Gascogne Si le - de Côtes de Gascogne
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magazine offert Si le Hors-série n°1 - 2019 Décembre 2019 Gascogne m’était conté... L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ. À CONSOMMER AVEC MODÉRATION. vignerons racontent de Côtes de Gascogne
édito L’épopée du Gascogne C’est l’histoire étonnante de vignerons qui à la fin des années 70 décidèrent de prendre en main leur The Côtes de Gascogne saga avenir. Une époque où, en Gascogne, les vins de cépages autochtones étaient essentiellement This is the story of winegrowers who decided to take promis aux flammes de l’alambic et personne their future into their own hands at the end of the n’osait imaginer, même les soirs de pleine lune 70’s. This was the time when native grape varieties lorsque la Blanche réchauffaient les âmes, que in Gascony were used essentially for distillation. des consommateurs de sa Gracieuse Majesté Back then, no-one imagined that the subjects of s’arracheraient les colombard et ugni blanc Her Gracious Majesty would passionately fall in love gascons. with the Colombard and Ugni Blanc from Gascony. Even on nights of full moon, when everything seems C’est pourtant ce qu’il advint. Très vite. En possible and the Blanche eau-de-vie warms up the quelques années seulement, le vignoble s’est souls of those who taste it. restructuré, quelques Maisons ont fait le pari de This is however exactly what happened, and it la bouteille, ont raflé à la surprise générale les happened very quickly. Within a few years, the entire premiers prix des concours de vins qui ne leurs vineyard in Gascony was restructured. A few Maisons bet on bottled wine and won awards at wine contests, tendaient pas forcément les bras. where they were considered as the underdogs. Très vite donc les marchés du nord de l’Europe Very soon, wine lovers from Northern Europe and et particulièrement de Grande-Bretagne se sont mostly the UK showed their enthusiasm for the fruity, enthousiasmés pour le fruité, la légèreté, la light and surprising wines from Gascony. The wine surprise des vins de Gascogne. Le vin de copains only as good as the mates you share it with became est devenu celui de l’apéro pour figurer 40 ans the wine to be had at pre-diner apéritif …and 40 years later it had become one of the white wines plus tard parmi les « blancs » les plus demandés. everyone is asking for. On l’imagine, cette fabuleuse épopée des vins It is easy to imagine the rich and colourful story of Côtes de Gascogne officiellement née en 1979, Côtes de Gascogne wines, officially created in 1979. est pétrie d’histoires d’hommes et de femmes, A story written by men and women, with their own de caves particulières et de coopératives qui ont personal stories and lives, as well as a story written by individual wine domains and group cooperatives. chacun contribuer à écrire ces pages. This Special Edition celebrates the past four decades Ce magazine hors-série célèbre à sa façon of the white wine. We have knocked on the door of ses quatre décennies. En poussant la porte many a wine domain, met many key players, some des propriétés, à la rencontre des acteurs, des of which were the pioneers while some are the new précurseurs, des générations actuelles. generations of wine growers. All work together to Une page d’histoire de la Gascogne, celle de ses write a page of the History of Gascony, its wine and its people, which will form part of the story of the vins, celle de ses hommes et qui s’inscrit plus wines from the South West of France. largement dans l’histoire des vins du Sud-Ouest. Gascogne Côté Gers GascogneCôtéGers • 3
NOM DUcôtes 40 ans DOMAINE ? de gascogne 40 ans côtes de gascogne © DR Côtes de Gascogne Gascogne Côté Gers - Hors-série ans sommaire Les Tontons précurseurs Les artisans de l’histoire ................... ................... 6 12 NUMÉRO SPÉCIAL 40 ANS DES CÔTES DE GASCOGNE « Se mettre d’accord sur une stratégie » ... 19 Gascogne Côté Gers est une publication de Plandecom sarl « De belles pages à écrire » .................. 22 au capital de 8000 € ; siège social : 1 rue Sainte-Clotilde 32600 L’Isle-Jourdain ; représentant légal : Frédéric Alvado ; Les chiffres-clés des Côtes de Gascogne .. 22 associés : F. Alvado, MC. Martet, D. Bankov - Directeur de la publication et Responsable de la rédaction : Frédéric Alvado. « Le Gascogne est une marque Ont collaboré à ce numéro : Marie-Pascale Boucher, Philippe sur laquelle il faut capitaliser » ............... 26 Campa, Sabine Darré, Elise Dupont, Christophe Dupouy, Marielle Fourcade. Traductions : Alice Murray et Sophie Tasker. Quarante années de passions Photo couverture © Julien Domec. 40 domaines Côtes de Gascogne .......... 33 Mise en page et coordination : Plandecom. Imprimé par Litografia Roses SA Espagne. Hors-série n° 1 2019 Numéro Spécial 40 ans Côtes de Gascogne. Partners in wine ........................................... 10 Dépôt légal à parution. ISSN 2555-9109. Tous droits de reproduction réservés. La reproduction, même partielle, des Craftsmen of History ....................................... 16 articles, photographies ou illustrations de Gascogne Côté Gers est interdite sans l’accord exprès du responsable de publication. “Agreeing on a strategy” ................................ 21 Pour joindre la Rédaction, le service Publicité / Partenariat, ou donner votre avis, merci d’envoyer un mail à Beautiful pages still to be written .................... 25 bonjour@cotegers.fr ou d’écrire à Gascogne Côté Gers Key figures Côtes de Gascogne .................... 25 1 rue Sainte-Clotilde - 32600 L’Isle-Jourdain. Vous pouvez aussi visiter notre site www.cotegers.fr “Gascony is a brand on which we must capitalise” 30 et nous suivre sur les réseaux sociaux. L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. Forty years of passion Frédéric Alvado À consommer avec modération 40 domaines Côtes de Gascogne ................... 33 GascogneCôtéGers • 5
