W+B - Wallonie-Bruxelles International
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S ISSN 0773-4301 - BUREAU DE DÉPÔT : BRUXELLES X > PRINTEMPS 2020 147 W+B WALLON I E + B RUXEL L ES R EVUE TRI MEST RI EL L E IN TER N ATION A L E ÉDI T ÉE PA R LA F ÉDÉRAT I ON WA LLON IE - B RUX EL L ES ET LA WA L LON I E INNOVATION ARMACELL, LE PLASTIQUE QUI SE VEUT FANTASTIQUE ARCHITECTURE ABDELHAKIM GUILMI, LE POUVOIR DE L’IMAGINATION DOSSIER LA WALLONIE, DESTINATION NATURE
< S > La gare de Liège-Guillemins, conçue par l’architecte Santiago Calatrava, accueille le trafic international européen, notamment avec l’ICE © Wallonia.be LA WALLONIE AU CŒUR DE L’EUROPE Avec sa position géographique privilégiée au cœur de l’Europe, Wallonie-Bruxelles offre de nombreuses possibilités de transport, tant pour les voyageurs que pour les marchandises. Son réseau ferroviaire international est le nœud central des liaisons européennes, reliant le territoire wallon et bruxellois aux pays limitrophes, et assurant ainsi un voyage aisé à travers toute l’Europe. Le transport de voyageurs est varié : l’Eurostar assure la liaison Royaume-Uni/Belgique via le tunnel sous la Manche. Certains trains s’arrêtent également à Lille et Calais (nord de la France). Il offre des correspondances avec plus d’une centaine de destinations en Belgique, en France, aux Pays-Bas et en Allemagne. Le Thalys, quant à lui, assure des liaisons vers de nombreuses villes françaises, allemandes et hollandaises, au départ des gares de Bruxelles-Midi et Liège-Guillemins. Le TGV permet également de traverser l’Europe via Wallonie-Bruxelles. L’ICE, de son côté, relie Bruxelles et Liège à Aix-la -Chapelle, Cologne et Francfort. Le réseau ferroviaire international wallon et bruxellois est aussi destiné au transport de marchandises. Les trains de marchandise roulent sur trois grands axes internationaux : Anvers – Athus-Meuse - Italie – Suisse ; Anvers – Montzen - Allemagne ; Anvers – France. Grâce à son réseau ferroviaire international, Wallonie-Bruxelles est connectée au reste de l’Europe avec efficacité.
< > W+B WA L LO N IE + BRUX E LLES R E V U E T R IMESTRIE LLE IN T E R N AT IO N ALE ÉD ITÉ E PA R L A F ÉD É RATIO N WA L LO N IE - BRUXE LLES E T L A WALLO NIE 04 ÉDITO NATURE, CULTURE ET 06 DOSSIER LA WALLONIE, 12 PORTRAIT JOSEPH NDWANIYE, ENTREPRISE, LE MÉLANGE DESTINATION NATURE L’ÉCRIVAIN POLYMORPHE SECRET DE LA WALLONIE ! par Emmanuelle Dejaiffe par Catherine Haxhe S OM M A I R E 14 Culture 18 architecture 22 mode/design W + B 1 47 I’M NO MORE MAD (MUSÉE) ABDELHAKIM GUILMI, BERTELLES, LE MONO-PRODUIT, par Isabelle Plumhans LE POUVOIR DE L’IMAGINATION GAGE D’EXCELLENCE par Nadia Salmi par Marie Honnay Photo couverture : Les villas d’Abdelhakim Guilmi à Marrakech témoignent du talent de cet architecte belgo-marocain © J. Van Belle -WBI 3 24 Jeunesse APPRENDRE UNE LANGUE 26 COOPÉRATION AU DÉVELOPPEMENT 28 ENTREPRISE LE PÔLE MECATECH, MOTEUR EN SE METTANT UN NOUVEAU PROGRAMME D’INNOVATION AUX AMBITIONS AU SERVICE DES AUTRES DES JEUNES AU MAROC EUROPÉENNES par Laurence Briquet par Charline Cauchie par Jacqueline Remits 32 Innovation ARMACELL, LE PLASTIQUE 36 gastronomie LE VIN WALLON : 38 survols QUI SE VEUT FANTASTIQUE UNE FILIÈRE EN PLEIN BOOM par Isabelle Plumhans par Vinciane Pinte SECRÉTAIRE COLLABORATION CONCEPTION ÉDITRICE DE RÉDACTION Marie-Catherine Polygraph’ RESPONSABLE Emmanuelle Stekke Duchêne, Fanny www.polygraph.be Pascale e.stekke@wbi.be Tabart, Véronique Delcomminette Téléchargez 02 421 87 34 Balthasart et Anne IMPRESSION Place Sainctelette 2 la revue sur Neuville Graphius B-1080 Bruxelles www.wbi.be/rwb/ www.graphius.com
< S > Nature, culture et entreprise, le mélange secret de la Wallonie É DI TO W + B 1 47 4 Dar Challa, une des villas créée par Abdelhakim Guilmi au Maroc © AAAG
< S > En 2020, la thématique touris- tique est la « Wallonie, destina- tion nature ». Quelle plus belle occasion pour la Revue W+B de vous faire découvrir des pe- tits coins de Wallonie que vous ne connaissez pas encore, de vous donner envie de vous échapper un peu du quotidien, le temps d’une activité insolite au cœur d’une Wallonie qui n’a pas encore fini de nous révéler tous ses secrets. É DI TO Découvrons aussi le renou- veau du MADmusée à Liège, W + B 1 47 sous sa nouvelle appellation : le TrinkHall Museum. Allons à la rencontre de Joseph Ndwaniye, auteur belgo-rwan- dais, et d’Abdelhakim Guilmi, 5 architecte belgo-marocain. Entrons enfin dans les méandres du Pôle MecaTech, le pôle de compétitivité wal- lon en matière de génie mécanique. Egalement au programme : Bertelles, une marque de bre- telles unique, l’apprentissage linguistique chez les jeunes au travers de séjours à l’étran- ger, le nouveau programme de l’APEFE au Maroc ou une dé- gustation de vins wallons. Bonne lecture !
