Charte de recommandations - sur l'usage de la Réalité Virtuelle Comité d'Éthique VR - VR Connection

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Charte de recommandations - sur l'usage de la Réalité Virtuelle Comité d'Éthique VR - VR Connection
Comité d’Éthique VR

Charte de recommandations
sur l’usage de la Réalité Virtuelle

    Cette charte est à destination des commanditaires,
 des utilisateurs, et des producteurs de contenus immersifs
Charte de recommandations - sur l'usage de la Réalité Virtuelle Comité d'Éthique VR - VR Connection
Charte de recommandation sur l’usage de la Réalité Virtuelle - octobre 2019

   Abstract
Dans les technologies immersives, la réalité virtuelle (VR), qui consiste à recréer un monde
entièrement virtuel généré par un ordinateur et dans lequel l’utilisateur peut s’immerger
complètement, est probablement celle qui provoque l’impact le plus important sur les
systèmes cognitif et émotionnel de l’utilisateur.

L’immersion provoquée par le système de réalité virtuelle, en visiocasque, est telle qu’elle
a prouvé son efficacité dans la thérapie contre les phobies. Mais si elle a un impact si fort
sur la cognition, il appartient à la filière de s’intéresser à son encadrement.

En effet, les technologies immersives ont désormais atteint une maturité qualitative et
opérationnelle suffisante pour être considérées durablement, par les industriels, dans
les processus de formation, de prévention, d’apprentissage, et d’assistance au geste
technique. Elles vont alors être confrontées aux contraintes de l’environnement de travail.
Et pourtant, leurs effets ne sont pas encore totalement connus. L’Agence Nationale de
Sécurité Sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) s’est saisie
du dossier pour étudier leur impact sanitaire et livrera des conclusions en 2020. Mais
dès à présent, la filière réagit avec la création d’un Comité d’Ethique VR dont l’une des
missions est de publier des recommandations à destination des commanditaires, des
utilisateurs et des producteurs de contenus immersifs pour éviter des écueils bien connus
de la profession.

Ces 22 recommandations couvrent les effets des incohérences sensorimotrices (SM),
des interfaces fonctionnelles irréalistes (CG), des contenus inappropriés (CT), des états
psychologiques et cognitifs inadaptés (PS), des modalités pratiques mal préparées
(MP). Elles ont été élaborées par le Comité d’Ethique VR qui regroupe psychiatres,
neuropsychologues, chercheurs, experts de l’immersion, producteurs de contenus
immersifs, grandes entreprises dans un objectif de faire de cette charte une référence
dans l’usage de la réalité virtuelle.

Ces recommandations n’ont pas l’objectif de freiner l’usage de la réalité virtuelle mais
elles sont, au contraire, destinées à faire bénéficier l’écosystème des apprentissages,
encore empiriques, des quelques années d’existence de cette technologie dans les jeux,
les divertissements, et les simulateurs.

La charte a vocation à évoluer et à s’enrichir au gré des usages.
Les retours et commentaires sont bienvenus à l’adresse ethique@vr-connection.com

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Charte de recommandation sur l’usage de la Réalité Virtuelle - octobre 2019

   Table des matières
Préambule													5
Les technologies immersives										6

1. Introduction												6
   Les technologies immersives										6
   La réalité virtuelle (VR)											7
   La réalité virtuelle (VR) en visiocasque								7
   La réalité virtuelle (VR) dans le cadre de la formation et de la prévention			 8

2. Les effets négatifs dus aux incohérences sensorimotrices					                        10
   Solutions pour contourner les effets négatifs des incohérences sensorimotrices sur
   le confort de l’utilisateur											11
   Les trois incohérences sensorimotrices majeures							11
      Inconfort SM1 : Incohérence entre vue et mouvement due à la latence d’affichage		 11
      Inconfort SM2 : Incohérence oculomotrice								                                  12
      Inconfort SM3 : Incohérence visuo-vestibulaire							                             12
   Les effets négatifs dus à la non-colocalisation							                               14
      Inconfort SM4 : Incohérence de non-colocalisation						                           14
   Les effets négatifs dus à la déformation du champ visuel						                       14
      Inconfort SM5 : Incohérence de déformation du champ visuel					                   14

3. Les effets négatifs dus à un interfaçage fonctionnel inadapté au schème
sensorimoteur naturel											                                                          15
   Inconfort CG1 : Inadaptation à un geste fonctionnel artificiel					                    15

4. Les effets négatifs provoqués par le contenu							                                    16
   Inconfort CT1 : Le niveau inapproprié d’immersion corporelle 					                     16
   Inconfort CT2 : La suggestion inappropriée d’attention						                           17
   Inconfort CT3 : La proximité excessive								                                         17
   Inconfort CT4 : La représentation inappropriée d’un humain 					                       18
   Inconfort CT5 : La progression asymétrique dans les niveaux d’immersions			            18
   Inconfort CT6 : Les transitions brusques								                                       19
   Inconfort CT7 : Les environnements anxiogènes							                                   19
   Inconfort CT8 : La gestion du temps									                                           20

5. État psychologique et cognition									                                                21
   Introduction												21
   Fonctionnement cérébral et immersion en réalité virtuelle 						                        23
   PS1 : Recommandations issues de la psychologie - psychopathologie				                   23
   PS2 : Recommandations issues de la neuropsychologie						                               25
   PS3 : Recommandations générales concernant les passations pour les utilisateurs novices 26

6. Modalités pratiques et le déroulement d’une expérience, dans un cadre
professionnel       											28
   MP1 : Consultation des entités institutionnelles							                                 28
   MP2 : Considérations préalables au lancement d’une formation en réalité virtuelle		     29
   MP3 : Recueil du consentement de l’utilisateur							                                   29
   MP4 : Recommandations de déroulé d’une séance de formation tutorée en réalité virtuelle 30
   MP5 : Recommandations sur le dispositif matériel à mettre en place				                  31