40 ans côtes de gascogne 40 ans côtes de gascogne Textes Philippe Campa LES TONTONS PRÉCURSEURS Ils se nomment Gilles Baumann, Francis Dèche, Michel Duffour, Paul Esquiro, Alain Lalanne. © Philippe Campa De jeunes papys, vignerons indépendants, qui ont connu les premiers pas des Côtes de Gascogne et en ont écrit le prologue. Malicieux et toujours prêts à dégainer de savoureuses anecdotes. otre chance ? C’est que nous ne reste dès lors qu’il faut balancer la bonne 70 et les primes à l’arrachage succèdent connaissions rien au vin ! Le ton formule : quand je recevais des amis à à la course à la plantation. Beaucoup se est donné. Signé Francis Dèche, la maison, j’achetais du vin parce que le sont laissés tenter, maugrée Francis Dè- un vigneron qui ne se contenta pas d’ap- mien ne valait rien ! Le décor est planté che. D’ailleurs, à cette époque, le vigno- prendre à vinifier mais qui, longtemps, a sous le regard des deux autres compè- ble gascon est passé de 40 000 à 20 000 défendu les couleurs gasconnes à l’INAO res : Paul Esquiro, celui par qui les vins hectares. Beaucoup ont choisi les céréa- (Institut National de l’Origine et de la rouges de Montestruc sont devenus Cô- les, et le maïs là où l’eau était présente. Qualité). Nous étions habités par l’idée de tes de Gascogne et Gilles Baumann dont bien faire, lâche Alain Lalanne (le trublion la discrétion n’a d’égale que sa virtuosité « Notre chance ? C’est que nous qui tint tête de longues années à l’État, exprimée dans son chai de Cassagnoles. ne connaissions rien au vin ! » et au fisc, en réponse à une taxation sur Les boutades se taisent. Place à leur his- FRANCIS DÈCHE le Floc de Gascogne jugée inacceptable). toire. Au contexte. Pour cela, une plongée On ne pensait qu’à bosser, au point que au début des années 70 s’impose. Le vi- Alain Lalanne se souvient du marché du ça a fait pas mal de dégâts dans nos vies gnoble armagnacais se portait mal, assè- jeudi à Éauze où le vin se vendait une mi- de famille. ne Alain Lalanne. On venait de nous faire sère. L’Armagnac faisait grise mine alors planter des centaines d’hectares d’ugni qu’à l’Est du département, du côté de Gilles Baumann, Francis Dèche, Alain Lalanne, Michel Duffour, Paul Esquiro « Quand je recevais des amis blanc pour répondre à la demande venue Montestruc, se levait un soleil bien rouge. à la maison, j’achetais du vin d’Allemagne. Outre-Rhin on expédiait du Comme la couleur des vins de Paul Es- parce que le mien ne valait rien » Viné, un vin enrichit d’armagnac. quiro qui, le 14 mars 1974, le jour de la MICHEL DUFFOUR Il fallait planter pour la distillation, poursuit naissance de son fils, a gagné une belle Michel Duffour. Entre 1/3 et la moitié de bataille. Ce jour-là était porté sur les fonds Michel Duffour, l’homme qui créa dans le nos vins blancs (en comptant le Viné) baptismaux le syndicat des producteurs Gers la première association des Caves étaient distillés. de vins de la région de Fleurance. Un particulières joliment dénommée Club Et puis, patatras. Les ventes d’armagnac représentant de l’ONIVINS nous lançait des vignerons de Gascogne, n’est pas en chutent brutalement au milieu des années fièrement que désormais nous pourrions 6 • GascogneCôtéGers GascogneCôtéGers • 7
40 ans côtes de gascogne 40 ans côtes de gascogne faire « des vins côtes du Gers ». Cette mais à l’époque la rivalité était forte. Ainsi était née une formidable histoire, dénomination nous paraissait restrictive On sentait bien une volonté de fédérer celle des Côtes de Gascogne inexistants comme pouvait l’être tout autant celle comme cela avait été fait pour les vins au début des années 70 et déjà stars en des côtes de Montestruc. Après de beaux de Saint-Mont, ajoute Alain Lalanne. Et Angleterre dix ans plus tard. Pour autant échanges nous obtenions la dénomina- puis la qualité des vins des Particuliers la progression a été raisonnée au cours tion vins des Côtes de Gascogne. commençait à interpeller, note Gilles des années 80 et la mise en bouteilles Et ainsi Paul Esquiro et son frère ont mis Baumann. La synthèse revient à Francis (avec plus de 100 vignerons concernés en bouteille les premiers vins rouges Cô- Dèche : Nous avons bousculé la coopé aujourd’hui) n’a explosé qu’au début des tes de Gascogne, bientôt suivis par Pa- en l’amenant vers la qualité. Le premier années 90. Parce que le prix du vin en trick Aurin du domaine d’Aula à Condom. concours des vins blancs organisé en vrac a été longtemps soutenu et l’est tou- Administrativement les Côtes de Gasco- 1980 à Éauze a été un détonateur et a fait jours, détaille Alain Lalanne. gne étaient nés en Lomagne avec des venir à nous les acheteurs. Quarante ans plus tard, les précurseurs coups de pouce de l’étoilé André Daguin Cette période de tension, Alain Lalanne ne tirent en aucun cas gloriole de ce ou du visionnaire Maurice Mességué qui l’illustre aussi : En 1978 j’avais planté des passé. Et trouvent, à leur manière, des faisait entrer les vins des frères Esquiro sauvignon et du gros manseng. J’appor- explications à cette formidable réussite. chez Fauchon. tais tout mon vin à la cave d’Éauze mais Finalement nous avons la chance d’avoir je m’étais gardé une cuve… la meilleure. les meilleurs cépages et nous avons fait le « Nous étions habités Et je commençais à vendre quelques bou- job, s’amuse Michel Duffour. Pour Francis par l’idée de bien faire » teilles, un vin nommé Véronique, comme Dèche la « coca-colarisation » n’a pas eu ALAIN LALANNE la passe taurine. Je le vendais à mes lieu. Certains voulaient standardiser nos amis du club taurin vicois. Cela n’a pas vins mais ils ont changé le fusil d’épaule. Pendant ce temps, du côté des vins plu à la cave qui a vite imposé la règle Quant à nous, nous avons planté d’autres blancs, beaucoup se lamentaient. Les du « tout apport ou rien ». Pour moi ce fut cépages et ainsi répondu aux attentes Français ne buvaient plus de vin, les rien. Nos colombard étaient étonnants, des clients. blancs de Gascogne n’avaient pas le ni- pour peu qu’on les travaille un peu ,lâche veau. Alors on s’est pris en main, s’exalte Francis Deche. En tout cas, plein d’espoir « Après de beaux échanges Alain Lalanne. On était jeunes, passion- pour nous, ajoute Alain Lalanne. nous obtenions la dénomination nés, on y croyait. Nous avions l’obsession vins des Côtes de Gascogne » de bien faire. On voulait tout casser, PAUL ESQUIRO « La qualité des vins des ponctue Michel Duffour. Sous l’impulsion Particuliers commençaient de la Chambre d’agriculture et de ses Pour Gilles Baumann, le fait d’être resté à interpeller » satellites, des dizaines de techniciens1 et en vins de pays, malgré quelques ten- GILLES BAUMANN œnologues, sont descendus sur le terrain. tations (de regarder vers l’AOC à une Nous organisions des réunions d’informa- époque) est ce qui nous est arrivé de tion dans toutes les communes. Nous C’est ainsi qu’au début des années 80 le mieux. Et Paul Esquiro d’enfoncer le allions aussi