Accompagner le développement du jeune enfant - Dossier - Adolescents - Agence régionale de santé PACA

 
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Accompagner le développement du jeune enfant - Dossier - Adolescents - Agence régionale de santé PACA
PRÉVENTION ⁄ PROMOTION ⁄ ÉDUCATION

Adolescents
Promouvoir l’activité physique

Saturnisme
État des lieux et prévention

Handicap
Témoignage d’un
parcours de vie

                                        Dossier
                        Accompagner
                    le développement
                       du jeune enfant
Septembre 2016 / Numéro 437
Accompagner le développement du jeune enfant - Dossier - Adolescents - Agence régionale de santé PACA
LA SANTÉ EN ACTION
la revue de la prévention,
de l’éducation pour la santé                                 est éditée par :
et de la promotion de la santé                               Santé publique France
                                                             42, boulevard de la Libération
                                                             93203 Saint-Denis Cedex – France
Tous les trois mois, 52 pages d’analyse                      Tél. : 01 49 33 22 22
                                                             Fax : 01 49 33 23 90
  Î actualité et expertise                                   inpes.santepubliquefrance.fr
  Î pratiques et actions de terrain
  Î méthodes d’intervention et aide à l’action               Directeur de la publication :
                                                             François Bourdillon
  Î interviews et témoignages

Une revue de référence                                       RÉDACTION
                                                             Rédacteur en chef :
et un outil documentaire pour                                Yves Géry
   Î les professionnels de la santé,                        Secrétaire de rédaction :
                                                             Marie-Frédérique Cormand
      du social et de l’éducation                            Assistante de rédaction :
                                                             Danielle Belpaume
   Î les relais d’information
   Î les décideurs
                                                             RESPONSABLES DE RUBRIQUES
Rédigée par des professionnels                               Sandrine Broussouloux, Michel Condé,
                                                             Nathalie Houzelle
  Î experts et praticiens                                    Lectures : Centre de documentation
                                                             
  Î acteurs de terrain
  Î responsables d’associations et de réseaux
                                                             COMITÉ DE RÉDACTION
                                                             Yaëlle Amsellem-Mainguy (Injep), Jean-
LA SANTÉ EN ACTION                                           Christophe Azorin (enseignant - formateur),
                                                             Judith Benrekassa (Santé publique France),
est disponible gratuitement :                                Dr Michel Berthier (mairie de Poitiers),
                                                             Dr Zinna Bessa (direction générale de la
  Î en format papier sur abonnement pour                    Santé), Mohamed Boussouar (Ireps Rhône-
                                                             Alpes), Isabelle Dolivet (Santé publique
    les lieux collectifs d’exercice et d’accueil du public   France), Alain Douiller (Codes de Vaucluse),
                                                             Christine Ferron (Fnes), Laurence Fond-­
    (établissements scolaires, centres de santé, hôpitaux,   Harmant (Luxembourg Institute of Health –
    communes et collectivités, bibliothèques, etc.)          LIH), Dr Luc Ginot (ARS Île-de-France), Emma-
                                                             nuelle Hamel (Santé publique France), Zoë
  Î enformat numérique pour tous les publics,               Heritage (Réseau français des villes-santé de
                                                             l’OMS), Laurence Kotobi (université Bordeaux-
    professionnels ou non, collectifs ou individuels         Segalen), Zekya Ulmer (FNMF), Éric Le Grand
                                                             (sociologue), Nathalie Lydié (Santé publique
                                                             France), Dr Annie-Claude Marchand (ARS
Rendez-vous sur inpes.santepubliquefrance.fr                 Champagne-Ardenne), Claire Méheust (Santé
                                                             publique France), Mabrouk Nekaa (DSDEN
                                                             Loire), Jean-Marc Piton (Santé publique
                                                             France), Jeanine Pommier (EHESP), Dr Sté-
                                                             phane Tessier (Regards), Hélène Therre (Santé
                                                             publique France).

                                                             FABRICATION
                                                             Conception graphique : offparis.fr
                                                             Réalisation graphique : Jouve
                                                             Photographies : Flore-Aël Surun, Mat Jacob,
                                                             Meyer, Patrick Tourneboeuf / Tendance Floue
                                                             Impression : Groupe Morault

                                                             ADMINISTRATION
                                                             Gestion des abonnements :
                                                             Marie-Josée Bouzidi (01 49 33 23 07)
                                                             sante-action-abo@santepubliquefrance.fr
                                                             No ISSN : 2270-3624
                                                             Dépôt légal : 3e trimestre 2016
                                                             Tirage : 12.000 exemplaires

                       9                                     Les titres, intertitres et chapeaux sont
                                                             de la responsabilité de la rédaction
Accompagner le développement du jeune enfant - Dossier - Adolescents - Agence régionale de santé PACA
Nutrition                                             PRÉVENTION ⁄ PROMOTION ⁄ ÉDUCATION                                                                                                          3
                                                   Adolescents

4 _ Connaissance des repères                       Promouvoir l’activité physique

                                                   Saturnisme
nutritionnels par les élèves                       État des lieux et prévention

                                                   Handicap
de cinquième de France                             Témoignage d’un
                                                   parcours de vie

métropolitaine
Hélène Mathiot, Angélique Nugier,
Viêt Nguyen‑Thanh
                                                                                           Dossier
6 _ Une approche socio-

                                                                                                              © Patrick Tourneboeuf / Tendance Floue
écologique pour la promotion
                                                                           Accompagner
de l’activité physique et la                                           le développement
réduction de la sédentarité                                               du jeune enfant
chez les adolescents
                                                   Septembre 2016 / Numéro 437
Julie-Anne Nazare

                                                                                                                                                       Saturnisme
Dossier                                          Visites à domicile
                                                 en Loire-Atlantique :
                                                 « Nous sommes parfois l’unique                                                                        en France
                                                 interlocuteur des familles »
ACCOMPAGNER                                      22 _ Entretien avec Sylvie Biette-Effray,                                                             42 _ Situation du saturnisme
                                                                                                                                                       en France et prévention :
LE DÉVELOPPEMENT                                 Fabienne Clouet, Corinne Lagarde
                                                                                                                                                       état des lieux
DU JEUNE ENFANT                                  Établir une relation de soins                                                                         Agnès Verrier, Marie Pécheux

Coordination :                                   entre migrantes
Christine César, Enguerrand du Roscoät,          et professionnels de santé                                                                            44 _ Paris : un dispositif
Thierry Cardoso                                  24 _ Patricia Vasseur                                                                                 spécifique pour lutter
                                                                                                                                                       contre le saturnisme
                                                 L’impact de la précarité sur                                                                          chez les enfants

