Maltraitance infantile - protection de l'enfant - UNIL
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Maltraitance infantile – protection de l’enfant Ulrich Lips Guide concernant la détection précoce et la façon de procéder dans un cabinet médical Stiftung Kinderschutz Schweiz Fondation Suisse pour la Protection de l’Enfant Fondazione Svizzera per la Protezione dell’Infanzia
Maltraitance infantile – Protection de l’enfant Ulrich Lips Guide concernant la détection précoce et la façon de procéder dans un cabinet médical Stiftung Kinderschutz Schweiz Fondation Suisse pour la Protection de l’Enfant Fondazione Svizzera per la Protezione dell’Infanzia
4 Maltraitance infantile – Protection de l’enfant Impressum Impressum Editrice Fondation Suisse pour la Protection de l’Enfant Case postale 6949 | 3001 Berne www.protection-enfants.ch Vous pouvez soutenir notre travail: compte postal 30-12478-8 Auteur Dr. med. Ulrich Lips, chargé de cours, spécialiste FMH de médecine pour enfants et adolescents, responsable du groupe de protection de l’enfant et du service de consultation pour les victimes des hôpitaux pédiatriques universitaires de Zurich Responsable du projet Mirjam Rotzler, Fondation Suisse pour la Protection de l’Enfant Conception graphique et production raschle & kranz | Atelier für Kommunikation, Berne (conception graphique) Martine Besse (traduction) Dr. med. Myriam Caranzano-Maitre, Fondation ASPI (adaptation) brioCHe (relecture) Stämpfli Publikationen AG, Berne (impression) Parution de la première édition en français: mars 2011 © 2011 | Fondation Suisse pour la Protection de l’Enfant Tous droits réservés La brochure peut être téléchargée sous forme de pdf en français, allemand et italien sur le site: www.protection-enfants.ch
Maltraitance infantile – Protection de l’enfant 5 Au sujet de l’auteur Au sujet de l’auteur Après avoir effectué de la Société suisse de pédiatrie; ce groupe sa scolarité et des coordonne les mesures de protection de études de médecine l’enfant dans les cliniques pédiatriques à Zurich, Ulrich Lips suisses, définit les lignes de conduite et tient a obtenu son diplôme une statistique pour l’ensemble de la Suisse. en 1974 et a poursui- vi ensuite sa forma- Ulrich Lips est auteur principal et co-auteur tion de 1975 à 1979 à de publications scientifiques sur les thèmes Bülach, Winterthur et Zurich pour devenir du syndrome du bébé secoué et de la qua- spécialiste FMH en médecine pour enfants lité de vie après des maltraitances infan- et adolescents. De 1980 à 1983, il a travaillé tiles. Membre du comité de la Fondation en qualité de chef de clinique à la clinique suisse Enfants et Violence (1993 à 2000), de néonatologie de l’hôpital universitaire Ulrich Lips est l’initiateur de la vidéo desti- de Zurich et à l’hôpital pédiatrique de Zu- née à prévenir le syndrome du bébé secoué rich. De 1983 à 1988, il a été à la tête de son (1997). propre cabinet de pédiatrie à Zurich-Hot- tingen. Le Prof. Dr. med. Andreas Fanconi, Ulrich Lips a été, en 1996, membre fonda- alors directeur de clinique, a nommé Ulrich teur de la Commission de la protection de Lips à la fonction de médecin-chef de la cli- l’enfant du canton de Zurich (la première nique de médecine interne, position qu’il commission de ce type en Suisse) et en occupe depuis le 1.6.1988 et depuis 2007 en a fait partie jusqu’en 2010. En tant que qualité de directeur suppléant. membre de cette commission, il a parti- cipé à la rédaction de la brochure intitulée Ulrich Lips est responsable depuis 1988 du «Leitfaden zur Standardisierung des Verfa- groupe de protection de l’enfant de l’hôpital hrens in Fällen von Kindsmisshandlung» pédiatrique de Zurich. En 1994, ce dernier (2000/2004). Il s’agit d’un guide pratique est devenu également un service de consul- visant à standardiser la procédure dans les tation pour les victimes. Ce groupe est au- cas de maltraitance infantile. Dans le cadre jourd’hui la plus grande institution médi- du Programme national pour la protection cale dans le domaine de la maltraitance de l’enfant «Protection de l’enfant à l’hori- infantile/de la protection de l’enfant en zon 2020» de la Fondation Suisse pour la Suisse; son équipe interdisciplinaire qui Protection de l’Enfant, Ulrich Lips a présidé réunit 12 personnes s’occupe de plus de 400 en 2007/08 le groupe de travail «Détection enfants et jeunes chaque année. précoce de la violence envers les enfants en De 1992 à 2007, Ulrich Lips a présidé le bas âge». L’idée du présent guide pratique groupe de travail «Protection de l’enfant» est issue de ce groupe de travail.
