Vieillir en bonne santé : comment organiser les soins ? - www.planetesante.ch - Jogging : à consommer avec modération P. 34 - Association des ...

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Jogging : à consommer   Henri Dès : « Je suis un
                                        avec modération P. 34   Monsieur Hibou » P. 48

                                Vieillir en
                                bonne santé :
                                comment
                                organiser les soins ?
Disponible chez votre médecin
N° 15 – juin 2013

                                      www.planetesante.ch
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PUBLIREPORTAGE

publireportage

Un stent qui se dissout de lui-même
En cas d’infarctus du myo-
carde, les stents sont des
prothèses indispensables
pour la vie des patients :
en très peu de temps, ils
ouvrent le vaisseau san-
guin bouché et rétablissent
la circulation sanguine ali-
mentant le cœur. Une nou-
velle génération de pro-
thèses endovasculaires a
maintenant été dévelop-
pée. Celles-ci se dissolvent
d’elles-mêmes une fois le
travail accompli.

Des graisses (cholestérol) et
du calcaire se déposent sur
les parois vasculaires et pro­
voquent des occlusions qui
peuvent conduire à l’infarctus
du myocarde. Depuis plus de
25 ans, les cardiologues uti­    lylactide, un matériau éprouvé   8 000 patients ont jusqu’à
lisent des stents en métal       utilisé depuis longtemps dans    présent reçu une prothèse
pour rouvrir les vaisseaux       d’autres applications médica­    endovasculaire de nouvelle
devenus trop étroits. Depuis     les. Dans le monde, quelque      génération.
peu, des prothèses endovas­
culaires biorésorbables s’im­
posent comme une alterna­                                                          Prof. Stéphane Cook
tive en Suisse.                                                                              Cardiologue
L’intervention pour implanter                                           Hôpital universitaire de Fribourg
ces nouvelles prothèses en­
dovasculaires est rapide et          Vous avez été le premier médecin à implanter la prothèse endovasculaire
douce, si bien que les pa­           biorésorbable sur un patient en Suisse. Combien d’interventions similaires
tients peuvent quitter l’hôpi­       avez-vous réalisées depuis ?
tal dès le lendemain. Afin           Au total, j’ai implanté la nouvelle prothèse endovasculaire chez plus de 100 patients.
                                     Dans notre hôpital universitaire de Fribourg, cette nouvelle technologie est déjà
que le vaisseau ne se referme
                                     utilisée dans un quart des cas.
pas après l’intervention, la
prothèse endovasculaire libère
                                     Pour quels patients les nouveaux stents sont-ils tout particulièrement
un médicament. En se dis­
                                     recommandés ?
solvant au fil du temps, elle
                                     Pour pratiquement tous les patients. Au départ, ils ont été utilisés principalement chez
permet au vaisseau sanguin           des sujets jeunes. Entretemps, il a cependant été démontré que même les autres
de retrouver son comporte­           patients peuvent bénéficier des stents de nouvelle génération.
ment naturel et d’adapter la
circulation sanguine à la            Quels sont pour vous les avantages pour les patients ?
charge corporelle. À long            Étant donné que la prothèse endovasculaire se dissout d’elle­même après un certain
terme, le risque de formation        temps, le vaisseau sanguin peut retrouver sa forme normale et sa mobilité. La
de caillots sanguins et de           dissolution complète de la prothèse minimise également le risque de thrombose sur
proliférations tissulaires en        le site d’intervention. Cette technique facilite en outre le travail des chirurgiens lors
réaction au corps étranger           d’éventuels contrôles ultérieurs ou en cas de nouvelle intervention, dans la mesure où
disparaît. Les prothèses en­         aucune pièce métallique ne gêne la vue ou le traitement. C’est ce qui fait de ces
dovasculaires autorésorba­           nouveaux stents des prothèses révolutionnaires.
                                                                                                                                 1006675

bles sont composées de po­
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EDITO      3

Vieillesse :
le devoir d’humanité
                                   C’
                                                     est une froide réalité: la popu-              domicile le plus longtemps possible (lire notre
                                                     lation suisse devient de plus en              dossier en page 6). Et cela, sans trop compter
                                                     plus âgée. Les chiffres parlent               sur la population active. Car nos modes de vie
                                                     d’eux-mêmes. De 10% en 2010,                  et nos comportements le montrent : nous sou-
                                    la proportion des personnes de plus de 65 ans                  haitons de moins en moins côtoyer ce qui est
                                    passera à 20% en 2020. Plus troublant encore :                 assimilé à une défaillance insupportable. Au
                                    l’effectif des plus de 80 ans a toutes les chances             XXIe siècle, la vieillesse, comme toute autre
                                    d’augmenter de 120% d’ici à 2040 !                             imperfection physique, doit être bannie de la
                                                                                                   sphère du visible. Pas question de répéter le
                                    Pourquoi ces chiffres donnent-ils le vertige ?                 schéma des générations passées : s’occuper des
                                    D’un point de vue strictement économique,                      aînés est devenu le rôle d’institutions spécia-
                                    parce qu’il va falloir diablement s’organiser                  lisées. Chaque jour, ce sont donc des milliers
                                    pour que les coûts liés à cette population en                  de professionnels de la santé qui assistent
                                    constante augmentation restent supportables                    les personnes âgées dans leurs tâches quoti-
                                    pour la société. Or la chose n’est pas simple.                 diennes. Avec pour unique récompense, des
                                    Car à la différence d’autres groupes de popu-                  relations humaines incroyablement fortes. Trop
                                    lation qui « consomment » de la santé sans                     souvent oubliés, ceux qui assurent les soins à
                                    forcément en avoir besoin, les personnes âgées                 domicile sont de véritables héros du quotidien,
                                    sont, elles, vraiment malades. En majorité,                    qui nous rappellent une leçon toute simple :
                                    elles souffrent de « polymorbidité », autrement                s’occuper des aînés n’est pas qu’une banale
                                    dit sont atteintes simultanément par plu-                      affaire de sous. C’est en fait un véritable devoir
                                    sieurs maladies chroniques. Traiter ces patients               d’humanité.
                                    s’avère non seulement complexe au plan médi-
                                    cal, mais aussi très coûteux.

