L'éducation se met au vert E - Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage OFEFP - Bundesamt für Umwelt
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Office fédéral de l’environnement, des forêts et du paysage OFEFP ENVIRONNEMENT 3/2004 L’éducation se met au vert
ÉDITORIAL Sommaire Pour davantage de responsabilité personnelle 4 Spots Pour que notre société se développe 6 Vision «Paysage 2020» harmonieusement, elle doit vivre en L’OFEFP a développé une stratégie à long terme équilibre avec la nature. L’intelligence pour encadrer l’inévitable évolution du paysage humaine devrait parvenir à intégrer ses et de la nature. Cinq exemples illustrent l’utilité de cet exercice prospectif. créations dans l’environnement sans le dégrader. Pour ce faire, nous pouvons renforcer la législation et le contrôle de l’Etat, créer des incitations économiques et faire appel à la respon- sabilité personnelle. La responsabilité personnelle est fondée sur le respect des autres, de la nature, de la vie sous toutes ses formes. Elle per- met d’éviter un contrôle étatique et des charges fiscales trop lourdes et repose sur la connaissance de l’environnement et de ses mécanismes. Elle vise à prendre conscience que la nature est notre famille et l’environnement notre maison. L’éducation – dans la famille, à l’école, dans la formation 11 Débits résiduels professionnelle, au travail – développe cette responsabilité. De Une récente étude explique ce qu’apporte la nombreux parents m’ont confié que c’est grâce à leurs enfants fixation d’un débit minimum de restitution dans un cours d’eau. que leur conscience écologique s’est développée. Ce qui a été appris et vécu à l’école est ensuite mis en œuvre à la maison: 14 Prairies sèches d’importance nationale tri des déchets, économies d’énergie, respect des animaux et Visite chez Denise Favre, paysanne de montagne des plantes. en Gruyère. Aujourd’hui, l’éducation à l’environnement n’est pas formel- 16 Le programme Emeraude en Suisse lement intégrée au système éducatif et la décentralisation de Le Conseil de l’Europe entend mieux protéger l’éducation reste un obstacle à l’introduction systématique de les espèces et les biotopes. La Suisse va adopter l’environnement comme discipline d’enseignement. Heureuse- ce programme; elle s’engage à protéger 30 ob- ment, des personnalités comme Mme la Conseillère d’Etat Ruth jets d’importance internationale. Gisi, Présidente de la Fondation suisse d’éducation pour l’envi- 20 Loisirs en forêt ronnement et M. Hans Ambühl, Secrétaire général de la Confé- Le programme forestier suisse ( PFS / WAP) tient rence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique, compte des besoins de tous les partenaires en ce ainsi que de nombreux autres acteurs, s’engagent activement. qui concerne l’utilisation de la forêt au cours des prochaines décennies. Les derniers arrivés seront La Confédération a peu de compétences directes dans ce do- les mieux servis. maine, mais elle peut et doit soutenir les efforts des cantons et des institutions privées qui s’engagent. Il s’agit certainement de l’investissement le plus productif que l’on puisse imaginer pour Couverture: projet solaire jeunesse de Greenpeace à Scuol GR, photographié par Emanuel Ammon, l’avenir de notre pays. Lucerne, Aura/OFEFP. Philippe Roch Directeur de l’OFEFP 2 ENVIRONNEMENT 3/04
24–45 DOSSIER ÉDUCATION À L’ENVIRONNEMENT 24 Avenir de l’éducation à l’environnement 41 Et la formation des enseignants? Tous les plans d’enseignement devraient com- Les Hautes écoles pédagogiques ont adopté un prendre un chapitre éducation à l’environne- module de formation en éducation à l’environne- ment. Avec d’autres, cette recommandation ment. L’enseignement de cette thématique ne provient d’un très officiel rapport. pourra qu’en bénéficier. 28 L’école, milieu de vie et d’expérimentation 43 Moyens d’enseignement On peut gérer écologiquement un établissement Sans matériel adéquat, pas d’éducation à l’envi- scolaire et utiliser cette expérience dans un but ronnement. Deux exemples pour inciter les formateur. maîtres à se lancer dans l’aventure. 32 La forêt de montagne comme atelier 45 Éducation à l’environnement ONLINE Les semaines organisées par Silviva dans les forêts de montagne permettent à de nombreux jeunes 46 Moteurs diesel sur les chantiers de découvrir un monde dont ils ignorent tout. Depuis deux ans, une directive règle le problème des émissions des moteurs diesel. Un premier bi- 35 Cudrefin.02 lan tente d’évaluer son effet. Destiné aux apprentis de toute la Suisse, cet atelier du futur se trouve sur la rive sud du Lac 49 Polluants de l’air provenant du trafic routier de Neuchâtel. Cette nouvelle étude le montre clairement: l’augmentation du trafic privé en Suisse réduit 36 Concours Environnement + Jeunesse partiellement à néant les progrès enregistrés 80 classes de Suisse romande ont pris part à au niveau de la réduction des émissions. la dernière édition de ce concours. Le thème 2004/2005 «Prenez l’air!» devrait attirer de nouveaux participants. 38 Développer ses compétences écologiques A Berne, le Centre de formation du WWF offre des cours qui permettent à chacun d’acquérir de nouvelles compétences en matière d’écologie. 52 Taxe d’incitation sur les COV La réduction des émissions de composés orga- niques volatils est en bonne voie. 54 Enquête auprès des lecteurs Le magazine ENVIRONNEMENT est fort apprécié par ses différents utilisateurs. 56 Jugement 40 Formation en cours d’emploi 56 ENVIRONNEMENT au quotidien Les spécialistes en environnement trouveront Informations provenant des cantons au sanu à Bienne de quoi entretenir leurs 60 Agenda connaissances, voire décrocher un nouveau 61 Nouvelles publications de l’OFEFP brevet fédéral. 62 Actif 63 Le savoir-vert / Impressum PROCHAIN DOSSIER: «OBSERVATION DE L’ENVIRONNEMENT»