6 Maltraitance infantile – Protection de l’enfant Préface FMH Préface FMH Un enfant qui nait, c’est un événement c’est au prix d’efforts énormes. Pour magnifique et le début de l’épanouisse- eux, beaucoup de choses deviennent ment d’un nouvel être. L’enfance com- plus compliquées et demandent plus mence et avec elle une période de la d’énergie. vie qui, depuis 1989, est protégée par la Convention des droits de l’enfant Malheureusement, chez nous aussi de l’ONU. Durant cette étape, les en- vivent des enfants en proie à cette fants grandissent, apprennent, jouent détresse. La Suisse a mis en vigueur la et se développent. Il est donc normal convention sur les droits des enfants il y que le droit à disposer de temps libre, a treize ans, mais concrètement, son ap- à jouer et à se reposer soit ancré dans plication n’est toujours pas coordonnée. cette convention tout comme le droit à la sphère privée, à une famille, à la Les premières années de la vie des protection des parents et à un chez-soi enfants sont fortement ancrées dans le sûr. Or ces droits, qui vont de soi pour contexte familial. C’est souvent là que nous, sont souvent bafoués. débute la maltraitance - au cœur de leur environnement le plus cher. Les Abus, exploitation, abandon et discri- examens préventifs ainsi que toutes les mination d’enfants sont autant d’actes autres consultations chez le médecin et de faits à déplorer dans tous les pays comptent parmi les contacts réguliers et à tous les niveaux socioculturels les plus importants hors du noyau fa- ou économiques, et chez nous aussi. milial. Les médecins comme aussi les Malgré leur besoin de protection, les autres groupes de professionnels de la enfants sont victimes de violences santé jouent ici un rôle important car physiques et psychiques, avec de graves ils peuvent déceler en temps utile les conséquences pour le corps et l’esprit, dangers qui menacent l’enfant. Mais risquant souvent d’hypothéquer leur quand est-on en présence d’un danger, avenir à longue échéance. L’épanouis- quels en sont les signes avant-coureurs sement et le développement de ces et comment venir au secours de l’en- enfants sont perturbés, voire parfois fant concerné? Il est parfois difficile de franchement compromis. Ils partent distinguer ce qui menace l’intérêt de dans la vie avec une lourde charge, un l’enfant des symptômes normaux et fardeau qui leur ferme de nombreuses des phases de développement indivi- voies; et quand ils peuvent s’y lancer, duelles.
Table de matières Impressum....................................... 4 Au sujet de l’auteur......................... 5 Préface FMH.................................... 6 Voulues par la Fondation suisse pour Table de matières............................ 7 la protection de l’enfant, les présentes Préface de la Fondation Suisse lignes directrices créent la clarté né- pour la Protection de l’Enfant....... 8 cessaire. Elles abordent les facteurs de A quoi sert ce guide?.....................10 risque, la négligence et les symptômes de maltraitance, elles expliquent com- Première partie........................... 11 ment agir avec les parents, elles pré- Définitions et formes.................... 11 sentent la situation juridique en Suisse Les facteurs de risque................... 14 et indiquent où les professionnels Constats d’ordre physique........... 15 peuvent obtenir un soutien. Signes de comportement particuliers....................................25 La FMH soutient les efforts de la Fonda- Dossier médical.............................26 tion Suisse pour la Protection de l’En Manière de procéder....................28 fant: les enfants doivent être protégés Situation juridique en Suisse...... 31 contre les menaces, l’abandon, l’exploi- tation et contre toute violence. Nous Deuxième partie......................... 33 recommandons ces lignes directrices Pédiatres et autres méde- car elles représentent un instrument cins qui suivent des enfants........ 33 important dans la pratique quotidienne Psychiatres de l’enfant et de non seulement pour venir en aide aux l’adolescent....................................34 enfants menacés et les protéger, mais Chirurgiens pédiatres, aussi pour épauler les pères et les chirurgiens....................................34 mères concernés, afin que le plus grand Dermatologues.............................. 35 nombre d’enfants puissent grandir dans Oto-rhino-laryngologues l’insouciance propre à la jeunesse et (ORL).............................................. 37 sans fardeau inacceptable. Obstétriciens et obstétri- ciennes, gynécologues et Dr Jacques de Haller néonatologues...............................38 Président de la FMH Dentistes........................................42 Généralistes et autres médecins Dr Christine Romann qui ne s’occupent pas d’enfants....43 Membre du Comité central de la FMH Le rôle de l’assistante médicale.....44 Responsable du domaine Promotion Informations complémentaires... 45 de la santé et prévention Recommandations......................... 46
8 Maltraitance infantile – Protection de l’enfant Préface de la Fondation Suisse pour la Protection de l’Enfant Préface de la Fondation Suisse pour la Protection de l’Enfant Chers médecins, pour écarter le danger. S’il n’y a pas de réaction, le danger peut s’intensi- Etant active au niveau national, la fier et l’enfant en gardera peut-être des Fondation Suisse pour la Protection séquelles durables. de l’Enfant se mobilise dans toutes les régions de notre pays pour que les en- Quand des enfants viennent vous fants puissent grandir dans la dignité consulter, vous êtes habituellement au sein de notre société, pour que leurs aussi en contact avec l’un des parents. droits soient respectés et que leur inté- Ces circonstances permettent de déce- grité soit protégée. Pour y parvenir, la ler des symptômes éventuels de vio- Fondation Suisse pour la Protection de lence et de négligence; elles permettent l’Enfant cherche à connaître les causes aussi d’expliquer à l’enfant qu’il a des de la violence et à les prévenir. Malgré