Les représentants du personnel et la santé et sécurité au travail
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DOSSIER Les représentants du personnel et la santé et N° 786 – SEPTEMBRE 2017 – 5,20 e sécurité au travail n EN IMAGES n LE GRAND ENTRETIEN n UNE JOURNÉE AVEC n EN ENTREPRISE Une démarche Valérie Koïta, directrice La caravane un tri des déchets qui a de l’étoffe prévention, santé, sécurité chez du Tour de France adapté aux nouveaux Bouygues Bâtiment Ile-de-France enjeux de la collecte
SOMMAIRE 10 © Grégoire Maisonneuve pour l’INRS Directrice prévention, santé, sécurité chez Bouygues Bâtiment Ile-de-France, Valérie Koïta déploie depuis son arrivée une nouvelle politique de prévention des risques professionnels de la filiale. 28 13 Avec un cortège de 170 véhicules et environ 400 personnes, rien ne doit être laissé au hasard au sein de la caravane publicitaire du Tour de France pour assurer la sécurité des caravaniers et du public. À l’heure où l’évolution des instances représentatives du personnel est en discussion, la mission du CHSCT pour la prévention des risques © Gaël Kerbaol/INRS professionnels reste d’actualité. Derrière celle-ci, s’expriment des réalités multiples. Avec les changements qui prennent forme dans les entreprises et un environnement juridique mouvant, de nouveaux défis apparaissent. © Gaël Kerbaol/INRS 04 ACTUALITÉS 13 DOSSIER n Grande distribution. Une prise de conscience Les représentants du personnel réelle, mais une sinistralité élevée et la santé et sécurité au travail n Outre-mer. Le BTP au pied du mur n Corse. Un club sans tabou 14. CHSCT, DP, DUP : une mission sans cesse n Communauté de communes. Cap sur les renouvelée manutentions mécanisées 17. S’approprier l’expertise 18. Donner une structure à l’instance 20. Président de CHSCT : une responsabilité à la hauteur des enjeux 22. Une instance au plus près des réalités des salariés 10 LE GRAND ENTRETIEN 24. Le CHSCT au cœur de l’action Valérie Koïta, directrice prévention, 26. « Seul, on va vite. Ensemble, on va plus loin » santé, sécurité chez Bouygues Bâtiment Ile-de-France « Une démarche sécurité qui repose 28 UNE JOURNÉE AVEC sur la prise de conscience » La caravane du Tour de France travail & sécurité – n° 786 – septembre 2017
ACTUALITÉS 30 © Fabrice Dimier pour l’INRS Certains vêtements déposés dans des conteneurs de recyclage, finissent à La Tresse, une entreprise qui permet à des personnes en difficulté de travailler. L’accroissement de son activité a poussé cette entreprise à changer de locaux… tout en prenant en compte le travail réel. Photo de couverture : Patrick Delapierre pour l’INRS Revue mensuelle publiée par l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles 65, boulevard Richard-Lenoir – 75011 Paris Tél. : 01 40 44 30 00. Fax : 01 40 44 30 41 Dépôt légal 1950-9005. ISSN 0373-1944 www.travail-et-securite.fr – www.inrs.fr © Grégoire Maisonneuve pour l’INRS 40 E-mail rédaction : ts@inrs.fr Prix au numéro : 5,20 e Abonnement annuel : 46 e Directeur de la publication : Stéphane Pimbert Rédactrice en chef : Delphine Vaudoux Pour lutter contre les TMS, une clinique de Seine-Maritime Assistante : Bahija Augenstein, 01 40 44 30 40 a mis en application une méthode récemment développée Secrétaire de rédaction : Alexis Carlier pour le secteur sanitaire et social. Elle a bénéficié Rédacteurs : Grégory Brasseur, Katia Delaval, de l’aide de la Carsat Normandie et de l’INRS. Damien Larroque, Céline Ravallec Ont collaboré à ce numéro : Patrick Delapierre, Fabrice Dimier, Rodolphe Escher, Grégoire Maisonneuve, Vincent Nguyen 30 EN IMAGES Maquettiste : Amélie Lemaire Reporters-photographes : Gaël Kerbaol Recyclage de tissus. Une démarche qui a de l’étoffe Iconographe : Nadia Bouda Chargée de fabrication : Sandrine Voulyzé Documents officiels : assistance juridique, 38 EN ENTREPRISE 01 40 44 30 00 Abonnements-diffusion : 01 40 94 22 22 38. Manutentions Photogravure : Jouve ACE, pour gagner Impression : Maury 40. Établissements de soins Ce numéro comporte un supplément de 8 pages, Charge physique de travail contre TMS Formation 2018, présentant les offres de stages de formation de l’INRS pour l’année 2018. 42. Bruit Une nuisance traquée en tout point Ce journal est imprimé par une imprimerie certifiée Imprim’vert®, avec des encres à base d’huile végétale sur papier issu de forêts 46. Déchets ménagers gérées durablement. Un tri adapté aux nouveaux enjeux de collecte 50 SERVICES 10-31-1282 Certifié PEFC Ce produit est issu de forêts gérées durablement et de n Questions-réponses n Retour sur n À la loupe sources contrôlées. pefc-france.org n Extraits du Journal Officiel travail & sécurité – n° 786 – septembre 2017
ACTUALITÉS LE CHIFFRE 04 05 3% des hyper et des supermarchés à l’arrêt. C’est ce que représentent les arrêts de travail dans ce secteur. Patrick Delapierre pour l’INRS LA RECOMMANDATION R 478, destinée à prévenir les risques liés aux manutentions manuelles lors de la mise en rayon dans la grande distribution, a été publiée il y a un an et demi. Le point avec Vincent Corlier, référent national grande distribution pour le réseau Assurance maladie-risques professsionnels. GRANDE DISTRIBUTION Une prise de conscience réelle, mais une sinistralité élevée Travail & Sécurité. Qu’est- rité – à l’exception de l’interdic- où d’autres facteurs entrent en volumes, ou la diminution des ce que la recommandation tion de la dépote au sol –, les ligne de compte. manipulations et du nombre de R 478 1 ? mesures techniques, comme reprises… Aujourd’hui encore, n Vincent Corlier. Il s’agit la limitation de la hauteur Comment limiter cette opé- un produit peut être repris dix d’une recommandation natio- des palettes à 1,80 m, l’adé- ration ? fois avant