                                    Comment faire, dès lors, pour prendre en charge
                                    ces personnes âgées ? Une tendance se des-                         Michael balavoine
                                    sine clairement : il faut réussir à les maintenir à

+
Impressum
Rédacteur en chef             Photographie                     Publicité                         Collaborations                    Comité de rédaction
Michael Balavoine             Romain Graf                      Médecine & Hygiène Publicité      Planète Santé est soutenu par     Dr Pierre-Yves Bilat
Rédactrice en chef adjointe   DR                               Maya Aubert                       - la Société vaudoise             Dr Henri-Kim de Heller
Elodie Lavigne                                                 Chemin de la Mousse 46              de médecine                     Dr Marc-Henri Gauchat
Rédacteurs                    Edition                          1225 Chêne-Bourg                  - la Société médicale du Valais   Dr Bertrand Kiefer
Gaëlle Bryand                 Joanna Szymanski                 Email : maya.aubert@medhyg.ch     - l’Association des médecins      Dr Michel Matter
Benoît Perrier                                                 Tél : +41 22 702 93 17              du canton de Genève             Dr Remo Osterwalder
Eric Schaerlig                éditeur                          Fax : +41 22 702 93 55            - la Société neuchâteloise        M Pierre-André Repond
Ellen Weigand                 Editions Médecine & Hygiène                                          de médecine                     Pr Bernard Rossier
                              Chemin de la Mousse 46           Abonnements                       - la Société médicale             M Paul-Olivier Vallotton
Conseillers scientifiques     1225 Chêne-Bourg                 Version électronique : gratuite     du canton du Jura
Dr Bertrand Kiefer            Email : planetesante@medhyg.ch   Abonnement papier : CHF 12/an
Dr Pierre-Alain Plan          Tél : +41 22 702 93 11           Tél : +41 22 702 93 29
                              Fax : +41 22 702 93 55           Fax : +41 22 702 93 55
Graphisme, illustration
                                                               Email : abonnements@medhyg.ch
et infographie
                              Fiche technique                  Site : www.planetesante.ch
giganto.ch
                              ISSN : 1662-8608
                              Tirage : 30 000 exemplaires
                              3 fois par an

                                                                                                             Plus d’articles sur www.planetesante.ch
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SOMMAIRE

     Politique
6    Vieillir en bonne santé, sans quitter
     son domicile

12   Pierre-Yves Dietrich : « L’intensité des relations
     humaines m’a poussé vers l’oncologie »

16   Tribune : Trouver un médecin de campagne,               6		 Vieillir
                                                                     en bonne santé,
     la croix et la bannière
                                                             		sans quitter son domicile
	En images
18   Guerre aux germes à l’hôpital

22   Le simulateur d’urgences pédiatriques

26   Comment notre organisme produit le sang

     Santé
28   Arsenic : danger !

30   Etre bronzé ne protège pas contre le cancer
     de la peau

32   Faire l’amour souvent rend heureux
     et préserve la santé                                    34		   Jogging : à consommer
34   Jogging : à consommer avec modération                          avec modération
36   L’infarctus du myocarde

40   Test : mieux choisir sa consommation d’alcool

44   Je vais passer une échographie de grossesse

     Juridique
46   Dossier électronique du patient :
     un projet d’avenir pour médecins et patients

     People                                                  48		   Henri Dès : « Je suis
48   Henri Dès : « Je suis un Monsieur Hibou »                      un Monsieur Hibou »
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6    politique

        Vieillir en
        bonne santé,
        sans quitter
        son domicile
                                 D
Aînés Le canton de Vaud                      ’abord il y a un constat : nous    Conseiller d’État Pierre-Yves Maillard.
                                             devenons de plus en plus âgés,     Un comité d’experts, présidé par le
a développé un ambitieux                     et souvent dans des conditions     Pr Christophe Büla, chef du Service de
concept pour permettre à                     plutôt bonnes. Dans le canton      gériatrie du CHUV, a élaboré un rap-
                                 de Vaud, plus d’un tiers (37,1 %) des per-     port très fouillé*, qui définit cinq axes
ses personnes âgées de vivre     sonnes âgées de 90 ans et plus vivent          d’actions et non moins de 109 mesures
                                 de manière autonome, sans même avoir           à développer ou mettre en place dans
le plus longtemps possible à     besoin de soins à domicile. Il reste que       les cinq prochaines années. Beaucoup
domicile, sans dépendance,       le vieillissement de la population pose        existent déjà et un tiers d’entre elles
                                 une question majeure à la collectivité :       auront des implications financières.
et en bonne santé. Des           comment organiser la prise en charge
actions de prévention ciblant    des aînés, aussi bien lorsqu’ils restent         Favoriser le maintien
                                 à domicile, que lorsqu’ils doivent être          à domicile
les seniors, un renforcement     hospitalisés, ou quand l’EMS devient la        Au départ, il y a un choix philosophique,
                                 seule solution ?                               celui de tout mettre en œuvre pour favori-
de la coordination et de la      Le vieillissement de la population est iné-    ser le maintien à domicile de la personne
première ligne de soins,         luctable : la proportion des plus de 65        âgée. Cette politique a fait qu’aujourd’hui
                                 ans passera de 10 % en 2010 à plus de          le canton de Vaud a un des taux les plus
ainsi que des changements        20 % en 2030. Quant à l’effectif des plus      bas de résidence en EMS. Pourquoi ?
profonds dans les pratiques      de 80 ans, il aura augmenté de 120 % en        D’une part, parce que l’écrasante majo-
                                 2040 !                                         rité des personnes âgées tient à rester
hospitalières caractérisent la   Anticiper les effets de ce phénomène           dans son domicile ; d’autre part, c’est
politique vaudoise.              démographique est donc indispensable,
                                 et en ce sens le canton de Vaud a fait
                                                                                une manière efficace de réduire les coûts.
                                                                                La conséquence de cette politique de
Texte Philippe barraud
                                 œuvre de pionnier avec la mise en place        maintien à domicile est que les séjours
                                 de sa politique « Vieillissement et santé »,   en EMS sont passés d’une durée de huit
                                 commencée en 2010 sous l’impulsion du          à dix ans, à une durée d’un peu moins de

     planète santé – JUIN 2013
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politique            7