apprendre en Bordelais, vignoble de Gascogne s’est emballé. Grâ- propos : le client ne cherche plus à savoir dans le Muscadet, en Nouvelle-Zélande, ce aux fonds obtenus, avec le concours d’où vient un vin, s’il le trouve bon, il est se souvient Francis Dèche. des techniciens, les vins ont rapidement bon ! Une extraordinaire soif de comprendre, progressé jusqu’à attirer les papilles d’un Avec Alain Lalanne se ponctue sans dou- de s’initier, mais aussi, sans vraiment s’en marché anglais très vite amoureux des te – très provisoirement – cette histoire : rendre compte à l’époque, de sauver un blancs de Gascogne. Gilles Bauman est Parce que nous étions dans une situation vignoble à la traîne, animait ces pionniers. un des premiers à mettre en bouteilles as- défavorable au départ nous avons réussi. Si on veut s’en sortir il faut faire du vin de pirés que nous étions par les Britanniques Nous sommes en perpétuelle évolution, qualité, clamaient-ils dans les réunions qui voulaient toujours plus de blancs. à l’instar de ce que réalisent les géné- publiques, vite relayés sur le terrain par À notre grande surprise les yeux des rations actuelles. Parce que nous avons les techniciens missionnaires. acheteurs anglais pétillaient et les com- toujours envie de faire mieux que l’année Des fonds d’État en dotation humaine et mandes, d’une fois sur l’autre, étaient au précédente. technique permettent ce grand virage. moins doublées. Alain Lalanne et Michel Et en 1979, le 15 mai, le syndicat de Duffour lui emboîtent le pas. défense des producteurs de vins de pays Désormais tout va très vite. D’autres vi- des Côtes de Gascogne est créé. Histoire gnerons entrent dans la danse. À l’instar de structurer, d’organiser mais aussi de du domaine du Tariquet. Maïté Grassa contrôler la production. court les salons pour faire déguster À dire vrai, nos Tontons précurseurs ne les premiers ugni blanc et colombard. gardent pas cette date de mai 79 en mé- D’autres vignerons entrent dans cette moire. En revanche, ils n’ont rien oublié aventure alors que l’Association des Vins des relations entre la coopération et les du Sud-Ouest donne elle aussi un coup Caves particulières. Aujourd’hui, tout se de main aux Gascons à grands coups 1. Michel Jorieux et Jacques Vernhes ont passe très bien, sourit Michel Duffour, d’aides à la promotion. joué un rôle important, lire par ailleurs 8 • GascogneCôtéGers GascogneCôtéGers • 9
40 ans côtes de gascogne 40 ans côtes de gascogne Alain Lalanne remembers the Thursday morn- May 1979, the Trade Union of Defence of the had sparkles in their eyes and their orders were ing markets in Éauze where wine was sold for Côtes de Gascogne Wine Producers was born. at least doubled from one time to the next. Alain a pittance. Armagnac was glum and grey, while The idea was to structure and organise (but Lalanne and Michel Duffour followed suit. Partners in the East, close to Montestruc, a bright red perhaps also take control?) of the sector. Things moved very fast. And other winemakers colour was starting to beam. The same colour To tell the truth, our partners in wine don’t really joined the party. Like the Domaine de Tariquet. as Paul Esquiro’s wines. Paul Esquiro who, keep the “May 79” date in mind. However, they Maïté Grassa was going from one trade fair to on the 14th March 1974, the day his son was have not forgotten the relationships between the other presenting the first Ugni Blanc and born, won a great battle. It was on that day we the Cooperative and the independent wine Colombard. Other winemakers got involved created the Fleurance wine producers’ union. merchants. Today, everything is fine, smiles while the Wines of the Southwest Association in wine A representative of the National Inter-profes- Michel Duffour, but at the time it was a lot of was also helping out the people from Gascony sional Office for Wines was proud to announce competition. We could feel the trend towards by covering product promotion costs. that we could start producing “Côtes du Gers” a federation of wine producers, as it had pre- And that was the start of a wonderful adven- wines. This denomination seemed restrictive, viously been done for the Saint-Mont wines, ture: Côtes de Gascogne was non-existent in as was the Côtes de Montestruc denomina- adds Alain Lalanne. And at the same time the the 1970s and a star in England ten years later. tion. After some very interesting discussions, quality of the wines produced by individual wine Growth in sales was steady in the 1980s and we managed to obtain the Côtes de Gascogne growers was starting to get noticed, note Gilles bottling (with over 100 winegrowers concerned wine denomination instead. Baumann. The task of summing everything up to this day) only started to explode at the start fell on the lap of Francis Dèche: We challenged of the 1990s. Because the price of bulk wine “Were we lucky? It is only because the Cooperative by pushing for quality. The first was long sustained and still is today, explains we knew nothing about wine” white wines contest organized in 1980 in Éauze Alain Lalanne. Francis Dèche was a trigger and drew buyers’ attention. Forty years later, the pioneers claim no credit for the achievements. In their own words, they Their names are Gilles Baumann, Francis Dèche, Michel Duffour, Paul Esquiro and Alain Lalanne. As a result, Paul Esquiro and his brother bot- “We were passionate about doing well” find ways to explain this success. In reality, we Young granddads who were there when Côtes de Gascogne wines took their first steps. tled the first Côtes de Gascogne red wines, Alain Lalanne were lucky to have the best grape varieties and You could say that they wrote the foreword of the wines’ story. Always mischievous, soon to be followed by Patrick Aurin of the Aula we just did what we had to do, jokes Michel they are ready to “shoot” a bullet of their delicious anecdotes. domain in Condom. Côtes de Gascogne was Duffour. For Francis Dèche our wines were not administratively born in Lomagne with the help Of the “tension time”, Alain Lalanne likes to turned into “fast wines”. Some people wanted of the Michelin-starred chef André Daguin as say: In 1978 I had planted Sauvignon and Gros for them to be standardised, but they changed well as the visionary Maurice Mességué who Manseng. I used to bring all my wine to the their minds. And as for us, we planted other opened the doors of Fauchon (French version Éauze cooperative cellar, but