d’être vendu (ou mis nale adoptée par le CTN D 2 en quation des équipements de n V. C. L’une des solutions au rebut). C’est beaucoup trop. avril 2015. Elle propose des manutention ou l’implantation consiste à livrer en place les mesures de prévention visant des gondoles… sont plutôt produits sur des supports Les choses avancent, mais à réduire les risques liés à la bien intégrées. Il y a bien sûr dédiés. Il est aussi possible de les chiffres de sinistralité manutention lors de la mise quelques enseignes en retard, dépoter à l’avancement, lors baissent lentement… en rayon, en hyper et super- mais la tendance globale est de la mise en rayon. Plusieurs n V. C. Oui, c’est l’un des para- marchés. Parmi ces risques, on plutôt positive. En revanche, il tests sont en cours, mais cela doxes de cette action : nous peut citer les chutes, de hauteur subsiste encore d’importantes modifie aussi une partie de la suivons ce secteur depuis long- et de plain-pied, les risques marges de progrès pour l’inté- chaîne logistique... Il est pos- temps, des actions sont mises psychosociaux et, surtout, les gration de la prévention dans sible aussi d’utiliser le mobilier en œuvre, il y a une vraie prise troubles musculosquelettiques, les organisations du travail. existant, comme cela se voit de conscience sur ce sujet dans dus aux sollicitations et aux dans les rayons surgelés sur les les enseignes, mais les chiffres efforts musculaires importants Qu’est-ce que la dépote au coffres de congélateurs . Nous de sinistralité restent élevés. lors de ces opérations. sol ? avons fixé comme objectif aux Notamment les indices de fré- n V. C. Cela consiste à déchar- enseignes de ne plus réaliser quence (AT et MP) qui sont, Qui est concerné ? ger au sol dans les rayons de dépote au sol à partir du en moyenne, deux fois plus n V. C. Les 517 525 salariés les marchandises livrées sur 1er janvier 2018. élevés dans ce secteur que la des 12 542 magasins (hyper et palettes/rolls. On a mesuré que moyenne nationale. En dix ans, super) en France. En 2015, on lors de la reprise des produits Quelles sont vos prochaines l’indice de fréquence des AT a enregistré 30 085 accidents posés au sol, l’effort au niveau pistes de travail ? n’a baissé que de 7 % dans les du travail (AT) dans ce secteur, du bas du dos peut atteindre n V. C. Nous continuons de supermarchés et de 9 % dans dont 57 % liés à la manutention. jusqu’à 15 fois la charge portée. travailler sur la conception du les hyper. Malgré tout, j’ai bon Cela représente 2 790 000 jour- C’est beaucoup, et source de mobilier de vente en géné- espoir que la démarche de pré- nées perdues. nombreux accidents du travail. ral. On souhaite notamment vention proposée par la R 478 Les maladies professionnelles davantage intégrer le stockage porte enfin ses fruits. Un an et demi après sa publi- (MP) sont compliquées à mettre dynamique. On poursuit aussi 1. À consulter sur www.ameli.fr. cation, comment est appli- en évidence à ce poste, car le travail sur les aspects liés 2. Services, commerces et industries quée la R 478 ? souvent les personnes fragili- au merchandising, au condi- de l’alimentation. n V. C. Dans leur grande majo- sées passent à l’encaissement tionnement, à l’adéquation des Propos recueillis par D. V. travail & sécurité – n° 786 – septembre 2017
ACTUALITÉS OUTRE-MER AVIS DU CESE Les discriminations Le BTP au pied du mur syndicales, frein D au dialogue social ans un texte déposé le 29 juin le mesurage de l’amiante. Le document Le Conseil économique, social 2017, intitulé « le BTP outre-mer recommande ainsi « un soutien de l’État […] et environnemental (Cese) vient au pied du mur normatif : faire pour accompagner l’application de la régle- de rendre un avis intitulé d’un obstacle un atout », le Sénat mentation sur l’amiante dans des contextes « Repérer, prévenir et lutter met en lumière le manque de insulaires en favorisant la mise en place de contre les discriminations respect de la législation par les entreprises formations des professionnels [et] en met- syndicales ». « Le ressenti du secteur du BTP dans les territoires et tant en place des partenariats avec des de la discrimination est fort parmi départements d’outre-mer. Ce rapport laboratoires accrédités pour réaliser les les syndicalistes, en particulier aborde entre autres la question de la ges- analyses et les prélèvements ». lorsqu’ils exercent des mandats tion du désamiantage, une activité parti- De plus, il n’y a pas, en outre-mer, de importants sur leur lieu culièrement sensible en termes de risques filière d’élimination des déchets d’amiante de travail », mentionne-t-il. professionnels. et les collecteurs autorisés éprouvent Avec une réalité difficile à cerner À la lecture de ce document, on apprend toutes les difficultés à trouver un arma- car les situations qui parviennent notamment qu’en la matière, les insuffi- teur qui prenne en charge ces produits. jusqu’aux tribunaux ou au sances dans le domaine des formations Selon les auteurs du rapport « ce type de Défenseur des droits sont peu sont l’un des facteurs d’explication du non- transfert nécessite d’obtenir l’accord pré- nombreuses. « Il ne peut pas respect de la législation. Ainsi, sur l’île de alable de chaque pays de transit et, dans y avoir de dialogue social La Réunion, les formations en sous-sec- le cas du transport maritime, de chaque véritable sans une implication tion 3, pourtant obligatoires pour effectuer port de transit ». Des obligations adminis- des différents acteurs et donc du retrait ou de l’encapsulage d’amiante, tratives lourdes qui découragent les arma- sans une véritable valorisation sont totalement absentes et beaucoup de teurs. Pour pallier cette situation, le texte et une reconnaissance