                                                                                                   Soins à domicile

                                                                                                   L’irruption
                                                                                                   du secteur privé
                                                                                                       Depuis quelques mois, des
                                                                                                   sociétés privées se sont lan-
                                                                                                   cées sur le marché des soins
                                                                                                   à domicile dans le canton de
                                                                                                   Vaud. En Suisse alémanique
                                                                                                   et au Tessin, où il n’existe
                                                                                                   pas d’organisations publiques
                                                                                                   massives comme les CMS
                                                                                                   vaudois, les sociétés privées
                                                                                                   occupent 30 à 50 % du marché
                                                                                                   dans certaines villes. Il s’agit
                                                                                                   souvent, à l’origine en tout
                                                                                                   cas, d’entreprises de location
                                                                                                   de personnel.
                                                                                                       Contrairement aux CMS,
                                                                                                   elles ne reçoivent pas de
                                                                                                   subventions. Pour compen-
                                                                                                   ser, et comme les tarifs sont
                                                                                                   fixés au niveau fédéral, elles
                                                                                                   tendent à facturer davantage
“La proportion des plus                                                                            d’heures, jusqu’à deux fois
de 65 ans passera de 10 %                                                                          plus. Pour Jean-Jacques Mona-
                                                     charge de maladies aiguës, sur
en 2010 à plus de 20 % en                            une période courte, à des soins de            chon, patron des CMS vaudois,
                                                     longue durée pour des pathologies             le privé peut être compétitif
2030”                                                chroniques dégénératives.                     au début, mais si les tâches et
                                                     Avec en plus une approche à
                                                                                                   les soins se complexifient, les
                                                     repenser : on sait que l’hospitalisa-
trois ans seulement. Avec toutefois une       tion a un effet néfaste sur l’indépendance           coûts vont augmenter. Il voit
conséquence fâcheuse : les EMS ne sont        fonctionnelle et l’autonomie des per-                une évolution dans laquelle
plus ces « lieux de vie » qu’on avait rêvé,   sonnes âgées. On estime que, dans cette              le privé s’octroiera les soins
mais tendent à devenir seulement des          tranche de la population, 50 % du déclin
lieux de fin de vie.                          fonctionnel est dû à un passage en hôpi-
                                                                                                   faciles, les soins complexes
La politique « Vieillissement et santé »      tal ! Autrement dit, une hospitalisation             revenant au secteur public.
s’articule autour de cinq axes.               peut entraîner un accroissement de la                Non sans une concurrence en
                                              dépendance et la fin de la vie autonome              matière de recrutement, même
1. Pour l’hôpital, un changement              à domicile.
de paradigme                                  La raison en est attribuée à des pro-                si le privé tend à ne pas vou-
L’un des secteurs les plus concernés par      cessus de soins et à un environnement                loir se soumettre aux conven-
le vieillissement est l’hôpital, car les      inadaptés. En conséquence, l’hôpital                 tions collectives.
soins aux personnes âgées vont deve-          doit repenser à la fois son organisation
nir son activité principale. Aujourd’hui      spatiale (locaux, bâtiments…) et ses pra-
                                                                                                       « Nous verrons dans douze
déjà, dans les services de médecine du        tiques professionnelles, pour réserver               à dix-huit mois si l’implan-
CHUV et des hôpitaux régionaux, 70 %          aux patients âgés des pratiques spéci-               tation a réussi », commente
des patients soignés ont plus de 65 ans,      fiques, fondées en particulier sur des               Jean-Jacques Monachon.
et 40 % ont plus de 80 ans ! Les acteurs      décisions cliniques mieux pesées. Il s’agit
sont appelés à un véritable changement        en particulier, et notamment au niveau
de paradigme, puisque l’hôpital doit pas-     des urgences, de bien évaluer l’état fonc-
ser d’une médecine axée sur la prise en       tionnel du patient, ses éventuels troubles

                                                                                             Plus d’articles sur www.planetesante.ch
Vieillir en bonne santé : comment organiser les soins ? - www.planetesante.ch - Jogging : à consommer avec modération P. 34 - Association des ...
8    politique

Formation continue pour                                         Une pyramide
les médecins de famille                                         hétérogène                           et à haut risque de dépen-
                                                                                                     dance, car leurs réserves
L’Association des médecins de famille du                        La population âgée n’est pas         physiologiques ne leur
canton de Vaud a décidé de mettre sur pied                      un groupe homogène, bien             permettent plus de faire face
une formation continue spécifique tournée                       au contraire. Elle forme une         aux événements stressants,
vers la personne âgée, à l’intention des                        pyramide à trois étages dont         tels que les maladies aiguës
médecins installés.                                             la base, 50 à 60 % de la popu-       ou les premières difficultés
Ces sessions sont organisées conjointement                      lation âgée, est constituée par      fonctionnelles.
avec plusieurs services du CHUV (psychia-                       une tranche réputée robuste          Enfin, le sommet de la
trie de l’âge avancé, gériatrie et réadapta-                    de personnes en bonne santé,         pyramide rassemble les per-
tion, Centre Leenaards de la mémoire), et                       présentant en moyenne une            sonnes âgées dépendantes,
développent des thèmes tels que « Docteur,                      seule maladie chronique.             qui représentent 15 à 20 %
ma mère perd la tête… » ou « Docteur, mon                       Sans surprise, on y trouve les       de la population âgée, et qui
père tombe… »                                                   jeunes retraités, entre 65 et        ont des besoins complexes.
Pour les médecins de famille, le rôle                           75 ans.                              Ce sont principalement des
primordial qu’ils jouent dans la prise en                       Le deuxième étage (20 à 40 %)        femmes âgées de 85 ans et
charge de la personne âgée rend néces-                          est constitué de personnes           plus, dont la plupart vivent
saire un complément de formation dans ce                        vulnérables, souffrant de plus       à domicile et bénéficient de
domaine.                                                        de deux maladies chroniques,         l’appui du CMS.