                                                                                                                                                                                                      La Santé en action No 437
                                                 la santé des femmes enceintes                                                                         Véronique Dufour
Introduction                                     26 _ Erwan Le Méner
8 _ Christine César, Enguerrand du Roscoät,                                                                                                            46 _ Saturnisme et accès
Thierry Cardoso                                  Prise en charge de la petite                                                                          aux soins en région PACA
                                                 enfance en milieu hospitalier

                                                                                                                                                                                               Sommaire
                                                                                                                                                       Remi Laporte, Alexandre Daguzan,
Comment les facteurs socio-                      pour promouvoir la santé                                                                              Karine Hadji, Brigitte Moissonnier,
environnementaux durant                          de l’enfant et de la mère                                                                             Gérard Coruble, Stéphanie Gentile,
l’enfance influencent-ils la                     28 _ Christel Denolle, Pascaline Marpeau,                                                             Brigitte Chabrol
santé au cours de la vie ?                       Karine Ronen, Romain Dugravier
10 _ Michelle Kelly‑Irving, Cyrille Delpierre,
                                                 Travailler en réseau aux étapes
                                                                                                                                                       Témoignage
Thierry Lang
                                                 précoces de la vie : un état
13 _ Lesinégalités s’installent                  d’esprit
dès la petite enfance                            30 _ Françoise Molénat                                                                                48 _ « Avoir une forme
                                                                                                                                                       d’autonomie et être actrice
Soutenir la motivation du tout-                  Centres de la petite enfance                                                                          de ma vie malgré mon handicap »
petit pour échanger, partager                    au Québec : favoriser                                                                                 Entretien avec Noémie Nauleau
et comprendre son monde                          le développement
15 _ Maya Gratier, Pascal Mallet                 des moins de 5 ans
                                                 34 _ Marie-France Raynault                                                                            Lectures
                                                                                                                                                                                                                  LA SANTÉ EN ACTION – No 437 – Septembre 2016

Le mal-logement, déterminant
sous-estimé de la santé                          Pour en savoir plus                                                                                   50 _Olivier Delmer, Manon Jeuland,
18 _ Manuel Domergue, Lisa Taoussi               37 _ Manon Jeuland, Laetitia Haroutunian                                                              Sandra kerzanet, Laetitia Haroutunian

                         Les Rencontres de
                         Santé publique France
                         30-31 MAI 2017                                                                     Paris
                                                                                                     Centre universitaire
                          www.rencontressantepubliquefrance.fr                                        des Saints-Pères
Selon une étude de Santé publique France, les adolescents ont une connaissance incomplète des
4           repères nutritionnels et d’activité physique.

            Connaissance des repères
            nutritionnels par les élèves
            de cinquième de France
            métropolitaine

Hélène Mathiot,
élève ingénieure agronome
à AgroParisTech,
Angélique Nugier,
                                     J’    aime man-
                                           ger, j’aime
                                           bouger, le
                                   guide nutrition
                                                             la vie et de la terre sont sollicités pour
                                                             le relayer.
                                                                Une étude a été menée, en 2015,
                                                             afin d’évaluer l’impact de ce plan de
                                                                                                            L’ESSENTIEL
                                                                                                            ÇÇ Les repères les mieux connus
                                                                                                            des jeunes adolescents sont ceux relatifs
chargée d’études scientifiques,                                                                             aux fruits et aux légumes, au groupe
                                   pour les adoles-          diffusion auprès des élèves des classes
unité Nutrition et Activités                                                                                viande‑poisson‑œuf et aux produits laitiers.
                                   cents [1], l’un des       de cinquième. À cette occasion, à              En revanche, la majorité d’entre eux ne sait
physiques,
                                   huit guides d’infor‑      partir du PNNS, leur connaissance              pas qu’il est recommandé de consommer
Viêt Nguyen‑Thanh,
                                   mation du Pro‑            des repères nutritionnels suivants a           des féculents à chaque repas et de pratiquer
responsable de l’unité Addictions,
Santé publique France.
                                   gramme national           également été recueillie : consommer           une heure d’activité physique par jour.
                                   nutrition santé           au moins cinq fruits et légumes par
                                   (PNNS) [2], fait          jour ; trois à quatre produits laitiers
                                   l’objet d’un plan         par jour ; viande‑poisson‑œuf (VPO)
                                   de diffusion an‑          une à deux fois par jour ; des féculents       Matériel et méthodes
            nuel par Santé publique France1 aux              à chaque repas et selon l’appétit ;               Un échantillon de 432 adolescents
            élèves des classes de cinquième. Dans            et pratiquer une heure d’activité              scolarisés en classe de cinquième et
            ce cadre, les professeurs de sciences de         physique par jour.                             âgés en moyenne de 12,4 ans a répondu,