droits, par exemple celui de ne pas être tout, il y a en Suisse de nombreux en- maltraité. En étant en contact avec les fants qui sont maltraités, exploités et parents, il vous est possible, par ail- négligés. En publiant ce guide pratique, leurs, d’aborder avec eux le problème la Fondation Suisse pour la Protection du surmenage et du stress, les facteurs de l’Enfant entend fournir aux méde- de risque concernant la maltraitance et cins un outil pour les aider à repérer la la négligence; vous pouvez leur indi- violence à un stade précoce et à effec- quer où s’adresser pour trouver de l’aide tuer les démarches nécessaires pour et se faire décharger. qu’elle cesse. Il n’y a pas, pour l’ensemble de la Suisse, Car vous jouez un rôle clé, en tant que de chiffres fiables concernant l’ampleur médecins, dans l’évolution des enfants de la violence exercée à l’encontre des en danger. C’est votre réaction rapide nourrissons et des enfants en bas âge. et compétente à la mise en danger du Le groupe de protection de l’enfant qui bien de l’enfant – qu’elle soit présumée existe depuis 1969 à la clinique pédia- ou avérée – qui détermine, dans de trique de Zurich – le plus ancien en nombreux cas, si l’enfant trouvera la milieu hospitalier – a constaté ces der- protection dont il a besoin et / ou si les nières années une augmentation des parents obtiendront l’aide nécessaire cas suspects signalés et une augmen-
Maltraitance infantile – Protection de l’enfant 9 Préface tation des mauvais traitements avérés times et des groupes de protection de envers les enfants. Même si le nombre l’enfant, si l’on veut que l’enfant béné- de cas n’est pas à lui seul un indicateur ficie effectivement d’une protection. qui permet d’établir une éventuelle Ce guide pratique fournit des réponses augmentation de la violence envers les précises à toutes ces questions. enfants, on peut admettre, en raison de la hausse nette des cas suspects signa- Ce guide pratique a été rédigé par le Dr. lés, que l’on est plus disposé à signaler. méd. Ulrich Lips, directeur du groupe La sensibilité du public et des milieux de protection de l’enfant des cliniques spécialisés semble donc accrue. universitaires et pédiatriques de Zu- rich. C’est à son inlassable travail en La qualité des indications fournies faveur du bien de l’enfant, à sa longue revêt une importance primordiale si expérience et à ses connaissances éten- l’on veut pouvoir établir qu’il y a eu dues dans le domaine de la protection maltraitance. Pour le permettre, il est de l’enfant que l’on doit l’élaboration indispensable que les professionnels de ce guide pratique. Au nom de la aient à disposition des informations ap- Fondation Suisse pour la Protection de propriées pour qu’ils sachent quand ils l’Enfant, je remercie très sincèrement sont confrontés à un cas suspect avéré, Ulrich Lips pour son précieux travail et à quel moment il est indiqué d’aviser la collaboration fructueuse avec notre l’autorité de protection de l’enfant (au- fondation. torité de tutelle) ou de demander l’avis du groupe de protection de l’enfant de A vous, chère lectrice, cher lecteur, je l’hôpital. Il est important aussi que les souhaite de prendre les bonnes déci- professionnels sachent quelle attitude sions dans l’exercice exigeant de votre adopter face à l’auteur présumé / à l’au- profession et je vous remercie de contri- teure présumée; il est essentiel, d’autre buer ainsi à protéger les enfants! part, que le rôle précis des profession- nels concernés soit clairement défini Fondation Suisse et délimité par rapport au travail des pour la Protection de l’Enfant autorités de protection de l’enfant, des Jacqueline Fehr services de consultation pour les vic- Présidente
10 Maltraitance infantile – Protection de l’enfant Introduction | A quoi sert ce guide? A quoi sert ce guide? Les mauvais traitements envers les tection de l’enfant. Nous laissons donc enfants (maltraitance infantile) sont délibérément de côté les détails précis fréquents. Même si des statistiques et les indications bibliographiques. Ce précises font défaut pour différentes guide vous est destiné, à vous les méde- raisons (nombre important de cas non cins qui exercez votre profession dans révélés, définition de la maltraitance, différentes spécialités et êtes peu fami- etc.) les faits sont irréfutables: selon liarisés avec ce domaine. Ce guide de- des estimations prudentes, 10 à 20 % vrait vous aider, vous-mêmes ainsi que des enfants1 subissent des mauvais vos assistantes médicales, à détecter les traitements sous une forme ou une cas de maltraitance subie et à repérer autre jusqu’à leur 18ème anniversaire. par ailleurs les situations suspectes et Nous voyons ces enfants couramment à risque; il devrait aussi vous montrer dans notre cabinet, en consultation et différents moyens d’y faire face. à l’hôpital conjointement à leurs pairs2 non affectés par des maltraitances. Ils Dans la première partie de cette bro- viennent pour des douleurs, des mala- chure, vous trouverez des généralités dies et des accidents, pour des examens sur le phénomène de la maltraitance de routine et des vaccins. Nous devrions infantile et la manière de l’aborder; la les reconnaître en tant qu’enfants mal- seconde partie fournit des informa- traités, car leur santé et leur qualité de tions complémentaires aux médecins vie – dans l’immédiat et pour toute leur de différentes spécialités confrontés vie future d’adultes – peuvent en être directement ou indirectement à la sensiblement améliorées. maltraitance infantile, soit parce qu’ils traitent des enfants, soit parce qu’ils Ce guide n’est pas un abrégé consacré s’occupent de patients et de patientes à la maltraitance infantile et à la pro- adultes ayant des enfants. 1 Le terme ‚enfants’ désigne des enfants et des jeunes de sexe masculin et féminin jusqu’à leur 18ème anniversaire (définition juridique) 2 Dans le texte, on parlera de patientes parce que les filles sont plus fréquemment maltraitées que les garçons. Bien entendu, les garçons sont toujours aussi considérés.