     cognitifs, ses performances de mobi-          3. Vieillir chez soi                          La politique vaudoise vise également
     lité, et d’organiser la prise en charge en    Nous l’avons dit, la politique du can-        à soutenir les proches aidants, essen-
     conséquence.                                  ton de Vaud en matière de soins à             tiels pour le maintien à domicile, mais
     Pour Eliane Deschamps, directrice du          domicile lui permet d’avoir un taux           qui subissent souvent une pression
     programme « Vieillissement et santé »,        d’hébergement en EMS parmi les plus           considérable.
     cette évolution de l’hôpital passe par la     bas de Suisse : environ 5000 personnes
     diffusion des compétence gériatriques et      âgées, pour 30 000 aidées à domicile.         4. Valoriser les compétences
     de pratiques interdisciplinaires dans les     Pilier du système, les Centres médicaux       Il s’agit de former un nombre suffisant
     services à haute densité de personnes         sociaux (CMS) emploient 4400 per-             de professionnels de soins à la personne
     âgées, et par une sensibilisation des         sonnes à temps partiel, principalement        âgée, et d’offrir aux soignants en acti-
     médecins généralistes (voir encadré).         des auxiliaires de santé avec la formation    vité des formations continues adéquates.
                                                   Croix-Rouge, et 600 infirmières. Le finan-    Un autre objectif important est de valo-
     2. Vieillir en santé                          cement est assuré paritairement par le        riser les professions de soins aux aînés,
     La Suisse est un des pays qui consacre le     canton et les communes, dont 85 % est         qui ne bénéficient pas d’une image très
     moins de dépenses à la prévention – trois     consacré aux charges salariales.              attractive, alors même que la pénurie de
     fois moins que le Canada – et les généra-     Pour Jean-Jacques Monachon, directeur         soignants menace.
     listes n’ont pas le temps de faire ce qu’il   général de l’AVASAD (Association vau-
     faudrait. Pour les auteurs du rapport, il     doise d’aide et de soins à domicile), il      5. Evaluer et piloter la politique
     est pourtant souhaitable d’améliorer la       s’agit de fluidifier le parcours de la per-   Un grand nombre d’intervenants sont
     qualité de vie des personnes âgées, et de     sonne qui va passer de son domicile aux       concernés par la prise en charge des
     réduire le temps passé en dépendance.         services hospitaliers, puis au centre de      patients âgés. Il est donc fondamental de
     Les mesures proposées, et les expériences     réadaptation, puis à l’EMS, et éventuel-      disposer d’outils d’évaluation et de coor-
     pilotes en cours, visent à développer une     lement revenir à son domicile.                dination compatibles et efficaces, mais
     prévention spécifique à cette période de      Les soins à domicile affichent des            aussi de statistiques précises, ce qui
     la vie, notamment dans le sens de l’acti-     chiffres impressionnants, comme les           n’est pas toujours le cas : par exemple,
     vité physique et la mobilité. Ce sont par     10 millions de kilomètres parcourus           le canton ne dispose pas d’une enquête
     exemple les campagnes « Ça marche ! »         chaque année (!), des chiffres qui sont       officielle sur la santé de ses habitants ;
     et « Pas de retraite pour ma santé ». On      en hausse constante. Les 52 centres du        les chiffres disponibles sont ceux de la
     vise aussi à limiter l’usage immodéré de      canton fournissent, chaque jour, plus de      Confédération, qui sont peu actuels et
     certains médicaments, et c’est à quoi         8000 prestations auprès de 4780 clients       insuffisants pour conduire une politique
     s’emploie la campagne « Somnifères ?          d’un âge moyen de 75 ans. Il s’agit par       ambitieuse comme « Vieillissement et
     Pas forcément nécessaires ! »                 exemple de 3000 heures de soins, 800          santé ». +
                                                   heures d’aide au ménage, et 2100 repas.          *www.vd.ch/vieillissement

     planète santé – JUIN 2013
Vieillir en bonne santé : comment organiser les soins ? - www.planetesante.ch - Jogging : à consommer avec modération P. 34 - Association des ...
politique              9

Histoires de patients

Mario Gloor : « J’ai eu plus
de chance que d’autres »
TEMOIGNAGE. Après une année d’hospi-
talisation, Mario Gloor est rentré chez lui
dans le quartier de la Servette à Genève.
Victime d’un cancer du larynx, il a été
confronté à un choix cornélien : manger
ou parler. L’ancien imprimeur a fait le
choix de la communication. Pour cela, les
médecins lui ont implanté une trachée
artificielle. S’il est pratiquement remis de
ses malheurs (il a aussi été victime d’un
cancer de la prostate), Mario ne pourrait
vivre chez lui sans les infirmières de l’Ins-
titution genevoise de maintien à domicile
(imad). Un soulagement après une année
d’hospitalisation. Conscient d’être un pri-
vilégié parmi ses anciens camarades de
chambre, il témoigne. Reportage dans
les coulisses qui ont permis cette véri-
table démonstration d’humanité et de
solidarité.

                                            Thierry Toulze est
                                            responsable d’équipe
                                            à l’antenne d’aide à
                                            domicile du quartier
                                            des Grottes à Genève.

                                                Les centres de proximité de l’imad           L’infirmière de référence
                                                A Genève, l’imad compte 2000 pro-            Murielle Dufour est l’infirmière de réfé-
                                                fessionnels répartis en 24 antennes de       rence de Mario Gloor. Elle le voit deux
                                                maintien à domicile qui se chargent de       fois par jour, le matin et le soir. Elle a
                                                quelque 16 000 personnes de tout âge et      un « portefeuille » d’une vingtaine de
                                                de tout horizon. Coordonner les soins au     patients et en voit en moyenne huit par
                                                sein de chaque centre de proximité est       jour. Sa relation avec Mario est toutefois
                                                une tâche essentielle. Pour la région du     particulière : il a insisté pour qu’elle le
                                                haut de la Servette, c’est Thierry Toulze,   suive à son retour à domicile. « Ce n’est
                                                le responsable d’équipe, qui gère l’orga-    pas toujours aussi facile, avoue l’infir-
                                                nisation d’une quarantaine de personnes      mière. Les situations des gens qu’on aide
                                                entièrement dédiées aux soins à domicile.    sont souvent dramatiques. »

                                                                                             Plus d’articles sur www.planetesante.ch
Vieillir en bonne santé : comment organiser les soins ? - www.planetesante.ch - Jogging : à consommer avec modération P. 34 - Association des ...
10 politique

                               Nettoyer la trachée
                               La trachée artificielle de Mario peut faci-
                               lement s’infecter. L’infirmière doit la net-
                               toyer matin et soir. De loin, l’opération
                               a l’air douloureuse. « Ce n’est rien par
                               rapport à ce que j’ai connu les premiers
                               temps, témoigne Mario. Au début, on a
                               l’impression de s’étouffer. Mais avec le
                               temps, on s’y fait. »

                               Des repas sans saveurs
                               Mario Gloor ne peut plus manger par la
                               bouche depuis son opération de la tra-
                               chée. C’est par injection qu’il reçoit les
                               nutriments essentiels au fonctionnement
                               de son organisme. « Le goût me manque.
                               Tout comme le plaisir d’un bon restau-
                               rant », confie-t-il.