             LES PRATIQUES DE NUTRITION ET D’ACTIVITÉ PHYSIQUE DES 11‑14 ANS

             L’étude nationale nutrition santé, réalisée     • 55 % déclaraient avoir consommé les          adapté du Youth Risk Behaviour Surveil-
             en 2006‑2007 par l’Institut national de         produits du groupe VPO une à deux fois par     lance System3.
             veille sanitaire (désormais Santé publique      semaine. Ces fréquences de consommation
             France), a évalué les consommations alimen‑     différaient peu entre les filles et les gar‑   1. Institut de veille sanitaire. Étude nationale
             taires des français de 3 à 74 ans1 à partir     çons (54 % contre 56 %) ;                      nutrition santé (ENNS),2006.Situation nutritionnelle
                                                                                                            en France en 2006 selon les indicateurs d’objectif et
             des données recueillies lors de trois rappels   • 39 % des 11‑14 ans déclaraient avoir         les repères du Programme national nutrition santé
             de 24 heures2. Dans ce cadre, un échantil‑      consommé des féculents entre trois et six      (PNNS). Colloque du Programme national nutrition
             lon de 464 jeunes âgés de 11 à 14 ans           fois par jour. Les filles étaient moins nom‑   santé (PNNS), 12/12/2007. Saint‑Maurice : InVS,
                                                                                                            2007 : 68 p. En ligne : http://invs.santepublique‑
             (227 filles et 237 garçons) a été interrogé.    breuses que les garçons à atteindre ce re‑     france.fr//publications/2007/nutrition_enns/
             Parmi les jeunes de 11 à 14 ans :               père (33 % versus 45 %).                       RAPP_INST_ENNS_Web.pdf
             • 24 % déclaraient avoir consommé au            • 60 % des 11‑14 ans ont déclaré avoir         2. Un diététicien appelait les sujets (sans les
                                                                                                            prévenir à l’avance pour éviter une modification
             moins cinq fruits et légumes par jour. Ces      pratiqué au moins deux heures trente par       des habitudes alimentaires) et leur demandait
             fréquences de consommation différaient          semaine d’activité physique au moins           de décrire le plus précisément possible tous les
             peu entre les filles et les garçons (25 %       modérée (55 % chez les filles et 65 % chez     aliments et boissons consommés la veille de
                                                                                                            l’entretien. La quantité de chaque consommation
             contre 23 %) ;                                  les garçons). Parmi eux, 39 % (31 % chez       était estimée grâce à un manuel de photographies
             • 42 % déclaraient avoir consommé trois à       les filles et 46 % chez les garçons) prati‑    de portions, mesures ménagères ou grammages.
             quatre produits laitiers par jour. Les filles   quaient au moins trois heures trente d’ac‑     3. Grunbaum J.A., Kann L., Kinchen S., Ross J.,
                                                                                                            Hawkins J., Lowry R. et al.Youth risk behavior sur‑
             étaient moins nombreuses que les garçons        tivité physique par semaine (soit trente       veillance‑United States, 2003. The Morbidity and
             à atteindre ce repère (38 % contre 45 %) ;      minutes par jour). Le questionnaire était      Mortality Weekly Report, 2004, vol. 53, no 2 : p. 1‑96.
5
Figure 1 : Connaissance, par un échantillon d’adolescents de France métropolitaine scolarisés en classe de cinquième, des repères suivants du
Programme national nutrition santé : fréquence de consommation journalière supposée de fruits et légumes, de produits laitiers, du groupe viande/
poisson/œuf, de féculents, ainsi que fréquence d’activité physique à pratiquer par jour pour être en bonne santé

                    FRUITS/LÉGUMES                                               PRODUITS LAITIERS
     Plus de 5                            Ne sait pas           Plus de 4                               Ne sait pas
        2%                                   1%                    5%                                       3%

                             Moins de 5
                               18 %                                                          Moins de 3
                                                                                               32 %
                                                                                                                                                  ACTIVITÉ PHYSIQUE

                                                                                                                                                                                               Alimentation et activité physique chez les adolescents
                                                                                                                                   Ne sait pas                       Moins de 15 min
                                                        De 3 à 4                                                                       3%                                  4%
       5
      79 %                                               60 %                                                              2 h et plus
                                                                                                                               9%                                De 15 min
                                                                                                                                                                  à moins
                                                                                                                        Plus d’1 h                               de 30 min
                                                                                                                      à moins de 2 h                                22 %
                   VIANDE/POISSON/ŒUF                              Ne sait pas      FÉCULENTS                              7%
                                       Ne sait pas                    4%
  3 fois ou plus
                                          4%             Plus de 3                                                                                          De 30 min
       7%
                                                            4%                                                                     1h                      à moins d’1 h
                                                                                           Moins de 1                                                          33 %
                                                                                                                                   22 %
                            Moins d’1 fois                                                   14 %
                                 22 %                     3
                                                         15 %
                                                                                              De 1 à
                                                                            De 2 à moins     moins de 2
                                                                              de 3 fois        37 %
                                                                                26 %
 De 1 à 2 fois
     67 %

Note : N = 432.
Les cercles représentent les réponses conformes aux repères PNNS. Résultats après conversion en jour des réponses formulées par semaine ou par mois. Questions
analysées : « À ton avis, combien de fruits et légumes/produits laitiers/VPO/féculents faut‑il manger par jour, par semaine ou par mois pour être en bonne santé ? »
et « À ton avis, combien de temps par jour, par semaine ou par mois faut‑il pratiquer une activité physique pour être en bonne santé, que ce soit de la marche ou du
vélo pour se rendre d’un endroit à un autre ou du sport ? »

à domicile et après accord des parents,                  Des progrès sensibles,
à un questionnaire en face à face entre                  une information à poursuivre                                     1. Santé publique France réunit l’Institut national

                                                                                                                                                                                       Nutrition
le 29 avril et le 13 juin 2015. La repré‑                   Dans le cadre du Baromètre santé                              de prévention et d’éducation pour la santé – Inpes,
                                                                                                                          l’Institut de veille sanitaire – InVS et l’Établissement
sentativité de l’échantillon a été assurée               nutrition 2008,la connaissance des repères                       de préparation et de réponse aux urgences sani‑
par la méthode des quotas appliquée aux                  du PNNS des jeunes de 12 à 14 ans avait                          taires – Éprus depuis le 1er mai 2016.
variables suivantes : le sexe, l’académie,               été interrogée [3]. Bien que les variations
la catégorie socio‑professionnelle du                    de méthodologies et d’effectifs des études
chef de famille et la catégorie d’agglo‑                 nous invitent à une certaine prudence
mération. Les résultats ont été redressés                dans la comparaison des résultats, on
concernant ces quatre variables ainsi                    constate que dans les deux études, les                             RÉFÉRENCES
que l’âge et le statut public ou privé de                repères les mieux connus étaient ceux                              BIBLIOGRAPHIQUES
l’établissement scolaire.                                relatifs aux fruits et légumes et au
                                                         groupe VPO, et le repère le moins connu
Résultats                                                concernait les féculents. Par rapport aux
    Le repère « Au moins cinq fruits                     résultats obtenus dans le Baromètre santé                          [1] Institut national de prévention et d’éducation
                                                                                                                                                                                                                      LA SANTÉ EN ACTION – No 437 – Septembre 2016