I had kept a tank grape varieties and, as a result, met our clients’ of Fortnum & Mason) to the Esquiro Brothers’ for myself...the best one. And I began selling expectations. W wines. a few bottles here and there. It was a wine I ere we lucky? It is only because we Paul Esquiro, who had Montestruc red wines Things were not so bright on the white wine called Véronique, as a reference to a bullfight- “The quality of the wines knew nothing about wine! The tone changed to Côtes de Gascogne, and Gilles side. The French were not drinking wine at the ing figure. I would sell it to my friends from the made by individual wine growers is set. Francis Dèche is a winemaker Baumann whose discretion is matched only by time, or the white wines from Gascony were Vic-Fézensac bullfighting club. That did not go was starting to get noticed” who did not stop at vinification but, for a long the virtuosity he displays in his Cassagnoles not good enough. We took things into our own down too well with the Cooperative that quickly Gilles Baumann time, flew the Gascony flag at the National wine cellar. hands, explains Alain Lalanne with passion. imposed a “everything or nothing” rule. And for Inter-professional Office for Wines. We were The antics die down. And the story takes over. We were young, we were passionate, we were me, it became nothing drops Francis Dèche. passionate about doing well, explains Alain The context. And to do so, one has to dive into believers. We were obsessed by doing well. Our Colombard wines were rather amazing, For Gilles Baumann, keeping the “vins de Lalanne. Alain the troublemaker: for years he the early 1970s. The wine business was not We wanted to break the pattern, adds Michel provided we could do a bit more work on them. pays” denomination despite temptation is the stood up to the French State and the tax au- doing so well in our Armagnac region, strikes Duffour. Under the impulse of the Chamber In any case, this meant hope for us, adds Alain best that could have happened to us (AOC was thorities in response to the taxes imposed on out Alain Lalanne. We had just been asked to of Agriculture and its satellite organisations, Lalanne. talked about at some point). And Paul Esquiro the Floc de Gascogne that were considered plant hundreds of hectares of Ugni Blanc in re- dozens of technicians1 and oenologists went reiterates: the customer is no longer interested unacceptable. All we thought about was work, sponse to the demand coming from Germany. to meet producers and customers. We kept “After some very interesting in knowing where the wine is from, if he thinks work, work, to the point that it affected our fam- We used to export Viné, an Armagnac-en- holding meetings in all the villages. We also discussions, we managed it’s good, then it’s good! ily lives. hanced wine, to the other side of the Rhine. travelled to Bordeaux, to Muscadet in the Loire to obtain the Côtes de Gascogne Alain Lalanne finishes the story – for now: It’s “When I invited friends, We had to plant for distillation purposes, contin- Valley, and as far as New Zealand to learn, wine denomination.” because we were in an adverse situation to be- I always had to buy wine ues Michel Duffour. Between 1/3 and half of our remembers Francis Dèche. Paul Esquiro gin with that we succeeded. We are constantly © Michel Carossio because mine was worthless!” white wines (including Viné) were distilled. The pioneers were driven by an extraordinary evolving, like today’s generations. Because Michel Duffour And suddenly, crash, bang! Armagnac sales thirst for understanding and discovering, but And that’s how, at the start of the 1980s, the we always want to do better than the previous plummeted dramatically in the middle of the also, without really realising it at the time, for Gascony vineyard sector took off. Thanks to year. Michel Duffour, the man who created the first 1970s. Grants to uproot crops took over the saving a fading vineyard. If we want to pull the extra funds and the technicians’ help, the wine cellar association in the Gers – with the planting race. A lot of people succumbed to the through, we have to produce quality wine, they quality of wines quickly improved. This was lovely name of “The Gascogny Wine Grow- temptation, grumbles Francis Dèche. Besides, would proclaim in public meetings. Their mes- the start of a love affair between the English Ph. C. ers’ Club” – often comes up with a punch line: at that time, the Gascony vineyard went from sage was quick to be relayed on the field by and Gascony white wines. Gilles Bauman was when I invited friends, I always had to buy 40,000 to 20,000 hectares. Many chose to missionary technicians. one of the first to bottle his wine, sucked in by wine because mine was worthless! The stage plant cereals and corn in fields where water They received human and technical resources the English who wanted more and more white 1. Michel Jorieux and Jacques Vernhes played an im- is set, under the gaze of two other sidekicks: was not a problem. to make this great transition possible. On 15 wine. To our great surprise, our English buyers portant role, read further in this magazine 10 • GascogneCôtéGers GascogneCôtéGers • 11
40 ans côtes de gascogne 40 ans côtes de gascogne Textes Philippe Campa TÉMOIGNAGES LES ARTISANS DE L’HISTOIRE « Nous avons tous Producteurs, œnologues, techniciens, membres engagés au sein de la coopération…, ils ont écrit quelques-unes des pages de l’aventure des Côtes de Gascogne. grandi ensemble » Ils racontent et témoignent de ces quarante années d’histoire. JACQUES VERNHES « Des œnologues L orsqu’il s’est installé dans le Gers Le technicien qu’est Jacques Vernhes en 1976 pour y élever des mou- témoigne aussi de l’avancée spectacu- tons, le jeune toulousain Jacques laire que nous avons vécue au début des se sont installés après 79 » Vernhes, qui venait d’achever des études de sciences naturelles et d’œnolo- gie, ne pouvait imaginer ce que serait sa années 80. On a rapidement maîtrisé les températures, on faisait un vin de belle qualité, les coopératives achetaient. Et les MICHEL JORIEUX vie professionnelle. Même si sa passion Anglais, les Hollandais commençaient à I pour le vin et ses cinq hectares de vigne apprécier nos vins. Un développement qui l est peu d’écrire que l’histoire des Côtes cole pour faire progresser la qualité des vins auraient pu lui mettre la puce à l’oreille… s’est traduit, pour l’œnologue, par l’achat