< S > La Wallonie, destination Nature… DOS S I ER W + B 1 47 6 Les Hautes Fagnes, des balades à la rencontre de la nature toute l’année © Dominik Ketz-High Fens Lorsque vient l’envie de s’échapper du quotidien, nos terres wallonnes réservent quelques surprises insolites pour ceux qui privilégient un tourisme de proximité, estampillé vert et durable. Bivouacs en forêt, paddle, rando en silence, dégustation de plantes sauvages, ou encore escalade de terrils... Pleins feux sur une Wallonie à visiter en mode Nature. PAR EMMANUELLE DEJAIFFE
< S > Ici comme ailleurs, toutes géné- IMMERSION EN FORÊT rations confondues, la Nature est tendance. Pour les uns, il convient « Cette forêt est un patrimoine ex- de la préserver, pour d’autres de s’y ceptionnel avec de nombreuses plonger simplement pour se res- réserves naturelles, c’est un site de sourcer. En Wallonie, dès ce mois grand intérêt biologique où s’ob- de mars, ce sera la thématique servent la nature et le gibier », sou- phare en matière de tourisme pen- ligne Ingrid Jusseret de la Maison DOS S I ER dant deux années consécutives. du Tourisme de la Forêt de Saint- « C’est en effet un marché en plein Hubert. « A Libin, nous propo- développement mais il faut défi- sons une formule de randonnée nir ce qu’est exactement la Nature pédestre entre Lesse et Lomme. W + B 1 47 et prendre en compte des critères Sur trois jours, on parcourt 78 ki- justes et précis. Par exemple, les lomètres balisés en famille ou hébergements ‘clé verte’ sont entre amis dans un cadre magni- un écolabel international », pré- fique. Des aires de bivouacs sont cise Sophie Burgeon de Wallonie aménagées. » Belgique Tourisme (WBT). « A Tenneville, il existe une for- 7 Pour cette campagne, le site de mule de ‘bains de forêt’ qui ren- WBT reprend toute une série de contre un franc succès, cela dure destinations très séduisantes, 200 une heure trente ou trois heures. explorations grandeur nature à Accompagnés d’un éco-guide ou vivre ! Il y en a des kilomètres de d’un sylvothérapeute, les mar- balades, chez nous, à pied, en vélo cheurs s’immergent dans les bois, ou à cheval. profitent du bienfait des arbres et Grèce aux bains de forêt, les promeneurs se reconnectent à la nature © Ingrid Jusseret
sont en pleine présence. Les cita- dins éprouvent souvent le besoin de se reconnecter à la Nature et de décompresser. Avant la fin de l’an- née, nous devrions inaugurer un parcours équipé où le promeneur pourra profiter seul d’un bain de forêt sans accompagnateur. » De nombreuses études scientifiques en démontrent aujourd’hui les ef- fets positifs sur la santé. La grande traversée du Pays de Chimay propose également une formule de bivouacs au cœur de la forêt, en 9 étapes. Là aussi, cela augure de belles promenades avec différentes formules de logements pour les marcheurs. Les bains de forêt rencontrent un franc succès à Tenneville © Ingrid Jusseret BALADES SUR LES TERRILS DU PAYS NOIR DOS S I ER Nos espaces urbains comportent aussi des zones naturelles singu- lières, comme à Charleroi. La ville W + B 1 47 invite à un autre type d’éco-pro- menades guidées à la découverte des terrils de la région. Ici, la nature a repris ses droits et les marcheurs courageux observent, au fil de l’es- 8 calade, une riche biodiversité vrai- ment spécifique. A Saint-Nicolas, la Maison des Terrils permet aux curieux d’en apprendre davantage sur la faune et la flore qui peuplent aujourd’hui ces vestiges du passé industriel de la région. À Charleroi, des éco-promenades invitent à la découverte des terrils de la région © WBT - Christophe Vandercam SE RESSOURCER SUR L’EAU Près de Chimay, l’Aquascope des Etangs de Virelles propose de vi- siter la réserve au fil de l’eau dès le petit matin. Stéphanie Bonnet, responsable du Service éducatif, coordonne les Aubes Sauvages. « Nous donnons rendez-vous pour ce moment contemplatif qui invite à vivre en silence le lever du soleil dans un RABASKA, un grand ca- noë indien de onze places. Parfois nous avons la chance de voir un castor ou du gibier qui se faufilent au bord de l’étang. On entend les oiseaux ou d’autres bruissements, rien n’est programmé. Après la À l’Aquascope de Virelles, la nature s’offre aux promeneurs © Aquascope de Virelles
< S > Les aubes sauvages à l’Aquascope de Virelles, à la découverte de la réserve au petit matin © Aquascope de Virelles DOS S I ER W + B 1 47 9 Au cœur de l’Ardenne, le magnifique Lac de Nisramont et son barrage © Colette Mottet balade, nous prenons ensemble un petit-déjeuner. » A Virelles, les amoureux de nature sont égale- ment invités à passer la nuit dans une SPHAIR, une chambre-bulle sur l’eau, un moment privilégié pour profiter de ce site fermé au coucher du soleil. Plus au sud, au cœur de l’Ardenne, sur le lac de Nisramont, se pra- tiquent dès le retour des beaux jours des séances de paddle en si- lence, les amateurs du genre pro- fitent d’un moment de sérénité en pleine nature. Sur le Lac de Nisramont, on pratique le paddle en silence pour un moment de sérénité © WBT - Caroline Rase