et légumes par jour » était connu de                     nutrition,on observe,en 2015,une connais‑                          pour la santé. J’aime manger, j’aime bouger. Le
81 % des jeunes interrogés, celui du                     sance légèrement supérieure des repères                            guide nutrition pour les ados. Saint‑Denis : Inpes,
groupe VPO de 67 % d’entre eux, celui                    fruits et légumes (81 % contre 78 %),                              2004 : 24 p. En ligne : http://inpes.santepublique‑
du groupe produits laitiers de 60 % des                  VPO (67 % contre 63 %), féculents (19 %                            france.fr/CFESBases/catalogue/pdf/747.pdf
élèves. 19 % connaissaient le repère                     contre 14 %) et activité physique (38 %                            [2] Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Santé.
des féculents et 38 % celui concernant                   contre 36 %) et largement supérieure                               Programme national nutrition santé 2011‑2015.
l’activité physique (voir figure 1).                     du repère produits laitiers (60 % contre                           Paris : ministère du Travail, de l’Emploi et de la
    La seule différence notable observée                 36 %). Ces résultats, à mettre en lien                             Santé, 2011 : 63 p. En ligne : http://social‑sante.
dans notre étude entre les connais‑                      avec les comportements relevés dans les                            gouv.fr/IMG/pdf/PNNS_2011‑2015.pdf
sances des filles et celles des garçons                  enquêtes les plus récentes (voir encadré                           [3] Escalon H., Beck F., Bossard C. Baromètre santé
portait sur le repère VPO, que les filles                page ci-contre), incitent à poursuivre les                         nutrition 2008. Saint‑Denis : Inpes, coll. Baromètres
connaissaient un peu mieux que les                       efforts d’information des jeunes Français                          santé, 2009 : 424 p. En ligne : http://inpes.sante­
garçons (72 % versus 62 %).                              sur les repères nutritionnels.                                     publiquefrance.fr/CFESBases/catalogue/pdf/1270.pdf
Des facteurs individuels, sociaux et environnementaux jouent un rôle dans la pratique d’une
6          activité physique régulière chez l’enfant.

           Une approche socio-écologique
           pour la promotion de l’activité
           physique et la réduction
           de la sédentarité des adolescents

                                 N
Julie-Anne Nazare,                          ous sa­       Sédentarité croissante                    L’ESSENTIEL
maître de conférences,                      vons que          De plus, on ne peut ignorer
Centre de recherche                         la promo­     aujourd’hui l’augmentation du com­        ÇÇ La pratique de l’activité physique dépend
en nutrition humaine                                                                                de l’individu et aussi très fortement de son
                                  tion de l’activité      portement sédentaire, un élément
Rhône-Alpes,                                                                                        environnement, familial, social, géographique.
                                  physique et la          moins connu ou moins identifié par
laboratoire de recherche                                                                            ÇÇ Chez l’adolescent en particulier, l’aspect
en cardiovasculaire,              réduction durable       les adultes et les enfants, bien qu’il    attrayant de la pratique et la motivation
métabolisme, diabétologie         de la sédentarité à     puisse représenter jusqu’à la moitié du   sont des critères favorables majeurs.
et Nutrition (CarMeN),            l’adolescence sont      temps éveillé chez certains individus.    ÇÇ L’étude Intervention auprès des collégiens
université Claude-Bernard         un enjeu de santé       Le comportement sédentaire, comme         centrée sur l’activité physique et la sédentarité
Lyon-1.                           publique majeur,        le fait de regarder la télévision, de     (Icaps), unique en France, démontre
                                  au vu de l’épidé­       passer du temps devant un écran,          que l’on peut augmenter le niveau de pratique
                                                                                                    d’activité physique des adolescents, initiative
                                  mie de surpoids         de lire, etc., n’est pas simplement un
                                                                                                    mise en œuvre dans les collèges.
                                  et d’obésité obser­     niveau d’activité physique insuffisant
                                  vée chez l’adulte       ou d’inactivité physique. En effet, de
                                  comme chez l’en­        plus en plus d’études nationales et
                                  fant (NDLR : en         internationales indiquent que la
           France, l’obésité concernait 15% des           sédentarité (de sedere, « être assis »    l’information simple rencontrent peu
           adultes en 2012, contre 6,1% en 1980,          en latin) et l’activité physique sont     de succès sur le long terme, car elles
           source : Inserm). Les résultats de l’étude     bien deux comportements distincts,        sous-estiment les déterminants sociaux
           présentée ci-avant dans ce numéro              qui alternent au cours de la journée      et environnementaux.
           montrent que 38 % des adolescents              et auraient un impact indépendant             Les facteurs personnels ou intra-
           interrogés connaissaient les repères de        sur la santé [1]. Ainsi, les données      individuels, qu’ils soient innés ou
           l’activité physique (> 1 heure par jour).      nationales et internationales récentes    acquis – le sexe, l’âge, les facteurs bio­
           Même s’il s’agit d’une minorité, il est        suggèrent clairement que pour être        logiques et génétiques, les capacités
           quand même intéressant de remarquer            efficaces à long terme, les stratégies    physiques, le niveau socio-économique –,
           qu’environ 30 % des enfants avaient            de promotion de l’activité physique       influencent les comportements des
           connaissance de l’existence d’un repère,       doivent cibler non seulement l’exer­      enfants et des jeunes vis-à-vis de l’acti­
           certes sous-évalué (de 30 minutes à            cice et l’activité physique pendant les   vité physique. On sait notamment que
           1 heure par jour). Il faut cependant           loisirs, mais également les activités     si les garçons pratiquent plus d’activité
           bien noter que le niveau de connais­           de la vie quotidienne et la limitation    physique, celle-ci commence à décliner
           sances des adolescents vis-à-vis des           des activités sédentaires.                dès l’adolescence quel que soit le sexe ;
           repères « Activité physique » n’est pas                                                  c’est donc une période cruciale pour
           forcément le reflet de leur niveau ni          Les facteurs individuels                  agir. D’autres facteurs psychologiques
           de leur fréquence de pratique. Les                Pour ce faire, il faut donc consi­     – croyances, image de soi et confiance
           recommandations chez les enfants               dérer et cibler l’ensemble des acti­      en soi, ressentis, obstacles perçus –
           sont de minimum 60 minutes par jour            vités de l’adolescent en intégrant le     jouent un rôle dans la pratique d’une
           d’activité physique d’intensité modérée        contexte social, culturel, physique et    activité physique régulière et dans son
           ou élevée, sous forme d’éducation phy­         organisationnel, c’est-à-dire la niche    maintien. Si un jeune ressent qu’il a les
           sique à l’école, de sport ou d’exercice lors   écologique dans lequel il évolue. En      capacités pour pratiquer une activité,
           d’activités extra-scolaires, de jeux, de       effet, les stratégies de prévention qui   il sera d’autant plus motivé et pourra
           transport actif ou toute autre activité        s’appuient uniquement sur les fac­        plus facilement surmonter les obstacles
           de la vie quotidienne.                         teurs individuels, la motivation ou       réels ou perçus lors des exercices.
7
   De plus, l’aspect attrayant, ludique         poids excessive chez les adolescents, en     a diminué de près de 50 % le risque de
de la pratique est bien sûr un critère          ciblant les collégiens dans leur milieu      passer en surpoids au terme des quatre
majeur. Le plaisir perçu, la motivation         de vie [2, 3]. Le programme, fortement       années de suivi. De façon intéressante,
jouent un rôle très important. Plus les         ancré dans les établissements sco­           les effets bénéfiques de l’interven­
adolescents prendront plaisir à pratiquer       laires et doté d’une stratégie intégrant     tion (diminution de la sédentarité,
une activité, plus les chances de la            de nombreux partenaires, s’appuyait          transport actif, activité physique) ont
maintenir à l’âge adulte seront grandes.        sur la perception, la motivation et les      été maintenus pendant deux ans et
                                                connaissances des élèves vis-à-vis de        demi après l’arrêt de l’intervention.
L’environnement social                          l’activité physique, de leur environne­      Certains facteurs ont été identifiés
et physique                                     ment social (familles, enseignants),         comme médiateurs significatifs des
   L’environnement social des jeunes            de leur environnement physique et            effets observés : une attitude positive
joue aussi un rôle majeur dans l’acqui­         également de leur perception de ces          vis-à-vis de l’activité physique, le support
sition d’un comportement actif au               derniers. Les actions étaient concertées,    social et la modification de perception
quotidien : la famille, les amis, les ensei­    co-construites avec les enfants, pour        de leur environnement par les élèves [3].
gnants, les éducateurs, etc. représentent       favoriser la participation de tous les       Cibler à la fois les facteurs individuels,
le support social vis-à-vis de l’activité       adolescents au programme.                    sociaux et environnementaux des ado­
physique ou de moins d’activités séden­                                                      lescents a permis de modifier, à long
taires via leur comportement, leur                  Pour promouvoir la motivation,           terme, le comportement des adolescents
motivation, la transmission de valeurs,         l’adhésion et le plaisir des jeunes,         vis-à-vis de l’activité physique et du
leur pratique personnelle, les encoura­         des animations physiques variées,            comportement sédentaire, avec un
gements, l’expérience. À l’adolescence,         ludiques et facilement accessibles           effet bénéfique sur leur état de santé.