                               S’hydrater pendant la nuit
                               La nuit, Mario est sous perfusion, pour
                               compléter l’apport de nourriture de
                               la journée et éviter la déshydratation.
                               « Je dors correctement quand-même »,
                               affirme-t-il. De toute façon, pour lui, l’es-
                               sentiel est ailleurs. Il a pu rentrer chez
                               lui. Et cela n’a pas de prix.

   planète santé – JUIN 2013
IFAS 2013
                                                     ROMANDIE
                            Plateforme commerciale romande du marché de la santé
                            Die Westschweizer Verkaufsplattform für den Gesundheitsmarkt

                            30 octobre –1 novembre 2013
                                                      er

                                                          Expo Beaulieu Lausanne

                                      FMH SERVICES

                                                                                                             1006673
1006673_Planete_ct.indd 1                                                                           24.05.13 11:48

                                                       Pour une meilleure
                                                       qualité de vie.
                                                       Les allergies et les intolérances alimentaires ne
                                                       sont plus une raison de se priver! Free From et
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12 politique

Pierre-Yves Dietrich
« L’intensité des
relations humaines
m’a poussé vers
l’oncologie »
   Interview Soigner les tumeurs cérébrales au
   moyen de l’immunothérapie, c’est le défi de vingt
   ans de recherches menées en laboratoire par
   l’équipe du professeur Pierre-Yves Dietrich, chef    Vous avez été élu « Cancer resear-
   du Service d’oncologie des Hôpitaux universitaires   cher of the year » aux Etats-Unis.
                                                        Que vous apporte cette prestigieuse
   de Genève (HUG). Couronné « Cancer researcher        récompense ?
   of the year » par la fondation américaine « The      Il s’agit d’un prix de 30 000 dollars qui
                                                        n’est pas un prix personnel, mais une
   Gateway for Cancer Research », l’oncologue           récompense destinée à la recherche.
   genevois atteste du niveau d’excellence de la        La fondation Gateway nous offre éga-
                                                        lement une somme d’un demi-million
   Suisse en matière de recherche sur le cancer.        de dollars visant à soutenir les débuts
   Texte malka gouzer                                   d’une étude clinique dans laquelle nous
                                                        allons effectuer les premiers tests de vac-
                                                        cins anti-tumoraux sur l’être humain. Ils
                                                        débuteront dans quelques semaines et
                                                        se repartiront sur une durée de 18 à 24
                                                        mois. Les tests porteront sur une ving-
                                                        taine de patients souffrant de tumeur
                                                        cérébrale (gliomes).

   planète santé – JUIN 2013
politique 13

                                                                                          “En oncologie, la
                                                                                          question n’est pas
                                                                                          de savoir qui fait quoi,
                                                                                          mais comment faire
                                                                                          face ensemble”

                                                                                          fait plaisir. Il permet d’apporter un peu
                                                                                          de visibilité à un projet de recherche de
                                                                                          longue haleine. Vingt ans de travail en
                                                                                          souterrain, il faut de la patience ! Puis il
                                                                                          met aussi en lumière d’un côté un tra-
                                                                                          vail accompli dans l’ombre par une
                                                                                          équipe de chercheurs, et de l’autre, une
                                                                                          structure hospitalo-universitaire dans
                                                                                          laquelle, il faut le rappeler, des choses
                                                                                          remarquables se déroulent.

                                                                                          Avez-vous choisi d’être oncologue pour
                                                                                          faire de la recherche ?
                                                                                          Non. Initialement, je voulais être
                                                                                          pédiatre. Puis, comme c’est souvent le
                                                                                          cas dans cette profession, mes choix se
                                                                                          sont faits en fonction des hasards et des
                                                                                          rencontres. Ce qui m’a plu dans l’onco-
                                                                                          logie, c’est la qualité et l’intensité des
                                                                                          relations humaines. Elles sont en effet
                                                                                          extrêmement vraies et intenses, avec un
                                                                                          échange très fort. Je pense qu’en exer-
                                                                                          çant ce métier le mieux possible, on
                                                                                          donne beaucoup, mais on reçoit aussi
                                                                                          énormément. Et c’est probablement cette
                                                                                          intensité-là qui m’a le plus plu et qui,
                                                                                          après six ans de médecine générale, m’a
En 1994, vous avez fondé le premier           existent entre les tumeurs et le système    fait « basculer » dans l’oncologie.
laboratoire d’immunologie des tumeurs         immunitaire. Nous avons appris comment
aux HUG. Qu’est ce qui vous a amené à         notre système de défense peut effective-    Qu’est-ce qui a changé dans votre
penser que l’immunologie deviendrait,         ment reconnaître et détruire des cellules   métier depuis que vous avez com-
vingt ans plus tard, un allié important       tumorales dans le cerveau. L’objectif est   mencé à l’exercer ?
dans la lutte contre le cancer ?              désormais d’exploiter cette propriété       Au début, les patients cancéreux ne
L’idée, pour simplifier les choses, c’est     naturelle pour développer des nouveaux      vivaient souvent que quelques mois.
que notre système immunitaire est là          traitements :l’immunothérapie. Il s’agit    Maintenant, ils vivent souvent plusieurs
pour nous défendre du monde exté-             toutefois d’une approche expérimentale.     années, mais dans des conditions diffi-
rieur, c’est-à-dire des agressions externes   Il nous faudra encore probablement une      ciles. Ils n’ont plus les mêmes capacités
au corps. Mais depuis un peu plus d’un        dizaine d’années pour pouvoir évaluer ce    physiques ni la même résistance. Un des
siècle, des chercheurs se demandent si        que l’on pourra obtenir de ces nouveaux     défis majeurs de notre société par rap-
notre système de défense ne pourrait          concepts thérapeutiques.                    port au cancer va être de maintenir ces
pas aussi nous protéger contre des dan-                                                   personnes dans une situation familiale
gers internes et ainsi être utilisé pour      Ce prix international vient en fait cou-    stable, dans un environnement sociétal
soigner les cancers. Lorsque je suis arrivé   ronner l’ensemble de ces recherches         correct et dans une activité profession-
aux HUG, j’ai créé un laboratoire dans        commencées il y a vingt ans ?               nelle où ils ne sont pas dénigrés ou mis
lequel nous avons étudié les relations qui    Oui. Et indéniablement, c’est un prix qui   de côté.