SPOTS Les certifications – Haute pression pour piéger les microparticules utiles en temps de crise Les microparticules PM10 et les suies qui En dépit de la persistance d’une s’attaquent à nos voies respiratoires ne situation économique difficile, le proviennent pas toujours de la combus- nombre d’entreprises certifiées tion du diesel. Le chauffage au bois augmente toujours. Cette tendance libère, lui aussi, des quantités considé- Cheminée ne profite pas uniquement à l’éco- rables de particules, qui se retrouvent ain- logie. Les entreprises sont large- si en suspension dans l’air. Le Laboratoire ment gagnantes en modérant leur fédéral d'essai des matériaux et de re- consommation de ressources non cherche (EMPA) développe un filtre élec- Electrode Isolation renouvelables ainsi qu’en limitant la trostatique pour éliminer au moins 50 % production des déchets. Rien que de cette pollution particulièrement per- pour l’année 2003, plus de 150 nicieuse. Une électrode engendre une candidats se sont inscrits auprès de haute pression dans la conduite d’éva- Ventilation l’Association suisse pour systèmes cuation des fumées, ce qui fixe les parti- de qualité et de management cules sur les parois. Le ramoneur pourra (SQS). Depuis 1996, cet organisme, ainsi récupérer ces dépôts lors de l’entre- leader du marché helvétique, a ain- tien de la cheminée. Dans les zones den- Poêle si certifié plus de 700 entreprises sément peuplées, le nouveau filtre per- respectueuses des normes du déve- mettra d’abaisser de façon considérable loppement durable. les émissions de microparticules durant la Commande Institut de recherches EMPA Beat Moser, Association suisse pour saison de chauffage. systèmes de qualité et de management, Volker Schmatloch, Laboratoire fédéral d’essai Bernstrasse 103, 3052 Zollikofen, des matériaux et de recherche EMPA, 031 910 35 35, headoffice@sqs.ch, 8600 Dübendorf, 01 823 41 53, www.sqs.ch volker.schmatloch@empa.ch, www.empa.ch Du bois plutôt que du pétrole Tout l’Emmental pourrait se chauffer avec le bois de la région, mais la moitié de ce précieux combustible se décompose sur place sans être exploité. Avec le soutien du canton et d’Ener- gieSuisse, le projet «Oil of Emmental» entend exploiter les res- sources disponibles, encourageant par la même occasion l’économie régionale. Le principe part d’une idée simple mais ô combien intéressante: plutôt que d’importer chaque année pour 30 millions de francs du pétrole, du gaz et de l’électri- cité, investissons cet argent directement dans l’économie ré- gionale. L’Emmental va faire un gros effort de promotion du chauffage au bois et autres installations qui exploitent des énergies renouvelables. Josef Jenni, Jenni Energietechnik AG, 3414 Oberburg BE, 034 422 97 77, info@jenni.ch, www.oil-of-emmental.ch, AURA www.oil-of-emmental.ch 4 ENVIRONNEMENT 3/04 SPOTS
La santé sans mercure Toujours tout savoir Un bon nez sur les labels Les revêtements routiers contiennent Pour faire ses achats dans le respect de soit du bitume soit du goudron, lesquels l’environnement en tenant compte d’un ne peuvent être distingués l’un de l’autre certain aspect social, il faut être bien in- à l’œil nu. Comme le goudron renferme formé et être capable de s’y retrouver des substances cancérigènes, les hydro- dans la jungle des labels. La fonda- carbures aromatiques polycycliques tion PUSCH (Praktischer Umweltschutz (HAP), la plus grande prudence s’impose Le mercure est un poison hautement Schweiz) a créé un site Internet qui pré- lors des travaux routiers. Des tests en la- toxique. C’est pour cela que l’importa- sente une information complète sur les boratoire étaient jusqu’ici nécessaires tion et l’abandon d’objets contenant ce labels écologiques et sociaux en vigueur afin de mesurer ces HAP. La division Dé- métal lourd sont interdits en Suisse. dans notre pays (en allemand pour chets de l’OFEFP a mandaté l’entreprise Mais cela n’empêche pas quelque le moment). Cette base de données Portmann AG de Biel-Benken BL et l’Ins- 4 tonnes de se balader encore dans le www.labelinfo.ch propose ainsi aux titut d’écologie appliquée de la Haute pays, surtout dans des thermomètres et consommateurs une bonne vision d’en- école de Rapperswil SG pour développer appareils à prendre la tension. L’associa- semble, tout en présentant des informa- un « nez électronique » à même d’effec- tion des Médecins en faveur de l’envi- tions objectives sur chacun des labels. La tuer les mesures en temps réel. Cet ins- ronnement s’investit en conséquence page d’accueil fait partie intégrante de la trument d’une grande sensibilité per- pour augmenter le taux de retour des structure d’information alémanique «In- mettra désormais de cartographier de appareils dangereux provenant des fostelle für Umwelt- und Soziallabels», façon rapide et efficace les zones cri- cabinets médicaux, des hôpitaux et des dont les connaissances vont bien au-delà tiques pour la santé des travailleurs et ménages privés, afin d’éliminer le mer- de ce qui est publié. Cette structure des riverains. cure dans les règles de l’art. Une pre- fonctionne avec le soutien de l’OFEFP, de Balz Solenthaler, Institut für angewandte mière récolte est prévue cet automne. l’Office fédéral de l’énergie, du canton Umwelttechnik, Oberseestrasse 10, D’ici 2006, le poison devrait avoir dis- de Zurich, du WWF et de COOP. 8640 Rapperswil, 055 222 48 66, paru du secteur sanitaire. Praktischer Umweltschutz Schweiz Pusch, balz.solenthaler@hsr.ch, www.umtec.ch Dr Peter Kälin, président des Médecins en case postale 211, 8024 Zurich, 01 267 44 11, faveur de l’environnement, www.umweltschutz.ch; www.labelinfo.ch 3954 Loèche-les-Bains, 072 472 18 20, petermkaelin@freesurf.ch, www.aefu.ch Le prix «Pegasus» facilite les décollages Remplissage des bio-réacteurs Depuis deux ans, un prix de la mobilité donne des ailes à l’es- méthode diminue le «tourisme du purin» ainsi que les émis- prit d’innovation dans notre pays. Lancé par EnergieSuisse et sions d’ammoniaque et de phosphore dans le canton de Sun21, ce prix soutient grâce à une enveloppe de 100 000 Lucerne, une région où il y a encore trop d’exploitations agri- francs le développement d’idées originales. Le prix «Pégasus» coles pour la surface disponible. La Ville de Genève et la Com- 2004 a été attribué au projet Swiss Farmer Power, qui produit munauté de travail IG Vélo ont reçu les prix de consolation. du gaz naturel avec un mélange de purin et de fumier. Ce car- Prix Pegasus, c/o Sun 21, Elisabethenstr. 