Première partie Définition et formes Dans les milieux médicaux spécialisés, on distingue généralement 5 formes de mauvais traitements envers les enfants »» Maltraitance physique »» Exploitation sexuelle (synonymes: violence sexuelle, agressions sexuelles, abus sexuels) »» Maltraitance psychologique »» Négligence »» Syndrome de Münchhausen par procuration Dans d’autres domaines (sciences sociales, droit civil), les formes de maltraitance suivantes viennent s’ajouter et se chevauchent en partie »» Maltraitance en raison d’un conflit concernant l’autonomie »» Maltraitance en raison d’un conflit d’adultes concernant l’enfant »» Maltraitance institutionnelle »» Maltraitance / violence structurelle La façon dont on classe les différentes formes de maltraitance a une portée sta- tistique et didactique mais elle est peu pertinente sous l’angle pratique: on est presque toujours en présence de plus d’une forme de maltraitance et les diffé- rentes formes de mauvais traitements se chevauchent. Définition de la maltraitance infantile La maltraitance infantile est une atteinte non fortuite, consciente ou inconsciente, physique et / ou psychologique (par une intervention active ou par omission), y compris la négligence des besoins de l’enfant, de la part de personnes (parents, autres responsables de l’éducation, tiers), d’institutions et de services sociaux, qui conduit à des troubles du développement, des lésions ou même la mort.
12 Maltraitance infantile – Protection de l’enfant Définition et formes Les différentes formes de maltraitance Maltraitance physique Il s’agit d’un large spectre de coups, de brûlures causées par une source de chaleur ou une substance bouillante, de contusions, de coups de couteau ou de secousses infligés à un enfant. Parmi les lésions graves, il faut citer des lésions du paren- chyme cérébral, des hématomes sous-duraux ou des hémorragies de la rétine ainsi que des lésions des organes thoraciques et abdominaux. L’association de diverses blessures anciennes (alors que selon l’anamnèse, il n’y aurait qu’un seul traumatisme) indique qu’il y a eu des traumatismes à divers moments. Négligence Le fait de ne pas satisfaire les besoins d’un enfant, par exemple en termes de nourriture, d’hygiène, de vêtements, d’éducation et d’encadrement. La négligence peut se manifester entre autres comme un trouble de la croissance d’origine non organique. La négligence peut avoir lieu de manière consciente ou inconsciente. Maltraitance psychologique Attitude négative et destructrice des adultes chargés de l’éducation d’un enfant, consistant à le rabaisser continuellement (insultes, brimades, avilissements, hu- miliations, oppression verbale, terrorisme verbal). Il s’agit d’appréciations déva- lorisantes qui affectent durablement l’estime de soi de l’enfant. En même temps, on communique sans cesse à l’enfant des sentiments négatifs face à son avenir. La forme de maltraitance psychologique la plus fréquente est aujourd’hui la vio- lence domestique: les enfants sont contraints à être témoins des altercations verbales, psychologiques ou physiques de leurs parents. Exploitation sexuelle Exhibitionnisme en présence d’enfants, pornographie impliquant des enfants, masturbation avec l’enfant, pénétration (vaginale / anale / orale). Les victimes sont des garçons et des filles souvent durant la petite enfance. Les auteurs (hommes et femmes) de ces actes sont issus majoritairement de l’entourage social proche des victimes. Il est rare de trouver des lésions corporelles évidentes.
Maltraitance infantile – Protection de l’enfant 13 Définition et formes Syndrome de Münchhausen par procuration Des parents (généralement des mères) suscitant souvent une image d’eux-mêmes très positive auprès du personnel médical, inventent des symptômes que leur enfant soit-disant présente (fièvre, crampes, saignements, etc.) ou les déclenchent par les manipulations les plus diverses. Ces deux comportements entraînent un grand nombre d’examens médicaux et d’interventions inutiles. La mère est ainsi au centre de l’attention en tant que personne très inquiète qui prend soin d’un enfant dont personne ne comprend la maladie et qui par conséquent ne peut pas être aidé. Elle en retire un gain d’attention secondaire à la «maladie» de son enfant. De ce chapitre font aussi partie des demandes d’opérations inutiles »» cf. le chapitre «Oto-rhino-laryngologues (ORL)», p. 37 Maltraitance en raison d’un conflit concernant l’autonomie Non maîtrise des conflits au moment où les enfants grandissent et se détachent de leurs parents. Maltraitance en raison d’un conflit entre adultes concernant l’enfant Dans les statistiques médicales, cette forme de maltraitance apparaît dans la catégorie des maltraitances psychologiques. Conflit concernant l’enfant, généralement entre les parents, dans des situations de discorde, de séparation ou de divorce. En raison de l’incapacité des adultes à dialoguer, l’enfant est entraîné dans le conflit et il n’est pas rare que les parties en conflit l’utilisent de surcroît à leur profit; ceci entraîne chez les enfants des dégâts psychologiques, notamment parmi les enfants en bas âge, qui sont tiraillés dans leur perception du conflit entre leurs parents. Maltraitance / violence structurelle La violence structurelle a pour effet que les enfants sont victimes des structures de la société; ces dernières apparaissent comme hostiles aux enfants ou pour le moins comme incompatibles avec les enfants (par ex. la pauvreté, la circulation routière, la pollution de l’environnement). Ce type d’atteinte aux enfants est naturellement bien compréhensible, mais il est en revanche difficile à quantifier et élargit la notion de maltraitance infantile à une dimension illimitée qui rend la collecte de données statistiques a priori irréalisable.