                                                                                          Plus d’articles sur www.planetesante.ch
14 politique

   On parle aussi beaucoup de traite-          techniques chirurgicales et en radiothé-      indéniablement le plus grand centre
   ments personnalisés. De quoi s’agit-il ?    rapie, ainsi que le développement sans        d’excellence dédié au cancer jamais
   L’idée c’est de mettre au point des         précédent des médicaments (on estime          construit en Suisse. Quel regard portez-
   traitements spécifiques adaptés aux         que l’on aura à disposition près de 500       vous sur un tel projet ?
   caractéristiques de chaque cellule tumo-    molécules en 2020) rendent chaque             C’est simplement formidable. On ne peut
   rale. Le cancer du poumon de Madame X       choix thérapeutique difficile. Comment        qu’applaudir des deux mains. Le projet
   et celui de Madame Y, bien qu’ils portent   utiliser au mieux toutes les ressources       est ambitieux, mais il répond de manière
   le même nom, sont différents. Une ana-      à disposition et déterminer quelle est la     intelligente à la problématique des can-
   lyse approfondie de chaque tumeur           meilleure séquence des différents traite-     cers dans nos sociétés. Compte tenu de
   devrait permettre d’établir une sorte       ments ? Ce sont-là, indiscutablement, les     la vitesse à laquelle avancent les connais-
   de code-barres, avec un traitement per-     défis actuels de la lutte contre le cancer.   sances et les possibilités de traitement,
   sonnalisé. Nous pourrions donc choisir                                                    c’est vraiment un bon moment pour
   le ou les traitements en fonction de        En 2016, l’Institut suisse de recherche       investir dans un centre de recherche.
   plusieurs centaines de millions d’infor-    expérimentale contre le cancer                Dans les prochaines décennies, ce sont
   mations émanant des cellules malades.       (ISREC) inaugurera à Lausanne un              ces centres de compétences qui nous
   Cela dit, la complexité du traitement est   nouveau centre pouvant accueillir             permettront de faire de nouvelles décou-
   diabolique. Les progrès en imagerie, en     400 chercheurs et cliniciens. Ce sera         vertes. C’est aussi grâce à eux que l’on
                                                                                             assurera à la Suisse l’accès à des médica-
                                                                                             ments de pointe dont le développement
                                                                                             est compliqué. C’est en devenant acteur
                                                                                             du développement de ces nouvelles thé-
                                                                                             rapies qu’on pourra y avoir accès.

                                                                                             Dans ce contexte de centralisation des
                                                                                             compétences, comment percevez-vous
                                                                                             le statut de l’oncologue indépendant ?
                                                                                             Un centre d’excellence ne peut pas tout
                                                                                             faire. D’autant plus que le volume de
                                                                                             patients est en explosion. D’abord parce
                                                                                             que la population vieillit et que le facteur
                                                                                             de risque principal du cancer c’est l’âge.
                                                                                             Et ensuite parce que si l’on guérit encore
                                                                                             relativement peu du cancer, les gens
                                                                                             vivent de plus en plus longtemps avec.
                                                                                             Si l’on cumule ces deux phénomènes,
                                                                                             les cancers sont indiscutablement le pro-
                                                                                             blème de santé publique numéro un de
                                                                                             nos sociétés. La question n’est donc pas
                                                                                             de savoir qui fait quoi, mais comment
                                                                                             faire face ensemble ! +

                                                                                “C’est grâce aux centres
                                                                                de compétences que la
                                                                                Suisse aura accès aux
                                                                                médicaments du futur”

   planète santé – JUIN 2013
communication
                                                                                                                   santé 15

Le cancer du côlon,
un obscur envahisseur
Prévention S’il est l’un des plus répandus, ce
cancer demeure pourtant méconnu. Comment
éviter son développement ?
Texte Marie Bertholet, ligue vaudoise contre le cancer – www.lvc.ch

E
         n Suisse, le cancer du côlon          est détecté tôt, plus le cancer du côlon a
         occupe le troisième rang sur le       des chances de guérison. Dès l’apparition
         podium des cancers les plus fré-      de l’un de ces signaux, il vaut donc mieux
         quents, juste après ceux de la        consulter son médecin, qui proposera, si
prostate et du sein. Chaque jour dans          nécessaire, une analyse complémentaire.
notre pays, dix nouvelles personnes
sont en effet touchées par cette maladie,        Dès 50 ans : une attention
qui demeure l’un des cancers les plus            particulière
mortels.                                       L’examen de dépistage, d’ailleurs
L’immense majorité des cas de cancer du        conseillé à toute personne âgée de 50
côlon – parfois aussi nommé « colorectal »     ans et plus, peut sauver des vies ! Pour
ou « de l’intestin » – se développe à partir   détecter la présence d’un tel cancer,
de polypes muqueux. Chez plus de la            deux méthodes principales existent à ce
moitié des personnes, la maladie en est        jour : la recherche de sang occulte dans
déjà à un stade avancé lorsqu’elle est         les selles et la coloscopie. La première
diagnostiquée. Comment reconnaître les         consiste à analyser trois échantillons de
signaux annonciateurs d’un tel cancer,         selles. Si la seconde semble a priori plus
qui peut se révéler dévastateur si on les      « contraignante », elle comporte certains
ignore ?                                       avantages : la coloscopie permet de
                                                                détecter avec une fiabilité
                                                                très élevée des polypes
       “L’examen de dépistage est                               ou des tumeurs − même
                                                                de petite taille −, et de les
       conseillé à toute personne                               ôter au passage. Après un
                                                                bon nettoyage de l’intestin
       âgée de 50 ans et plus”                                  grâce à un laxatif pris la      équilibrée et… bougez ! Les aliments
                                                                veille, un tube, muni d’une     riches en fibres ont un effet protecteur
                                                                minicaméra, est introduit       par rapport à ce type de tumeur. Ainsi,
  Un occupant masqué                           par l’anus en vue d’analyser l’intérieur du      consommer sans modération des fruits et
Du sang dans les selles, une perte de          côlon. Durée de l’« exploration » ? Environ      légumes – au minimum cinq « poignées »
poids inexpliquée, de faux besoins             vingt minutes. Un calmant est proposé            par jour –, en variant les plaisirs, est un
d’aller à la selle, des maux de ventre         au patient avant cet examen, perçu               réflexe salutaire. La pratique régulière
persistants ou encore des troubles du          généralement comme peu agréable, mais            d’une activité physique constitue un autre
transit intestinal : autant de signaux         indolore.                                        moyen de s’armer contre la maladie :
d’alarme à ne pas sous-estimer. Il peut                                                         30 minutes de mouvement par jour (par
s’écouler plus de dix ans avant que les          A vos armes !                                  exemple 3x10 minutes ou 2x15 minutes
premiers symptômes de cette maladie            Pour éviter l’apparition d’un cancer             de marche, de vélo…) sont d’ailleurs
insidieuse soient perceptibles. Or, plus il    du côlon, privilégiez une alimentation           bénéfiques pour l’état de santé général ! +