LA NATURE GOURMANDE hameau dans la région de Bertrix. pensé par les propriétaires dans un Ils proposent leurs produits (lait, esprit responsable pour consom- Direction Jambes où Lionel Raway fromages, yaourts, glace) dans un mer le moins possible, et surtout a lancé Cuisine sauvage. « Environ espace de dégustation. « Notre local et durable. Sur leurs réseaux 9 plantes sur 10 de notre jardin troupeau est constitué de brebis sociaux, les commentaires sou- se mangent. Au fil du temps, j’ai laitières belges, une espèce en lignent l’esprit du lieu : « ce gîte appris à voir le jardin comme un voie de disparition. Notre ferme est spacieux, bien équipé, entouré garde-manger. » On y découvre est plus qu’une ferme, nous y d’un beau jardin qui, c’est à souli- un jardin des comestibles avant avons notre magasin, nous y orga- gner, s’inscrit dans une démarche de participer à un atelier cuisine nisons des cours de filage de laine, volontariste pour la protection de ou encore à une balade sauvage, parfois des cours de fromagerie et notre milieu naturel. » pour porter un autre regard sur les autres événements... » Autre gîte avec une politique du- herbes qui nous entourent ! rable et environnementale, le Des fermes wallonnes ouvrent éga- Moulin Castral de Hollogne-sur- lement leurs portes pour retrouver CAP SUR L’AVENTURE Geer accueille les touristes dans un le plaisir du contact avec les ani- cadre magnifique. Depuis 2008, la maux et l’agriculture. Consommer Pour les amateurs de sensations roue réhabilitée de ce patrimoine local, choisir des produits authen- fortes, la Wallonie propose des classé produit de l’électricité sans tiques, de qualité dont l’origine est activités sportives à pratiquer au émission de CO2. A noter, l’en- connue, les habitudes changent grand air, en toutes saisons dans semble des auberges de jeunesse doucement. ses parcs aventure et sur les sen- de Wallonie sont aussi Clé Verte. A Emines, le domaine viticole du tiers de trail en pleine forêt, dans DOS S I ER Chenoy, créé en 2002 par Philippe les Hautes Fagnes ou dans le Grafé, comprend 11 hectares de Geopark Famenne Ardenne, pre- vignes, ce premier vignoble pro- mier parc reconnu en Belgique qui fessionnel wallon propose visites s’étend de Durbuy à Beauraing. Ce W + B 1 47 et dégustations. La commerciali- label de l’UNESCO distingue un sation des vins, certifiés bio, est en territoire d’intérêt géologique et circuit court, tout est pensé dans le environnemental. respect de l’environnement. Dans la vallée de la Molignée, se 10 niche l’escargotière de Warnant, DES HÉBERGEMENTS une visite hors du commun qui se RESPONSABLES termine par un moment gastrono- mique. Elu agriculteur de l’année Non loin du domaine de à la Foire agricole de Libramont, Chevetogne, se dresse la Grange Eric Frolli est le premier hélicicul- d’Ychippe, un gîte labellisé Clé teur en 1986 à lancer un élevage en Verte tout juste récompensé d’un Belgique. Aujourd’hui, le site pro- prix lors d’un récent appel à projet duit 600.000 gastéropodes par an. lancé par Ardennes Ecotourisme. Plus au sud, Barbara et Peter font Zéro déchet, économie d’énergie, vivre la bergerie d’Acremont, un grand jardin et potager, tout est Le troupeau de la bergerie d’Acremont est composé de brebis laitières © WBT - Caroline Rase
< S A VOS CLICHÉS ! > Enfin, dès le mois d’avril, pour lan- cer plus largement cette théma- tique, un concours photos sera proposé sur le site. Histoire de lais- ser place à l’image et de découvrir combien la Wallonie est naturelle- ment belle. Vous retrouverez toutes ces destinations Nature sur walloniebelgiquetourisme.be/ nature Dans le Geopark Famenne Ardenne, les Rapides de la Lesse offrent de l’aventure © WBT DOS S I ER Les Hautes Fagnes, une nature unique à découvrir © WBT - Antoine Davister W + B 1 47 11
< S > Joseph Ndwaniye, l’écrivain polymorphe Oscillant entre roman, conte, récit de voyage et scientifique, l’univers de Joseph Ndwaniye est riche. Nourri de son enfance au pays des mille collines, où la fiction et la tradition orale invitent à une vraie rêverie intérieure, et de son travail dans un hôpital bruxellois bien ancré dans le monde réel, Joseph Ndwaniye nous offre la Joseph Ndwaniye singularité d’une œuvre empreinte d’une grande humanité. PAR CATHERINE HAXHE P OR T R A I T Né au Rwanda en 1962, Joseph Après La promesse faite à ma nuit. Les moments où je ne travaille Ndwaniye n’est pas ce que l’on ap- sœur et Le Muzungu mangeur pas sont consacrés à la famille et W + B 1 47 pelle un produit du monde littéraire. d’hommes, Joseph Ndwaniye pu- le peu qu’il me reste à l’écriture. Je Diplômé de l’École d’assistants mé- blie, en 2018, Plus fort que la hyène, viens ici dans ce café où j’ai mes dicaux de Kigali, il a travaillé dans un livre qui lui ressemble et qui dé- habitudes et j’écris, je corrige ou je différents hôpitaux de son pays crit la maladie (ici la drépanocy- lis. Ce n’est pas simple, je dois bien avant de s’installer en Belgique tose) à des enfants, sous forme de m’organiser. C’est inspirant mais 12 voici une vingtaine d’années, où il a conte poétique. Un ouvrage illustré aussi exutoire. Le travail d’infir- obtenu les diplômes d’assistant de par Anne-Marie Carthé. mier au sein d’une telle unité (ndlr : laboratoire, d’infirmier gradué et greffe de moelle osseuse) n’est pas de licencié en gestion hospitalière. Votre formation médicale ne vous de tout repos. Il travaille désormais au sein des prédestinait pas à l’écriture, est- Cliniques Universitaires Saint-Luc ce compliqué de concilier les Comment est née cette envie de Bruxelles, dans un service pour deux activités ? d’écrire ? patients traités par la greffe de Je travaille à temps plein à St-Luc, Mon premier cahier me fut offert moelle osseuse. avec des horaires irréguliers et de par ma fille lors de mon premier voyage de retour au Rwanda. Elle m’a dit : « Papa c’est pour écrire tout ce que ma grand-mère va dire et pour que tu n’oublies rien ». Quand je suis rentré du Rwanda, j’avais 6 cahiers de 100 pages cha- cun et au bout de plusieurs mois j’ai tout retranscrit sur l’ordina- teur et me suis retrouvé avec 300 pages tapées à la machine. Un jour j’ai rencontré quelqu’un investi dans des cours de littérature afri- caine qui m’a lu et a trouvé cela in- téressant. Il y avait bien sûr beau- coup de travail de réécriture, cela a pris plusieurs années. Ensuite le choix était simple, soit je gar- dais tout ce travail pour la famille, soit je publiais. On m’avait préve- nu, cela allait être long et pénible.
