cash – un service ou un bien en échange vers les autres, qui souhaitent en faire quelque d’argent comptant –, il faut pouvoir compter sur un chose. Si l’objectif est simple, la tâche est émi- support technologique fiable lorsque vous utilisez de la nemment compliquée. Recevoir des dépôts et monnaie scripturale intangible. Cette confiance est méritée accorder des crédits est une chose. Gérer les dans 99,9% des cas. Mais 99,9%, ce n’est pas 100%. Pas une flux financiers gigantesques qui en découlent, semaine ne passe sans qu’on évoque la défaillance d’un de et vers les particuliers, entreprises, pouvoirs système de paiement ou un vol d’informations bancaires dans publics et autres banques, est une autre paire le cyberespace financier. Admettons-le, les défaillances élec- de manches. Dès lors, la gestion de ces flux fi- troniques sont exceptionnelles. Et elles sont la seule part nanciers est une des tâches cruciales des d’ombre d’un système qui présente par ailleurs de nombreux banques. Une tâche dont l’ampleur s’est encore avantages. En effet, le paiement électronique complique consi- accrue ces dernières années. Car il ne s’agit dérablement le vol et la fraude, car le monde électronique est pas uniquement d’alimenter un terminal en un univers ouvert et contrôlé. Et surtout un univers pratique. billets, ou d’accepter une carte de crédit au Confortablement installés dans notre fauteuil, nous ne craignons restaurant. Proton ? Puce de GSM ? Sites web ? plus de perdre des billets, nous faisons des achats et des Vous payez où, quand et comme vous le sou- ventes où et quand nous le voulons. Sans nous soucier des haitez, à l'aide de vos revenus, virés automati- mécanismes complexes qui sous-tendent cette amélioration quement sur votre compte. de notre confort financier. Aujourd’hui, la Belgique compte 14 millions de Ce confort nous est fourni par la banque. Le cœur d’activité cartes de débit et 4 millions de cartes de crédit. de chaque banque est clair : fournir des services. En tant C’est environ deux fois plus qu’en 1995. L’an dernier, les Belges ont retiré environ 40 milliards d’euros des distributeurs automatiques du pays, deux fois plus qu’en 2000. Et plus de 10 milliards LE TRAITEMENT ÉLECTRO- d’euros à l’étranger, deux fois plus qu’en 2010. NIQUE DES PAIEMENTS Le PC banking connaît une croissance expo- nentielle, comme les achats en ligne. Les chèques DEVIENT UN RÉSEAU GÉANT disparaissent. Le cash aussi. Le traitement élec- tronique des paiements se métamorphose de DE BITS ET D'OCTETS. plus en plus en un gigantesque réseau de bits et d’octets.|| I 18 I
I Activités bancaires I Swift et SEPA La libre circulation est inscrite dans les textes fondateurs européens. Et à raison : la fluidité des paiements constitue l’un des piliers d’un commerce international prospère, qui, à son tour, est une condition es- sentielle à une économie saine et à l’accroissement de la richesse. Comment la libre circulation des paiements est-elle organisée ? Comment éviter les erreurs et la fraude ? Quand il y a de l’argent en jeu, la situation devient rapidement délicate, d’autant plus que les montants sont considérables. Chaque transaction et chaque partie prenante doit pouvoir être identifiée de manière univoque. Cette identification passe par le code IBAN (International Bank Account Number) pour les comptes personnels et le code BIC (Bank Identifier Code) pour l’organisme financier. Grâce à ces codes, chaque compte dans chaque pays a une adresse unique, ce qui facilite le suivi et le contrôle. Ce trafic passe par une série d’institutions spécialisées. La Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication (SWIFT), basée à La Hulpe, est de loin la plus importante. SWIFT est la propriété de plus de 10 000 organismes financiers dans 214 pays, dont toutes les banques importantes, également parties prenantes. Rien qu’en Belgique, on en dénombre 104. Grâce au réseau de SWIFT, ces organismes s’envoient des informations concernant les paiements. En Belgique, environ 1,5 million de messages sont échangés par jour. SWIFT assure ainsi un rôle essentiel dans le trafic des paiements transfrontaliers. Toutefois, elle n'est pas seule dans ce domaine. Target2 – Trans-European Automated Real-Time Gross Settlement Express Transfer – est une plateforme paneuropéenne qui assure d’importants transferts libellés en euros et le règlement des opérations de la Banque centrale européenne. La circulation monétaire est régie par les autorités européennes, par le biais de la SEPA (Single Euro Payments Area). Depuis le 1er février 2014, tous les virements et domiciliations des pays européens se font de la même manière, par le biais d’une grande infrastructure, avec un seul type de formulaire de virement et une seule législation européenne. L’Europe est devenue une zone de paiement unique, où les paiements en euros sont exécutés partout de manière identique. Pour le plus grand bénéfice