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ANNEXES													32

Annexe - Incohérences sensorimotrices - chap. 2 							          33
  Latence d’affichage											                                 33
  Incohérence oculomotrice										                             34
  Incohérence visuo-vestibulaire 										35
  Quelques notions sur le comportement sensorimoteur humain					 40
  Introduction à l’extéroception et la proprioception							     40

Annexe - État psychologique et cognition - chap. 5						                        44
  Sentiment de présence 											                                             44
  Le phénomène d’illusion corporelle (et le concept d’unité d’identification
  phénoménologique)											                                                  46
  Le phénomène dit de l’effet proteus									                                  47
  Perspective neuroscientifique : que vit notre cerveau en VR ?					            47
  Utiliser la VR pour en savoir plus sur la cognition et le cerveau 					       48
  Pour comprendre les effets possibles de la VR sur la psychologie humaine :
  les usages de la VR en psychothérapie pour traiter les troubles anxieux.			   48
  Réflexions générales basées sur des études concernant les effets de la VR
  sur la psyché et le comportement 									                                    49

Annexe - Modalités pratiques et déroulement d’une expérience dans un cadre
professionnel – chap. 6											                                              51

Bibliographie			                                        								                53

Vocabulaire													                                                        57

Contributeurs												                                                       60

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    Préambule
Le Comité d’Éthique VR est un groupement indépendant de psychiatres,
neuropsychologues, chercheurs, experts de l’immersion, producteurs de contenus
immersifs, grandes entreprises*. Il est mis en place à l’initiative du GIE VR Connection,
la filière française des solutions immersives, et est présidé par M. Franck Rougeau. Le
comité a pour vocation de :

1 - Définir les règles à respecter et émettre des recommandations à destination des donneurs
d’ordre (commanditaires, prescripteurs, ingénieurs pédagogiques, validateurs, formateurs,
élèves et utilisateurs) et des producteurs de contenus, de façon à limiter les effets indésirables
des expériences immersives pour les usages professionnels.

2 – Créer une sorte de PEGI VR (création du système d’évaluation, développement du
lobby du label, structuration et reconnaissance du label dans la réglementation), de façon à
classifier les contenus immersifs produits par les studios dans un objectif d’information de
l’utilisateur grand public sur l’intensité de l’impact généré par l’expérience.

Ce document, issu des réunions mensuelles du Comité d’Éthique VR pendant un an, est son
premier livrable. Il traite des recommandations sur l’usage de la Réalité Virtuelle en formation
ou prévention dans un environnement professionnel. Ces recommandations couvrent
essentiellement le champ opérationnel et s’inscrivent en complément des conclusions de
l’étude des effets sanitaires potentiels liés à une exposition aux technologies de réalité
virtuelle (VR) et de réalité augmentée (AR) que l’ANSES prévoit de publier en 2020.

*         La liste des contributeurs est fournie en annexe
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   1. Introduction

Les technologies immersives
Les technologies immersives regroupent plusieurs solutions techniques, dont les quatre
plus développées sont : la réalité virtuelle (VR), la vidéo 360°, la réalité augmentée (AR) et
la réalité mixte (MR). Ces technologies peuvent ensuite se diffuser sur plusieurs dispositifs
matériels.

                        Réalité virtuelle                                               Vidéo 360°
                      (VR : Virtual Reality)
                                                                               Visionner un contenu vidéo en
                   Immersion dans un monde                                     360°, c’est-à-dire hors de son
                    entièrement virtuel généré                                     champ de vision initial
                     par ordinateur. Il occulte
                  l’environnement réel autour.

                 Réalité augmentée                                                       Réalité mixte
              (AR : Augmented Reality)                                                (MR : Mixed Reality)

              Compléter une vue réelle en                                          Intégrer et interagir avec des
             temps réel par une couche de                                          objets virtuels dans la réalité
              données ou d’objets virtuels.

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La réalité virtuelle (VR)
La réalité virtuelle (VR) permet en temps-réel de recréer un environnement entièrement
artificiel, totalement maîtrisé par le code informatique, qui permet de jouer tous les
scénarii possibles en gérant les interactions avec l’utilisateur. C’est une technologie
particulièrement efficace pour un certain nombre d’applications car l’environnement
virtuel va pouvoir réagir aux interactions de l’utilisateur sans la limite d’être figé comme
dans un film.

Elle se caractérise, entre autres, par cinq éléments :
• Interactif : l’utilisateur est acteur, il interagit avec l’environnement virtuel via l’ordinateur
   (l’application / le logiciel) et des interfaces motrices (manettes, « leap motion* »,
   pointage oculaire, etc…) ;
• Immersif : l’utilisateur est plongé dans un monde virtuel, coupé du monde extérieur ;
• Visuel : par exemple, au travers d’un casque ou dans une salle équipée (simulateur) ;
• Sonore : incluant des sons recréant l’environnement, ou des instructions orales
   pouvant guider l’utilisateur ;
• Haptique : avec quelquefois la possibilité de toucher, via des interfaces tactiles, ou de
   ressentir des forces sur ses mains, via des interfaces à retour d’effort.

La VR peut se pratiquer sur différents dispositifs matériels provoquant plusieurs degrés
d’immersion : les écrans de PC, de tablettes, de smartphones, les écrans projetés (salles
immersives ou “Cave”), les écrans multiples avec simulateur matériel, les visiocasques
avec ou sans simulateur matériel. Le dispositif étant un élément essentiel de l’immersion,
les recommandations éthiques peuvent différer en fonction de celui qui est sélectionné.