                                                                                                                                                                Activité physique chez les adolescents
le soutien des amis, la convivialité            leur étaient proposées. Ils ont ainsi        Cette étude, originale, indique que la
deviennent un moteur favorisant le              gagné en estime d’eux–mêmes, ce qui          prise en compte de l’individu dans
plaisir associé à l’activité physique.          les a incités à être plus actifs et à        son environnement social et physique
                                                s’engager dans de nouvelles activités.       est un levier majeur de réussite des
   Les facteurs environnementaux, plus          La participation des parents et leur         programmes de promotion de l’activité
particulièrement l’école et la maison,          implication ont été encouragées via des      physique et de réduction de la séden­
sont des déterminants prépondérants du          réunions d’information, des journées         tarité à long terme.
comportement des enfants. Le type de            familiales actives. Ils étaient les relais
logement et son organisation : le nombre        des interventions des enseignants
d’écrans à disposition, l’utilisation           et éducateurs, en dehors de l’école.
familiale de véhicules motorisés ou de          Des actions dans et autour de l’école
vélos, le quartier de résidence (acces­         ont été proposées pendant les cours
sibilité, trajet école-maison, sécurité,        d’éducation physique, les récréations,        RÉFÉRENCES

                                                                                                                                                        Nutrition
proximité de pistes cyclables, parcs,           les temps périscolaires, en favorisant        BIBLIOGRAPHIQUES
chemins, etc.) ; l’école : le type d’activité   l’accessibilité des équipements sportifs.
proposée lors des cours d’éducation             Le programme ciblait aussi les temps
physique, l’encadrement ou encore les           de déplacements de la vie quotidienne
équipements disponibles en cours de             et les activités de la vie familiale, avec    [1] Ekelund U., Steene-Johannessen J., Brown W.J.,
récréation… en d’autres termes, les poli­       notamment l’accompagnement par des            Wang Fagerland M., Owen N., Powell K.E. et al. Does
tiques d’aménagement et de transport            éducateurs sur les premiers trajets hors      physical activity attenuate, or even eliminate, the
urbain, les programmes scolaires, les           école à vélo, à pied ou en trottinette.       detrimental association of sitting time with morta-
politiques nationales de santé publique         Un environnement sécurisé pour les            lity? A harmonised meta-analysis of data from more
sont autant de facteurs susceptibles            déplacements à pied ou en vélo peut           than 1 million men and women. The Lancet, 2016.
d’influencer la pratique des jeunes.            faciliter le choix du passage du transport    En ligne : http://www.thelancet.com/pdfs/journals/
                                                actif dans le quotidien pour les enfants      lancet/PIIS0140-6736(16)30370-1.pdf
La preuve par Icaps                             et leurs parents.                             [2] Simon C., Kellou N., Dugas J., Platat C., Copin N.,
                                                                                                                                                                                LA SANTÉ EN ACTION – No 437 – Septembre 2016

    C’est dans cette perspective que                                                          Schweitzer B. et al. A socio-ecological approach
l’étude Intervention centrée sur                Résultat : augmentation                       promoting physical activity and limiting sedentary
l’activité physique et la sédentarité           de l’activité physique                        behavior in adolescence showed weight benefits
(Icaps) des collégiens, combinant des           et réduction pérenne                          maintained 2.5 years after intervention cessation.
approches éducationnelles, sociales             de la sédentarité                             International Journal of Obesity, 2014, vol. 38, no 7 :
et environnementales, a été déployée               À la fin du programme, les collégiens      p. 936-943. En ligne : http://www.nature.com/ijo/
en intégrant simultanément les dif­             du groupe « Action » bénéficiant du           journal/v38/n7/pdf/ijo201423a.pdf
férents paramètres pour cibler les              programme d’intervention pratiquaient         [3] Kellou N., Sandalinas F., Copin N., Simon C.
adolescents dans leur environnement.            66 minutes d’activité physique de loi­        Prevention of unhealthy weight in children by promo-
L’Icaps a démontré qu’il était possible         sirs de plus par semaine et passaient         ting physical activity using a socio-ecological
d’augmenter la pratique d’activité phy­         16 minutes de moins par jour devant           approach: What can we learn from intervention stu-
sique, de réduire les comportements             un écran de télévision que les adoles­        dies? Diabetes & Metabolism, 2014, vol. 40, no 4 :
sédentaires et de prévenir une prise de         cents-témoins. De plus, l’intervention        p. 258-271.
8