14 Maltraitance infantile – Protection de l’enfant Les facteurs de risque Les facteurs de risque La maltraitance infantile a toujours des causes multiples et ne résulte jamais d’un seul facteur de stress ou de risque. L’addition de plusieurs facteurs de risque conduit à l’incapacité de faire face; celle-ci se traduit par une tolérance réduite au stress, une perte de contrôle et l’incapacité d’identifier les besoins de l’enfant et / ou de les satisfaire. Ceci est valable pour toutes les formes de maltraitance à l’exception de l’exploitation sexuelle; dans ce cas, on est en présence d’un profil de l’auteur tout à fait différent. Les facteurs de risque les plus courants sont les suivants »» Isolement social, marginalisation, exclusion »» Difficultés financières (travail / logement) »» Grossesse non désirée »» Grossesse très précoce »» Succession de naissances rapprochées »» Insécurité sociale et / ou émotionnelle / affective »» Expérience personnelle d’abus »» Toxicodépendance »» Maladie psychique / signe de comportement particulier (dépression post-natale) »» Maladie chronique de l’un des parents »» Comportement délinquant de l’un des parents »» Conflits dans le couple, séparation, divorce »» Violence domestique »» Acceptation des châtiments corporels comme méthode d’éducation »» Attentes des parents démesurées, ce qui génère une pression inappropriée »» Naissances multiples »» Naissance fortement prématurée »» Bébés pleurant beaucoup »» Enfants ayant des problèmes alimentaires »» Enfants ayant des troubles du sommeil »» Enfants handicapés »» Enfants affectés par une maladie chronique
Maltraitance infantile – Protection de l’enfant 15 Constats d’ordre physique Constats d’ordre physique Observations d’ordre général Les éléments, comportements et constats suivants sont des signes généraux qui indiquent l’existence d’une maltraitance physique: Recours tardif à l’aide d’un médecin Ceci concerne surtout les lésions cutanées superficielles: dans un premier temps, les enfants qui ont des éraflures et des brûlures de degré léger par ébouillantage ne sont pas conduits tout de suite chez le médecin mais seulement plus tard, par ex. quand la blessure s’est infectée et qu’il n’est plus possible d’éviter la consultation médicale. Incohérences au niveau de l’anamnèse »» Les indications fournies lors de l’anamnèse sont peu vraisemblables et ne concordent pas avec le type de blessure (exemple: présence isolée d’hématomes striés sur la joue gauche, sinon aucune autre lésion sur le corps; explication fournie: chute d’un tricycle). La même personne fournit, selon le moment, des explications différentes concernant les blessures (exemple: brûlure occasion- née par du thé bouillant puis, plus tard, par de la soupe très chaude). »» Différentes personnes soi-disant présentes au moment de l’accident fournissent des descriptions divergentes. Des blessures d’âge différent La présence de blessures d’âge différent (hématomes présentant un stade de colo- ration différent, des fractures dont l’ancienneté varie, etc.) doit surtout retenir l’attention quand un seul accident est signalé, ce qui est généralement le cas. Atten- tion: les enfants qui bougent beaucoup ont presque toujours plusieurs hématomes de coloration différente aux endroits caractéristiques où l’on se heurte (tibias!) Changement de médecin sans raison »» Consultations annulées fréquemment Les consultations destinées à des examens de routine et / ou des vaccinations sont régulièrement annulées au dernier moment. La raison peut en être la présence d’hématomes ou d’autres blessures que le médecin ne doit pas voir.
16 Maltraitance infantile – Protection de l’enfant Constats d’ordre physique »» Comportement inapproprié des parents / des personnes qui accompagnent l’enfant Il s’agit d’être attentif surtout quand les parents ou les personnes qui accom- pagnent l’enfant sont peu impressionnés par des blessures relativement graves ou semblent peu concernés. Attention: des parents innocents peuvent se trouver dans un état de choc qui les rend insensibles à toute émotion (état second). »» Symptômes de maladies «qui n’existent pas» Si, en suivant un enfant, vous êtes confrontés au fait que de nouveaux symptômes de maladie sont décrits en permanence, – et que les anciens disparaissent sans qu’on se l’explique et sans traitement – pensez au syndrome de Münchhausen par procuration qui n’est sans doute pas si rare. En particulier quand les symptômes décrits sont inhabituels (par ex.: un bébé qui a des saignements répétés en l’espace de quelques semaines, une fois par la bouche, une autre fois par le vagin, puis une hémoptysie, et une autre fois encore à l’anus) et tout particulièrement si vous- même ne constatez rien (dans l’exemple ci-dessus: pas de traces de saignement, taux d’hémoglobine normal, coagulation du sang normale, etc.). Il en va de même des maladies que vous-même et vos collègues expérimentés n’avez encore jamais vues: soit vous venez de découvrir une nouvelle maladie, (et dans ce cas, vous devez vous empresser de l’étudier et de publier vos observations!) soit vous êtes en présence du syndrome de Münchhausen par procuration. Si vous soupçonnez un tel syndrome, vous vous trouvez face à l’une des situations les plus difficiles du point de vue médical: demandez tout de suite conseil au groupe de protection de l’enfant 3 d’un hôpital pédiatrique d’une certaine importance; il vous indiquera ce qu’il faut faire. Constats particuliers Lésions de la peau Hématomes Chez les enfants qui ont une grande activité motrice, les hématomes sont fré- quents. Pour pouvoir déterminer s’il y a maltraitance ou non, il faut prendre en compte les points suivants: 3 En Suisse, chaque hôpital pédiatrique d’une certaine importance a un groupe de protection de l’enfant.