de Gascogne a marqué la vie profession- blancs ont été mis en place grâce au Grou- Pourtant, en 1979, lorsque la Chambre d’une chaine d’embouteillage mobile. Fina- nelle de Michel Jorieux. Jeune œnologue, pement de développement agricole (GDA) et d’agriculture et Michel Jorieux cherchent lement, nous avons tous grandi ensemble. ingénieur de l’ENSAT (Toulouse) fraîche- les CETA. À chaque structure était associé un des œnologues stagiaires, il est un des Sur l’évolution des Côtes de Gascogne et ment diplômé, il n’a rien oublié de son arrivée à œnologue. Rien qu’en 1979 j’en ai embauché premiers à lever le doigt. Nous étions leur succès, Jacques Vernhes avance une la Chambre d’agriculture en tant qu’animateur huit. Un travail d’amélioration qui est passé tout-terrain, il fallait tout faire. Parce que analyse partagée par d’autres acteurs de viticole, à la fin des années 70. En pleine crise aussi par de nombreux voyages d’études jusqu’alors les vignerons ne vinifiaient que sa génération : longtemps notre région a de l’armagnac, alors que les vins de distillation dans d’autres vignobles, par l’acquisition de pour l’alambic, sourit-il. Une époque où été méconnue, du coup la concurrence ne se vendaient pas, que les primes d’arra- matériels. résonnait un refrain sarcastique, notam- nous a laissés tranquilles. Nous avons chage connaissaient un énorme succès (on Petit à petit nous avons élaboré des vins bien ment du côté du Bordelais, qui disait à peu progressé alors que les « blancs » pas- a perdu à cette époque près de la moitié du meilleurs, poursuit l’œnologue. Mais les gens près ceci, ah bon ? On fait du vin dans le saient d’un vin à boire sur le poisson à un vignoble), il fallait faire quelque chose face à ne les connaissaient pas. Alors nous avons Gers ? vin plaisir, à déguster entre ami, à l’apéro, cette saignée. créé le concours des vins blancs de Gasco- Jusqu’en 1981 Jacques Vernhes est fidèle un vin que l’on demande dans un bar à Certes nous élaborions du Floc de Gascogne gne… C’était il y a 39 ans ! La suite, on la con- à la Chambre d’agriculture. Puis il com- vins. Désormais, on le consomme comme depuis 1976, raconte le technicien, mais cela naît. Le succès des vins de Gascogne a été mence à proposer des conseils dans les les Anglais, à l’envie. Et ces vins blancs ne suffisait pas pour des vignerons qui ne fai- rapide et le paysage viticole gersois a évolué, il propriétés, se lance dans l’analyse œno- plaisent beaucoup aux jeunes. saient que du vin de distillation. Alors Michel s’est structuré. À telle enseigne que beaucoup logique et crée enfin son laboratoire dans Quant à la santé économique des Côtes de Jorieux a fait partie de ceux qui ont travaillé à d’œnologues que nous avions recrutés en l’ancienne cave coopérative de Gondrin. Gascogne, là encore la situation a beau- l’amélioration des vins mais aussi à la mise en 1979 sont restés, se sont installés, commente C’est vrai, plaisante-t-il, mon activité est coup évolué pour l’œnologue de la premiè- place de la restructuration du vignoble, à partir Michel Jorieux. Ce tissu important d’œnolo- née avec les Côtes de Gascogne. re heure qui estime qu’aujourd’hui, on peut de 1980, avec des aides énormes à la clé. Une gues, épaulé par le Laboratoire départemental Des débuts de l’aventure, il n’oublie pas les supporter une année de mauvaise récolte, association de restructuration a vu le jour par d’Eauze et son directeur Jean Vignau, n’est problèmes de fin de fermentation, sur les- ce qui n’était pas le cas il y a dix ans. canton. Nous avions surtout de l’ugni blanc, de pas étranger à l’exigence que nous avons eue quels il a beaucoup travaillé, notamment Une aventure d’hommes et de femmes la folle blanche, du baco et quelques hectares pour nos vins. auprès de ses collègues de l’association qui ont marqué Jacques Vernhes. Nous de colombard. Nous avons développé ce der- Si parallèlement à cette animation sur le ter- des œnologues de France. Une époque n’étions pas une bande de copains, mais nier et amélioré l’encépagement en plantant rain l’œnologue a participé aux travaux du où les fournisseurs et les techniciens nous pas loin, lâche-t-il joliment. des sauvignon et chardonnay, des merlot et centre de recherches au Domaine de Mons, transmettaient des infos. Une sorte de civilisation du colportage qui nous a fait © Michel Carossio cabernets pour des vins rouges de belle qua- s’il a longtemps été « Le » technicien du Floc lité plutôt dans le Condomois. de Gascogne, il fait partie de ceux qui ont porté progresser. C’était la débrouille car les Et il a fallu apprendre à vinifier, sourit Michel sur les fonds baptismaux les Côtes de Gasco- viticulteurs n’avaient pas les moyens d’in- Jorieux. Des programmes d’amélioration vini- gne et contribué à son développement. vestir dans du matériel. 12 • GascogneCôtéGers GascogneCôtéGers • 13
© Michel Carossio 40 ans côtes de gascogne 40 ans côtes de gascogne « 20 000 hectares de vignes restructurés» ALAIN FAGET E mblématique président de l’associa- Une tendance qui s’est confirmée lors des tion de restructuration du vignoble décennies suivantes et qui laisse penser à durant près de 38 ans, Alain Faget l’ancien président de la restructuration du garde de ce long cheminement, le vignoble que les précurseurs des années 80 sentiment du travail accompli. Globalement ont été quelque peu visionnaires. Concernant nous pouvons dire que nous avons fait du bon le vignoble, Alain Faget note que depuis quel- travail. En quarante ans nous avons restruc- ques années la tendance est à la recherche turé 20 000 hectares de vignes, soit l’équiva- de cépages résistants et soutient le travail lent de la surface actuelle du vignoble. engagé avec l’INRA et l’IFV sur la création Pour le président Faget, les vignerons ont de cépages résistants en descendance des compris le sens de cette restructuration indis- cépages emblématiques, Colombard, Gros pensable à la qualité de nos vins mais aussi Manseng et Tannat nécessaire pour répondre aux goûts des con- Toujours attentif à l’évolution du vignoble et sommateurs. C’est pourquoi nous avons pu du développement des Côtes de Gascogne il restructurer avec une réelle continuité. prône la production de vins toujours aroma- Alain Faget ne cache pas qu’au début des tiques et fidèles à la typicité du terroir pour années 80, la question de la restructuration continuer à se battre sur un marché mondial était vitale. Et au-delà, il estime qu’il était né- certes