du fait sociétés ne sont pas encore formées à la conseille la mise en place d’un soutien syndical, explique l’un des deux sous-section 4. financier de l’État pour l’exportation des rapporteurs, Lionel Marie. Des carences existent aussi du côté de l’ana- déchets dangereux. n D’où l’importace de travailler lyse et des prélèvements, car seules la Nou- Le rapport est à consulter sur www.senat.fr. sur ces questions. » velle-Calédonie et la Martinique possèdent des organismes accrédités pour effectuer D. L. 39 % des cordistes ont déclaré au moins une © PhotoAlto blessure pendant les 12 derniers mois, selon une étude de la Fondation Petzl menée auprès de 500 cordistes. La majorité des blessures déclarées sont de nature Le rapport préconise de réaliser articulaire, ligamentaire et musculaire, ou tendineuse. un travail statistique pour repérer Cette étude a pour objectif de faire mieux connaître les discriminations existantes. les types et fréquences de blessures chez les Puis, « faire en sorte que, dans notre pays, la réglementation travailleurs sur cordes afin d’identifier de nouvelles européenne, qui prévoit que les pistes de prévention. discriminations soient réparées N. B. : Rappelons qu’il est interdit d’utiliser les techniques d’accès et de positionnement au moyen de façon intégrale, soit mise de cordes pour constituer un poste de travail. Sauf exception. Cf. article R. 4323-64 du Code du travail. concrètement en application La totalité de l’étude est disponible sur www.fondation-petzl.org et prenne en compte tous les préjudices », précise Lionel Marie. Du côté de la prévention, PROFESSIONNELS DU DIGITAL les rapporteurs préconisent Heureux mais… un certain nombre d’actions Une enquête menée auprès de 1 258 professionnels et proposent entre autres : du numérique 1 met en évidence qu’ils sont 61 % • d’inciter les entreprises à s’estimer heureux au travail. Mais à côté de cela, à intégrer le thème des 26 % pensent que leur travail n’a pas de sens. discriminations syndicales dans Par ailleurs, 48 % des répondants disent subir leur politique RSE ; © Gaël Kerbaol/INRS du stress. Parmi les principaux facteurs : la charge • de favoriser le dialogue avec de travail trop importante (55 %), les objectifs trop l’encadrement de proximité élevés (53 %), les conflits avec les collègues sur les conditions d’exercice ou la hiérarchie (36 %), la nécessité d’être connecté du mandat et l’organisation en permanence (32 %) et les conflits liés aux du travail ; valeurs (éthique, 27 %). Les métiers de « bizdev » • de garantir le maintien des (62 %) et chef de projet (57 %) sont les plus stressants, à l’opposé des métiers du design compétences professionnelles (41 %) et de l’acquisition (38 %). pendant la durée du mandat par 1. Réalisée sur le Blog du Modérateur et Hellowork.io en mai et juin 2017. des actions de formation Tous les résultats de l’enquête : www.blogdumoderateur.com/enquete-bonheur-pros-digital/ professionnelle… travail & sécurité – n° 786 – septembre 2017
ACTUALITÉS CORSE 06 Un club sans tabou NORD- PICARDIE 07 NORMANDIE ILE-DE- FRANCE ALSACE- MOSELLE NORD-EST BRETAGNE PAYS- CENTRE- DE-LA-LOIRE IL Y A TROIS ANS, les deux contrôleurs de sécurité de la Carsat VAL-DE-LOIRE BOURGOGNE- FRANCHE-COMTÉ CENTRE-OUEST Sud-Est en Corse ont ressenti la nécessité de créer un club de préventeurs. Depuis, l’idée a fait son chemin… RHÔNE-ALPES AUVERGNE AQUITAINE O LANGUEDOC- MIDI-PYRÉNÉES ROUSSILLON SUD-EST n était un peu isolés. On a sages et d’appuyer les actions des préven- décidé de se rencontrer, teurs », remarque Pierre Lecullier. Dès qu’ils pour mettre en commun le peuvent, les membres du club proposent LES RÉGIONS nos connaissances et par- des interventions croisées. Il en existe une tager les questions que l’on par exemple sur les troubles musculosque- n SUD-EST était amenés à se poser… » C’est ainsi que lettiques et les postures contraignantes En juin dernier, à l’occasion Pierre Lecullier, contrôleur de sécurité proposée par la Carsat, le service de santé d’une journée sur les risques à la Carsat Sud-Est à Bastia, explique la au travail et Jacques Olmiccia, respon- professionnels dans le transport genèse du « Club des préventeurs corses ». sable d’une entreprise d’acconage à Bastia et la logistique destinée aux Les discussions commencent entre Pierre et ostéopathe. Une autre sur les chutes de agences d’intérim, la Carsat Lecullier à Bastia, Éric Crouin, contrôleur hauteur, coanimée par la Carsat, la Direccte Sud-Est a présenté son « kit prévention ». Celui-ci contient de sécurité à la Carsat Sud-Est à Ajaccio, et le service de santé au travail. des affiches, brochures et jeux et Lionel Cottenceau-Bartoli, préventeur à « On se sent parfois un peu seuls sur des pour ce secteur. Il a pour objectif l’IgeSa 1. Nous sommes en 2014 et l’idée sujets liés à la prévention, et depuis que ce de faire repérer les risques au de constituer un groupe de réflexion et club a été créé, on sait que l’on peut sol- nouvel arrivant, de vérifier et d’échanges autour des questions de pré- d’améliorer ses connaissances, vention des risques professionnels germe de susciter l’échange autour très rapidement. Les critères pour faire LES PARTICIPANTS des risques professionnels, partie du club ? Avoir été formé au métier Côté institutions, la Direccte, la Carsat, et de faire monter en compétence de préventeur et avoir un « vrai rôle de le Service de santé au travail sont prévention les permanents préventeur au sein de l’entreprise » – et représentés au sein du « Club des des agences d’emploi. non être un simple nom dans un organi- préventeurs corses ». Pour ce qui est Pour se procurer ce kit : gramme. des préventeurs d’entreprises, des https://solutionspreventionlemag. « C’est