Illu. 1: Hématome situé à un endroit où l’on se heurte souvent (enfant Illu. 2: Hématome situé à un endroit qui suscite un très fort en bas âge apprenant à marcher: se heurte et tombe fréquemment) soupçon de maltraitance (enfant en bas âge prétendument tombé sans qu’on le voie) »» Âge et développement psychomoteur de l’enfant Pour provoquer un hématome, il faut qu’il y ait eu l’intervention d’une certaine force: un enfant doit tomber ou se heurter violemment pour qu’un hématome apparaisse sans intervention extérieure. Ceci n’est possible que si l’enfant a atteint un certain stade de développement psychomoteur: les nourrissons ne peuvent pas se faire d’hématomes sans intervention extérieure, les enfants alités dont la motricité est réduite non plus. »» Localisation Les hématomes non suspects quant à d’éventuels mauvais traitements se situent aux endroits caractéristiques où l’on se heurte: front, os malaire / os zygomatique, nez, menton, coude, crête iliaque, genou, tibia. (Illu. 1 et 3) Sont suspects en revanche les hématomes situés au cou, à la nuque, à la poitrine, au dos, au ventre, au derrière et aux parties intérieures des extrémités. (Illu. 2 et 4) Illu. 3: Localisations typiques d’hématomes Illu. 4: Localisations typiques d’hématomes causés accidentellement causés par des maltraitances
Illu. 5: Traces de coups laissées par un câble Illu. 6: Trace de gifle d’une grande violence électrique »» Àge de l’hématome Tous les hématomes causés par le même épisode accidentel ont en règle générale la même couleur. Les hématomes dont la coloration diffère doivent être par consé- quent provoqués par des traumatismes multiples non simultanés (comme on les voit fréquemment chez des enfants en bonne santé à partir d’un certain âge; les hématomes se situent alors aux endroits caractéristiques!). Attention: la détermi- nation de l’ancienneté des hématomes sur la base de leur coloration a été fortement remise en cause dernièrement quant à sa fiabilité. Une seule chose reste vraie: la coloration en jaune signifie que l’hématome date de plus de 3 jours. Un autre point subsiste: un accident unique = tous les hématomes ont la même couleur. »» Traces Les traces que l’on peut attribuer à un objet ou à une partie du corps constituent pratiquement la preuve d’une maltraitance; exemples: boucle de ceinture, bâ- ton (= double trace linéaire), fil métallique ou corde (= sorte de boucle), cintre, main / doigts, morsures, etc. (Illu. 5 – 7) »» Troubles de la coagulation Il est bien évident que l’appréciation des hématomes est très différente si l’on est en présence de troubles de la coagulation. Néanmoins, les enfants qui présentent des troubles de la coagulation peuvent eux aussi subir des mauvais traitements!
Illu. 7: Trace de morsure humaine Illu. 8: Brûlure accidentelle provoquée par une Illu. 9: Brûlure occasionnée par une boisson chaude que l’enfant a fait tomber de la maltraitance; les pieds ont été plongés table en tirant (tasse posée sur un set de table) dans de l’eau bouillante »» Autres diagnostics différentiels »» Taches mongoliques (parfois sur tout le dos, les bras jusque sur le dos de la main) »» Purpura de Schönlein-Henoch et autres vasculites »» Syndrome d’Ehlers-Danlos »» Lichen scléreux et atrophique / lichen sclerosus et atrophicus »» cf. le chapitre «Dermatologues», p. 35 Blessures provoquées par des causes thermiques Brûlures occasionnées par un ébouillantage La plupart des brûlures accidentelles occasionnées par un ébouillantage se pro- duisent quand un enfant fait tomber de la table ou d’une étagère de la cuisine des boissons et des aliments très chauds. Pour que cela se produise, il faut que l’enfant ait atteint un certain stade de développement psychomoteur. Il en résulte des schémas de brûlures caractéristiques; les parties touchées sont la poitrine, le ventre, éventuel- lement les épaules et le menton. Le degré de gravité diminue en direction cranio- caudal. Des brûlures par ébouillantage se produisent aussi quand les parents / les personnes qui s’occupent de l’enfant portent le bébé dans les bras / sur les genoux tout en ayant une boisson chaude dans l’autre main. Les brûlures dues à la mal- traitance sont en règle générale clairement délimitées et sont surtout localisées aux mains, aux pieds et dans les zones anogénitales. Ce sont des endroits où les enfants ne se brûlent pas sans l’intervention d’un tiers, sauf éventuellement aux mains et aux pieds, mais dans ce cas, selon une configuration tout à fait différente. (Illu. 8 – 9)
20 Maltraitance infantile – Protection de l’enfant Constats d’ordre physique Brûlures Lorsque les enfants entrent en contact avec des objets brûlants ou du feu, c’est uniquement parce qu’ils ne repèrent pas le danger (plaque chaude de cuisinière, porte de four brûlante, etc.) ou parce qu’ils tombent ou trébuchent. Lorsque le contact avec des objets brûlants est accidentel, les lésions concernent généra- lement la paume de la main ou la plante du pied; en cas de chute, les brûlures sont souvent associées à d’autres blessures. Dans le cas de traces laissées par des objets brûlants (gril, fer à repasser, cigarettes, etc.), il faut toujours soupçonner qu’il y a eu maltraitance. Diagnostics différentiels »» Staphylococcal Scalded Skin Syndrome »» Epidermolysis bullosa / épidermolyse bulleuse »» Pratique thérapeutique populaire d’Extrême-Orient (la peau est traitée à l’aide d’objets ou de cuillères très chauds pour combattre la fièvre: Cao Gio ou cupping) Fractures La présence de fractures sur le squelette de l’enfant est un élément important pour le diagnostic de la maltraitance infantile, en particulier lorsque les fractures apparaissent à un très jeune âge ou que le mécanisme de l’accident tel qu’il est décrit ne concorde pas avec la fracture. Il convient de prendre en compte les facteurs suivants: Âge / psychomotricité de l’enfant Pour des raisons biomécaniques, un enfant ne peut se faire une fracture par l’exercice de son activité que s’il marche de manière autonome, ce qui n’est guère le cas durant sa première année de vie. Les fractures qui apparaissent avant le 1er anniversaire sont donc de prime abord très suspectes et une analyse attentive des circonstances montre qu’une fracture sur deux survenue avant le 1er anni- versaire est causée par une maltraitance. Selon certaines études, les fractures qui surviennent avant le 4ème anniversaire doivent être considérées comme très sus- pectes et chacune d’elles doit être examinée très attentivement quant à ses causes.