difficile mais dans lequel le Gascogne cessaire de se positionner par rapport à ce a toute sa place. qu’allait devenir le marché. Les Anglo-saxons nous ont aiguillés en réclamant des vins faci- les à boire et d’un degré peu élevé. « Je suis impressionné par cette réussite » « J’ai un petit vin blanc à vendre » ANDRÉ DUBOSC MAÏTÉ GRASSA C L ’est un formidable développement, Il pointe également la création du syndicat ’émotion est vive derrière cha- Il avait le flair pour s’adresser à des per- Une époque sans portable, où le feeling une reconnaissance extraordinaire, en 1979 autour de huit coopératives et une cun des mots de Maïté Grassa sonnes, dans les beaux quartiers, pour avait toute sa place et où nous ne pen- commente André Dubosc qui fit par- poignée de vignerons indépendants, sous l’im- quand elle évoque le début des se faire recommander le bon caviste, sions pas aux difficultés qui pourraient tie, pour le compte des coopératives pulsion de celui qui allait devenir son premier années 80. À cette époque nous l’épicerie fine à ne pas manquer. Alors je arriver. Sinon, malgré notre jeune âge de Plaimont, des bâtisseurs des Côtes de Gas- président, Jean-Louis Carrère. vendions de l’armagnac et lorsque nous poussais la porte. Une jeune femme qui nous n’aurions peut-être pas été aussi cogne. Avec la malice qui le caractérise aussi, Aujourd’hui, et avec quatre décennies de recul, sommes arrivés à Montpellier avec nos entre en disant, « bonjour j’ai un petit vin audacieux… Car une femme dans ce il lance aujourd’hui : aurions-nous encore André Dubosc dit se réjouir de la reconnais- échantillons pour participer au concours blanc du Gers à vendre », il fallait y croire, milieu du vin, il y a quarante ans, avec un beaucoup de vignes en Gascogne s’il n’y avait sance obtenue par les Côtes de Gascogne qui des vins de table, avec notre millésime sourit Maïté. vin blanc gersois dans ses bagages, ce pas eu cette heureuse initiative ? ne sont plus considérés comme un vin tech- 1982, on n’en menait pas large. Verdict : Très vite le succès est au rendez-vous. n’était pas gagné d’avance. De cette aventure, il veut rappeler quelques nologique mais dont les racines sont mises en médaille d’or avec félicitations du jury Grâce à de jolies rencontres, poursuit- De ce début des années 80, Maïté Gras- noms. Comme celui de Guy Lavignac (chef avant. pour le blanc de Tariquet. Ce fut une joie elle, comme avec le caviste Lucien sa garde le souvenir du beau tandem que de centre de l’ONIVIT devenu ONIVINS puis Pour lui, le développement doit se faire avec immense, raconte Maïté Grassa. Vous Legrand, tout près de la Bourse à Paris. nous formions avec Yves, lui au chai, FRANCEAGRIMER) qui dès 1973 faisait le cette posture de vin agréable, dans l’air du imaginez ? Un 100 % ugni blanc produit Il m’a ouvert les portes de bistrots bran- moi comme commerciale, alors que lui tour de tout le Gers pour créer une appellation. temps. Car les Côtes de Gascogne ne sont au fin fond du Gers... chés, de cavistes connaisseurs qui étaient comme moi nous n’y connaissions rien en Ou encore celui d’Olivier Desbarrats, alors pré- pas un produit à la mode, ils sont la vie. Ils cor- De 1982 à 1985, toujours à Montpellier, très en attente de nouveautés. Dans les vin et en commerce ! sident (entre autres) de la cave coopérative de respondent à une demande, comme celle que le blanc réalisé par Yves Grassa à Éauze restaurants parisiens on servait du Mâ- Condom, qui milita, avec son directeur Pierre nous avons connue il y a quarante ans avec rafle toutes les médailles. Sa sœur Maïté, con blanc. Nous arrivions avec quelque Roseau, pour la création des vins des coteaux les pays anglo-saxons. elle, visite toutes les villes de France et chose de nouveau. Et je repartais avec de Gascogne, nom déjà pris par les fournis- pousse les portes. Un peu au hasard. des commandes de 120 bouteilles. C’était seurs d’eau… s’amuse André Dubosc. Souvent mon mari Guy m’accompagnait. une période extraordinaire. @PimentOiseau 14 • GascogneCôtéGers GascogneCôtéGers • 15
40 ans côtes de gascogne 40 ans côtes de gascogne Testimonials Craftsmen of History Producers, oenologist, technicians, committed members of the Cooperation … they wrote in the book of the Côtes de Gascogne. They tell the tale of these forty years of History. “Oenologists set up shop in this area after the fact we had so many oenologists in the 1979” area – which were supported by the County “I have a little white wine from the Gers to MICHEL JORIEUX Laboratory based in Eauze and its Director sell” Jean Vignau – we imposed high quality require- MAÏTÉ GRASSA The story of Côtes de Gascogne wines has ments to our wines. The oenologist took part in marked Michel Jorieux’s professional life. the research studies organised by the research Emotions are still high when Maïté Grassa re- When he was a young oenologist, after having centre based on the Domaine de Mons, as calls the early 80’s. At the time, we were selling completed his degree in agricultural engineer- well as becoming THE ‘Floc de Gascogne’ Armagnac. When we went to Montpellier with © Michel Carossio ing at the Institute of Agricultural Studies in expert technician. He is one of those who cre- our samples in order to participate in the Table Toulouse, he never forgot the time he worked ated Côtes de Gascogne and contributed to its Wine Contest, with our 1982 cuvée, we weren’t for the Agricultural Chamber as a wine special- growth. too confident. Verdict: a Gold Medal with the ist at the end of the 70’s. In the midst of the Jury’s compliments for the Tariquet white. Such Armagnac crisis, when no-one was buying dis- joy, Maïté Grassa tells us. Can you believe it? A tillation wines, when the grubbing-up premiums “We all grew up together” 100% Ugni Blanc made deep in the Gers… were very effective (almost half of vineyard JACQUES VERNHES was lost), something had to be done to stop From 1982 to 1985, the white wine made by this bloodbath. When he arrived in the Gers in 1976 to raise Yves Grassa in Éauze won all the medals at It is true that we had been making Floc de sheep, Jacques Vernhes was a young man the Montpellier contest. His sister Maïté trav- tures, we were making good quality wine that in Gascony today without this excellent initia- ration of the vineyard for 38 years. Alain keeps Gascogne since 1976, the technician explains, from Toulouse who had just completed his elled all round France and went door-to-door