< S J’ai envoyé à différentes maisons d’édition et deux mois plus tard, > les « Impressions Nouvelles » m’ont rappelé. Votre travail est une exploration des relations entre l’Afrique et l’Europe ? Oui je me nourris de ces deux uni- vers, celui de mon enfance et celui du jeune homme que j’étais lorsque je suis arrivé en Belgique en 1986. Mon premier livre évoque le re- tour d’un rwandais dans son pays. J’invite le lecteur à m’accompagner dans cette redécouverte, dans mes errements, mes questionnements sur ce pays, sur le génocide que j’ai vécu de loin, avec pas mal de culpabilité puisque j’étais déjà ins- tallé en Belgique. Mais c’est aussi P OR T R A I T un roman qui invite à se question- ner sur l’Humanité. Le second livre évoque la période d’avant le géno- cide. Un jeune couple hollandais découvre le Rwanda à sa façon, W + B 1 47 selon deux approches différentes. J’y aborde l’impact que cela pour- ra avoir sur leur couple, comment ils vont en revenir. et mes premières conversations se Vous voguez aussi sur diffé- sont faites dans une paroisse hol- 13 rentes formes littéraires, comme landaise près de chez moi, avec avec ce dernier livre illustré pour des missionnaires qui parlaient enfants ? d’ailleurs très mal le français. Mon Oui, c’est un conte tiré de textes point de vue évolue mais j’ai tou- écrits depuis plus de quinze ans, jours ce problème de légitimité un livre pour enfants, qui parle de l’écrivain. Suis-je bien dans la de cette maladie génétique et qui corporation des écrivains en tant touche surtout l’ethnie des noirs, qu’infirmer ? Souvent, j’en doute. la dépranocytose. Il y a une di- Je pratique mon écriture dans mension de transmission entre une certaine forme de solitude, en grands-parents et petits-enfants, marge des milieux d’écrivains. Mais thème récurrent chez moi. J’ai grâce à l’invitation de WBI et des vécu chez ma grand-mère dès Alliances françaises en Amérique l’âge de cinq ans. A l’époque on ra- Latine, je m’autorise à une cer- contait au coin du feu des histoires taine forme de reconnaissance. Je que chacun devait imaginer soir suis allé en Bolivie, au Pérou, en après soir. J‘ai appris à être créatif, Colombie, au Panama et prochai- j’ai emmagasiné un tas d’histoires. nement au Mali. C’est passionnant Quand j’ai commencé à écrire, je d’échanger, de voyager, d’aller à me suis rendu compte que j’avais la rencontre des autres. Ce que beaucoup de choses à raconter. fait WBI est essentiel dans l’aide apportée à la circulation des ar- Vous sentez-vous d’avantage tistes de par le monde. Ma langue écrivain qu’infirmier aujourd’hui ? de partage avec le monde, c’est le J’ai appris le français à l’école au français. Je suis fier de pouvoir le Rwanda. Nous n’avions pas cette faire dans cette langue. Je n’aurais tradition de lecture et de livres, absolument jamais imaginé cela nous n’avions pas de bibliothèque lorsque je l’ai apprise à 9 ans.
< S > © M.Thies - Creahm.be I’m no more MAD (musée) Trinkhall Museum C ULT U R E W + B 1 47 PAR ISABELLE PLUMHANS L’ancien MADmusée, vitrine des œuvres du Créahm (CREAtivité et Handicap Mental) 14 situé dans le parc d’Avroy à Liège, fait peau neuve. Nouvelle architecture, nouveau concept et nouveau nom: appelez-le désormais Trinkhall Museum. Il sera un écrin pour l’art situé (ne l’appelez plus art différencié). Panorama de la transformation et retour sur les histoires d’une belle aventure. L’histoire est belle, qui mêle passé architecture appréciée par les mi- d’une des huit tables de billard de de Liège, aventure rebelle et futur lieux bourgeois quand il est érigé fin la salle principale. La guerre verra culturel liégeois en construction. du 19ème siècle (1880). Surmonté les choses changer; les femmes L’histoire avec un grand H, d’abord. de deux dômes pointus, il est au fréquentent désormais le lieu. Un Celle d’un bâtiment, le Trinkhall, milieu du parc d’Avroy un lieu de kiosque à musique se construit, dont ce musée nouvelle formule divertissement et de spectacles. A lui faisant face. Lieu de projection reprend le nom. Le Trink Hall était l’époque, il est fréquenté par des cinématographique, le bâtiment un bâtiment d’aspect mauresque, hommes qui se retrouvent autour souffrira d’un incendie, de la ré- quisition pendant la guerre, par les allemands, du métal des dômes, puis des inondations des années 20. Un projet architectural moder- niste le repense dans les années 60. Le nouveau lieu, blanc et bé- ton sur deux étages, est voué aux fêtes et célébrations en tout genre. Son rez-de chaussée et la terrasse sur le toit sont accessibles au pu- blic du parc. « C’est ce lieu, nous confie Cécile Schumacher, ac- tuelle directrice du Créahm, qu’in- vestit, à la punk, Luc Boulangé à la Aloys Beguin et Brigitte Massart création de l’asbl. » C’est là qu’on
< S > C ULT U R E Vue de chantier du Trinkhall Museum © Beguin-Massart / Alain Janssens entre alors dans la deuxième partie W + B 1 47 de l’histoire du Trinkhall Museum. CRÉAHM, DE LA DIFFÉRENCE À LA RECONNAISSANCE 15 Luc Boulangé, artiste peintre, est le fondateur du Créahm. Il croit plus que tout en la créativité des gens « hors norme ». Il cherche un lieu pour accueillir des ateliers enca- drés d’artistes qui travaillent avec des personnes dotées d’un han- dicap mental. On est dans les an- Vues du nées 80. Il ne s’agit pas ici d’ate- chantier © Trinkhall liers thérapeutiques, mais bien Museum d’ateliers qui accompagnent les candidats dans une démarche ar- tistique, d’un centre d’éducation permanente. Ces ateliers prennent doucement de l’ampleur. En ’92, faute de place, ils migrent vers le quartier Saint-Léonard, et ce qui a alors pris le nom de MADmusée (actuel Trinkhall Museum) de- vient lieu d’exposition temporaire. Luc Boulangé a en effet, au fil du temps, créé de nombreux liens avec des institutions partout en Europe qui observent la même philosophie que la sienne, et a acquis une collection d’œuvres d’« art différencié ». L’activité du Créahm se poursuit en deux pôles,