La réalité virtuelle (VR) en visiocasque
La VR en visiocasque permet une immersion importante (« immersion corporelle »)
car l’utilisateur peut naturellement regarder autour de lui à 360° et peut se déplacer
physiquement dans l’environnement virtuel. Aussi, le visiocasque est un dispositif
relativement abordable pour être considéré pour un déploiement dans un cadre
industriel. Il est entendu que des accessoires complémentaires peuvent être importants
dans le cadre d’une immersion plus profonde impliquant des interactions physiques avec
l’environnement (siège actif, pédales, volant, boutons, …). C’est le dispositif pris comme
référence dans l’élaboration de cette charte de recommandations. Mais la plupart des
recommandations suivantes sont valables pour toutes applications VR, qu’elles soient
lues avec ou sans visiocasque.

*         Les mots en caractère gras sont définis dans l’annexe vocabulaire
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La réalité virtuelle (VR) dans le cadre de la formation et de
la prévention
L’immersion et l’implication de l’utilisateur, provoquées par la VR, favorisent l’apprentissage
et l’ancrage mémoriel. Les entreprises utilisent, de plus en plus, cette modalité pédagogique
pour former les salariés à des gestes métiers ou prévenir et réduire l’exposition aux risques
dans leur environnement de travail.

Les gains / avantages de la modalité :
• Immersion à 360°, « du sol au plafond »;
• Liberté du formateur sur le niveau de réalisme (environnement extrêmement réaliste ou
   non, suivant les choix pédagogiques) ;
• Reconstitution d’environnements spécifiques, peu accessibles, et/ou dangereux ;
• Scénarisation possible et liberté du formateur sur la navigation contrainte ;
• Possibilité de faire des exercices validants (avec points / récompenses / badges ...) ;
• Possibilité de faire une évaluation objective et automatisée du comportement de
   l’apprenant ;
• Forte économie (coût immobilisation & déplacement du personnel, réduction des frais de
   structure, …) ;
• Logistique simplifiée pour des formations déportées hors de l’école (transport,
   formateur, …) ;
• Progression au rythme de l’apprenant.

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Les gains / avantages sur le plan pédagogique :
• Contribue à améliorer la motivation des apprenants ;
• Favorise la mémorisation des informations ;
• Possibilité de rejeux pour observer et comprendre ses erreurs ;
• Possibilité d’enregistrement et d’évaluation de l’activité de l’apprenant en temps-réel ou en
   différé, pour le formateur ;
• Possibilité d’assistance pédagogique, automatisée ou non, pour l’apprenant ;
• Adapté à l’enseignement de notions abstraites par représentations ;
• Adapté à des situations demandant un accès sur le terrain ;
• Partie intégrante du « blended learning »;
• Expérience utilisateur enrichie par rapport à une pédagogie non immersive.

Les scénariis déroulés dans une expérience VR peuvent avoir un impact variable en fonction
du conditionnement de l’utilisateur, de sa préparation, du cadre dans lequel il joue l’expérience
et enfin du contenu évoqué. Afin de circonscrire les recommandations aux usages les plus
fréquents du marché, nous nous sommes concentrés, dans un premier temps, sur une
charte de recommandations d’éthique à destination des commanditaires, des prescripteurs,
des ingénieurs pédagogiques, des validateurs, des formateurs, des producteurs de contenu
immersif, dans les usages de la formation professionnelle et de la prévention dans l’industrie.

L’usage des techniques de réalité virtuelle peut poser divers problèmes de confort et de santé.
Ces derniers peuvent être induits par certaines catégories d’applications, créant des malaises
ou vertiges et risques de chute chez les plus âgés. Ils sont principalement dus :
• à des incohérences physiques, c’est-à-dire sensorimotrices ;
• à un interfaçage fonctionnel inadapté au schème sensorimoteur naturel ;
• à des contenus inappropriés ;
•    à des perturbations de l’état psychologique et cognitif du sujet par l’environnement virtuel ;
•    à des mises en œuvre non accompagnées ou des dispositifs technologiques non sécurisés.

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    2. Les effets négatifs dus aux
    incohérences sensorimotrices*
Indépendamment des solutions techniques exploitées, même avec un visiocasque
« parfait », qui proposerait une même qualité de vision que celle du monde réel,
persisteront toujours des incohérences physiques (c’est-à-dire sensorimotrices) pour
certains types d’applications. Par principe, la création d’un nouveau monde artificiel
implique l’existence de nouvelles règles, limites et potentialités ; dont certaines
dépassent ou diffèrent sensiblement de celles du monde réel.

Ces incohérences sensorimotrices peuvent être, soit à l’intérieur d’un sens (par
exemple, incohérence entre accommodation et convergence des yeux en vision
stéréoscopique), soit entre plusieurs sens (par exemple, la locomotion sur un tapis
roulant entraînant une incohérence entre la vision et la proprioception vestibulaire),
soit entre sens et réponses motrices (souvent due à un décalage temporel entre l’action
et la perception en retour de cette action). L’exemple le plus connu est le temps de
latence entre le mouvement de rotation de la tête et l’affichage du point de vue correct
dans le visiocasque.