          Accompagner
Dossier

          le développement
          du jeune enfant
                                                    L
          Dossier coordonné par                             a petite enfance   attentes sur le monde physique, mais
          Christine César,                                  est une période    il possède aussi des attentes précises
          chargée d’expertise scientifique,                 cruciale dans la   sur le comportement d’autrui. À
          unité petite enfance,
                                                     construction de           18‑21 mois par exemple, ce qui compte
          Enguerrand du Roscoät,
          responsable de l’unité santé mentale,
                                                     l’individu, et les évé‑   pour son bon développement, c’est le
          Thierry Cardoso,                           nements vécus dans        temps passé à faire quelque chose
          responsable de l’unité petite enfance,     cette période sont        ensemble, avec les parents et l’entou‑
          direction de la Prévention                 susceptibles d’avoir      rage. À chaque âge ses formes d’inte‑
          et de la Promotion de la santé,            des influences sur le     ractions les plus à même de faire
          Santé publique France.                     long terme. C’est         progresser l’intelligence de l’enfant.
                                                     dans la première          L’importance d’accompagner et de
                                                     année de vie que se       soutenir le petit enfant dans sa moti‑
                                                     développent des           vation naturelle à découvrir le monde
                                                     acquisitions senso‑       dans lequel il évolue à travers sa per‑
                                                     rielles, motrices et      ception sensorielle est ainsi essentiel.
                                  intellectuelles essentielles, notamment
                                  pour interagir avec son milieu physique          Ce dossier central est consacré à la
                                  et social. Comme l’expliquent les            périnatalité et la petite enfance jusqu’à
                                  experts que nous avons sollicités, les       3 ans. L’objectif est de mettre à dispo‑
                                  travaux précurseurs de Spitz, Bowlby         sition des professionnels un corpus de
                                  et Brazelton ont révélé à quel point         connaissances récentes, relatives d’une
                                  l’environnement social et affectif est       part au développement de l’enfant et
                                  vital pour le petit humain. Le bébé de       d’autre part à l’influence des détermi‑
                                  quelques mois a non seulement des            nants socio‑environnementaux sur ce
9
                                                                     fiques récentes – ne doivent pas induire      enceinte aux premières années de
                                                                     en erreur : elles n’ont pas de valeurs        l’enfant. Ainsi, dans certains services
                                                                     prédictives à l’échelle d’un individu, mais   de grands hôpitaux publics de l’Hexa‑
                                                                     elles visent à identifier des contextes       gone, les professionnels se rendent, en
                                                                     de développement globalement favo‑            consultations itinérantes, au domicile
                                                                     rables ou défavorables à l’échelle d’une      de l’enfant et de sa famille afin d’épauler
                                                                     population.                                   les parents qui font face à d’impor‑
                                                                                                                   tantes difficultés. Même démarche
                                                                     L’importance des déterminants                 itinérante au sein de certaines PMI,
                                                                     environnementaux                              dans des territoires privés de structures
                                                                         Les contextes sociaux exercent            adaptées. Point fort de consensus : la
                                                                     très tôt une influence sur la santé           nécessité absolue du travail en réseau
                                                                     future des individus avec des inégalités      entre les différents professionnels
                                                                     sociales de santé observées dès la petite     intervenant en périnatalité auprès
                                                                     enfance. Une enquête présentée dans           de l’enfant et de sa mère ou, plus lar‑

                                                                                                                                                                             Accompagner le développement du jeune enfant
                                                                     ce dossier montre que les difficultés         gement, de sa famille. Travailler en
                                                                     afférentes à la précarité sociale sont        réseau aux étapes précoces de la vie
                                                                     insuffisamment prises en compte dans          est un état d’esprit. Le réseau facilite
                                                                     le suivi médical de la grossesse ; que        la connaissance mutuelle et permet
                                                                     ce suivi prend trop peu en compte les         d’apprendre, puis de travailler ensemble.
                                                                     conditions socio‑économiques de vie           Point de départ intangible : un tel
                                                                     de la mère ; qu’une femme enceinte            réseau de soins est forcément amorcé
                                                                     confrontée à des problèmes de com‑            à partir de l’écoute de la future mère
                                                                     munication et d’orientation dans le           et/ou du couple. Il s’agit d’un profond
                                                                     système de santé va faire face à des          changement de culture, qui bouscule
                                                                     difficultés plus importantes pour son         les identités professionnelles concer‑
                                                                     suivi et à une grossesse plus difficile       nées, du médical, de la psychiatrie et
                                                                     et plus à risque .                            du social. Cette démarche n’en est pas
                                                                         Par ailleurs, déterminant premier         moins indispensable au profit de la
                                      © Mat Jacob / Tendance Floue

                                                                     des conditions de vie, les conditions         mère, des parents, de la famille et en
                                                                     de logement jouent un rôle majeur             tout premier lieu de l’enfant.
                                                                     dans la santé des enfants. Le nombre
                                                                     de familles à la rue avec enfant a aug‑
                                                                     menté. Le « mal‑logement » conjugue            La publication de ce dossier central
                                                                     souvent plusieurs risques : saturnisme,        « petite enfance » coïncide avec un ren-
                                                                     humidité, insalubrité, précarité énergé‑       forcement de l’engagement de Santé pu-

                                                                                                                                                                       Dossier
développement, dans une optique de                                   tique, etc. Vivre dans un logement sur‑        blique France dans le champ de la péri-
prévention et de promotion de la santé.                              peuplé aggrave de 40 % le risque pour          natalité et de la petite enfance. En effet,
À cet égard, il convient de rappeler                                 un enfant de 11 à 15 ans d’accuser une         dès sa création début 2016, la nouvelle
à quel point, dans cette période de                                  année de retard scolaire. Pour autant, il      agence nationale de santé publique1 s’est
périnatalité et de petite enfance, le                                n’y a pas de fatalité, l’expérience montre     investie de façon importante dans ce do-
développement de l’enfant s’appuie                                   qu’une politique adaptée permet de             maine en créant une unité chargée de la
sur les interactions qu’il entretient                                faire reculer rapidement les atteintes         périnatalité et de la petite enfance au sein
avec les adultes qui l’entourent et en                               à la santé des enfants.                        de la nouvelle direction de la Prévention
premier lieu avec ses parents. Enfin,                                                                               et de la Promotion de la santé ainsi qu’un
ce dossier aborde la prise en compte                                 Indispensable travail en réseau                programme intégré de surveillance épidé-
des inégalités sociales de santé dans le                                La seconde partie du dossier exa‑           miologique et de prévention. Cette unité
                                                                                                                                                                                               LA SANTÉ EN ACTION – No 437 – Septembre 2016