C ULT U R E Vue générale du Trinkhall Museum © Atelier d’architecture Beguin-Massart W + B 1 47 ateliers encadrés (théâtre, danse, 1963, sans l’effacer; l’ancienne ter- bien créatifs. En droite lignée avec musique, arts plastiques, cirque) rasse du toit est notamment trans- les ateliers d’artistes d’antan. Et qui au quai Saint-Léonard et musée formée en salle d’exposition. La produit un art qui a sa place dans le au parc d’Avroy. Dans leurs nou- transmission est au centre du pro- monde de l’art d’aujourd’hui. Un art veaux locaux, les ateliers se déve- jet, avec des espaces éducatifs, une qui dit, qui dénonce, qui est certes 16 loppent. Les Jam d’impro du mer- bibliothèque et un centre de docu- différent… mais ne le sommes-nous credi accueillent un public divers, mentation. Les caves ont été trans- pas tout·e·s ? L’important est donc les oeuvres des artistes plasticiens formées en réserves correspon- de montrer l’art dans le « comment il se vendent. Certains des artistes dant aux critères de conservations se construit ». D’où cette notion d’art se font d’ailleurs connaître au large d’œuvres (3000 œuvres au total). situé, qui s’inscrit dans le « faire ». public. Tel Pascal Duquenne, re- Enfin le MadCafé, lieu de convivia- L’art comme « ex-pression ». connu à l’international pour sa lité bien connu des liégeois, res- prestation dans le Huitième Jour, tauration saine et sympathique, Dans la première exposition qui de Jaco Van Dormael, mais qui est terrasse solaire par beau temps sera proposée par le lieu, « Visages/ avant tout un artiste plasticien, ou au pied du kiosque, est conservé frontières », il sera question de vi- encore Michel Petiniot, dont les au rez-de-chaussée. S’il change de sages. Un sujet vaste, qui accueille- dessins ont inspiré le styliste Jean- nom (appelez-le Trinkhall Café), il ra crâne surmodelé de Papouasie - Paul Lespagnard: les deux artistes est confié à la même coopérative Nouvelle-Guinée, autoportrait de ont travaillé main dans la main à finalité sociale qu’auparavant. Rembrandt, figure bricolée de pour une collection de costumes. L’idée est évidemment de travailler Louis Pons, lithographie de Bengt main dans la main avec le musée. Lindström ou de James Ensor… TRANSVERSALITÉ Le « main à main », c’est le deu- Ce nouveau musée ouvre à la dif- xième point du musée. Car il s’agit férence, dans ce qu’elle a de plus Et c’est bien cette transversali- d’un musée qui se base sur la col- beau. « Art is a garanty of Sanity » té, ce caractère inclusif que veut laboration. Car pourquoi art situé disait Louise Bourgeois. C’est sans mettre en lumière le nouveau mu- à la place de l’ancien art différen- doute la plus belle des transmis- sée Trinkhall. cié? L’art différencié se voulait « art sions que propose ce nouveau mu- D’abord au niveau architectural. La par les ‘hors normes’ ». Au Trinkhall sée. La présentation d’un art qui nouvelle structure (pensée par le Museum, on enfonce l’idée de base nous relie et nous fait. bureau Beguin-Massart), translu- du Créahm, qui se veut lieu d’ac- cide, incorpore l’ancien bâtiment compagnement artistique. Un lieu moderniste. Du polycarbonate qui propose des ateliers encadrés. NDLR : Merci à Claude Warzée pour les englobe littéralement l’édifice de Pas des lieux thérapeutiques, mais informations historiques.
< S Trinkhall Museum © M.Thies - Creahm.be TrinkHall Museum > Parc d’Avroy 4000 Liège info@trinkhallmuseum Week-end d’ouverture: 21 et 22 mars 2020 (performances, visites guidées gratuites, ateliers créatifs, ambiance musicale…). Accès gratuit, réservation souhaitée. Horaire: Mardi au dimanche, 10 à 18h. Accès gratuit chaque premier dimanche du mois. De nombreuses expositions sont proposées dans des lieux partenaires de la région (dont le Théâtre de Liège, C ULT U R E La Boverie, L’Emulation). Un parcours retraçant l’histoire du bâtiment sera également visible au Grand W + B 1 47 Curtius cet été. Toutes les infos sur www.trinkhall.museum 17 Vue de chantier du Trinkhall Museum © Beguin-Massart © Alain Janssens
< S > Abdelhakim Guilmi, le pouvoir de l’imagination Il a fait de ses initiales un atelier d’architecture prospère et réputé… A.A.A.G, c’est l’histoire d’un belgo-marocain qui avait un rêve et qui s’est donné les moyens de le réaliser. PAR NADIA SALMI Tout commence à Lommel le 14 décembre 1978. Mais ce jour-là, Abdelhakim Guilmi ne s’en sou- A R C HI T EC T UR E vient évidemment pas. Sa nais- sance, celle qui va donner un sens à sa vie, elle se situe plus tard, à l’âge de cinq ans, quand il dé- ménage à Liège. « En troisième maternelle, j’ai découvert l’école à pédagogie active. C’était tellement W + B 1 47 stimulant que ça m’a marqué. Ça a même peut-être fait qui je suis au- jourd’hui. Dans le système Freinet, l’autonomie laissée à l’enfant est s’adonne à sa passion, sincère- Un an après, la famille Guilmi importante. On lui laisse faire ce ment, avec déjà l’envie de se per- déménage et une école plus tra- 18 qu’il veut, dans un cadre bien dé- fectionner. « Je me vois encore du- ditionnelle s’impose à Abdelhakim fini puisqu’il y a un contrat à res- rant la Coupe du Monde de 1986 qui sent tout de suite la différence. pecter avec l’institutrice… Moi, ce en train de m’amuser à refaire la L’adaptation prend du temps mais qui m’intéressait, c’était le dessin fameuse mascotte avec le grand le jeune garçon s’accroche. Il a et les mathématiques ». Et ce qui chapeau mexicain... Une fois, neuf ans et déjà, une certitude : pourrait passer pour une lubie ne deux fois, à l’infini. Ça a vraiment plus tard, il sera architecte. Il se l’est pas... Jusqu’à la deuxième an- joué sur ma vocation artistique et le répète comme un mantra et le née primaire, Abdelhakim Guilmi cartésienne ». martèle aussi à ses frères et sœurs. © AAAG Villa Cros © AAAG Villa Talotte © AAAG