cooperatives were buying. And English and tive? A few names associated with this venture from this long journey a feeling of accomplish- but there was not enough income for the wine- studies in natural sciences and oenology. He offering samples, sometimes haphazardly. Of- Dutch clients started appreciating our wines. must be mentioned: Guy Lavignac (head of the ment. On the whole, we can say that we did a growers who were only producing distillation had no idea what his professional life would ten Guy, my husband, would come with me. He Progress resulted in the purchase of a mobile ONIVIT then ONIVINS and later FRANCEA- good job. In forty years, we have restructured wine. So, Michel Jorieux worked with other turn out to be. Even if his passion for wine and knew how to speak to people in the nice parts bottling line. Ultimately, you can say that we all GRIMER) who was touring the Gers to create a 20,000 hectares of vineyards, which equals the winegrowers to improve the wines and also his 5 hectare-vineyard could have given him a of town, asking for them to recommend a wine grew up together. wine designation as early as 1973. Olivier Des- total surface of the current vineyard. organised the restructuration of the vineyard, clue… merchant or a good delicatessen. So I would When asked about the Côtes de Gascogne’s barrats, then Chairman (amongst other things) as early as 1980, with the help of large public In 1979, when the Agricultural Chamber and knock on their door. A young woman walking in development and success, Jacques Vernhes of the wine cooperative in Condom, who According to Chairman Faget, winegrowers subsidies. A restructuration committee was Michel Jorieux were looking for trainee oe- and saying ‘good morning, I have a little white offers his views, shared with other players of campaigned with his manager Pierre Roseau understood the purpose of restructuring their set up for each county. We mostly had Ugni nologists, he was one of the first volunteers. wine from the Gers to sell’… you had to believe the same generation: for a long time our region for the creation of the Coteaux de Gascogne, vineyards, which is essential to improve the Blanc, folle blanche, Baco and a few hectares We were all-terrain, and so much was to be in yourself, smiles Maïté. was not well known, so competition left us in a name already used by water companies… quality of the wine and also meet customers’ of colombard grape varieties. We increased the done. Until then, winegrowers would grow wine Success came very quickly. Thanks to some re- peace. We progressed at a time where ‘whites’ laughs André Dubosc. tastes. This is why we restructured with a quantity of Colombard and improved the map- for distillation only, he smiles. This was a time ally nice encounters, she continues, for exam- moved from being a wine you serve with fish He also points out the creation of the union in sense of continuity. ping of grape varieties by planting Sauvignon when you could hear sarcastic comments, in ple with Lucien Legrand, an independent wine dishes to a wine enjoyed and shared with 1979 through the regrouping 8 cooperatives Alain Faget does not hide the fact that in the and chardonnay, merlot and cabernets for qual- particular in Bordeaux, such as: really? people merchant next to the Paris Stock Exchange. friends, before a meal for the aperitif, a wine and a handful of independent winegrowers, by early 80’s, restructuration was vital. And since ity red wines in the Condom area. make wine in the Gers? He took me to all the trendy bars and cafés, you can order in a wine bar. Now we drink white the man who would become its first President, then it has been necessary to position our And then they had to learn how to make and Until 1982, Jacques Vernhes carried on work- to meet wine merchants who were keen for wines like do the English, for pleasure. And Jean-Louis Carrère. wines as to what the market was going to be- vinify wines, Michel Jorieux smiles. Projects ing for the Agricultural Chamber. Then, he novelty. Paris restaurants used to serve white young people like these white wines. Today, benefiting from the lessons learnt over come. The Anglo-Saxons helped us by asking and actions aiming at improving the quality of started offering advice to wine domains, ran Mâcon at the time. We were offering something As to the Côtes de Gascogne’s economic the last 4 decades, André Dubosc says that for wines that were easy to drink and with low white wines were created by the Groupement oenology testing courses and finally created new. And I would go home with an order for 120 health, this is where the pioneer oenologist he is so happy to see the recognition earned alcohol content. de développement agricole (GDA) and the his own laboratory in the old cellar of the Coop- bottles. These were amazing times. sees the most changes. In his view, today one by Côtes de Gascogne wines, which are not It is a trend that was confirmed during the fol- CETAs. An oenologist worked with each group erative based in Gondrin. Jokingly, he adds: It These were years without mobile phones, can manage a year of bad crop, which was not seen as technological wines but are praised for lowing decades and led the former Chairman or committee set up locally. In 1979 alone, I is true that my business was born at the same where decisions were based on a hunch and the case 10 years ago. Men and women who their roots. to think that the pioneers from the 1980’s were hired 8 of them. In order to improve the quality time as the Côtes de Gascogne. where we would not think about the obstacles have shared their passion with Jacques Vern- According to him, growth will come through quite visionary. Turning to the vineyard, Alain of the wine, they made several study trips to From early on, he had to deal with the technical that may arise. If not, despite our young age, hes have made a lasting impression on him. He the stance of pleasurable wine, in the spirit of Faget notes that in the past few years, the other winemaking areas, as well as purchased issues resulting from the end of the fermen- we might not have been so daring and ready to has one last, nice comment: We were not quite the moment. It is because Côtes de Gascogne trend has been to find resilient grape varieties. equipment. tation process, on which he worked a lot, in take risks… Being a woman in the wine indus- a bunch of friends, but not far from it. wines are not meant