                                                                                                Plus d’articles sur www.planetesante.ch
16 TRIBUNE

Pierre-Yves Bilat*

Trouver un médecin
de campagne,
la croix et la bannière

                                                «
                                                          En m’installant devant mon nou-        manger trop et faire de la gymnastique
                                                          veau docteur, j’ai poussé un ouf       pour maigrir.
                                                          de soulagement et l’ai remer-           Bon, je serais bien allée chez un nouveau
                                                          cié de m’avoir acceptée ! Ainsi        docteur pour qu’il me suive longtemps.
                                                se termine une sorte de safari dans le           Celui-ci a l’air sympa, mais il n’est plus
                                                monde de la santé : alléluia, j’ai trouvé        tout jeune, un peu bedonnant, déjà gri-
                                                un généraliste, la perle rare, l’espèce en       sonnant et je crois qu’il m’a déjà jugée
                                                voie de disparition. Comme je suis jeune         du haut de ses 25 années d’expérience,
                                                et en bonne santé, j’aurais peut-être pu         au travers de ses lunettes de myope.
                                                me contenter des visites chez mon gyné-          Dans mon marathon téléphonique je me
                                                cologue, mais elles s’espacent car il n’a        suis heurtée à des refus partout. Les plus
                                                plus le temps pour les contrôles de rou-         récemment installés ne prennent plus de
                                                tine, il est toujours débordé et stressé.        nouveaux patients. J’ai bien essayé le frin-
                                                De plus, j’ai adhéré à un modèle d’assu-         gant cabinet médical de la ville d’à côté,
                                                rance que je n’ai pas trop bien compris,         visionnaire, aidé par les services publics,
                                                si ce n’est qu’il m’offre un substantiel         mais il se cantonne aux patients de son
                                                rabais de prime mais que je dois d’abord         numéro postal. Le médecin de mon mari
                                                m’adresser à un médecin de famille,              ne m’a pas acceptée car il ne pratique
                                                dont la liste m’a été fournie ; mais celle-ci    pas le “ regroupement familial ”. Je ne
                                                comportait des médecins rayés des listes,        veux pas aller chez celui de mon premier
     * Médecin généraliste et président de la   des spécialistes et même le toubib de ma         conjoint qui connaît trop toutes nos his-
      Société neuchâteloise de médecine         voisine, décédé il y a quelques années.          toires. Il y a bien un cabinet à côté de
                                                Mon ancien docteur, qui me connais-              chez moi qui annonce : “ médecin prati-
                                                sait depuis toujours puisqu’il s’occupait        cien ”, mais on y pratique essentiellement
                                                même des enfants, qui m’avait plâtré la          les médecines parallèles et ce n’est pas
                                                jambe quand j’étais tombée à ski et qui          mon truc. Me voici prise en charge, mais
                                                connaissait trois générations, est parti à       que vais-je faire de mes deux enfants qui
                                                la retraite. Je suis allée le trouver pour       ont besoin de vaccins ? Même ma voi-
                                                lui souhaiter bon vent, il m’a remis mon         sine, fraîchement arrivée du Portugal, n’a
                                                dossier, une enveloppe A3 avec mon nom           pas trouvé de place chez les pédiatres
                                                dessus. Le nouveau verra que j’ai guigné         locaux qui n’acceptent que les nouveau-
                                                (pas pu m’empêcher) car je n’ai pas pu           nés. Elle devra rouler 25 kilomètres pour
                                                bien recoller le rabat. Je n’ai pas compris      les faire soigner, alors qu’on habite dans
                                                grand-chose à ces rapports avec leurs            une ville importante. Bon, en cas d’ur-
                                                termes savants : essentiel, cryptogéné-          gence, je les emmènerai à l’hôpital, mais
                                                tique, fonctionnel, on ne m’a pas dit que        il paraît que la Hotline pédiatrique c’est
                                                j’avais tout ça, je croyais que j’allais bien,   un sacré Bronx. Comment voulez-vous
                                                faudra que je clarifie avec le nouveau ; je      qu’on s’y retrouve : les médecins prati-
                                                vais repartir à zéro, arrêter de fumer, de       ciens ne pratiquent pas, les médecins de