< S > © AAAG © AAAG A R C HI T EC T UR E © AAAG © AAAG W + B 1 47 Ça tombe bien. L’une d’elles a une amie qui vient d’aller à la journée portes ouvertes de la faculté d’ar- 19 chitecture de Lambert Lombard. Elle pense donc naturellement à Abdelhakim et lui ramène une bro- chure. « Je passais tous les jours devant cet établissement qui me faisait rêver. Du coup, j’ai gar- dé le document qu’elle m’a of- fert comme un talisman. Ça m’a Maison Crocodile © AAAG motivé à tel point que quand on m’a demandé en cinquième année primaire de dire comment « faites ce que vous voulez mais fi- considère comme la continuité de je me voyais plus grand, je me suis nissez-le ». Alors Abdelhakim étu- l’architecture. Conclusion finale de dessiné à une table en train de die, s’accroche et s’inscrit à 17 ans cet apprentissage: il obtient la plus faire des croquis ». à la faculté qu’il brûlait de décou- grande distinction alors qu’il ne vrir. C’est la belle époque, la confir- parlait pas espagnol à son arrivée mation de ses espoirs. Le jeune à Grenade. LE GOÛT DES ÉTUDES homme enchaîne là les cours et les recherches graphiques avec no- L’évidence est là et le père d’Ab- tamment un professeur qui fera fi- L’ENVOL AU SOLEIL delhakim sait comment la stimu- gure de mentor. « J’ai eu la grande ler. Lui qui travaille à la mine de- chance d’avoir Henri Chaumont, Avec ses diplômes en poche, le puis son arrivée en Belgique dans un architecte très pédagogue qui rêve de pouvoir vivre de sa passion les années 60 veut le meilleur pour m’a fait grandir car il croyait vrai- se rapproche. Reste à déterminer ses enfants… « Chaque année, au ment en moi ». Au terme de ses l’endroit. Abdelhakim a le goût du mois de juin, il me posait la même cinq années d’études, Abdelhakim voyage alors il postule partout, sur question « Que veux-tu devenir ? » choisit ensuite de faire un Master tous les continents. Et c’est finale- et je répondais invariablement en paysages en Espagne, histoire ment Londres et Marrakech qui lui « architecte ». Sa devise, c’était de maîtriser également ce qu’il répondent favorablement. « Je me
Dar Challa © AAAG A R C HI T EC T UR E Villa Talotte © AAAG Ksar Zaytoune © AAAG W + B 1 47 20 Villa Cros © AAAG
< S suis dit que ce serait pratique d’aller Trois questions express vivre au Maroc car ma famille y à Abdelhakim Guilmi > avait gardé un pied-à-terre. Et puis, j’avais envie de mieux connaître ce Comment décririez-vous votre style architectural ? pays que je ne visitais que pendant Moderne, authentique et fonctionnel. J’aime les lignes pures et les vacances d’été. J’étais donc cu- droites. Je fais attention au moindre détail. rieux et mon père, très surpris de ma décision ». En 2004, le jeune Quels sont vos modèles ? architecte débarque à Marrakech, Au niveau international, je dirais OMA, Frank Lloyd Wright et Le considérée alors comme l’eldora- Corbusier. En Belgique, j’aime beaucoup le travail d’Erpicum. do des Français. C’est l’endroit à la mode, idéal pour prospecter et Quelle est votre devise ? établir sa stratégie. Durant qua- Le travail, ça paie mais la droiture, ça paie encore plus. L’argent torze mois, il travaille comme colla- n’achète pas tout. Il faut rester intègre. borateur pour des cabinets et puis, en octobre 2005, il décide de se mettre à son compte. Il a à peine 26 ans. « Quand la première maison que j’ai construite a été publiée A R C HI T EC T UR E dans un magazine de décoration, les commandes ont commencé à vite tomber et A.A.A.G a gran- di. Aujourd’hui, je travaille avec une équipe d’une dizaine de per- sonnes sur des projets résidentiels et hôteliers. A cela s’ajoute aussi du W + B 1 47 conseil ». La clientèle est cosmopolite : de Dubaï à Monaco en passant par les pays d’Afrique de l’Ouest et bien sûr la Belgique. Depuis 2017 en ef- 21 fet, il a une antenne dans son pays Abdelhakim Guilmi de cœur pour pouvoir accom- © J. Van Belle – WBI pagner au mieux ceux qui sou- haitent investir dans l’immobilier au Maroc. De quoi faire de belles affaires car Marrakech est devenue au fil des ans une plateforme inter- nationale. « Les gens rencontrés là, vous pouvez rêver pour les voir à Bruxelles ou à Paris. Ils viennent souvent en mode relax, ce qui fait que les langues se délient… Et moi, je suis à l’écoute, prêt à saisir les occasions. Ce qui me plaît quand je construis, c’est de mettre en va- leur le savoir belge au Maroc, que ce soit pour des châssis, de l’éclai- rage ou encore du revêtement comme le Mortex ». Il est comme ça, Abdelhakim Guilmi, fier de sa Belgique natale qu’il a conscience aussi de repré- senter. En guise de conclusion, Ksar Zaytoune © AAAG Villa Cros © AAAG © J. Van Belle - WBI il glisse ainsi dans un sourire: « A © J. Van Belle - WBI Marrakech, on me surnomme l’ar- chitecte belge. C’est un beau com- pliment ». www.aaag-maroc.com
< S > Bertelles, le mono-produit, gage d’excellence L’entrepreneur belge Gilles Grosjean a un petit faible pour le mono produit. Après les chemises, il s’est lancé dans la création de bretelles, un marché de niche dans lequel il a très vite trouvé ses marques. Aujourd’hui, il vise l’international. Gilles Grosjean, PAR MARIE HONNAY fondateur de Bertelles M O DE / DE S I GN Tout a commencé avec Abbie & A l’époque, Gilles Grosjean envi- « terroir ». Bertelles est l’appella- Rose, une marque de chemises sage ce nouveau projet comme tion en wallon (et en dialecte pi- masculines qui a permis à Gilles « une sorte de récréation », mais, card) du mot bretelles. Et, d’autre Grosjean, un ingénieur d’origine très vite, le caractère authentique part, de viser l’international. « Ce liégeoise, de mettre un pied dans du produit et son potentiel mar- mot », précise-t-il « se prononce W + B 1 47 l’univers de la mode. Ce premier keting le titillent. Au point, finale- plutôt bien dans d’autres langues. projet lui donne l’occasion de faire ment, de le convaincre, dès 2015, Un bon point de départ pour l’ex- ses armes, de développer son ré- de revendre Abbie & Rose pour se port ». Pour conquérir les mar- seau et de croiser la route des fon- consacrer totalement à Bertelles, chés belges et étrangers, Gilles dateurs de Colonel moutarde, une son nouveau bébé. Grosjean a mis toutes les chances 22 micro-entreprise du nord de la de son côté. Installé à Bruxelles, France spécialisée dans le nœud dans un bâtiment récemment ré- papillon. Ce sont eux qui lui mettent EN WALLON DANS LE TEXTE nové du cœur historique, le label la puce à l’oreille : « Et pourquoi pas joue la carte d’une belgitude dis- des bretelles, un produit, certes de Le nom Bertelles, Gilles Grosjean le crète (l’idée n’est pas d’utiliser cet niche, mais qui continue à intéres- choisit pour deux raisons presque ancrage comme argument mar- ser le public, dans le cadre de te- opposées : d’une part, dans une keting), mais assumée. Toutes nues de mariage, par exemple ? ». idée de véhiculer un message les bretelles sont fabriquées en © Bertelles