vrai, on a refusé des personnes secteurs aussi variés que la grande carsat-sudest.fr. qui souhaitaient nous rejoindre. Nous distribution, le tourisme, le BTP, n AQUITAINE voulons des préventeurs d’entreprises le secteur médical, l’agroalimentaire, La Carsat Aquitaine a ouvert qui montrent une vraie volonté de faire l’aide à domicile, les pompiers un portail visant à informer, avancer la prévention… Et nous refusons ou l’armée, pour n’en citer que sensibiliser et donner des outils les consultants, cela fausserait la donne », quelques-uns, sont présents. en matière de prévention souligne Pierre Lecullier. La première des risques professionnels année, le groupe est constitué de dix per- aux structures d’aide à domicile, sonnes. Il se réunit une fois par an, autour liciter les autres membres : on s’appelle, aux aidants professionnels, d’un ou de plusieurs thèmes. « Si je devais on s’envoie des mails… on partage des aux aidés et à leur famille. résumer ce club, je dirais qu’il permet aux savoirs, des réflexions », explique Jean- Le logement est à la fois un lieu entreprises de questionner, aux institu- Louis Sanguinetti, chargé de mission HSE de vie et un lieu de travail, tionnels d’alerter, et à tous les participants à la CCI de Haute-Corse. « Nous avons une quand on s’occupe à leur domicile d’apporter des appuis quand c’est néces- règle à respecter : tout ce qui est dit lors de personnes à l’autonomie saire, et surtout d’échanger sur des pro- de ces réunions ou entre nous doit rester et à la mobilité réduites. Le site blèmes qui se posent au quotidien dans au sein du club des préventeurs », insiste « Aidants/aidés » de la Carsat certaines entreprises… », insiste Christine Pierre Lecullier. Car chacun le reconnaît : a ainsi pour objectif de concilier Simoni, directrice adjointe du SIST2B 2. les échanges sont riches et sans tabou. prévention des risques, « Ça nous permet de savoir si on est sur la autonomie des personnes aidées Une possibilité de faire passer bonne voie, de nous aider à faire des choix, et amélioration de leur qualité de des messages sans être jugés », conclut Jean-Louis San- vie. À l’aide de vidéos, de Au fil des ans, le club s’étoffe et se struc- guinetti. n présentations d’aides techniques ture. Lors de sa réunion annuelle, en 2015, 1. Institution de gestion sociale des armées. et de conseils pour les plusieurs experts de la Carsat interviennent 2. Service de santé au travail de Haute-Corse. professionnels, le site veut sur le risque chimique, les RPS et le risque montrer que l’on peut concilier : incendie. La Direccte fait également une D. V. • l’amélioration de la satisfaction intervention sur les instances représen- de personnes aidées, en tatives du personnel. En 2016, le club LE CHIFFRE préservant la santé des aidants, dépasse les vingt entreprises représen- • faire converger les notions de qualité de service, de santé au travail et de maitrise des coûts. tées, soit 14 635 salariés. « Certains nous ont demandé s’ils pouvaient venir avec leur direction. Nous avons accepté car, pour 14635 Le site : https://aidantsaides. nous, c’est un vrai plus, c’est une possibilité salariés sont représentés carsat-aquitaine.fr supplémentaire de faire passer des mes- à travers ce club. travail & sécurité – n° 786 – septembre 2017
L’IMAGE DU MOIS Avec ses 600 mètres de long, ses 51 arches sur trois niveaux et ses 52 mètres culminant au-dessus de la vallée de la Suize, le viaduc ferroviaire de Chaumont, en Haute-Marne, est le plus grand ouvrage d’art maçonné d’Europe occidentale. Construit entre 1855 et 1857, il fait l’objet jusqu’en décembre 2018 de travaux de rénovation, en particulier de réparations de maçonnerie (injection de fissures, reprise de pièces dégradées…). L’échafaudage a été pensé pour assurer la sécurité des onze maçons qui y travaillent et faciliter l’approvisionnement du matériel. Le chantier est divisé en 10 phases le long du viaduc (soit 3 piles et 2 voûtes). Conçu par Altrad et monté par Arnholdt échafaudages, il s’agit d’un échafaudage « glissant » : pendant qu’une phase du chantier est en cours, le matériel ayant servi à la précédente phase est démonté puis remonté plus avant pour la phase suivante. © Grégoire Maisonneuve pour l’INRS travail & sécurité – n° 786 – septembre 2017
ACTUALITÉS LE CHIFFRE 08 09 14 kg, c’est le poids unitaire des barrières de sécurité installées lors des multiples manifestations publiques. Le parc de barrières de la Communauté de communes Philippe Castano pour l’INRS du Grand Pontarlier est passé de 250 à 500 pièces en l’espace d’un an, pour répondre aux besoins sans cesse croissants. COMMUNAUTÉ DE COMMUNES Cap sur les manutentions mécanisées LA COMMUNAUTÉ de communes du Grand Pontarlier réfléchit depuis plusieurs années aux façons de réduire, au sein de son personnel, le risque de troubles musculosquelettiques, lié aux nombreuses manutentions manuelles des matériels. Le développement de mécanisation, par l’acquisition et le déploiement de matériels adaptés, apporte les premières solutions. L’ été est arrivé avec gnaient de plus en plus de de levage étaient de moins les barrières de sécurité par son lot de festivals maux de dos. Et on observait en moins utilisés, à peine lots de trente. Concernant et d’événements en que les lombalgies commen- 10 % », poursuit-il. La CCGP les chalets, un prototype de plein air. Dans la çaient à devenir chroniques, s’est ainsi orientée vers une rack conçu pour stocker les commune de Pon- avec des arrêts de travail de mécanisation des manuten- composants a également tarlier, dans le Doubs, s’est plus en plus longs. » tions. Elle s’est équipée d’un été développé. « Ces racks tenu durant la première camion-grue et d’un tracto- pèsent autour de 