23, 4010 Bâle, burant limite la production de gaz à effet de serre. De plus, la 061 227 50 55, info@prixpegasus.ch, www.prixpegasus.ch ENVIRONNEMENT 3/04 SPOTS 5
PRINCIPES DIRECTEURS DE L’OFEFP Vision «Paysage 2020» Les beaux paysages, tous les prospec- la nature sont des valeurs sûres, dont la qualité du paysage et en assurer une tus touristiques nous les promettent. Le personne ne peut se passer. évolution harmonieuse passe par une marché de l’immobilier aussi. La majo- Nul ne le contestera: un paysage at- réflexion sur les aménagements qu’on rité des gens les recherchent pendant trayant, dans la vie quotidienne comme y réalise. Ce qui demande de nous in- leurs loisirs. On aimerait tous les avoir dans les loisirs, est inestimable. Mais terroger sur nos attentes et sur l’évolu- devant notre porte, même si on habite il est aussi évident que ce patrimoine tion que nous souhaitons. «Paysage en ville. Beaux paysages et diversité de subit de multiples pressions. Maintenir 2020» n’est rien d’autre que la contri- Champ d’action «Utilisation du sol» Une assurance pour l’avenir Le paysage a été façonné au cours de l’histoire par l’utilisation du sol et le mode de vie des po- pulations. Il ne sert pas seulement à produire des matières premières et des denrées alimentaires, mais constitue également un espace de vie, ainsi qu’un lieu de détente. Ces fonctions, il devra aus- si les remplir à l’avenir. Il est donc essentiel de préserver une exploitation agricole et forestière respectueuse de l’environnement. Gabriela Brändle, FAL Exemple: hêtraies à chênes Les hêtraies à chênes sont devenues rares sur le Plateau. A Treiten BE, une forêt de ce genre était menacée par un projet de gravière. Grâce à l’étude d’impact sur l’environnement, une grande partie du périmètre d’extrac- tion a pu être placé en dehors de la zone digne de protection. De plus, des surfaces forestières adjacentes d’une grande valeur écologique (riches en vieux bois et bois mort) ont été protégées contractuellement en tant que réserve forestière. OFEFP/Nature et paysage 6 ENVIRONNEMENT 3/04 NATURE ET PAYSAGE
bution de l’OFEFP à ce dialogue social. Nos principes directeurs se déclinent • L’homme dans le paysage Il esquisse les principes de l’évolution en huit champs d’action: • Participation du paysage dans un contexte de déve- • Utilisation du sol • Instruments économiques et loppement durable et formule le pro- • Politique du territoire utilisation des ressources gramme à long terme de l’office pour • Cours d’eau • Recherche et prospective. ce qui touche à la nature et au paysage. • Espèces et milieux naturels Champ d’action «Cours d’eau» Nos rivières ont besoin d’espace Les lacs et les rivières sont les artères du paysage. Pour qu’elles puissent assumer leurs fonctions vitales pour l’homme, les animaux et les plantes, elles ont besoin d’eau pure, d’un régime hydrique aussi naturel que pos- sible – et d’espace en suffisance. Exemple: l’Engelbergeraa Ashvin Gatha, Blonay L’Engelbergeraa, près de Stans NW, était une rivière fortement canalisée par des digues en maçonnerie. On a pourtant réussi à lui redonner plus d’espace. Depuis, on assiste à la formation de bancs de gra- viers ou de nouveaux bras. Des îles émer- gent, colonisées par la végétation pion- nière telle que les saules. Ces tronçons proches de l’état naturel constituent des lieux de détente très appréciés. Ils servent également de refuges pour les plantes et les animaux. OFEFP/Nature et paysage ENVIRONNEMENT 3/04 NATURE ET PAYSAGE 7
Champ d’action «Milieux naturels» Réseau vert suisse Lorenz Heer, Bern On dénombre chez nous quelque 45'000 espèces animales et végétales. Pour sa pérennité ce précieux patrimoine a besoin d’un réseau de biotopes aussi naturels que possible: réserves naturelles et forestières, surfaces de compensation écologique dans les zones agricoles et les agglomérations, etc. Il faut aussi une gestion responsable de la flore et de la faune sur l’ensemble du territoire. Exemple: Weissenau près d’Interlaken Le site de Weissenau, entre les lacs de Brienz et de Thoune, comporte une zone alluviale et un bas-marais d’importance nationale; il est aussi protégé par l’IFP, et représente un lieu de détente fort appré- cié. Il se situe à côté d’un terrain de golf construit dans les années soixante. On procède à une revalorisation écologique non seulement de la zone protégée, mais aussi du terrain de golf. Le parcours deviendra plus attractif, tant pour les spor- tifs que pour la flore et la faune sauvages. Tout le monde en profitera. OFEFP/Nature et paysage 8 ENVIRONNEMENT 3/04 NATURE ET PAYSAGE