< S > M O DE / DE S I GN W + B 1 47 23 © Bertelles Belgique dans une approche qua- PASSÉ ET PRÉSENT chés », précise-t-il. Si, pour l’heure, litative et durable. Si les pièces les États-Unis et l’Asie ne sont pas métalliques sont allemandes et le L’engouement croissant des encore les pays les plus porteurs cuir tanné en Italie, chaque paire consommateurs pour les produits pour Bertelles, le label y est ce- est assemblée dans un atelier authentiques et porteurs de va- pendant présent. « Au Japon, les connu pour son savoir-faire dans leurs éthiques a évidemment boos- hommes portent leurs bretelles ce secteur. Côté identité visuelle, té le développement de la marque sur un jeans. Notre but n’est pas de Gilles Grosjean, aujourd’hui entou- belge. Mais, pour durer, Gilles réinventer le produit, au contraire, ré d’une petite équipe de 3 colla- Grosjean doit également dévelop- mais plutôt de le moderniser en boratrices, mixe codes rétros et per d’autres arguments. « Nos pro- fonction des besoins et des goûts accents plus contemporains. Les duits sont proposés dans des tons de nos clients. Une manière de res- photos publiées sur les réseaux so- classiques, mais aussi dans une sé- ter fidèles à nos valeurs, mais éga- ciaux invitent les porteurs de bre- lection de couleurs plus « mode » lement de grandir sans dévaloriser telles dans le quotidien d’une griffe qui changent de saison en saison. notre produit. » respectueuse d’un certain artisa- En suivant les tendances, nous nat, mais désireuse de les bouscu- cherchons à plaire à un public ler gentiment en leur proposant de plus jeune, mais aussi à nous ins- www.bertelles.com nouvelles manières de les porter. crire dans la logique d’autres mar-
< S > Apprendre une langue en se mettant au service des autres Chaque année, de nombreux jeunes font le choix de voyager pour apprendre une langue étrangère, mais aussi pour se mettre au service d’une association. PAR LAURENCE BRIQUET L’apprentissage des langues est encore Bel’J (pour parfaire sa important dans une carrière pro- connaissance du néerlandais ou de fessionnelle. Chaque année, de l’allemand en participant au projet nombreux jeunes font le choix d’une association en Flandre ou en de voyager pour aller apprendre Communauté germanophone). » J E UN ES S E une ou plusieurs langues. « En effet, rien ne vaut une immer- Nancy, bruxelloise de 25 ans et de- sion dans le pays où l’on parle la mandeuse d’emploi, a, par exemple, langue qu’on souhaite pratiquer », soumis un projet au BIJ pour vivre explique Véronique Balthasart, une immersion linguistique de 3 W + B 1 47 chargée de la communication du mois au Royaume-Uni, dans le Bureau International Jeunesse cadre de Tremplin Langues. Elle a Erasmus © BIJ (BIJ). « Le BIJ peut aider à finan- choisi de mener son projet dans cer ces séjours à travers plusieurs un magasin de vêtements de se- pétences en vente et en compta- programmes comme Tremplin conde main OXFAM, à Manchester. bilité. Ces 12 semaines m’ont sur- 24 Langues (dans un pays d’Europe, « Cette expérience a été particuliè- tout permis de prendre confiance on améliore sa pratique de la rement enrichissante et m’a permis en moi, de mieux me connaître et langue en se mettant au service d’être nettement plus à l’aise en de voir plus clair dans mes envies d’une association), Volontariat anglais en pratiquant la langue au et mes projets de vie. Et puis, (en collaboration avec 5.000 pro- quotidien, dans un contexte pro- découvrir une nouvelle culture, jets des associations agréées par fessionnel mais aussi en dehors. c’est voir le monde autrement », la Commission européenne) ou J’ai aussi acquis certaines com- explique-t-elle. Corps européen de solidarité © BIJ
< S Etudiants à Barcelone : « C’est enrichissant de quitter son quotidien » > VOLET ESSENTIEL Le programme Eurodyssée permet, Chiara, 18 ans, est restée en pour sa part, de participer à un stage Belgique pour améliorer son néer- professionnel dans une région d’Eu- landais grâce au programme Bel’J. rope. Julien De Mesmaeker, 25 ans, de Elle a fait 3 mois de volontariat Céroux-Mousty (Brabant Wallon), diplô- chez « De Ark-Gent ». « Le projet mé Master en Ingénieur de Gestion à la m’a rendue plus autonome et plus Louvain School of Management, en fait mature, j’ai appris à plus m’ouvrir, actuellement l’expérience, à Barcelone. à m’occuper et vivre avec des per- « J’ai choisi Barcelone car je voulais sonnes atteintes d’un handicap. trouver un endroit où pouvoir pratiquer Julien De Mesmaeker J’ai fait de belles rencontres que et surtout améliorer mon espagnol tout je n’oublierai jamais et j’ai évidem- en restant relativement proche de la ment amélioré mon néerlandais », Belgique. Le programme Eurodyssée of- confie Chiara, visiblement ravie de frait la possibilité de partir dans plusieurs régions d’Espagne. J’y suis son expérience. depuis novembre. J’ai commencé par un mois de cours intensif d’es- pagnol et enchainé avec 5 mois de stage en entreprise. C’est très Notons que l’ensemble des pro- enrichissant de quitter son quotidien, son environnement habituel, sa grammes du BIJ permettent famille, ses amis… pour se retrouver presque seul dans un pays incon- J E UN ES S E d’améliorer ses compétences nu, avec une langue différente », note-t-il. linguistiques de manière indi- recte, informelle : à travers les re- Laurentine Fosséprez, 25 ans, de lations avec