350 kg, quinzaine de juillet le Pon- Démarche pelle pour réaliser certaines mais une nouvelle généra- ta’Beach, manifestation de participative opérations. Six conducteurs tion plus légère devrait voir promotion du sport et des Face à l’accroissement du ont été formés et ont obtenu le jour », explique Gilles Vuil- jeux en plein air et en famille. nombre de manifestations le Caces pour manœuvrer ces laume, responsable de la Des terrains de sable, des et aux récentes contraintes engins. menuiserie. chalets en bois, des podiums, découlant du plan Vigipirate En parallèle, la CCGP s’est De nouvelles pratiques qui des barrières ont été installés (multiplication du nombre de rapprochée de l’entreprise apportent satisfaction aux pour l’occasion sur les rives barrières à installer, manipu- Mabéo industries pour déve- agents, « même si la résis- du Doubs. Le montage de ces lation de matériels lourds tels lopper des supports faci- tance au changement et structures à la fin du mois de que les blocs de béton), il a litant le chargement et le les craintes suscitées par juin a été l’occasion de mettre fallu réfléchir à de nouveaux déchargement des matériels. la nouveauté nécessitent en œuvre des moyens de modes de manutention. Désormais, des racks en acier une pédagogie et une com- manutention mécanisés. Les « En parallèle, nos engins servent à manutentionner munication permanentes », ports de charges font en effet constate Patrice Couturier. l’objet de réflexions depuis « La démarche menée ici est plus de trois ans au sein de la UN NOUVEL ESPACE DE STOCKAGE très positive, en particulier Communauté de communes La CCGP se dote actuellement d’un nouvel espace de du fait de la participation du Grand Pontarlier (CCGP). stockage du matériel : pneus, extincteurs, guirlandes de Noël, du personnel aux réflexions « C’est parti de l’évalua- sacs de terreaux, véhicules de déneigement… étaient et aux essais de matériels, tion des risques dans notre jusqu’à présent dispersés sur les dix communes qui conclut Matthieu Armbruster, document unique et du composent la communauté. Le nouveau siège de la chargé d’inspection en santé constat qu’il y avait de mul- Communauté de communes a une surface de 1 000 m2 et sécurité au service préven- tiples reprises manuelles pour centraliser l’ensemble du matériel. « Il sera beaucoup tion du centre de gestion du de charges et décharges de plus simple d’avoir un point de stockage unique au Doubs. Beaucoup de collec- matériels lourds, se remé- quotidien », se réjouit Thierry Pierluigi, responsable tivités rencontrent ce même more Patrice Couturier, du magasin. Un nouveau fonctionnement qui devra type de problématique et de conseiller en prévention à néanmoins faire appel à une nouvelle organisation. questionnements. » n la CCGP. Les agents se plai- C. R. travail & sécurité – n° 786 – septembre 2017
ACTUALITÉS LES PARUTIONS L’AGENDA n Signalisation de santé l’arbre des causes. En s’appuyant sur n Paris, le 26 septembre 2017 et de sécurité au travail des exemples variés, elle décrit la méthode et indique comment l’exploiter pour mettre Journée pour les services La mise en œuvre de la signalisation de santé au travail de santé et de sécurité s’inscrit dans le en place des actions de prévention. L’INRS propose aux acteurs cadre de la démarche de prévention que Cette brochure s’adresse à toute des services de santé au l’employeur doit mettre en place. personne qui a en charge des questions travail une journée d’échanges Cette brochure est une synthèse de cette de santé et sécurité au travail dans privilégiés avec ses experts, réglementation. Elle traite dans un premier l’entreprise. formateurs et chercheurs temps des principes généraux de ED 6163 sur des sujets d’intérêt signalisation, applicables en toutes n Peintre et poseur de revêtements en termes de prévention circonstances dès lors que la mise en place Dans la série de dépliants Les risques sur des risques professionnels : d’une signalisation est rendue obligatoire le chantier : c’est mon affaire !, • risques psychosociaux ; ou nécessaire au regard de l’évaluation un tout nouvel opus vient de sortir, • activités physiques ; des risques. Dans un second temps, consacré au métier de peintre et poseur • risques chimiques ; à travers diverses fiches thématiques, de revêtements. Il explique simplement • nuisances physiques ; elle envisage les cas où une obligation et concrètement, essentiellement à l’aide • risques biologiques. spécifique de signalisation est prévue d’illustrations, les bonnes pratiques Un focus sera proposé sur par le Code du travail ou des textes en matière de prévention des risques, l’offre de prévention dédiée non codifiés. applicables au quotidien sur le chantier. aux TPE/PME, ainsi que sur les ED 6293 ED 6287 maladies professionnelles. n La méthode de l’arbre des causes Deux sessions sont proposées, n La méthode d’analyse de la charge Les accidents du travail ne résultent l’une le matin, l’autre physique de travail – Secteur jamais d’une cause unique : ils sont la sanitaire et social l’après‑midi. conséquence d’une combinaison La méthode d’analyse de la charge Inscription gratuite mais de facteurs. Toute la difficulté consiste physique de travail dans le secteur obligatoire sur le site : à identifier les différents éléments qui sanitaire et social a été conçue pour être www.inrs-journee-sst2017.fr/ y ont contribué. Pour y parvenir, l’INRS utilisée dans les établissements inscription/ a mis au point une méthode pratique de spécialisés (hôpitaux, cliniques, n Prague, du 3 au 6 octobre 2017 recherche des facteurs d’accidents, dont hébergements pour personnes âgées, les résultats sont présentés sous la forme Complexité du management handicapés, enfants) et les