Champ d’action «L’homme dans le paysage» A bas la monotonie – vive la diversité La mémoire de notre société est inscrite dans les paysages Christoph Bürki, Bienne qu’elle a façonnés. Ceux-ci revêtent une grande importan- ce pour notre identité culturelle. Or, cette mémoire se dilue dans la monotonie de la grande «agglomération suis- se». A l’avenir, nous devrons faire un usage plus respon- sable des richesses naturelles et culturelles du paysage. Il s’agit de respecter la nature lors de la construction d’ou- vrages, intégrer les besoins de détente dans le développe- ment urbain. Quant aux zones de montagne encore in- tactes, elles devront le rester. Exemple: Paysages en poésie La relation au paysage, les valeurs qu’on lui attribue, le plaisir qu’on y recherche évoluent de pair avec les transformations de la société. Sur trois sites, l’exposition Paysages en Poésies des Préalpes vaudoises tente de lire dans les mutations du paysage ce rapport d’une société à son environnement, afin de déceler les nouvelles références qui imprègnent notre perception. Ce projet artistique pluridisciplinaire allie photographie, poésie et architecture. Il est à découvrir jusqu‘au 15 octobre dans les paysages emblématiques de la colline du Temple à Château d’Œx, du Col de la Croix et sur les hauts de Leysin (www.paysages-en-poesie.ch). Paysages-en-poésie, projet à Château d’Œx ENVIRONNEMENT 3/04 NATURE ET PAYSAGE 9
LIEN Champ d’action «Instruments économiques» Paysage consommé – à qui l’addition? www.environnement-suisse.ch > paysage 2020 La plupart des ressources naturelles sont limitées; les sols les plus fertiles n’échappent pas à cette règle. Si l'on n’arrête pas de gaspiller ce capital, celui-ci ne produira plus d’intérêts pour les générations futures. Le sol étant un bien public, l’Etat veillera à ce qu'il soit utilisé de façon judicieuse. La surface imperméabilisée ne devrait plus augmenter. L’emplacement et le tracé des constructions sont à choi- sir en respectant le contexte naturel et paysager, et en s’efforçant de les regrouper. Roland Findeisen, Constance Exemple: jachères florales Les incitations financières de la nouvelle poli- tique agricole encouragent la diversité bio- logique et paysagère. Ainsi, les jachères florales apportent des notes colorées dans des paysages exploités de façon intensive, tout en servant de refuge à des oiseaux, des papillons, des insectes ou d’autres animaux devenus rares (le lièvre par exemple). Elles offrent un maximum d'efficacité lorsqu’elles constituent un réseau ramifié à tra- vers de grandes surfaces. Matthias Stremlow, OFEFP Markus Jenny LECTURE INFOS • Brochure Paysage 2020. Principes directeurs de l'OFEFP pour la nature et le paysage, Matthias Stremlow 2003. Gratuit ; disponible en F, D, I, RG, E ; DIV–8407-F. OFEFP, Documentation, Section Paysage et infrastructure 3003 Berne, fax 031 324 02 16, docu@buwal.admin.ch, www.buwalshop.ch OFEFP • Paysage 2020. Commentaires et programme. Synthèse réalisée pour les principes 031 324 84 01 directeurs Nature et Paysage de l'OFEFP, 96 p. Disponible en F, D. CHF 25.– ; matthias.stremlow@buwal.admin.ch DIV-8408-F. Commande: voir plus haut. 10 ENVIRONNEMENT 3/04 NATURE ET PAYSAGE
DÉBITS RÉSIDUELS Les poissons au goutte-à-goutte? L’exploitation de la force hydraulique est soumise à certaines règles, notamment celle des débits résiduels convenables. Une récente étude vient confirmer que les exigences légales se justifient et qu’elles assurent un bon compromis entre les intérêts économiques et la protection des ressources naturelles. A gauche, la passe à poissons installée avec succès sur la Suze, dans Bieler Tagblatt/Archive les Gorges du Taubenloch, au-dessus de Bienne. Parmi ses sites touristiques, la ville de dessous d’un débit de 700 litres par se- par seconde du débit de restitution dé- Bienne compte les gorges du Tauben- conde. Le reste – soit plusieurs fois cet- passent de 140 litres le minimum légal. loch. Peu avant de pénétrer en ville, la te quantité en période de grandes eaux Suze suit en effet un parcours profond, – est prélevé en amont par la centrale Liberté d’appréciation cantonale et sauvage, creusé au fil des siècles dans hydroélectrique de Boujean: il emprun- La loi fixe certes un débit résiduel mini- le dernier contrefort du Jura. Ebahi par te une conduite forcée et actionne une mum, mais elle laisse une large marge les cascades et les chutes vertigineuses, turbine avant de retourner à la rivière. de manœuvre aux cantons pour décider le promeneur ne remarque pas que La concession a été renouvelée en si la protection du cours d’eau doit seule une partie des eaux passe sous ses 1998, conformément aux exigences de passer avant les intérêts économiques. yeux. Cela parce que la concession obli- la loi fédérale sur la protection des C’est ce qui a prévalu dans le cas des ge l’exploitant à ne pas descendre en eaux, qui date de 1992. Les 700 litres gorges du Taubenloch. Malgré le prélè- ENVIRONNEMENT 3/04 PROTECTION DES EAUX 11
vement, la Suze conserve donc l’essen- Lors des pêches de contrôle, on n’a Appréciation générale tiel de sa fonction de milieu naturel, pris aucun poisson dans le tronçon Somme toute, les résultats de l’étude comme le démontre l’étude «Débits ré- affaibli par l’infiltration, alors qu’un sont mitigés, quoique plutôt positifs. siduels – quel bénéfice pour les cours petit peuplement de truites subsiste en En effet, la fonction écologique est d’eau?» réalisée par l’OFEFP (voir Lec- amont. Et le tronçon de référence est maintenue dans quatre des tronçons tures). nettement plus peuplé. La conclusion examinés: le Schächen antérieur UR, la Cette étude a examiné en détail huit des experts est donc claire: «Les fonc- Vièze près de Monthey, l’Aar près d’In- cours d’eau. Dans chaque cas, les terlaken et la Suze. Par ailleurs, le usines hydroélectriques ont obtenu Bockibach près d’Erstfeld UR, l’Aa- leur concession après l’entrée en vi- gueur de la loi révisée. L’évaluation écologique se fonde sur les critères suivants: [ LE RAPPORT ÉTABLIT L’EFFICACITÉ DES DÉBITS MINIMAUX ] bach près de Wildegg AG et le Flem- bach remplissent partiellement les exigences écologiques. L’Aar près de Worblaufen BE est • Conservation de la diversité des es- tions écologiques