des jeunes d’autres Bruxelles, qui a fait des études d’ingé- pays, les jeunes de Wallonie et nieur de gestion à Louvain-La-Neuve W + B 1 47 de Bruxelles arrivent à s’exprimer est, elle aussi, en ce moment à Barcelone dans une autre langue et à com- dans le cadre du même programme. muniquer. Les jeunes qui partent « Avec ma formation d’ingénieur de ges- en volontariat dans une associa- tion, les langues sont primordiales sur tion en Europe grâce au Corps eu- le marché du travail. Cela combiné avec ropéen de solidarité améliorent l’expérience de travail que j’acquiers 25 aussi leurs pratiques linguistiques lors de mon stage, cela va certainement Laurentine Fosséprez grâce à des cours en ligne et, en être un plus sur mon cv », note la jeune fonction de l’association qui les ac- femme, qui semble profiter pleinement cueillent, de cours de langue sur de son expérience espagnole. place. De même, les travailleurs de jeunesse, dans le cadre du volet jeunesse d’Erasmus+, ont la pos- sibilité de suivre des formations et une base de la langue, un module Ce module ayant fait ses preuves, séminaires thématiques en anglais pour mieux communiquer en an- il a été repris par d’autres Agences qu’ils pratiquent avec leurs collè- glais à chaque étape de leurs pro- nationales du volet jeunesse du gues européens. jets : présenter son association, programme Erasmus+. Le Bureau International Jeunesse prendre contact avec ses parte- a également mis en place, pour les naires, élaborer un programme travailleurs de jeunesse ayant déjà commun, évaluer les retombées… www.lebij.be © BIJ
< S > CO OP ÉR AT I O N AU DÉVE LO PPE M E NT Un nouveau programme d’entrepreneuriat et d’employabilité des jeunes au Maroc W + B 1 47 Abdelmounaãm Madani, Directeur Général de l’ANAPEC, partenaire de l’APEFE © Apefe Le projet lancé en ce début fé- a un nouveau contrat de gestion vrier au Maroc est symbolique à qui élargit considérablement son plus d’un titre. D’abord, il s’agit du mandat », commentait récemment 26 premier programme de l’APEFE Jean Van Wetter, le directeur Dans le cadre d’une (Association pour la Promotion d’Enabel nommé fin 2018, « À côté convention de subside, de l’Education et de la Formation de notre rôle d’implémentateur de l’APEFE met en œuvre à l’Etranger) qui sera financé par la coopération gouvernementale, un programme de l’Agence fédérale en charge de la qui est notre métier de base, nous soutien à l’amélioration coopération au développement, assumons aujourd’hui un nouveau de l’entrepreneuriat Enabel. Selon la volonté du fédé- rôle de ‘broker’, de facilitateur et l’employabilité des ral, Enabel se positionne de plus entre acteurs de la coopération. jeunes marocains. en plus comme bailleur de fonds L’idée est de servir d’intermédiaire et plus forcément comme exécu- pour la mise en place de nouveaux tant des projets de développe- partenariats autour de projets de PAR CHARLINE CAUCHIE ment : « Depuis deux ans, Enabel développement. Ce n’est d’ailleurs Remise des attestations de formation en présence de l’ANAPEC et de la Présidente de l’association © Apefe
< S > CO OP ÉR AT I O N AU DÉVE LO PPE M E NT W + B 1 47 Atelier de formation des jeunes femmes non diplômées en présence de l’administrateur du programme de l’APEFE pas un hasard si nous avons aussi nous a amené à récolter énormé- au Maroc, Mr Stiévenart © Apefe changé de nom, puisqu’Enabel est ment d’informations et à mettre un jeu de mots sur l’anglais to en- tout le monde autour de la table able, rendre possible, faciliter. Cela avant de démarrer quoi que ce 27 illustre bien cette nouvelle facette soit. » de nos activités. Parallèlement, nous accentuons aussi notre col- Le public-cible de ce nouveau pro- laboration avec d’autres acteurs jet sont les 18-35 ans, « essentiel- ration, c’est donc un vrai challenge. belges et internationaux. » lement les non-diplômés comme Il y a un réel besoin, comme l’ont pour Min Ajliki ». Même si l’accent montré les récents événements Parmi lesquels l’APEFE donc, qui sera aussi mis sur les femmes et politiques. Les jeunes sont très mettra en œuvre au Maroc ce pro- les jeunes filles, « un des buts prin- réceptifs. » gramme, financé à hauteur de trois cipaux est d’amener les jeunes à millions d’euros sur quatre ans, qui travailler ensemble de façon mixte Il y a tout un secteur à structurer : va soutenir l’amélioration de l’en- pour éviter le cloisonnement. » « Les moyens sont là pour l’em- trepreneuriat et l’employabilité des Le programme veut participer à ploi, mais ce qui manque, ce sont jeunes Marocains avec, comme « stimuler l’esprit d’entreprendre des plateformes régionales qui partenaires, le Ministère du Travail des jeunes en développant leurs puissent assurer un suivi et un ac- et de l’Insertion Professionnelle capacités entrepreneuriales et ma- compagnement des jeunes dans marocain et l’Agence nationale nagériales ». Avec l’aide des as- le lancement d’entreprises, la for- de promotion de l’emploi et des sociations locales déjà présentes mation. Un challenge pour l’APEFE compétences (ANAPEC). Benoît sur le terrain, des incubateurs se- qui veut également continuer à Stiévenart, administrateur de pro- ront développés dans quatre ré- intégrer le numérique : « On peut gramme APEFE au Maroc, ex- gions parmi les plus pauvres et difficilement organiser des forma- plique que l’objectif de ce projet enclavées du pays : Fès-Meknès, tions qui impliquent uniquement est formulé en miroir de celui de Draa-Tafilalet (le sud du pays avec du présentiel. Le numérique aura « Min Ajliki 2.0 » (programme fi- des villes comme Ouarzazate, son importance. » nancé par la Direction Générale Errachidia, Zagora, etc.), l’Orien- Coopération au Développement et tal (Oujda, Nador, Driouch, etc.) et Aide Humanitaire), qui concerne Beni-Mellal-Khénifra (au centre). www.apefe.org l’entrepreneuriat féminin : « Notre « Ce sont des zones moins inves- www.enabel.be expérience acquise via Min Ajliki ties par les programmes de coopé-
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