Dans le monde réel, l’homme              «Ces incohérences sensorimotrices
construit      une    représentation     peuvent être, soit à l’intérieur d’un sens,
cohérente depuis son enfance             soit entre plusieurs sens, soit entre
à partir de tous les stimuli             sens et réponses motrices»
sensoriels reçus. Dans le monde
virtuel, l’utilisateur cherchera en
conséquence à interpréter avec cohérence ce qu’il perçoit, par rapport à son vécu dans
le monde réel et malgré les incohérences sensorimotrices imposées par les techniques
VR. Mais il est encore difficile actuellement de déterminer pour tous les usagers, aux
comportements variables si, immergés dans tel ou tel environnement virtuel, ils arrivent
à percevoir sa cohérence et à surmonter les éventuelles incohérences sensorimotrices.
Certains seront plus sensibles que d’autres mais sans percevoir profondément pour
quelles raisons. Si des incohérences sensorimotrices peuvent provoquer une gêne,
quelquefois rédhibitoire, elles offrent aussi un résultat bénéfique quand le cerveau du
sujet arrive à rendre cohérent la perception de l’activité lors de la simulation virtuelle.
Un exemple classique : le sujet porte un visiocasque en restant en position fixe dans
un lieu. Si le point de vue du sujet dans l’environnement virtuel se déplace en limitant
les accélérations, le sujet se sent en mouvement, bien que ses systèmes vestibulaires
indiquent que son corps est sans mouvement.

*         Les éléments de ce chapitre sont extraits de [Fuchs 2018]
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Solutions pour contourner les effets négatifs des
incohérences sensorimotrices sur le confort de l’utilisateur
Pour chacune des incohérences sensorimotrices, quatre catégories de solutions permettent
de contourner les effets négatifs sur le confort de l’usager.
• Atténuation de l’impact de l’incohérence sensorimotrice sur l’inconfort ou le malaise de
    l’utilisateur ;
• Suppression de l’incohérence sensorimotrice en modifiant le fonctionnement de l’activité
    virtuelle ;
• Suppression de l’incohérence sensorimotrice en modifiant le fonctionnement de l’interface
    ou en rajoutant une autre interface ;
• Adaptation de l’usager à l’incohérence sensorimotrice pour ne plus avoir d’inconfort ou
    de malaise.
Cette dernière catégorie « d’adaptation individuelle » à ces incohérences n’est pas exposée
et reste un sujet de recherche actuelle.

Les trois incohérences sensorimotrices majeures
Tandis qu’une dizaine d’incohérences sensorimotrices perturbatrices sont connues, certaines
sont très spécifiques (voir chapitre 6 dans [Fuchs, 2018]). Les trois plus importantes sont la
latence d’affichage, l’incohérence oculomotrice et l’incohérence visuo-vestibulaire.

    INCONFORT SM1 : INCOHÉRENCE ENTRE VUE ET MOUVEMENT DUE À LA
    LATENCE D’AFFICHAGE

   Exemple explicatif : Si le temps de latence                                 Difficulté à diminuer l’inconfort : faible.
   d’affichage entre tout mouvement de tête                                    Cible : Développeurs de l’application
   de l’observateur et l’affichage du bon point                                Bibliographie : [Fuchs, 2018], [LaValle,
   de vue correspondant au mouvement est                                       2017], recommandation [Oculus]
   trop important (plus de 50 millisecondes),
   l’environnement virtuel ne sera pas perçu
   immobile pour l’usager, qui le verra osciller
   intempestivement.

    Recommandations :
        Atténuation de l’impact de l’incohérence par prise en compte dans le matériel et le logiciel :
    Vérifier que le matériel choisi offre un temps de latence de l’ordre de 20 millisecondes
    et que le programme informatique développé n’augmente pas ce temps de latence.
        Suppression de l’incohérence en modifiant l’interface visuelle :
    Remplacer l’immersion visuelle via un visiocasque par un écran parabolique, un écran
    cylindrique ou avec un ensemble d’écrans plats, la tête de l’observateur devant être
    immobile en translation par rapport aux écrans.

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Charte de recommandation sur l’usage de la Réalité Virtuelle - octobre 2019

    INCONFORT SM2 : INCOHÉRENCE OCULOMOTRICE

 Exemple      explicatif    :     en   vision                                  deux images.
 stéréoscopique, que ce soit dans un                                           Difficulté à diminuer l’inconfort :
 visiocasque ou tout écran stéréoscopique                                      moyenne.
 (Cave, cinéma en relief « 3D », etc.), une                                    Cible : Concepteurs et développeurs de
 trop grande différence entre l’image de l’œil                                 l’application.
 gauche et celle de l’œil droit, imposée aux                                   Bibliographie : [Shibata, 2011], [Fuchs,
 observateurs, crée une fatigue oculaire,                                      2018], [LaValle, 2017].
 voire une impossibilité de fusionner les

    Recommandations :
        Atténuation de l’impact de l’incohérence par prise en compte dans le contenu :
    Limiter la différence entre les images stéréoscopiques gauche et droite (disparités
    rétiniennes inférieures à un seuil de l’ordre de 1° à 1,5°), ce qui revient à positionner
    les objets virtuels dans une certaine zone par rapport à la position de l’observateur. (Cf.
    annexe) ;
        Suppression de l’incohérence en modifiant l’interface visuelle :
    Afficher en vision monoscopique (même images pour les deux yeux de l’observateur,
    comme au cinéma classique). Ceci est à proposer systématiquement pour les quelques
    pourcents de la population qui ne peuvent pas voir en vision stéréoscopique ou ceux
    qui fusionnent les images stéréoscopiques avec un effort oculomoteur important et
    donc avec une fatigue oculaire.