développement de l’enfant.                                           mine dans quelle mesure ce constat             aura en charge le développement d’une
   La première partie est consacrée                                  – de l’impact très précoce des environ‑        stratégie de prévention et de promotion de
à l’état des connaissances scienti‑                                  nements sur l’état de santé futur – est        la santé – en lien avec les nombreux acteurs
fiques. Sont présentées les données                                  pris en compte dans les pratiques des          engagés au quotidien dans l’accompagne-
les plus récentes sur les grands déter‑                              professionnels et des différents acteurs       ment de l’arrivée et du développement du
minants (attachement, relation avec                                  du champ de la périnatalité et de la           jeune enfant – pour toute la population et
les parents, etc.) de la construction                                petite enfance. Nous avons analysé             sur l’ensemble du territoire national.
sociale et psychologique de l’enfant                                 dans quelle mesure les dispositifs
et de leurs impacts sur la santé à l’âge                             publics de droit commun, comme les             1. Santé publique France réunit l’Institut de
adulte. Toutefois, comme le soulignent                               PMI et les hôpitaux, mais aussi des            veille sanitaire (InVS), l’Institut national de
                                                                                                                    prévention et d’éducation pour la santé (Inpes),
les chercheurs que nous avons mis                                    dispositifs plus spécifiques, prennent
                                                                                                                    l’Établissement de préparation et de réponse
à contribution, ces données – dont                                   en charge la petite enfance et plus            aux urgences sanitaires (Éprus) et Addictions,
certaines sont le fruit d’études scienti‑                            largement la périnatalité, de la femme         drogues, alcool info service (Adalis).
Des études scientifiques récentes montrent que les événements stressants vécus durant la petite
10          enfance peuvent avoir un impact négatif sur la santé de l’adulte.

            Comment les facteurs
            socio‑environnementaux
            durant l’enfance influencent‑ils
            la santé au cours de la vie ?

                                  L
Michelle Kelly‑Irving,                  es études sur    interactions entre les individus et leurs   gage et la parole et, pour les fonctions
chargée de recherche,                   les inégalités   environnements, d’élucider la transi‑       cognitives supérieures, durant les dix
Inserm‑Research unit for                sociales de      tion du social vers le biologique. Ce       premières années de la vie [5]. Cette
epidemiology and public health,
                                 santé (ISS) consti‑     processus d’incorporation biologique        plasticité, largement démontrée à la
UMR1027 ‑ Social epidemiology
team,
                                 tuent un champ de       se produit quand l’expérience sociale,      fois au niveau épidémiologique et au
Faculté de médecine, université  recherche crois‑        humaine, biographique pénètre « sous        niveau biologique sur des modèles ani‑
Paul‑Sabatier, Toulouse.         sant et dynamique,      la peau » et, par l’intermédiaire des       maux, repose sur le fait qu’au cours de
Cyrille Delpierre,               et la réduction des     mécanismes biologiques, influence le        phases sensibles du développement, les
directeur de recherche,          ISS représente une      développement biologique humain [2].        conditions environnementales peuvent
Inserm‑Research unit for         priorité en santé       C. Hertzman observe que la structu‑         avoir des effets biologiques sur le long
epidemiology and public health, p u b l i q u e    en    ration sociale des différents milieux       terme. L’interaction entre les enfants et
UMR1027 ‑ Social epidemiology France, caractéri‑         environnementaux peut conduire à            leur environnement immédiat, surtout
team,
                                 sée par une de‑         des états biologiques et développe‑         relationnel et matériel, contribue donc
Faculté de médecine, université
Paul‑Sabatier, Toulouse.
                                 mande de plus en        mentaux socialement structurés [3].         à forger l’architecture cérébrale et, en
                                 plus explicite de       Cette incorporation biologique est une      conséquence, leurs capacités cognitives
Thierry Lang,
directeur,
                                 connaissances           dynamique continue tout au long de          et leurs fonctions physiologiques. En
Institut fédératif d’études et   pour développer         la vie, une interaction entre différents    ce sens, la définition et la caractérisa‑
de recherche interdisciplinaires des interventions       éléments de l’environnement et l’orga‑      tion de l’environnement psychosocial
santé société (IFERISS),         susceptibles de les     nisme. La réponse biologique est en fait    familial dans l’enfance constituent un
équipe 5, UMR1027                réduire, surtout        une adaptation à un environnement           défi important.
Inserm‑Université Paul‑Sabatier, dans une période        présent, à un temps donné, et elle est
département d’épidémiologie
                                 de crise écono‑         construite en partie par des réponses       Les conditions défavorables
et santé,
Faculté de médecine, Toulouse.
                                 mique [1].              précédentes.                                durant l’enfance et la santé
                                     Les détermi‑                                                    adulte
                                 nants sociaux           L’environnement durant                         Des travaux épidémiologiques ont
                                 peuvent avoir une       l’enfance et la construction                mis en évidence le rôle de l’adversité
             influence toute particulière sur l’état     des inégalités sociales de santé            psychosociale durant l’enfance sur la
             de santé futur en cas d’expositions            Les premières années de la vie           santé à long terme. Il s’agit d’événe‑
             précoces à certains déterminants            constituent une séquence de phases          ments stressants dans la vie de l’enfant,
             sociaux délétères durant la période         développementales essentielles à la         tels que des dysfonctionnements fami‑
             fœtale ou l’enfance. Les maladies           trajectoire de santé ultérieure [4].        liaux, des séparations parentales, des
             de l’adulte y trouvent en effet une         Cette étape est fondamentale, car           négligences physiques, des abus phy‑
             part de leurs origines. Une difficulté      elle est constituée de périodes sen‑        siques et sexuels ou encore le fait d’être
             majeure est de comprendre la façon          sibles pendant lesquelles se forme le       témoin de violences. Ces épreuves ont
             dont ces déterminants s’enchaînent          cerveau humain, caractérisées par des       été liées à de nombreux pathologies
             depuis l’enfance et influencent l’état      capacités de plasticité plus élevées qu’à   chroniques de l’âge adulte [6]. Cette hy‑
             de santé, construisant ainsi les ISS [1].   des périodes ultérieures de la vie. C’est   pothèse a été testée dans une étude de
             La mise en évidence de ces chaînes de       au cours de la première année que se        cohorte qui a suivi jusqu’à aujourd’hui
             causalité implique de comprendre les        développent l’appareil sensoriel, le lan‑   plusieurs milliers de personnes, nées
11
L’ESSENTIEL                                  augmentait avec l’intensité de l’exposi‑    fréquents – notamment le tabagisme
                                             tion. La probabilité de décéder préma‑      et, dans une moindre mesure, un indice
ÇÇ C’est pendant la première année           turément augmentait de 66 % chez les        pondéral en dehors des normes – et
de vie que se développent l’appareil         femmes exposées à une adversité et de       par un faible niveau socio‑économique
sensoriel, le langage et la parole.
                                             80 % chez celles exposées à au moins        à l’âge adulte, sans que ces facteurs
ÇÇ Un environnement favorable
chez l’enfant influe sur sa santé globale    deux adversités, par rapport à celles       suffisent à expliquer l’ensemble du
et, plus tard, sur sa santé d’adulte.        qui n’en avaient pas vécu [8]. La prise     lien observé. Élément essentiel pour
A contrario, l’adversité à laquelle          en compte des facteurs de confusion         montrer l’importance de la CA, il a été
l’enfant fait face est un facteur            et de médiation modifiait peu l’asso‑       montré qu’une charge allostatique plus
potentiel d’altération de santé à l’âge      ciation entre adversité et mortalité.       élevée à l’âge de 44 ans était liée à une
adulte. Les déterminants sociaux             Ces résultats, fondés sur un critère        santé globale moins bonne à 50 ans [12].
ont un impact sur la santé future.
                                             de jugement bien défini, renforcent
ÇÇ Ces données épidémiologiques
et biologiques nouvelles ne doivent pas      la plausibilité de l’hypothèse d’une        Des pistes pour entraver
induire en erreur. Elles n’indiquent         incorporation biologique de l’envi‑         la construction des inégalités
aucune prédiction individuelle               ronnement, notamment pendant des            sociales de santé ?