  planète santé – JUIN 2013
TRIBUNE 17

    famille ne regroupent pas… les familles,      la pléthore dans les cantons concernés,            avec les services hospitaliers, principa-
    donc on se demande pourquoi ils ont           les autorités locales, conscientes enfin           lement en périphérie ; ceci est essentiel
    ce titre. Les généralistes ne veulent plus    du problème, tentent de mettre en place            pour le maintien de confrères dans ces
    faire de petite chirurgie, et les pédiatres   une régulation qui serait hautement sou-           régions, sinon ils seront vite épuisés,
    ne veulent pas voir mes enfants… espé-        haitable. Les autorités fédérales, elles,          et le sont d’ailleurs déjà. Il faut insister
    rons que ça ira avec mon nouveau              veulent réintroduire la clause du besoin           sur les collaborations entre la méde-
    médecin… »                                    pour les spécialistes, ce qui nous jettera         cine libérale et les hôpitaux ;
                                                  de nouveau dans cette infernale spi-            - s’interroger sur les vraies raisons de
    Ainsi va le monde de la santé dans les        rale et ne résoudra pas le problème des            l’augmentation, inéluctable, des coûts
    régions périphériques où le manque de         manques en périphérie, essentiellement             de la santé.
    médecins se fait cruellement sentir et va     de généralistes.                                Actuellement la balle est dans le camp
    s’aggraver dans les prochaines années,        En fait le glas de la libéralisation à tout     des politiciens. Des décisions doivent
    car nombre de thérapeutes ont la soixan-      crin a sonné et les autorités devraient         absolument être prises rapidement et
    taine et vont prochainement prendre           prendre les choses en main. Je vois             l’introduction d’une nouvelle clause du
    leur retraite. Alors que certaines villes     quelques pistes :                               besoin, même limitée aux spécialistes,
    croulent sous les demandes d’installa-        - augmenter les facilités d’accès aux           est certainement une mauvaise idée.
    tion de médecins étrangers, la plupart           études de médecine sans décourager           Que dire des assureurs, qui devraient
    des régions vont manquer de bras. Le             les étudiants motivés. On a besoin de        être des acteurs constructifs du système
    système actuel, très libéral, ne permet          jeunes médecins (et du terroir, osons le     de santé ? Désorganisés, éclatés dans
    jusqu’à maintenant pas la gestion des            dire !) ;                                    une multitude de caisses et de modèles
    installations. Les politiciens, aveuglés      - promouvoir la médecine de pre-                d’assurance, divisés au point que leur
    par l’augmentation des coûts de la santé,        mier recours (internistes généraux,          organisation faîtière n’est plus représen-
    comprenant que l’offre crée la demande           pédiatres) pendant les études et après       tative dans la majorité des cantons, ils
    et s’imaginant que la démographie médi-          celles-ci par des incitatifs financiers et   ne sont plus des interlocuteurs valables,
    cale en est la seule responsable, ont            de meilleures possibilités d’installation    et sont ressentis plus comme une force
    réagit il y a quelques années par la clause      dans les régions périphériques ;             oppositionnelle que constructive.
    du besoin ; ils ont bloqué les ouvertures     - gérer l’afflux de médecins étrangers          Il y a toujours dans l’air l’idée d’une
    de cabinets médicaux, toutes spécialités         dans les grandes villes en n’agréant pas     caisse unique ou d’une séparation de
    confondues. Cette décision fort discu-           à tour de bras ; imposer par exemple         l’assurance de base et des complémen-
    table a, entre autres, maintenu les jeunes       un temps de travail préalable dans la        taires. Les négociations tarifaires sont
    médecins dans les hôpitaux, et ainsi             région concernée et exiger la connais-       difficiles et butent sur des calculs d’épi-
    aggravé le manque actuel, spécialement           sance de la langue nationale parlée          cier. On préférerait des réflexions plus
    chez les généralistes puisque les internes       à cet endroit, ce qui n’est pas le cas       approfondies. La « perte de l’obligation
    en ont profité pour se « sur-former ».           aujourd’hui. Offrir la possibilité d’une     de contracter », un fantasme des assu-
    Actuellement, la libre circulation des           gestion cantonale des installations ;        reurs (c’est-à-dire, la possibilité qui leur
    personnes permet aux médecins étran-          - obtenir des statistiques fiables sur          serait donnée de choisir les médecins
    gers, de l’Union européenne ou ayant             les besoins et les ressources. Elles         avec qui ils veulent travailler), n’est cer-
    des diplômes reconnus par celle-ci, de           n’existent toujours pas et il faudra y       tainement pas la bonne réponse aux
    s’installer ; du coup on voit une masse de       inclure l’ambulatoire hospitalier qui        problèmes de démographie médicale.
    collègues fondre sur « L’Eldorado helvé-         prend, par la force des choses, tou-         Les patients sont d’ailleurs très attachés
    tique », essentiellement dans les régions        jours plus d’importance. C’est normal        au libre choix de leur thérapeute.
    réputées « attractives » de Genève, Bâle         que les populations se rendent davan-        Plaidons plutôt pour une régulation
    et du Tessin.                                    tage dans les services d’urgence,            par les autorités, et acceptons-la si elle
    Afin d’éviter bien de déceptions pour            séduites par leurs plateaux techniques       est à même de régler les graves soucis
    ces confrères, une mauvaise couver-              importants et leur disponibilité ;           de couverture sanitaire qui vont être la
    ture sanitaire et une augmentation des        - redéfinir les systèmes de garde et de         principale préoccupation de ces toutes
    coûts de la santé forcément induite par          médecine d’office en collaboration           prochaines années ! +
 Snortec-mars-2013.pdf 1 07.03.2013 09:14:02

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                                                                                                                   d’entrer dans la
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                                                                                                                   malade en isole-
                                                                                                                   ment.

Guerre aux germes
à l’hôpital
Infection Quotidiennement,
ils luttent pour que vous
ne tombiez pas malade                     Se désinfecter les mains, enfiler des         s’il est porteur d’un germe multirésistant,
                                          gants, passer une blouse jetable, mettre      c’est-à-dire insensible à de nombreux
à l’hôpital. Des soignants                un masque. Un rituel d’un peu moins           antibiotiques et donc très difficile à soi-
aux nettoyeurs, tous sont                 d’une minute que Jean-François Bovier,        gner. Le but de la manœuvre qu’opère
                                          infirmier en chirurgie septique au Centre     l’infirmier est double : se prémunir lui-
concernés par la lutte contre             hospitalier universitaire vaudois (CHUV),     même d’une infection en n’entrant pas
les germes. Reportage au                  doit accomplir chaque fois qu’il rentre
                                          dans la chambre d’un patient en isole-
                                                                                        en contact avec les germes du malade, et
                                                                                        protéger les autres patients de l’hôpital
CHUV.                                     ment. La pancarte rouge « Stop, n’entrez      en s’assurant de ne pas les transporter
Texte Benoît Perrier photos Romain Graf   pas sans protection » fait figure de rap-     plus loin. Les mêmes précautions seront
                                          pel appuyé, de même que la présence           prises par les visiteurs. Quant au patient,
                                          du « statif » devant la porte, le haut pré-   il ne sortira pas de sa chambre durant
                                          sentoir où est disponible tout le matériel    son hospitalisation, sauf pour les exa-
                                          requis pour s’équiper.                        mens. Le cas échéant il le fera dans des
                                          Pourquoi l’isolement ? Parce que le           vêtements propres, sur un lit ou un fau-
                                          patient est contagieux. A plus forte raison   teuil roulant fraîchement désinfecté.

      planète santé – JUIN 2013
en images 19

Les lits, justement, font tout un cir-
cuit dans l’hôpital. A chaque fois qu’un
patient quitte l’hôpital, son lit descend
au sous-sol du CHUV pour y être désin-
fecté et toute sa literie est changée. Une
fois propre, il remonte dans les étages.
Un incessant ballet, qu’entrecoupe par-
fois une réparation sur un élévateur
qu’on croirait sorti tout droit d’un garage.
Autre élément essentiel pour l’hygiène de
l’hôpital, le nettoyage. Une science minu-
tieuse, nous explique Maria Carmen Gil,
la cheffe des gouvernantes, responsable
de l’entretien de tous les locaux. Chaque
nettoyeur a un chariot, et trois bidons sur
celui-ci : bleu pour les surfaces et la pous-
sière, jaune pour les lavabos, rouge pour
les toilettes. Le savon désinfectant qu’ils
contiennent est changé régulièrement ;
s’y ajoutent deux balais préimprégnés.
Chaque chambre est nettoyée quotidien-
nement. Celles de malades en isolement
font l’objet d’un soin particulier, tous les
outils n’y seront employés qu’une fois
ou seront désinfectés avant toute autre
utilisation.

                                                  La cheffe des gouvernantes,
                                                  Maria Carmen Gil, avec un
                                                  des chariots qu’utilisent les
                                                  nettoyeurs.
                    Après avoir été nettoyé, le
                    lit est refait entièrement.

                                                                       Plus d’articles sur www.planetesante.ch
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