    INCONFORT SM3 : INCOHÉRENCE VISUO-VESTIBULAIRE

   Exemple      explicatif   :    L’observateur                                Difficulté à diminuer l’inconfort :
   étant immobile dans la pièce réelle, tout                                   grande.
   déplacement virtuel perçu par lui, dû à la                                  Cible : Concepteurs et développeurs de
   vision des mouvements de la scène observée,                                 l’application.
   va créer de l’inconfort, voire des nausées                                  Bibliographie     :   [Kemeny,     2015],
   (médicalement appelé cinétose), si les                                      [Kennedy, 1993], [Kennedy, 2000], [Harm,
   accélérations des mouvements virtuels sont                                  2002], [Stoffregen, 1991].].
   trop fortes.
    Recommandations :
         Atténuation de l’impact de l’incohérence par prise en compte dans le contenu :
    Il existe cinq solutions, les deux premières étant complémentaires et, les trois dernières,
    également entre elles :
    • Limiter les accélérations en translation et en rotation du déplacement de l’utilisateur
        dans l’environnement virtuel ;
    • S’assurer que les trajectoires ne soient pas être trop tortueuses, donc à rayons de
        courbure assez élevés ;
    • Diminuer le champ de vision observé par une occultation des images en vision
        périphérique ;
    • Injecter dans les images en vision périphérique, quelques références spatiales de
        l’environnement réel pour stabiliser l’utilisateur ;
    • Afficher des objets dans l’environnement virtuel qui soient immobiles par rapport à
        l’environnement réel.
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   Suppression de l’incohérence en modifiant le fonctionnement de l’activité virtuelle :
   Il existe deux solutions différentes :
   • Le déplacement réel de la personne, debout en environnement réel, est le même
       géométriquement que le déplacement en environnement virtuel ;
   • Le déplacement en environnement virtuel se fait par téléportation d’un lieu à un autre,
       l’utilisateur restant immobile dans l’environnement réel (ce mode de déplacement
       peut s’avérer très peu ergonomique pour certaines personnes, notamment les
       plus âgées qu’il est préférable d’assoir : nous n’avons pas constaté d’inconfort lié
       à la téléportation, mais par contre de grandes difficultés de compréhension et de
       manipulation)
   Suppression de l’incohérence en rajoutant une interface à simulation de mouvement :
   Pour solliciter correctement les systèmes vestibulaires de l’utilisateur, on exploite des
   interfaces à simulation de mouvement (sièges, cabines, tapis roulant, etc.).

Synthèse des solutions à envisager pour traiter les trois principales incohérences
sensorimotrices

                              Atténuer l’impact                                Supprimer l’impact Supprimer
                              d’une incohérence                                par modification     l’impact par ajout
                                                                               du                   d’interface
                                                                               fonctionnement de
                                                                               l’activité virtuelle
 SM1 :                        Diminution du temps                                                   Ecrans autour
 Incohérence                  d’exécution du logiciel                                               de la tête sans
 due à la                     ou augmentation de la                                                 translation
 latence                      puissance de calcul du
 d’affichage                  dispositif

 SM2 :                        Positionner les objets virtuels Vision                                Futurs
 Incohérence                  dans une certaine zone          monoscopique                          visiocasques à
 oculomotrice                                                                                       accommodation
                                                                                                    adaptative

 SM3 :                        Limiter accélération et                          Environnement réel   Interface à
 Incohérence                  inclinaison                                      et environnement     simulation de
 visuo-                                                                        virtuel              mouvement
 vestibulaire                 Trajectoires douces                              géométriquement
                                                                               identiques
                              Diminuer le champ de vision
                                                                               Déplacement par
                              Traitements en vision                            téléportation
                              périphérique

                              Objets fixes / environnement
                              réel en vision périphérique

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Les effets négatifs dus à la non-colocalisation
La colocalisation est la superposition de la perception visuelle avec la perception
proprioceptive du corps de l’usager. Concernant les mains, l’usager doit voir ses mains
au même endroit qu’il les perçoit proprioceptivement, c’est-à-dire avec ses récepteurs
sensoriels dans ses muscles, tendons et articulations. La non-colocalisation peut
être due à des défauts techniques (capteurs imprécis) ou à un choix de faire de
la téléopération : l’usager manipule des objets à distance de son corps. La non-
colocalisation est donc aussi une incohérence sensorimotrice (incohérence visuo-
manuelle). Celle-ci peut créer des difficultés cognitives pour manipuler des objets
virtuels mais ne crée pas de malaise ou de nausée.

    INCONFORT SM4 : INCOHÉRENCE DE NON-COLOCALISATION

   Exemple explicatif : Un cas particulier                                     perturbant : l’observateur ressent une
   d’erreur de colocalisation existe lors de                                   incohérence proprioceptive, son corps
   toute visualisation des prises de vue de                                    étant enfoncé dans le sol ou ses pieds en
   caméra 360°. Les prises de vue étant faites à                               l’air.
   une certaine référence de hauteur des yeux
   d’une personne, la restitution visuelle de la                               Difficulté à diminuer l’inconfort :
   scène filmée sera faussée verticalement                                     grande.
   pour tout usager ayant une taille différente                                Cible : Concepteurs et développeurs de
   que celle prise en référence, ce qui est                                    l’application

    Recommandation :
       Atténuation de l’impact de l’incohérence par la prise en compte dans le contenu :
    Traiter le sujet à la troisième personne, c’est-à-dire voir la scène sans en faire partie.