services d’aide d’une arborescence graphique dénommée Le réseau Workingonsafety.net et de soins à domicile. Elle permet « arbre des causes ». Son principe est réunit des décideurs et des de repérer et d’analyser les facteurs simple : les faits qui ont contribué chercheurs internationaux de risque pour l’appareil locomoteur à l’accident sont représentés et organisés dans le domaine de la sécurité en tenant compte de la globalité des dans un ordre logique, en remontant au travail. Sa neuvième composantes de l’activité. de l’effet aux causes le plus en amont conférence aura pour thème Elle propose une conduite d’action de possible. C’est une méthode structurée « La complexité du prévention qui permet d’établir des et rigoureuse. Elle permet de comprendre management dans une société priorités, d’orienter vers des pistes de le scénario de l’accident et de proposer qui change ». Elle sera prévention pertinentes et d’en évaluer diverses mesures de prévention. l’efficacité. Elle est applicable dans les l’occasion d’échanges Comment construire un arbre des causes ? structures de toutes tailles. Sa mise en d’expériences, d’expertises Quel est son apport dans une démarche œuvre peut être initiée par tous les et de bonnes pratiques. de prévention ? C’est à ces questions que acteurs de la structure, mais son efficacité Cette conférence s’adresse veut répondre cette brochure, intitulée repose sur une démarche collective. aux chercheurs, décideurs, L’analyse de l’accident. La méthode de ED 6291 chargés de sécurité, inspecteurs du travail, Les brochures sont à consulter et à télécharger sur www.inrs.fr administrations et experts ou à demander auprès des Caisses régionales (Carsat, Cramif et CGSS). de la prévention des accidents du travail. Les sujets suivants seront abordés : 29% des accidents du travail, en Espagne, ont touché des jeunes de moins de 35 ans en 2015, • les fondamentaux scientifiques de la sécurité : théories, principes, méthodes selon l’Union générale des travailleurs. Ce syndicat et outils ; souligne par ailleurs que plus les travailleurs sont • la recherche appliquée : jeunes et ont des contrats courts, plus ils risquent réalisations, enseignements et défis ; d’être victime d’un accident du travail. • la gestion des risques et culture de sécurité : études de cas et bonnes pratiques ; LUXEMBOURG • la réglementation ; Campagne 2017-2021 • l’éducation et la formation ; L’Association d’assurance accident (AAA) et ses partenaires viennent de lancer • la multidisciplinarité. la campagne Vision Zéro risques, accidents, morts (2017-2021). Celle-ci s’adresse Pour tout renseignement et principalement aux salariés, jeunes travailleurs, futurs travailleurs et au grand public, inscription : www.wos2017.net/ mais vise aussi les chefs d’entreprise et les cadres dirigeants. travail & sécurité – n° 786 – septembre 2017
LE GRAND ENTRETIEN 10 11 « Une démarche sécurité qui repose sur la prise de conscience » VALÉRIE KOÏTA est directrice prévention, santé, sécurité chez Bouygues Bâtiment Ile-de-France. Depuis son arrivée, elle a défini et déployé une nouvelle politique de prévention des risques professionnels de la filiale. Elle nous livre son regard sur les questions de santé et sécurité dans le secteur de la construction. Travail & Sécurité. Vous êtes arrivée chez l’humain. En matière de sécurité, nous ne par- Bouygues à la fin de l’année 2015, après vingt tions pas de rien car beaucoup d’actions avaient ans d’expérience dans l’industrie, dans des déjà été menées sur le matériel, les techniques de secteurs aussi variés que l’environnement, construction, les modes opératoires... en un mot, la microélectronique ou le nucléaire. Quels la « science ». Et la conscience, c’est justement ont été vos premiers constats en matière de que chacun réalise qu’il est acteur de la sécurité, sécurité dans le secteur du bâtiment ? tant la sienne que celle de ses collègues, dans un Valérie Koïta. À mon arrivée, j’ai passé trois mois environnement de travail donné ou face à une à ne faire que des visites de chantiers, en Ile-de- REPÈRES situation à risque identifiée. Nous affichons claire- France et dans d’autres régions, pour m’imprégner Bouygues Bâtiment ment que la sécurité devient la priorité absolue de de la culture de l’entreprise et découvrir la diver- Ile-de-France l’entreprise, avec un objectif « Zéro prise de risque sité des métiers sur le terrain. J’ai tout de suite n FILIALE francilienne pour zéro accident ». Cela implique une évolution constaté un très fort attachement des personnes de Bouygues au quotidien des comportements de nos collabo- à leur activité et à leur entreprise. Construire est Construction, Bouygues rateurs et en particulier des managers pour à la une action concrète, où l’on voit rapidement le Bâtiment Ile-de-France fois développer la vigilance, corriger-sanctionner résultat. À tous niveaux, les salariés de Bouyg ues est composé d’unités les prises de risque et valoriser-promouvoir les sont très fiers des ouvrages auxquels ils ont parti- opérationnelles : pratiques sûres. Nous avons exposé les principes cipé, ils s’impliquent dans les chantiers, tous sont rénovation privée, de cette politique et les nouveaux standards lors passionnés. Et le BTP est un secteur extrêmement construction privée, d’une journée spéciale, le 15 juin 2016, sur tous dynamique, avec une forte ouverture sur le monde, habitat résidentiel, les chantiers, dans l’ensemble des agences et au en matière d’innovation, d’outils numériques… ouvrages publics, siège social. Un livret indiquant comment cha- Sur le plan de la sécurité, j’ai senti aussi un enga- habitat social, ainsi que cun peut contribuer à cette politique suivant sa gement et une conviction très affirmés