du Flembach ne sont un cas particulier. Et ce n’est pas seule- pèces, de la capacité de rendement que partiellement garanties par les dé- ment à cause du prélèvement de l’usine piscicole et des ressources nutritives bits résiduels existants.» hydroélectrique de Felsenau. En fait, la pour la faune piscicole. Les exigences légales sont toutefois cause est surtout biologique, la station • Possibilité de franchissement par les remplies en été. Pendant la belle saison, d’épuration rejetant des eaux de très poissons. le Flembach est en effet alimenté par la mauvaise qualité. Des travaux sont en • Qualité des biotopes. fonte des neiges et le débit a été fixé à cours pour améliorer la situation, grâce • Qualité de l’eau. 300 litres par seconde, en particulier à un agrandissement de la STEP. • Odeur, turbidité, formation de vase pour préserver ce site, car un sentier et prolifération d’algues. longe le cours d’eau. Les contrôles ont Efficacité des prescriptions • Colmatage (dépôt de fines particules même fait état de débits de 350 litres «Le rapport prouve que les prescrip- tendant à imperméabiliser le fond du par seconde. tions relatives aux débits résiduels sont lit). efficaces», conclut Manfred Kummer de Les valeurs observées ont été comparées la division Protection des eaux et pêche à celles d’un tronçon de référence du de l’OFEFP. Mais des améliorations sont même cours d’eau, ou aux valeurs défi- encore nécessaires. A son avis, les nies par la loi. Pour la Suze, c’est le tron- Prescriptions légales études destinées à définir la concession çon situé en amont du captage qui a pourraient être menées avec plus de servi de référence. Pour chaque cours d’eau, le débit ré- soin. Autre point important: «Quand siduel minimal est calculé selon une les cours d’eau ont une importance éco- Quand l’infiltration fausse tout formule qui tient compte du débit na- logique particulière, les mesures de pro- Les résultats sont moins probants pour turel. Dans certaines conditions, les tection devraient être considérées avec le Flembach, qui se jette dans le Rhin cantons peuvent fixer le débit rési- attention lors de la pesée des intérêts.» antérieur près de Flims GR. La conces- duel en deçà de la limite légale. Mais Il faut savoir que les débits minimaux sion fixe le débit résiduel minimal à 60 ils peuvent aussi le fixer à un niveau fixés par la loi se situent vraiment à la litres par seconde en hiver. Selon les supérieur s’ils estiment, au terme de limite de ce qui est écologiquement mesures effectuées, ce débit est bien res- la pesée des intérêts prévue par la loi, supportable. pecté dans la partie supérieure du tron- que la protection du cours d’eau çon; mais en aval, il n’y a plus que 30 concerné passe avant son exploi- Production peu affectée litres par seconde. Cette baisse est due à tation. Reste à déterminer les conséquences l’infiltration des eaux. des débits résiduels sur la production 12 ENVIRONNEMENT 3/04 PROTECTION DES EAUX
Présence du poisson Le débat se poursuit Au printemps 2003, le conseiller natio- nal Christian Speck a déposé une mo- tion visant à réduire sensiblement le ni- veau actuel des débits résiduels. De son côté, le conseiller aux Etats Simon Epi- ney a proposé, dans une initiative parle- mentaire allant dans le même sens, de Tronçon sans Tronçon avec débit Tronçon sans pré- reformuler entièrement cette réglemen- réglementation résiduel lèvement d’eau du débit résiduel tation. Suite aux discussions en commis- Source: aide-mémoire Débits résiduels, OFEFP 2003 sion, le Valaisan a retiré son initiative au profit d’une contre-proposition de la Les débits résiduels font vivre les poissons. Il alimentent les nappes phréa- tiques, favorisent la diversité biologique, valorisent le paysage, façonnent les commission. zones alluviales et assurent la propreté des cours d’eau. d’électricité. Selon une étude menée dans l’autre, les choses s’équilibrent et rait fatal à des écosystèmes entiers: une par Elektrowatt en 1987, les nouvelles l’impact sur la production ne devrait perte sans commune mesure avec la ré- prescriptions légales devaient réduire la pas dépasser 2000 GWh jusqu’en 2070. duction des émissions de CO2 permise production annuelle de 5000 GWh, soit Et ces prévisions ne tiennent pas par un supplément de production. 1/7e de la production annuelle de compte des progrès techniques. Certes, Urs Fitze toutes les centrales hydroélectriques. l’effet des prescriptions sur les centrales Dans ses explications, le Conseil fédéral ayant obtenu leur concession depuis INFOS prévoyait une baisse plus modérée: 1992 s’est traduit par une baisse de pro- Manfred Kummer les nouvelles prescriptions devaient en- duction estimée à 70 GWh par an. Mais Service Débits résiduels traîner une baisse annuelle de 2000 l’agrandissement et l’optimisation des OFEFP GWh jusqu’en 2070. Mais le Gouverne- centrales ont malgré tout permis d’ac- 031 322 93 93 ment supposait aussi que la liberté croître la production de 2000 GWh. manfred.kummer@buwal.admin.ch d’appréciation laissée aux cantons en- gendrerait une diminution équivalente. Ecosystèmes en péril LECTURES Avançant des arguments de protection • Urs Vogel, Arthur Kirchhofer, Martina Brei- Les cantons ont fait preuve du climat, les producteurs ont récem- tenstein, Restwassermengen – Was nützen LIEN de retenue ment exigé qu’on abaisse, voire suppri- sie dem Fliessgewässer?, Débits résiduels – Il s’avère que les cantons ont me, les débits résiduels. Ils prétendent quel bénéfice pour les cours d'eaux?, BUWAL www.environnement-suisse.ch > Protection des eaux > Débits résiduels une pratique assez restrictive. en effet que ces réglementations entra- 2004, Cahier de l’environnement n° 358, Le débit résiduel n’a dépassé la vent trop la production d’une énergie 139 p., publication bilingue, CHF 25.–, limite minimale légale que propre… Mais leurs thèses se fondent SRU-358-D; OFEFP, Documentation, 3003 dans quelques cas, comme ce- sur des donnés erronées, car ils suresti- Berne, fax 031 324 02 16, docu@buwal. lui de la Suze. Certains n’hé- ment la baisse de production entraînée admin.ch, www.buwalshop.ch (peut aussi sitent pas à fixer un débit rési- par la législation. être téléchargée en format pdf). duel inférieur, en particulier Les débits résiduels sont fixés de ma- • Les débits résiduels, dépliant, OFEFP 2003; dans les cours d’eau dépourvus nière à assurer la fonction écologique disponible en f, d i; DIV-2704-F. Gratuit. de peuplement piscicole. L’un des cours d’eau. Les réduire encore se- Aussi téléchargeable. ENVIRONNEMENT 3/04 PROTECTION DES EAUX 13