Les effets négatifs dus à la déformation du champ visuel

    INCONFORT SM5 : INCOHÉRENCE DE DÉFORMATION DU CHAMP VISUEL

  Exemple explicatif : Le champ visuel réel                                    Difficulté à diminuer l’inconfort        :
  de 180° est compressé et ramené dans un                                      grande.
  champ plus étroit (celui du visiocasque).                                    Cible : Développeurs de l’application

    Recommandation :
        Atténuation de l’impact de l’incohérence par la prise en compte dans le logiciel :
    Diviser le champ visuel réel de 180° en plusieurs secteurs correspondants aux champs
    de vision des visiocasques utilisés. Par exemple, si le visiocasque ne permet de ne
    voir qu’un champ de 120°, l’environnement virtuel ne devrait représenter que 120° de
    champ de vision réel.
Les autres incohérences sensorimotrices perturbatrices sont moins fréquentes. Certaines
sont dues au choix du concepteur de l’application VR de proposer une activité sensorimotrice
irréaliste (applications artistiques, recherches en neurosciences, etc.), comme de se déplacer
en se voyant en caméra objective (à la troisième personne), augmenter artificiellement son
champ de vision (ceux des visiocasques étant limités), voler dans les airs en voyant son
propre corps, etc.
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3. Les effets négatifs dus à un
interfaçage fonctionnel inadapté au
schème sensorimoteur naturel

Pour interagir dans un environnement                                           Plus précisément, si le concepteur
virtuel     (observation,     manipulation,                                    souhaite se rapprocher des actions
déplacement, etc.), l’utilisateur exploite                                     physiques réalisées dans le monde réel,
des interfaces sensorielles ou motrices (de                                    il faut invoquer la notion psychologique
commande), telles qu’un visiocasque, des                                       de schème telle que proposée par le
manettes, un tapis roulant, etc. Les gestes                                    psychologue Piaget [Piaget, 1979] : un
fonctionnels à mettre en œuvre font appel                                      schème est « l’organisation mentale des
à deux types de processus cognitifs pour                                       actions telles qu’elles se généralisent lors
permettre une interaction et une immersion                                     de la répétition de cette action en des
efficaces : soit un processus naturel, soit                                    circonstances analogiques ». Dans ce cas,
un processus métaphorique. Ces gestes                                          l’être humain fait appel dans ses activités
fonctionnels peuvent se rapprocher des                                         sensorimotrices à des automatismes qu’il
actions physiques réalisées dans le monde                                      a assimilés dans le monde réel depuis son
réel, comme marcher sur un tapis roulant,                                      enfance. A l’inverse, comme dans le cas de
manipuler un objet. Ils peuvent être, à                                        la téléportation, c’est via une métaphore
l’opposé, totalement artificiels, comme le                                     qu’il exécute son action et non pas par
fait d’indiquer avec une manette une zone                                      une copie plus ou moins automatique
où l’on veut se déplacer et s’y retrouver                                      d’un schème. Au lieu d’exploiter un
instantanément par une simple commande                                         comportement sensorimoteur et acquis de
binaire sur un bouton (mécanisme de la                                         la personne, on lui propose, visuellement
téléportation).                                                                en général, une image symbolique de
                                                                               l’action ou de la perception souhaitée.

    INCONFORT CG1 : INADAPTATION À UN GESTE FONCTIONNEL ARTIFICIEL

  Exemple explicatif : Le déplacement                                           Difficulté à diminuer l’inconfort :
  effectué en indiquant avec une manette une                                    moyenne.
  zone où l’on veut se déplacer et s’y retrouver                                Cible : Développeurs de l’application et
  instantanément par une simple commande                                        formateur.
  binaire sur un bouton : la téléportation.                                     Bibliographie : [LaValle, 2017], [Fuchs,
                                                                                2018]

    Recommandation :
    Dans le cas d’un schème sensorimoteur artificiel, l’utilisateur novice exploite d’abord
    une ou des actions métaphoriques qu’il mettra un certain temps à assimiler par
    apprentissage avant qu’il devienne pour lui-même un schème sensorimoteur naturel…
    en environnement virtuel. Il conviendra de faire suivre un tutoriel à l’utilisateur.

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4. Les effets négatifs provoqués par le
contenu
Le contenu regroupe différentes étapes de l’élaboration de l’expérience. Contrairement au
média classique, le contenu de réalité virtuelle possède une couche de réflexion supplémentaire
inhérente à sa capacité immersive. Au-delà du scénario stricto sensu qui représente le déroulé
de la trame narrative d’une expérience, une couche de conceptualisation est donc à envisager
dans le même temps, voire en amont de l’élaboration du scénario, en fonction du ressenti ou de
l’effet désiré chez l’utilisateur.
Ce travail de conceptualisation prend en compte un certain nombre de paramètres qui peuvent
provoquer de l’inconfort dans l’expérience à dessein ou pas.

Les études scientifiques montrent (Cf. Chap.5 : État psychologique et cognitif) que la grande
majorité des sujets immergés dans
un environnement virtuel immersif            Ils vivent l’expérience virtuelle du
vivent cette expérience avec un
sentiment de présence (ils vivent            visiocasque comme réelle et « oublient »
l’expérience virtuelle du visiocasque        le monde tangible hors du casque.
comme réelle et « oublient » le
monde tangible hors du casque) et un engagement émotionnel plus important que pour un
contenu équivalent mais non immersif. Il serait cohérent que plus l’immersion est constituée par
un grand nombre de sens numérisés (toucher, retour d’effort, olfaction etc…), plus ce sentiment
de présence soit consistant et stable, résistant aux fluctuations qui le caractérisent.

Certains sujets sont potentiellement moins sensibles : ceux ayant une expérience ancienne
et/ou quantitativement importante des jeux vidéo, ceux ayant des profils de fonctionnement
cognitifs/sensoriels particuliers (par exemple, les personnes non-sujets aux vertiges par rapport
à ceux qui le sont). Néanmoins, des études doivent le confirmer.

    INCONFORT CT1 : LE NIVEAU INAPPROPRIÉ D’IMMERSION CORPORELLE

  Exemple explicatif : Le niveau d’immersion                                   Difficulté à diminuer l’inconfort : grande.
  corporelle peut être plus ou moins fort en                                   Cible : Concepteurs et scénariste
  fonction du réalisme (déplacement, hauteur                                   d’expérience.
  etc…) du point de vue que l’utilisateur a dans
  l’environnement virtuel.