des entreprises. LA CONCURRENCE EST LÀ Aujourd’hui, pièces et billets sont toujours en circulation ; en 2020, ce ne sera peut-être plus le cas. Nous pouvons déjà effectuer une foule de paiements à l’aide d’un smartphone ; en 2020, ce sera sans doute notre seul porte-monnaie. Le bitcoin est en plein essor ; en 2020, une devise virtuelle sera peut-être aussi importante que l’euro ou le dollar. Le cash existera-t-il encore en 2020, trois générations après le lancement de la carte de crédit, en 1958 ? Qui gérera le trafic des paiements ? Les banques sauront-elles résister aux géants de la technologie comme Google ? eBay est déjà propriétaire de PayPal, et d’au- tres entreprises informatiques sont en quête d’une licence ban- caire – quand elles n’en détiennent pas déjà une. De l’autre côté de la chaîne, les opérateurs téléphoniques et les supermar- chés se trouvent exactement là où se font la plupart des paie- ments. Les banques semblent peu à peu évincées du centre de la chaîne des paiements. Qu’elles s’accrochent ! © Shutterstock I 19 I
I Activités bancaires I Produits et services financiers en vitrine Cela fait longtemps que vous ne vous La prospérité économique aidant, la distinction entre les deux types de banques s’est peu à peu estompée. Les ménages ont rendez plus chez votre banquier uniquement beaucoup plus de moyens financiers qu’il y a cinquante ans, et pour vos produits d’épargne et votre prêt ils attendent plus de leur banque qu’un simple assortiment de hypothécaire. Les banques proposent une comptes d’épargne et de prêts hypothécaires. De ce fait, les gamme de plus en plus vaste de produits banques d’affaires répondent également aux besoins d’inves- et services financiers, dans laquelle une tissement des ménages, alors que les banques d’épargne clas- siques pénètrent le marché des services aux entreprises. Cette clientèle aussi large que possible doit évolution a finalement donné naissance à des organismes fi- trouver chaussure à son pied. nanciers actifs sur les différents marchés, dont certains sont même devenus des bancassureurs intégrés. Ces derniers ont également, dans leur catalogue, des produits d’assurance : E des assurances incendie ou auto aux assurances-vie. n Europe, les organismes qui ne pro- posent que des services de banque d’épargne ou de banque d’affaires sont Acteurs de niche et en voie de disparition. De nombreuses banques universelles institutions financières sont devenues des banques Aujourd’hui, 104 banques sont enregistrées auprès de Febelfin, universelles, au point que certains les considèrent la fédération du secteur bancaire belge. Parmi elles, de petites comme de véritables supermarchés financiers, et de grandes banques, des banques de niche, des banques où une clientèle la plus large possible peut s’ap- d’épargne et des banques universelles, chacune proposant provisionner en produits et services financiers produits et services spécifiques. Ces organismes vendent les plus divers. Il y a cinquante ans, il en était des produits d’épargne et de placement, accordent des tout autrement. Les banques d’épargne se crédits, dispensent des conseils lors d’introductions en bourse concentraient sur les ménages. Elles attiraient et de placements privés, organisent des mécanismes de cou- les dépôts qu’elles utilisaient ensuite pour accorder verture contre les risques de taux ou de change, financent des prêts hypothécaires. Les banques d’affaires des activités d’exportation. Ces dernières activités sont typi- déployaient leurs activités de l’autre côté du quement le terrain d’action des banques d’affaires ou des spectre. Elles s’adressaient exclusivement aux départements « Corporate & Commercial Banking ». entreprises, qui avaient besoin de produits et Les produits d’investissement sont proposés par des services plus spécialisés. départements de type « Investment Management » ou I 20 I
I Activités bancaires I MiFID protège les investisseurs Les banques qui commercialisent des produits financiers sont soumises à des règles. Au ni- veau européen, on trouve notamment la MiFID, acronyme de Markets in Financial In- struments Directive. Cette directive euro- péenne, entrée en vigueur début 2007, a pour mission de protéger plus efficacement les investisseurs. Depuis, les banques ne peu- vent vendre certains produits financiers que si elles disposent d’un profil de risque détaillé du client. Ce profil de risque est défini à l’aide d’un questionnaire, dans lequel le client identifie les risques qu’il est disposé à prendre et communique son expérience en matière de produits financiers. La MiFID comporte « Asset Management ». En gestion de patrimoine individuelle, aussi de nombreuses obligations d’information un portefeuille de placements est confié à un spécialiste. Gé- pour les banques, qui doivent garantir que néralement, c’est le domaine du private banking, un service l’investisseur prend ses décisions sur base réservé aux