G. Masé PRAIRIES ET PÂTURAGES SECS Denise Favre mise sur l’écologie L’exploitation agricole de Mme Favre, à Montbovon, en Haute-Gruyère, produit chaque année 60 000 kg de lait tout en embellissant le paysage. Le terrain comprend une prairie sèche d’importance nationale que sa propriétaire soigne avec amour et professionnalisme. «Sur cette photo, on voit ma plus belle logique OQE (voir ENVIRONNEMENT rages secs comme un nouveau secteur prairie sèche. Chaque année en mai, 4/2001). Parmi celles-ci figure «La Rap- de l’exploitation. Elle met toutefois en elle déborde de fleurs.» Denise Favre paz», une prairie sèche d’importance garde les amateurs: «Si quelqu’un fait montre une image accrochée dans la nationale de 0,55 hectare. Denise Favre ça uniquement pour l’argent, il va ren- cuisine du chalet. Elle parle des prairies a accompagné le botaniste qui a effec- contrer beaucoup de problèmes.» et des pâturages colorés qui annoncent tué les relevés sur ses terrains. Elle l’arrivée de l’été en montagne, des connaît donc bien tout ce qui y pousse: Fourrage de qualité inférieure champs de narcisses et d’orchidées qui «La flore de ma prairie est vraiment En raison de la fauche tardive (au plus embellissent le printemps au bord de la unique!» Sarine, dans l’Intyamon, nom patois de La prairie se trouve sur une pente ce bout de vallée entre Montbovon et très raide, exposée plein sud. Son oncle, Prairies sèches et Estavannens. Elle évoque son enfance, qui l’exploitait avant elle, n’a jamais pâturages maigres la ferme de ses parents à Château d'Œx, utilisé d’engrais non plus. La parcelle la vie avec les vaches, les bouquets de est fauchée mécaniquement une fois Les prairies et pâturages secs (PPS) ne narcisses qu’elle cueillait avec ses petits par année. Dans certains endroits, où représentent plus qu’un petit pour cent camarades pour les vendre au bord de la des rochers affleurent, il faut faucher à de la surface agricole utile en Suisse. On route, l’herbier où elle collectionnait la main. «Il est important de faucher estime qu’entre 20 à 40 % de ces bio- les plus jolies fleurs. soigneusement, sinon une parcelle se topes ont disparu rien qu’au cours des transforme rapidement en friche.» En 20 dernières années. Une ordonnance D’importance nationale fait, elle est plutôt contente de ne pas d’application est en préparation; les Ses prairies et pâturages occupent une devoir faire plus souvent ce travail. Si travaux de cartographie seront terminés surface totale de 25 hectares. Trois hec- l’été n’est pas trop sec, La Rappaz est en été 2005. Objectifs: protéger et tares sont constitués de cultures peu in- aussi utilisée pour faire pâturer le bétail favoriser les stations sèches au niveau tensives ou extensives intégrées dans en automne. fédéral. L’agriculture y occupe une pla- un projet régional de mise en réseau, L’agricultrice considère l’exploita- ce incontournable. selon l’ordonnance sur la qualité éco- tion extensive de prairies et de pâtu- 14 ENVIRONNEMENT 3/04 NATURE ET PAYSAGE
Jacques Studer Christine Caron-Wickli L’agricultrice Denise Favre pose ici avec son chat Tiloup. A gauche, une prairie sèche. Photo principale: prairies et pâturages caractérisent le paysage de l’Intyamon en Gruyère. L’exploitation agricole en chiffres Exploitante: Denise Favre tôt le 1er juillet), ce foin est plutôt de Partager ses connaissances Lieu: Montbovon FR qualité inférieure. Il convient surtout Un sentier didactique de douze kilo- Altitude: 800 à 1200 m pour l’affouragement des vaches taries mètres relie Montbovon à Estavannens, Zones d’exploitation: ou des bêtes d’élevage, moins exi- plus bas dans la vallée. De nombreux Zone de montagne II et III geantes. panneaux d’information ont été ins- Surface agricole utile: 25 hectares L’exploitation manque de fourrage tallés le long du chemin. Ils renseignent Personnel: 1,5 spécifique pour favoriser la production sur la région, l’agriculture locale, la Mode de production: PI laitière. Denise Favre élève douze bêtes faune et la flore. En été, le parcours at- (Production intégrée) tachetées rouges, croisées avec des Sim- tire beaucoup de promeneurs. Secteurs de production: 22 unités menthal. Le taux de matière grasse, me- Le sentier longe les prairies et pâtu- de gros bétail (UGB); 10 à 12 suré à la fromagerie du village, est sou- rages secs de l’exploitation de Mme vaches laitières + veaux et génisses vent insuffisant, ce qui entraîne une Favre. «Les randonneurs aiment ces Contingent laitier: 60 000 kg lait réduction du prix payé pour le lait. prairies fleuries. Ils posent des tas de de fromagerie «Mon objectif est d’obtenir une vache questions sur les plantes et notre tra- Prairie sèche d’importance polyvalente pour la production de lait vail, explique-t-elle. C’est pour moi un nationale – «La Rappaz»: 0,55 ha et de viande, ce qui permettrait une plaisir de partager mes connaissances. de prairie mésophile avec indica- utilisation optimale du fourrage de Mais en été, il y a beaucoup de travail et teurs d'eutrophisation; prairie de l’exploitation», explique l’éleveuse. Elle peu de temps pour faire la causette!» fauche, pâturée en automne rééquilibre la nourriture des vaches laitières en achetant des mé- Christine Caron-Wickli LIEN langes de céréales. En re- LECTURE > Habitats & parcs > vanche, il n’y a aucun prob- www.environnement-suisse.ch Prairies et pâturages secs lème de fumure. «J’aurais Cartographie et évaluation des prairies et pâtu- plutôt tendance à manquer INFOS rages secs d'importance nationale. Rapport de fumier et de lisier. Je les Christine Gubser technique. OFEFP, 2001, Cahier de l’environ- utilise dans les parcelles Section Protection des espèces nement n° 325, 251 p., disponible en F, D, I, plates et facilement acces- et des biotopes, OFEFP E ; gratuit, SRU-325-F. OFEFP, documenta- sibles.» 