    Recommandations :
    Les points de vue dépendent de 3 grands types d’immersion corporelle dans
    l’environnement virtuel :
    ●      Omnipotente : Je me déplace sans enveloppe corporelle ni aucune contrainte de
    vitesse ou de gravité ;
    ●      Physique invisible : Je respecte des codes de taille, d’ampleur et de gravité
    probable mais je ne suis pas visible par mon environnement ni par moi-même ;
    ●      Physique présente : Je respecte des codes de taille, d’ampleur et de gravité
    probable et je suis visible par mon environnement qui interagit donc probablement
    avec moi.
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  Le passage d’une immersion corporelle, donc d’un point de vue à un autre, peut être utilisé
  en cours d’expérience pour minimiser les effets traumatisants dans des expériences
  de sensibilisation à des risques graves. Par exemple, il est recommandé de laisser
  l’utilisateur à un niveau d’immersion corporelle très élevé (physique présente) jusqu’au
  moment de l’accident puis de le désincarner en le passant à l’immersion omnipotente
  pour le laisser spectateur extérieur de l’accident sans le lui faire subir.

    INCONFORT CT2 : LA SUGGESTION INAPPROPRIÉE D’ATTENTION

   Exemple       explicatif     :   Dans     un                                un moment précis de l’environnement
   environnement où l’utilisateur est libre de                                 généralement pour faire avancer la
   regarder où et quand il veut, la totalité                                   narration.
   de ce qui l’entoure et où le point de vue
   d’un réalisateur ne lui est pas imposé (film                                Difficulté à diminuer l’inconfort : grande.
   classique), les réflexes ancrés dans le                                     Cible : Concepteurs, développeur et
   cerveau reptilien sont activés pour attirer                                 scénariste d’expérience.
   l’attention de l’utilisateur à un endroit et

    Recommandations :
    ●      Le son spatialisé permet de forcer la personne par réflexe à regarder la source
    sonore d’un bruit inédit par rapport à l’environnement visible ;
    ●      Le « scintillement » joue avec la luminosité d’un objet ou la couleur par rapport
    au reste de l’environnement et attire l’attention ;
    ●      Le « défilement » : un objet se déplaçant à une vitesse supérieure à l’environnement
    réaliste attirera forcément l’attention vers sa destination, d’abord, et son origine, ensuite.

    INCONFORT CT3 : LA PROXIMITÉ EXCESSIVE

  Exemple explicatif : L’entrée d’une entité                                   Difficulté à diminuer l’inconfort : faible.
  en mouvement (personnages, animaux, etc.)                                    Cible : Concepteurs, développeur et
  dans le cercle proche des 1m30 environ de                                    scénariste d’expérience.
  notre point de vue corporel peut être ressentie
  comme menaçante et angoissante.

    Recommandations :
    Dans les films avec 3D précalculée, une fois une certaine zone de proximité franchie,
    équivalente à la “bulle” sur laquelle les images sont posées autour de notre point de
    vue, les représentations sont volontairement déformées pour réduire la probabilité de
    l’environnement ainsi que le sentiment de présence et donc l’immersion.
    Dans le cas d’expériences en 3D temps réel, comme toujours en réalité virtuelle, il
    peut être très angoissant de voir des objets « dynamiques » et non contrôlables entrer
    dans cette zone de 1,3m et à plus forte raison au-dessus des jambes, plus proche du
    point de vue et des organes vitaux dans notre inconscient. Il est donc recommandé
    d’éviter cette zone

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    INCONFORT CT4 : LA REPRÉSENTATION INAPPROPRIÉE D’UN HUMAIN

 Exemple explicatif : Plus une forme                                           auront une résonance émotionnelle forte.
 humanoïde est ressemblante à un humain                                        Ainsi, une action violente appliquée à
 (ne peut pas être, dans notre mémoire                                         une forme humanoïde trop réaliste pourra
 collective, rapportée à autre chose de                                        donc provoquer un choc émotionnel chez
 connu), plus l’empathie se fera vite et plus                                  l’utilisateur.
 ce qu’il arrivera à cette forme humanoïde
 aura des conséquences importantes.                                            Difficulté à diminuer l’inconfort :
 Autrement dit, plus l’empathie est forte, plus                                moyenne.
 les actions effectuées sur cet humanoïde                                      Cible : 3D artist et scénariste d’expérience.

    Recommandations :
    N’utiliser les formes humanoïdes que pour générer confort et empathie.
    Préférer des formes humanoïdes non organiques pour des actions violentes.

    INCONFORT CT5 : LA PROGRESSION ASYMÉTRIQUE DANS LES NIVEAUX
    D’IMMERSIONS

  Exemple explicatif : On appelle niveau                                       entre le nombre de niveaux d’entrée et
  d’immersion les différentes couches                                          de sortie peut provoquer un sentiment
  d’environnement, imbriquées les unes                                         d’incohérence.
  dans les autres et non sur le même plan
  géographique (poupées russes). On entre                                      Difficulté à diminuer l’inconfort :
  dans un espace, puis dans un autre, situé à                                  moyenne.
  l’intérieur du premier, puis de nouveau dans                                 Cible : concepteur et scénariste
  un autre, et ainsi de suite. Une différence                                  d’expérience.

    Recommandations :
    Pour une immersion plus efficace et confortable, il convient de progresser avec une
    probabilité croissante, accompagnée par des niveaux d’immersions successifs. Cela
    permettra au cerveau de « lâcher » petit à petit et par la même d’augmenter la probabilité
    dans l’immersion.
    Chaque descente en immersion doit être remontée, dans le sens contraire, dans les
    mêmes environnements pour un sentiment de cohérence et de douceur dans la sortie.