Illu. 10: Fracture métaphysaire «bucket handle fracture» Illu. 11: Fracture métaphysaire «corner fracture» Fractures multiples / âge variable des fractures Après un accident, on constate dans 80% des cas une seule fracture; les en- fants maltraités présentent en moyenne 3 fractures. Les fractures dont le degré d’ancienneté varie sont un solide argument pour conclure à la présence d’une maltraitance (échelonnée dans le temps). Endroits privilégiés / type de fracture Les fractures des côtes et des os longs tubulaires ainsi que les fractures méta- physaires et épiphysaires chez les enfants en bas âge sont suspectes au plus haut degré (corner fracture resp. bucket handle fracture). (Illu. 10 – 11) Les opinions sont très contradictoires pour établir à partir de quelle hauteur une chute provoque des fractures du crâne chez les nourrissons (par ex. chute de la table à langer): en règle générale, on estime qu’à partir d’un mètre de hau- teur, des fractures du crâne simples peuvent se produire; il s’agit de fractures dites linéaires qui ne chevauchent pas les sutures crâniennes. Il faut prendre en compte la consistance de la surface percutée et le fait que le crâne ait pu heurter un petit objet dur, ce qui peut entraîner des fractures par enfoncement, même si la chute s’est produite d’une faible hauteur. En tous les cas, une «chute de la table à langer» (hauteur de la table située entre 80 et 90 cm) n’occasionne guère de fracture du crâne. Diagnostic différentiel Les fractures qui surviennent en raison d’une ostéopénie à l’occasion d’un choc très faible ou même spontanément sont régulièrement citées comme possibilité de diagnostic autre que la maltraitance.
22 Maltraitance infantile – Protection de l’enfant Constats d’ordre physique Il faut également envisager les situations suivantes: »» Osteogenesis imperfecta / ostéogenèse imparfaite »» Ostéopénie en cas de naissance extrêmement prématurée (< 32 semaines de gestation); premiers mois de la vie »» Ostéopénie en cas d’inactivité (enfants handicapés qui ne peuvent pas marcher) »» Rachitisme Il faut toutefois garder à l’esprit que ou bien toutes ces situations sont claires du point de vue de l’anamnèse et du diagnostic clinique (naissance prématurée, rachitisme, inactivité) ou bien qu’elles se présentent beaucoup plus rarement comme maltraitance infantile (ostéogenèse imparfaite). Blessures internes Les blessures internes occasionnent en règle générale des signes cliniques graves qui nécessitent une hospitalisation immédiate. C’est pourquoi nous nous conten- tons d’aborder ici quelques blessures plus légères ainsi que le «syndrome des bébés secoués»; dans ce cas précis, au cabinet médical l’accent doit être mis prio- ritairement sur la prévention (comment faire face à la situation quand un bébé pleure beaucoup). Syndrome des bébés secoués Le fait de secouer, dans le sens sagittal, un petit enfant qui ne peut pas stabiliser sa tête occasionne des lésions intracrâniennes et intracérébrales graves sans que le crâne percute un objet dur quelconque (il n’y a donc ni signes d’impact ni fractures). Les blessures caractéristiques sont des hématomes sous-duraux, des «shearing injuries» dans le parenchyme cérébral (tous deux provoquent une pres- sion intracrânienne accrue, ce qui est un facteur de préjudice supplémentaire) ainsi que des saignements de la rétine et / ou du corps vitré. (Illu. 12) Sont concernés les nourrissons, les garçons davantage que les filles, la fréquence la plus grande se situant à 5 mois. Le facteur déclenchant est en règle générale les pleurs (fréquents) du nourrisson (raison pour laquelle les garçons sont plus souvent affectés). L’image clinique se compose de trois symptômes principaux:
Illu. 12: Mécanisme du syndrome des bébés secoués état de conscience perturbé (de la somnolence au coma), troubles respiratoires (de la bradypnée à l’apnée) et convulsions. Le pronostic est extrêmement néga- tif: 20 – 25% des bébés meurent immédiatement après le traumatisme; quant à ceux qui survivent, ils se retrouvent presque sans exceptions handicapés à des degrés divers. Blessures dans la cavité buccale Il arrive que l’on conduise chez le médecin des bébés qui présentent des sai- gnements dans la cavité buccale. Ces derniers peuvent être provoqués par des méthodes violentes pour nourrir l’enfant ou par des coups sur la bouche. » cf. le chapitre «Dentistes», p. 42 Intoxications Des états de conscience ou des constats neurologiques inhabituels doivent inci- ter à penser que l’on a administré à l’enfant des substances psychotropes ou des médicaments. La preuve se trouve dans l’urine et / ou le sang; il est préférable de prélever immédiatement l’un et l’autre si vous avez un soupçon. Congelé dans un premier temps, ce matériau peut être analysé par la suite ou jeté.