031 322 99 80 tion, 3003 Berne, fax 031 324 02 16, christine.gubser@buwal.admin.ch docu@buwal.admin.ch, www.buwalshop.ch. ENVIRONNEMENT 3/04 NATURE ET PAYSAGE 15
RÉSEAU EUROPÉEN EMERAUDE Protéger les espèces de montagne: une responsabilité suisse Conserver les espèces et les biotopes menacés d’Europe à l’intérieur d’un réseau continental de zones protégées: tel est l’objectif du programme Emeraude. La Suisse a fait sa part, puisque 30 ha- bitats seront inscrits dans ce but après une procédure de consultation auprès des cantons. Au Tessin, le débit naturel de la Maggia Normalement, un événement aussi sant derrière elle des surfaces de gra- est de 50 m3 par seconde en moyenne extraordinaire ne se produit que tous viers nues, sur lesquelles la végétation après la jonction avec la Melezza. Un les deux à trois siècles. Mais il a montré peut redémarrer. Seules quelques riviè- jour d’automne 1978, à la suite de de manière saisissante la puissance res alpines ont un tel dynamisme. La pluies diluviennes, il a atteint les 5000 d’une rivière de montagne. Heureuse- Maggia est une des zones alluviales les m3, soit autant que le Nil aux environs ment, celle-ci peut encore divaguer, plus intéressantes d’Europe centrale. du Caire! Aucune pierre n’est restée à sa parce qu’elle n’est pas canalisée. Aussi, C’est le quatrième objet, par sa taille, de place dans le lit ravagé par la violence quand les eaux montent, la Maggia l’inventaire fédéral des zones alluviales des flots. redessine le paysage avec violence, lais- d’importance nationale. Giosanna Crivelli La Maggia est une des dernières grandes zones alluviales sauvages de Suisse. C’est une région très riche en diversité. Sur 20 km2, on trouve un tiers des espèces végétales menacées. 16 ENVIRONNEMENT 3/04 PROTECTION DES ESPÈCES
Le petit rhinolophe fer à cheval (Rhinolophus hipposideros) élit domicile dans les combles des vieilles maisons. C’est là qu’il passe sa journée, en grandes colonies. La nuit, cette chauve-souris part à la chasse dans les bo- cages. L’espèce compte parmi les mammifères les plus menacés de Suisse. Ce paysage obtiendra prochaine- et le Chabot, deux poissons qui ment le statut Emeraude, du nom de vivent dans les eaux froides bien ce réseau qui est un programme de oxygénées. Situées entre Cevio et protection de la nature du Conseil de Maggia, ces zones font parties des 30 l’Europe. Les États membres, dont la paysages suisses retenus pour le ré- Suisse, sont priés de conserver les seau Emeraude: leur surface totale espèces et les habitats menacés à atteint 350 km2. l’échelle de l’Europe et – si nécessai- La sélection repose sur une étude re – de les placer sous protection. réalisée par le Centre suisse de carto- graphie de la faune à Neuchâtel, en Agentur Sutter Le trésor du Tessin collaboration avec un bureau spécia- Le Conseil de l’Europe a élaboré un lisé. Le tout sur mandat de l’OFEFP La leucorrhine à gros thorax (Leucorrhinia pec- instrument de mise en œuvre sous la (voir LECTURE p.19). Le centre gère toralis) est une espèce de libellule naguère ré- forme d’une liste rouge des espèces nos connaissances sur les effectifs et pandue dans les tourbières. L’exploitation de la et des habitats menacés à l’échelle la distribution du monde animal en tourbe lui a ravi son habitat. du continent. Bien des biotopes se Suisse. Des centaines de milliers d’in- trouvent aussi dans la zone alluviale formations sur plus de mille espèces couverte par la Maggia. Il s’agit indigènes sont enregistrées dans les notamment de prairies alluviales de banques de données. Quant au montagne couvertes de lavande, de Centre du réseau suisse de floristique forêts d’aulnes blancs, de rives à Genève, il fait le même travail pour sablonneuses. Quelques espèces ani- le monde végétal. C’est lui qui a livré males figurant dans la liste s’y trou- les données de base nécessaires à vent bien, comme le Barbeau canin l’étude. Hansruedi Wildermuth Zones Emeraude de Suisse 1 Bonfol JU 15 Valle Maggia TI 2 Etang de la Gruère 16 Piano di Magadino TI JU/BE 17 Tresa TI 3 Doubs JU 18 Colombera TI 4 La Vraconne VD 19 Val Roseg GR 5 Rive sud du lac de 20 God da Staz GR Neuchâtel BE/VD/FR 21 Ruin'Aulta GR 6 Vallée de Joux VD 22 Lauerzersee SZ 7 Sèche de Gimel VD 23 Rothenthurm SZ/ZG 8 Rhône en aval de 24 Marais au Genève Rickenpass SG 9 Les Grangettes VD 25 Galgenmaad- 10 Les Mosses VD Schribersmaad SG 11 Pfynwald VS 26 Reusstal AG/ZG/ZH 12 Belpau BE 27 Wetzikon ZH 13 Habkern/Sörenberg 28 Boniswiler-Seenger Ried AG BE/LU 29 Regensdorf ZH 14 Hanenried OW 30 Thurspitz SH/ZH ENVIRONNEMENT 3/04 PROTECTION DES ESPÈCES 17