clients les plus aisés. En gestion de patrimoine d’informations justes. La directive prévoit collective, les investisseurs peuvent souscrire à de nombreux aussi l’obligation pour les banques d’informer fonds de placement. Ici, on distinguera les architectures fermées les clients des possibles conflits d’intérêts, et des architectures ouvertes. Dans le premier cas, les banques les contraint à traiter de manière optimale disposent de leurs propres gestionnaires de fonds et proposent les ordres d’achat et de vente de produits de aux investisseurs leurs fonds « maison ». Dans le cas de l’ar- placement. Pour les banques de détail, cela chitecture ouverte, les fonds de placement d’autres gestionnaires signifie obtenir le prix le plus bas possible, de fonds sont disponibles. De nombreuses banques offrent moyennant des frais d’exécution les plus bas actuellement une combinaison des deux modèles. || possible. Les produits de placement sont donc soumis à des règles strictes. C’est aussi le cas de produits plus simples, comme le compte épargne. L’arrêté royal du 18 juin 2013 impose LE MODÈLE DE DISTRIBUTION, aux organismes de crédit des obligations DU NORD AU SUD d’information lorsqu’ils commercialisent des comptes d’épargne réglementés. Ainsi l’épar- En Europe, on distingue deux modèles de distribution dans gnant doit-il notamment pouvoir consulter le secteur bancaire. Dans le premier, l’accent est surtout mis une fiche d’information standardisée avec sur les opérations électroniques. Les agences étant moins des renseignements essentiels. Ce document nombreuses, les clients assurent eux-mêmes les tâches ban- doit être approuvé par la FSMA, l’organe de caires et ont accès aux produits financiers sur Internet. C’est supervision du secteur financier. On peut y la situation qui prédomine dans le nord du continent, de la ajouter l’arrêté royal du 27 septembre 2012, Scandinavie aux Pays-Bas. Dans le sud de l’Europe, les qui fixe le fonctionnement du compte d’épar- réseaux d’agences sont beaucoup plus étendus. La gne réglementé. La loi détermine le paiement Belgique se situe entre les deux modèles. On y trouve une du taux de base et de la prime de fidélité. offre considérable de canaux Internet, mais aussi un vaste Elle limite également les conditions que les réseau d’agences. Ce réseau est cependant de plus en plus banques peuvent imposer à leurs clients pour menacé en raison de son coût. bénéficier d’un taux donné. I 21 I
I Activités bancaires I L’ABC de la banque Lorsqu’on s’intéresse au monde de la banque, on se voit rapidement confronté à un dédale de termes complexes. Tour d’horizon des principales notions à connaître. Banque centrale Les Banques centrales veillent à la stabilité du système financier. Dans certains pays, elles assurent également la supervision des banques individuelles. Les Banques centrales déterminent la politique de taux d’un pays et d’une région, et peuvent mettre de la monnaie en circulation. Dans la zone euro, ces activités sont exercées par la Banque centrale européenne. L’objectif principal de la BCE n’est pas de piloter la croissance économique, mais de maintenir FSMA Euro- l’inflation « sous, mais à proximité de 2% ». La Financial Services and Markets La « Federal Reserve » est la Banque Authority (FSMA) est un organisme système centrale américaine. La « Bank of Japan » public indépendant qui supervise le sec- est la Banque centrale du Japon. teur financier belge. Elle s’assure que les organismes financiers ainsi que les L’Eurosystème se compose produits et services qu’ils proposent sa- de la Banque centrale eu- tisfont aux règles. La FSMA est également ropéenne et des Banques chargée de la surveillance des marchés centrales des États mem- financiers. En revanche, elle n’est pas bres de la zone euro. La responsable du contrôle de la stabilité Banque nationale de Bel- des organismes financiers dans notre gique (BNB) en fait donc pays, lequel relève de la responsabilité partie. Ensemble, ces insti- de la Banque nationale de Belgique. tutions définissent et exé- cutent la politique moné- taire pour la zone euro. En outre, l’Eurosystème assure le bon fonctionnement du Banque coopérative trafic des paiements, la La banque coopérative offre à ses clients la possibilité de devenir associés ou copropriétaires en conservation et la gestion achetant des parts coopératives. Pour une banque, c’est souvent une façon d’impliquer plus étroi- des réserves de devises tement (une partie de) ses clients dans la stratégie et de nouer une relation à long terme. Les étrangères ainsi que la col- parts coopératives ne peuvent être vendues à n’importe quel moment. Des avantages spécifiques lecte des statistiques éco- sont offerts aux membres, comme des remises sur certains produits et services. Les coopératives nomiques et financières. agréées peuvent verser un dividende maximum de 6% par an. I 22 I
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