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    INCONFORT CT6 : LES TRANSITIONS BRUSQUES

   Exemple explicatif : Dès que la narration                                   transition brusque qui peut provoquer un
   exige un changement d’environnement qui                                     inconfort.
   n’est pas justifié par un déplacement visible
   (de la même manière qu’une cristallisation                                  Difficulté à diminuer l’inconfort : faible.
   en littérature), il y a potentiellement une                                 Cible : Concepteur.

    Recommandations :
    Quel que soit le type de transition (déplacement, changement de niveau d’immersion,
    game over), il convient d’utiliser un fondu (au noir ou au blanc en fonction de
    l’environnement) contrôlé par l’utilisateur et, si impossible, expliqué par l’histoire. Cela
    permettra une transition douce.
    Pour obtenir un effet plus violent, il est recommandé d’utiliser le fondu enchainé, puis
    le « cut », puis le gel d’image (généralement utilisés en cas de « game over »)
    Un fondu sortant doit toujours s’accompagner d’un fondu entrant.

Aussi l’ensemble des recommandations ci-dessus n’ont de sens qu’en fonction d’un effet
désiré pour l’expérience. Elles ne sont là que pour garantir le confort ou le renforcement
d’un impact chez l’utilisateur.

Il existe deux autres éléments conditionnant le confort de l’utilisateur sur lesquels nous
recommandons les pratiques suivantes :

    INCONFORT CT7 : LES ENVIRONNEMENTS ANXIOGÈNES

   Exemple explicatif : Les environnements                                     improbable, …
   virtuels peuvent être anxiogènes s’ils
   ne respectent pas les règles probables                                      Difficulté à diminuer l’inconfort : faible.
   naturelles ; éclairage irréel, immobilisme                                  Cible : Concepteur.

    Recommandations :
    Pour créer un environnement le plus rassurant possible il convient de laisser un horizon
    libre ainsi qu’une lumière éclairant de manière égale (du dessus).
    Le changement d’environnement sans transition peut se faire de manière extrêmement
    simple au moment où la personne ne regarde pas (lorsque la 3D n’est pas calculée).
    Il doit toujours se passer quelque chose dans l’ensemble de l’environnement (extérieur)
    pour le rendre probable.
    Les codes de création graphique, réalistes ou non, se rapprochent des codes de
    graphisme propres aux films d’animation.

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    INCONFORT CT8 : LA GESTION DU TEMPS

   Exemple explicatif : Le contrôle du temps,                                  Difficulté à diminuer l’inconfort : faible.
   s’il est mal réalisé, peut causer une gêne                                  Cible : Concepteur.
   voire une perturbation chez l’utilisateur et
   les effets sont encore mal connus.

    Recommandations :
    Ne pas donner, autour de l’utilisateur, de facteur de temps à moins qu’il ne soit très
    contrôlé (compte à rebours ou chronomètre). C’est, en effet, comme pour les rêves, un
    facteur de baisse de probabilité.
    Le contrôle du temps en réalité virtuelle peut cependant avoir des effets formidables et
    pédagogiques, mais il s’agit d’un domaine encore mal étudié.

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5. État psychologique et cognition
Introduction
Une expérience (dans le monde physique ou virtuel) se caractérise, entre autres, par des
perceptions. Ces dernières émanent des signaux externes (venant de l’environnement)
et internes (venant du corps). Ces signaux sont traités par le système (notamment le
cerveau) en tenant compte des connaissances préalables et de l’expérience antérieure
de l’individu (système cognitif).

La cognition (pensée) émane de la boucle interactive perception/action. Autrement
dit, la cognition naît de l’action que l’individu effectue dans l’environnement perçu.
Mais aussi des modifications de l’environnement par ces actions et réciproquement
des influences de l’environnement sur l’individu. C’est ce qu’on appelle la cognition
incarnée.
                                                                  «L’efficacité de la thérapie par réalité virtuelle
Sur le plan de la cognition, le vécu
d’une expérience en visiocasque      dans le traitement de l’ensemble des troubles
de réalité virtuelle ne diffère donc anxieux dont notamment les phobies est
pas significativement de celui       établie dans la littérature scientifique.»
d’une expérience dans le monde
réel (excepté les incohérences sensorimotrices générées : voir chapitre 2).

C’est à ce titre que certains hôpitaux utilisent la réalité virtuelle dans la thérapie, sous
la supervision généralement d’un psychiatre, contre les phobies. La réalité virtuelle est
dans ce contexte utilisée pour confronter de manière progressive le patient à l’objet de
sa peur, selon les principes de la thérapie cognitivo-comportementale, traitement de
référence selon l’HAS (Haute Autorité de Santé). La réalité virtuelle est donc proposée
comme modalité d’exposition. L’efficacité de la thérapie par réalité virtuelle dans le
traitement de l’ensemble des troubles anxieux dont notamment les phobies (peur du
vide, peur des araignées, peur d’être enfermé, peur de l’avion, …) est établie dans la
littérature scientifique.

Concepts clés issus des sciences cognitives et sollicités lors
d’une immersion dans un environnement virtuel
Le concept du sentiment de présence est le phénomène central lors de l’immersion dans
un environnement virtuel qui fait réagir les utilisateurs comme si le virtuel était un monde
réel.

     Définition de la présence
     Il n’existe pas de définition consensuelle de la présence. De nombreux auteurs ont
     essayé de décrire la présence. D’après Lombard, la présence est « l’illusion perceptive
     de l’absence de médiation » (Lombard and Ditton , 1997). D’autres auteurs définissent
     la présence comme « un état psychologique dans lequel les objets virtuels sont
     expérimentés comme des objets réels » (Lee, K.M., 2004). Certains font référence à la
     présence comme la sensation subjective d’être là (dans l’environnement virtuel).
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