du top des filiales Brézillon, fonction a été distribué à cette occasion. La feuille management. Néanmoins, il manquait un cadre et Elan et Linkcity. de route et la nouvelle organisation avaient été un pilotage des actions, il y avait des disparités présentées au préalable au printemps 2016 aux n AVEC 5 500 salariés dans les pratiques et dans les règles, par exemple CHSCT de chaque unité opérationnelle. et un chiffre d’affaires d’une unité opérationnelle à une autre. J’ai aussi de 2,2 milliards d’euros, été interpellée par un écart des pratiques et des Comment s’organise cette politique ? elle est présente exigences sécurité entre les entreprises sous-trai- V. K. Elle se décline autour de quatre enga- en moyenne sur tantes et Bouygues Bâtiment Ile-de-France. Ces gements. Le premier porte sur la maîtrise des 500 chantiers de tailles constats m’ont conduite à envisager une nouvelle risques majeurs et la prévention des accidents. très variées sur la organisation et une politique santé-sécurité, afin Cela passe par le respect par tous de standards région. d’harmoniser les règles et les pratiques, et d’éta- communs, à la fois individuels, de management et blir un référentiel de standards applicables à tous n LE BUDGET annuel techniques. Les standards individuels sont entre les collaborateurs Bouygues Bâtiment Ile-de- consacré à la santé autres : le « 360 ° » (observer son environnement France, intérimaires et sous-traitants compris. Ce sécurité est de travail immédiat et vérifier qu’on est en sécu- qui a pu être réalisé grâce à un engagement fort du de 6,6 millions rité avant de démarrer), le « Stop » (réagir face président et des directions de chaque entité, une d’euros. à un risque pour soi ou ses collègues, en s’arrê- volonté déjà présente à mon arrivée. tant et en corrigeant la situation), porter les EPI nécessaires, être vigilant dans ses déplacements Bouygues Bâtiment Ile-de-France a officielle- – beaucoup de nos accidents sont des chutes de ment lancé en juin 2016 une politique santé- plain-pied ou dans les escaliers –, ou encore la sécurité 2016-2018. Quel en est le principe ? tolérance zéro vis-à-vis de la consommation V. K. Cette politique s’intitule « De la science à d’alcool et de drogues. Côté management, nous la conscience » car nous avons voulu l’axer sur avons instauré des briefings sécurité quotidiens. travail & sécurité – n° 786 – septembre 2017
LE GRAND ENTRETIEN © Grégoire Maisonneuve pour l’INRS Valérie Koïta est directrice prévention, santé, sécurité chez Bouygues Bâtiment Ile-de-France. Chaque manager organise en début de journée postes de travail et du matériel est une de nos un rapide échange avec son équipe pour faire le préoccupations. Nous recherchons en perma- bilan de la veille, les points positifs, les éventuels nence des améliorations possibles. Nous tra- problèmes ou dysfonctionnements rencontrés et vaillons ainsi actuellement avec des fabricants pour souligner les points de vigilance de la jour- au développement d’une nouvelle banche « zéro née à venir. Ces échanges complètent les quarts effort ». Outre le fait qu’elle préserve le capital d’heure sécurité hebdomadaires qui existaient des personnes en bonne santé en réduisant déjà. les postures pénibles, elle permettrait aussi de Le deuxième engagement est d’ancrer une culture féminiser le métier. Le maintien dans l’emploi santé-sécurité et de libérer la parole. Nous et la gestion des restrictions médicales sont encourageons la remontée d’informations vers la une autre de nos préoccupations. Nous menons hiérarchie concernant tout accident, presqu’ac- également depuis plusieurs années des projets cident, événement indésirable, ou situation qui de recherche et développement, par exemple pose question. C’est à partir de leur analyse que sur les objets connectés qui peuvent équiper les des solutions appropriées peuvent être trouvées compagnons au quotidien : casques et manchons ensemble. Et pour développer le leadership des de communication, mesures d’efforts et de péni- managers sur les questions de santé sécurité, bilité et réalité virtuelle pour les formations... nous lançons une démarche collaborative nom- Ces recherches sont étroitement suivies par un mée « Culture juste », du compagnon au direc- réseau d’ergonomes. Et à la rentrée, nous lan- teur, afin que chacun à son niveau ait la réaction çons un programme de prévention du stress. Le juste face à un comportement approprié ou au bâtiment est un métier où la pression à certaines contraire une prise de risque. phases est souvent présente, du fait des délais, L’engagement n° 3 porte sur la protection de la des changements d’affectation liés à l’enchaîne- santé et notamment la réduction des risques ment des chantiers par exemple. Nous souhaitons Propos recueillis différés. Sont concernées les maladies profes- intervenir à un niveau organisationnel en aidant sionnelles telles que les lombalgies mais aussi les managers à mieux conduire les changements ➜ par Katia Delaval et Céline Ravallec les risques psychosociaux… L’ergonomie des ou en allégeant certaines procédures. Et nous travail & sécurité – n° 786 – septembre 2017