LIEN Responsabilité de la Suisse en L’étude s’est donc basée sur une liste Partant d’une étude réalisée par www.wwf.ch/smaragd tant que pays alpin plus large, comprenant un millier d’es- l’OFEFP, le WWF a sélectionné 108 Plus de 150 espèces figurant sur la pèces animales et végétales. zones potentielles, d’une surface totale Liste rouge du Conseil de l’Europe On n’a pas pris les oiseaux en con- de 1475 km2. Selon toute attente, ces sont également présentes dans sidération. La Station ornithologique surfaces recoupent en grande partie des notre pays. Mais il est rapidement suisse de Sempach LU et l’association zones déjà protégées, notamment des apparu que cette liste ne pouvait BirdLife Suisse ont préféré utiliser une zones alluviales, des marais et des pay- que partiellement servir de base à une procédure spéciale de détermination sages marécageux qui figurent dans les politique d’orientation internationale. des zones d’importance internationale inventaires fédéraux correspondants. «La responsabilité spécifique de la pour l’avifaune, l’Important Bird Areas Suisse se situe très clairement dans l’es- IBA (voir encadré). Du plat pays… pace alpin», souligne Erich Kohli, chef Tel est le cas notamment des 30 objets de la section Protection des espèces et L’accent est mis sur un critère qui doivent constituer la première série des biotopes de l’OFEFP. «La recherche La distribution d’espèces animales et Emeraude en Suisse. Ils sont déjà tous des ‹points chauds Emeraude› en Suisse, végétales choisies a été établie à partir placés sous protection, sous une forme au sens de la liste européenne, n’y des avis de découvertes enregistrés de- ou une autre. Comme ils couvrent plu- conduit pas forcément.» En effet, le puis 1970. Les biotopes d’importance tôt la partie humide du paysage, en monde de la faune et de la flore alpines européenne ont été localisés d’après les termes écologiques, ils se trouvent prin- est peu présent dans la liste européen- espèces indicatrices. Plus les données cipalement en plaine. Leur intégration ne. «La Liste rouge reflète plutôt l’op- sont nombreuses, plus on a de chance dans le réseau Emeraude ne réclame pas tique d’une protection de la nature qu’il s’agisse d’une région d’importance de nouvelles mesures, si ce n’est un lé- dans les régions de plaine», confirme européenne. ger ajustement des objectifs ainsi que Simon Capt, du CSCF de Neuchâtel. du périmètre de protection. Les zones d’importance pour l’avifaune Tous les pays devraient se préoccuper en vivent en Suisse. Elles déterminent la dé- priorité des espèces vivant sur leur terri- finition des zones d’importance pour toire, ainsi que de leurs habitats. C’est le l’avifaune. La liste dressée par la Station principe sur lequel repose la conception ornithologique suisse de Sempach et des Important Bird Areas (IBA) élaborée BirdLife Suisse recense 31 objets, totali- par BirdLife Europe. Les sections natio- sant une surface de 6440 km2. nales de cette organisation de protec- Parmi les espèces IBA, on trouve aus- tion des oiseaux sont chargées de déter- si quelques oiseaux aquatiques qui ne miner les espèces concernées et de leur nidifient quasiment plus en Suisse, mais assurer un milieu vital. y passent l’hiver en grand nombre. C’est En Suisse, les premiers visés sont des pour eux que dix habitats aquatiques du oiseaux qui vivent dans les Alpes: un Plateau sont considérés comme zones Accenteur alpin sur quatre nidifie dans d’importance pour l’avifaune. Seules les notre pays. Une Niverolle alpine sur régions de montagne ont une impor- cinq, et plus d’un Chocard à bec jaune tance internationale comme zone de et d’un Merle à plastron sur dix. nidification: 15 zones dans les Alpes, Peter Baumann Pour 29 espèces, une forte pro- trois dans le Jura. L’aigle royal, une des 29 espèces concernées portion des populations européennes 18 ENVIRONNEMENT 3/04 PROTECTION DES ESPÈCES
Le liparis de Loesel (Liparis loeselii) fleurit dans les bas marais et les deltas. ... aux sommets alpins Dans un second temps, l’attention se por- tera sur les espèces et les habitats alpins ainsi que sur les régions sèches. Là aussi, La larve de la rosalie on tombera probablement sur des sur- (Rosalia alpina) s’épanouit faces déjà protégées. Un premier travail dans les hêtraies plutôt âgées. important a déjà été fait, par exemple Comme bien des habitants avec l’inventaire des prairies et pâturages d’arbres anciens, cette espèce secs. Mais il ne permet pas de transférer de coléoptère est menacée telles quelles les surfaces protégées dans de disparition. le réseau Emeraude. Certes, les obligations sont formulées de manière peu contraignantes: rien ne doit être entrepris qui puisse menacer les Peter Baumann espèces et les biotopes concernés. Mais la mise en œuvre complète de ce program- Les tourbières font partie des biotopes menacés au niveau me international ne sera pas possible européen. Ici, un exemple dans les Préalpes. sans toucher aux intérêts de certains ex- ploitants. «Il se peut bien que telle ou telle espè- ce rare se trouve seulement en dehors de la zone protégée», estime M. Kohli. «Mais certains types d’habitat importants au niveau européen sont encore assez fré- quents dans les Alpes suisses, comme les forêts de sapins ou de pins de montagne. Elles ne réclament pas des mesures de conservation particulières. Qu’elles soient rares ou plus fréquentes, situées dedans ou dehors de la zone de protec- tion, les espèces pour lesquelles la Suisse assume une responsabilité particulière exigent toute notre attention. Si nécessai- re, il faudra créer de nouvelles zones de protection.» Hansjakob Baumgartner Documenta Natura LECTURE INFOS Raymond Delarze, Simon Capt, Yves Gonseth, Antoine Guisan, Le réseau Eme- Erich Kohli raude en Suisse. Rapport préliminaire, Cahier de l’environnement n° 347, OFEFP, Section Protection des espèces 2003, 52 p., disponible en F, D. CHF 12.–, SRU-347-F. OFEFP, Documentation, et des biotopes, OFEFP 3003 Berne, fax 031 324 02 16, docu@buwal.admin.ch, www.buwalshop.ch 031 322 68 66 erich.kohli@buwal.admin.ch ENVIRONNEMENT 3/04 PROTECTION DES ESPÈCES 19
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