to be fashionable, but He fully supports the work carried out with the Slowly we learnt how to make much better particular with his colleagues from the French try, forty years ago, offering a little white wine are for life. They meet a demand, like the one INRA and IFV to create new resilient grape va- wines, continues the oenologist. But people Association of Oenologists. It was a time when from Gascony, was not that easy. we experienced forty years ago with English- rieties from iconic varieties such as Colombard, did not know our wines. So, we came up with suppliers and technicians would share informa- The memory Maïté Grassa keeps from her time “I am impressed by this success” speaking countries. Gros Manseng and Tannat. the idea of organising the Gascony White Wine tion. A kind of system based on ‘door-to-door in the 80’s is of our duo, Yves in the wine cellar ANDRÉ DUBOSC Always paying attention to the development of Contest... and that was 39 years ago! You information sharing’, which enabled us to and me managing the commercial side of the the vineyard and the Côtes de Gascogne, he know what happened next. Gascogne wines progress in our work. It was a time when you business, when we knew nothing about wine It is a formidable development, an amazing “20,000 hectares of restructured vine- advocates the production of aromatic wines met a lot of success very quickly and the Gers had to be resourceful and inventive as wine- and business! recognition, comments André Dubosc who yards” that reflect the specificities of the terroir in or- wine area developed in a structured way. So growers could not afford investing in equip- was one of the builders of the Côtes de Gas- ALAIN FAGET der to continue competing on the international much that a lot of the oenologists we had hired ment. Jacques Vernhes also testifies of the cogne designation, whilst working for Plaimont market. It may not be a nice and easy market in 1979 ended up staying and set up their own spectacular progress made at the start of the cooperatives. With his usual cheekiness, he Alain Faget is an iconic figure. He was the to sell wines on, but Gascony is fully entitled wine domains, Michel Jorieux explains. Given 80’s. We quickly learnt how to control tempera- adds: would we still have a lot of vineyards Chairman of the Association for the restructu- to its place. Ph. C. 16 • GascogneCôtéGers GascogneCôtéGers • 17
40 ans côtes de gascogne Texte Philippe Campa « Se mettre d’accord sur une stratégie » Bernard Bonnet, premier président de la section interprofessionnelle des Côtes de Gascogne. V igneron indépendant durant de sur une stratégie. Nous nous sommes À l’origine de l’interprofession, Bernard longues années avant d’adhérer attelés à cette tâche difficile en créant du Bonnet loue son efficacité et sa complé- au groupe Plaimont qu’il présida lien entre le syndicat des producteurs et mentarité avec le syndicat des produc- pendant près de quinze ans, les metteurs en marché. Un travail mené teurs. C’est le seul moyen de bâtir une Bernard Bonnet est une des figures de étroitement avec Jean-Pierre Drieux et stratégie qui tienne compte des problé- la viticulture gersoise. Et alors qu’il aurait Alain Desprats (les présidents et directeur matiques tant de l’amont que de l’aval de pu se ranger des voitures, il acceptait la du syndicat Côtes de Gascogne, Ndlr). la filière. Les deux appellations phares de main tendue des responsables des Côtes Notre ligne était dictée par une ambition France (Champagne et Cognac) sont un de Gascogne en 2010. Ainsi, il écrivait de qualité, mais aussi par une autodisci- exemple de cette prise en compte. De une page importante du « Gascogne » pline et une rigueur, pas toujours de mise la même façon, la valeur ajoutée, mais en devenant le premier président de la en Gascogne, sourit Bernard Bonnet. aussi les responsabilités, doivent être section interprofessionnelle des Côtes de 2011 marque également la reconnais- partagées par les metteurs en marché et Gascogne. sance régionale (au sein de l’interprofes- la production. Cela a fait de nous, en 2011, la seule sion des vins du Sud-Ouest) des Côtes Plutôt que de la fierté d’avoir favorisé interprofession IGP. Jusqu’alors les vins de Gascogne et leur poids économique. la création de l’interprofession, Bernard gersois vivaient en autarcie, en tant que Il est évident qu’avec plus de 700 000 Bonnet préfère parler d’extrapolation. Je vins de pays. Et là, cette interpro nous hectolitres par an notre vignoble pèse n’ai fait que m’inspirer de ce que nous avi- mettait au même rang que des AOP pres- comparé aux 150 000 hl d’appellations ons mis en place au sein de Plaimont. tigieuses de la région comme Cahors, beaucoup plus anciennes. Cette place est Un œil toujours vers demain, le premier Madiran ou Saint Mont. considérable, poursuit l’ancien président, président de l’interprofession insiste sur la Un virage assurément important dans au cœur du « bassin viticole » qu’est celui nécessité de mettre de la cohérence dans la jeune histoire des vins de Gascogne. de Toulouse et qui fait partie des 11 bas- nos stratégies et de ne pas en changer La réussite de nos vins a été fulgurante, sins français. D’ailleurs, lorsque l’idée de tous les deux ans. Il faut être constant analyse Bernard Bonnet. Elle s’explique redéfinir ces bassins a surgi, nous avons dans la qualité indépendamment de la cli- en partie par la crise connue par l’arma- entamé un véritable combat pour conser- matologie. Et ne donnons pas l’occasion gnac dans les années 70. La solution et ver le nôtre dans cette nouvelle et grande au consommateur, qui est très sollicité, l’embellie sont venues du vin avec des Occitanie. Tous les vignerons n’ont pas de se détourner de nous à la première produits de qualité et la progression des conscience que la règlementation ne occasion. entreprises Plaimont et Tariquet. Avec, à s’écrit pas dans le Gers mais au sein du l’époque, des vins blancs Côtes de Gas- bassin viticole Sud-Ouest à Toulouse. cogne qui étaient commercialisés, pour Nous devons tout mettre en œuvre pour 80% des volumes, à l’export. le préserver. Nous risquerions également Pour le premier président de la section in- de perdre les particularismes des vins Cô- terprofessionnelle, cette structuration de tes de Gascogne en sortant de ce bassin la filière a permis de se mettre d’accord viticole régional. GascogneCôtéGers • 19
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