LE GRAND ENTRETIEN 12 souhaitons aider chacun à mieux appréhender ces pressions, en encourageant notamment à UNE JOURNÉE MONDIALE SANTÉ- une bonne hygiène de vie. SÉCURITÉ BOUYGUES CONSTRUCTION Pour marquer son engagement fort dans Et sur quoi porte le dernier engagement ? la prévention, Bouygues Construction V. K. Le quatrième engagement est d’obtenir a interrompu le 13 juin dernier son activité de nos partenaires la conformité aux exigences le temps d’une opération d’envergure inédite. santé sécurité de Bouygues Bâtiment Ile-de- La quasi-totalité de ses chantiers se sont France. Nous avons intérêt à les faire progres- arrêtés pour rappeler aux collaborateurs ser pour continuer à travailler ensemble. Ils sont et aux entreprises partenaires – soit environ tenus de respecter les différents standards éta- 100 000 personnes – la priorité donnée blis par le groupe et des consignes générales à la santé et la sécurité au travail. de sécurité sont intégrées aux contrats. Et pour mieux sélectionner nos partenaires en amont des projets, nous avons déterminé un certain nombre sion d’harmoniser les évolutions de matériels, en de critères en santé sécurité, qui ne se basent collaboration avec Bouygues Construction Maté- pas uniquement sur l’accidentologie de l’entre- riel et les autres filiales de Bouygues Construction. REPÈRES prise. Ces mêmes critères permettront d’évaluer Il travaille sur un référentiel, l’ergonomie, la veille n 1995 : diplôme la performance des entreprises en fin de presta- réglementaire ou encore la communication. Cela d’ingénieur à l’Insa tion. Si un partenaire n’a pas respecté certaines permet notamment d’alimenter le contenu des de Lyon. règles, n’a pas corrigé un point de sécurité à la quarts d’heure sécurité hebdomadaires sur les suite d’une remarque, ou n’a pas été force de pro- chantiers. Et à une autre échelle, toutes les réu- n 1995-2003 : position sur des axes d’amélioration, cela pourra nions de management chez Bouygues Bâtiment responsable être discriminant pour une future collaboration. Ile-de-France, quelle que soit la thématique, et en qualité, sécurité, Nous souhaitons aussi accompagner nos parte- particulier celles impliquant des partenaires exté- environnement chez naires privilégiés dans une démarche de pro- rieurs, débutent par un focus sécurité. Cela traduit Veolia Environnement. grès, grâce à des actions ciblées, par exemple à quel point la prévention est notre priorité. n 2003-2007 : sur des problèmes rencontrés, afin de trouver des directrice qualité solutions ensemble. Avec l’OPPBTP et d’autres Observez-vous des premières avancées performance grandes entreprises du secteur, nous allons ainsi grâce à cette démarche ? & développement participer à une enquête auprès de sous-trai- V. K. Des indicateurs de pilotage ont été défi- durable chez FCI tants pour connaître leurs attentes en matière nis pour mesurer les progrès à terme. Il s’agit à Microconnections. d’organisation et recueillir leurs observations ou la fois d’indicateurs classiques et de remontées n 2007-2015 : suggestions. d’événements, par exemple. Le taux de fréquence directrice support continue de s’améliorer : de 4,1 en 2015, il est aux opérations Quels moyens avez-vous eus pour mettre en passé à 3,1 en 2016, le meilleur chiffre du sec- à la direction œuvre cette nouvelle politique ? teur en France. Mais au-delà des chiffres, on sûreté nucléaire, V. K. La direction a fourni des moyens supplé- constate déjà des différences sur le terrain, en santé, sécurité, mentaires pour créer une filière santé sécurité. termes de tenue de chantiers par exemple. Et à développement durable Cette notion de filière implique que le respon- chaque réunion, la sécurité est systématique- chez Areva. sable Prévention de chaque unité opérationnelle ment le premier sujet abordé. On sent une appro- n DÉCEMBRE 2015 : me soit rattaché hiérarchiquement et ait un lien priation de la démarche. Je n’aurais pas pu espé- arrivée en tant que fonctionnel, au plus haut niveau dans son unité rer que les choses se mettent en place aussi vite directrice prévention opérationnelle, à savoir avec le directeur général. et aillent aussi loin. Évidemment, certains points santé, sécurité chez Tous ces responsables font partie des comités de demandent davantage de temps pour être inté- Bouygues Bâtiment direction de leur unité, cela montre l’importance grés par tous : l’attitude interrogative doit être Ile-de-France. que donne la direction à la santé sécurité. En développée, tout le monde n’ose pas prendre la termes de moyens, nous avons créé des postes. parole par exemple ou appliquer son droit de En effet la direction santé sécurité a été organi- retrait en cas de situation à risque, car il demeure sée en trois pôles : un pôle de préventeurs (une une crainte de la sanction. Or il faut accepter le équipe de 35 personnes dont six responsables), droit à l’erreur et savoir apprendre de nos erreurs. chacun assurant le suivi d’un ou plusieurs chan- Si la fin de la campagne est prévue à l’issue de tiers dédiés ; un pôle de cinq contrôleurs qui ont l’année 2018, il y a une adhésion qui perdurera une mission transverse : ils ne visitent jamais les au-delà. Notre souhait est que les salariés soient mêmes chantiers, ils ont ainsi un regard neuf pour fiers de travailler dans l’entreprise la plus sûre constater d’éventuels écarts et les réduire. Leur de son secteur d’activité. Et comme le dit Ber- rôle ne s’arrête pas au contrôle : ils ont également nard Mounier, notre président, notre objectif est pour mission de relever les bonnes pratiques qui de passer du statut d’entreprise de référence en ont pu émerger sur un chantier afin de les parta- santé sécurité à celui d’entreprise de préférence. ger et faire progresser l’ensemble du groupe. Les Nous souhaitons ainsi que la santé et la sécurité visites de contrôle se font selon deux mots d’ordre : au travail devienne aussi un critère de choix de exigence et bienveillance. Ce sont des postes nou- la part de nos clients. Sur ce point, il reste encore veaux, créés pour soutenir notre démarche. Enfin, du chemin à parcourir pour que cela devienne un un pôle expertise de quatre personnes a pour mis- argument, un critère de préférence. n travail & sécurité – n° 786 – septembre 2017
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