                                                                                                                                           Accompagner le développement du jeune enfant
et ne comportent donc aucun                  périodes sensibles du développement.            Ces données épidémiologiques et
déterminisme personnel, écartant                                                         biologiques nouvelles ne doivent pas
de ce fait toute idée de dépistage.          Environnement défavorable                   induire en erreur. Elles n’indiquent
                                             durant l’enfance et usure                   aucune prédiction individuelle et ne
                                             physiologique                               comportent donc aucun déterminisme
                                                 Le concept d’usure physiologique        personnel. Toute idée de dépistage
en mars 1958 en Grande‑Bretagne.             multisystémique, appelé « charge allos‑     doit donc être écartée. Les liens mis en
L’adversité psychosociale a été mesurée      tatique », est précieux afin de mieux       évidence n’ont de valeur qu’au niveau
par six dimensions – enfant placé en         comprendre le lien biologique entre         de groupes. Les conséquences à tirer
institution ; enfant négligé par ses         la réponse au stress chronique suscité      de ces observations ne peuvent l’être
parents sur le plan physique ; parent        par les adversités et la santé. L’un des    qu’en termes de prévention et de modi‑
en contact avec l’administration péni‑       mécanismes principaux mis en œuvre          fication des conditions de vie des per‑
tentiaire ; séparation des parents suite     par les organismes pour s’adapter à         sonnes et des groupes, sans idée de suivi
à un divorce, un décès ou une autre          leur environnement consiste en des          individuel. La variété des déterminants
raison ; expérience familiale de la mala‑    systèmes de réponses au stress. Exposés     évoqués dans ces travaux concerne
die mentale ; expérience familiale de la     à un stress chronique, ces systèmes         aussi bien les conditions de vie de
toxicomanie – ; elle a été codée en trois    sont en état constant de « surchauffe ».    l’enfance, que celles durant la grossesse
catégories : aucune adversité (75 %),        Cette usure physiologique de multiples      ou les conditions socio‑économiques de
une adversité (20 %), au moins deux          systèmes, qui définit la charge allos‑      vie des familles. Les conséquences sont
adversités (5 %). Après cinquante ans        tatique (CA), est le prix à payer pour      donc à chercher au sein de toutes les
de suivi, la probabilité de déclarer avoir   s’adapter à un environnement difficile.     politiques, bien au‑delà des politiques

                                                                                                                                     Dossier
eu un cancer avant l’âge de 50 ans           Selon B.S. McEwen, la pression exercée      de santé, et il est indispensable de
chez les femmes était deux fois et           sur le corps par des alternances de pics    mobiliser l’ensemble des acteurs pour
demi plus élevée chez celles ayant été       et de bas de la réponse physiologique       des partenariats de promotion de la
exposées à au moins deux adversités,         et l’impact de l’usure sur un certain       santé ; parmi eux, l’Éducation nationale
par rapport à celles exposées à aucune       nombre de tissus et d’organes peuvent       est un partenaire privilégié, mais loin
épreuve, après avoir pris en compte les      prédisposer un organisme aux maladies.      d’être exclusif. Deuxième grande consé‑
facteurs de confusion. Ces résultats         Cet état est défini comme la charge         quence, les politiques de santé visant
suggèrent qu’une exposition adverse          allostatique [9]. À l’âge de 44 ans, elle   à prévenir les maladies chroniques
pendant l’enfance pourrait constituer        est liée à des expositions à des adver‑     et à réduire les inégalités sociales de
pour les femmes un facteur de risque         sités psychosociales durant l’enfance       santé doivent se penser à l’échelle de
de cancer à l’âge adulte. La persistance     ainsi qu’au niveau socio‑économique         quelques décennies, dans la mesure où
                                                                                                                                                             LA SANTÉ EN ACTION – No 437 – Septembre 2016

d’un lien, même après prise en compte        des premières années de vie, estimé         les décisions de politiques publiques
des facteurs de confusion et des fac‑        par le niveau d’études de la mère, la       prises aujourd’hui vont influencer l’état
teurs de médiation les plus connus,          catégorie socioprofessionnelle du père.     de santé dans plusieurs décennies.
conforte l’idée d’un rôle biologique         Les individus ayant été confrontés à        S’agissant de l’enfance, la question
direct de l’adversité sur la survenue        plus de deux adversités psychoso‑
des cancers [7].                             ciales dans l’environnement familial
    Dans une deuxième étude sur la           durant leur enfance [10] comme ceux         « PLACER LES PARENTS
même cohorte, le risque de décès pré‑        dont les parents avaient une position       DANS LES CONDITIONS
maturé chez les hommes était plus            socio‑économique basse [11] avaient         PSYCHOSOCIALES
élevé (+ 57 %) chez ceux qui avaient         une CA plus élevée à 44 ans. Ce lien        ET ÉCONOMIQUES
connu au moins deux adversités par           entre environnement adverse et              TELLES QU’ILS PUISSENT
rapport à ceux qui n’avaient pas été         score de CA élevé était expliqué par        ASSURER AU MIEUX
exposés. Chez les femmes, le risque          des comportements à risques plus            LEUR RÔLE PARENTAL. »
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