24 Maltraitance infantile – Protection de l’enfant Constats d’ordre physique Constats indiquant qu’une excision a été pratiquée Le résultat de différentes formes de mutilation génitale féminine4 (infibulation, excision, diverses formes d’incision) peut être décelé facilement lors de l’examen génital de la petite fille, par ex. l’absence de clitoris et / ou des petites lèvres ainsi que la suture des bords de la vulve. Les incisions moins marquées ou les «mini- formes» de l’excision (grattage du clitoris jusqu’à l’apparition d’une goutte de sang) ne sont généralement pas décelées lors d’un examen. Circoncision Dans les milieux spécialisés eux-mêmes, la circoncision (des garçons) que l’on pratique généralement chez les nouveau-nés ou les nourrissons divise les esprits. Elle constitue en effet une intervention non indiquée du point de vue médical, d’autant plus que le sujet concerné ne peut pas donner son avis; de ce fait, elle se trouve en contradiction avec les conceptions actuelles de l’éthique biomédicale. Constats d’ordre physique après une exploitation sexuelle La définition large de l’exploitation sexuelle qui, souvent, ne correspond pas à une pénétration vaginale ou anale (voir plus haut) a pour effet que les constats d’ordre physique sont extrêmement rares après des agressions sexuelles. Si cer- tains signes peuvent être décelés, ils sont souvent si peu apparents que seul un spécialiste expérimenté peut faire la différence entre des signes non spécifiques ou certaines variantes de la norme; il s’agit de lui adresser les enfants concernés et de lui demander son avis – sans attendre, si l’on soupçonne que l’agression a été commise au cours des 72 dernières heures. Seuls peuvent être considérés comme des spécialistes expérimentés des pédiatres ayant suivi une formation complé- mentaire en gynécologie ainsi que des gynécologues chargés d’examiner régu- lièrement des enfants dont on pense qu’ils pourraient avoir subi un abus sexuel. 4 On distingue aujourd’hui les formes d’excision suivantes (mutilation génitale féminine MGF/ female genital mutilation FGM): A (Type 1 «Sunna»): Ablation du capuchon clitoridien avec ou sans clitoris B (Type 2 «Excision»): Ablation du clitoris et des petites lèvres C (Type 3 «Infibulation»): Ablation du clitoris, des lèvres et des zones voisines puis suture du vagin pour ne laisser qu’un minuscule orifice
Maltraitance infantile – Protection de l’enfant 25 Constats d’ordre physique | Signes de comportement particuliers Lorsqu’il y a soupçon d’exploitation sexuelle, la transcription du témoignage de la patiente revêt une importance majeure. Il s’agit de relever les observations en respectant strictement «l’original» (c’est-à-dire mot à mot, sans rien chan- ger, éventuellement en «argot») en indiquant la situation dans laquelle l’enfant s’exprime (pendant la consultation, au moment de sortir, dans la salle d’attente; quelles sont les personnes présentes et quel est leur comportement, etc.). Le mé- decin doit se limiter à transcrire ce que dit spontanément l’enfant; il ne faut en aucun cas «interroger» l’enfant sur d’éventuelles agressions sexuelles; cette tâche est réservée exclusivement aux autorités chargées de l’enquête (en vertu de la Loi sur l’aide aux victimes d’infractions). Il est connu que des «interrogatoires préa- lables» influencent négativement la façon dont les enfants s’expriment lorsqu’ils sont interrogés par les enquêteurs. En effectuant un tel interrogatoire, le médecin rend donc un mauvais service à la patiente. »» cf. le chapitre «Obstétriciens | Gynécologues | Néonatologues», p. 38 Signes de comportement particuliers Après des mauvais traitements, les signes de comportement particuliers sont beau- coup plus fréquents chez les enfants que la présence de constats d’ordre physique. Ces signes comportementaux sont la conséquence des traumatismes subis et tra- duisent la manière dont l’enfant fait face à cette situation. De même que les enfants disposent de facteurs protecteurs extrêmement différents (capacité de résilience), les modifications de comportement peuvent elles aussi être très variables – même dans le cas de traumatismes comparables; elles dépendent aussi de l’âge de l’enfant ainsi que de la position et de la relation qui lie l’auteur à l’enfant. Les signes comportementaux particuliers comme indice de maltraitance ne sont pour ainsi dire jamais spécifiques d’un type de traumatisme: il se peut donc que dans le contexte d’un divorce conflictuel qui représente un traumatisme psy- chique pour l’enfant, les symptômes qui apparaissent soient les mêmes qu’après une exploitation sexuelle chronique, après un harcèlement continu subi à l’école ou après la perte de l’un des parents pour cause de décès. Il faut donc se garder d’interpréter certains symptômes sans connaître précisément la biographie et le contexte général dans lequel vit l’enfant; les listes de symptômes doivent donc être utilisées et interprétées avec une extrême prudence!
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